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01/10/1986 | FRANCE | N°84-17090

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 01 octobre 1986, 84-17090


Attendu que Mme Marie-Patrice Y..., épouse de M. Gérard X..., a mis au monde le 7 avril 1983 un enfant de sexe féminin ; que les époux avaient choisi de prénommer leur fille Fleur de Marie, Armine, Angèle mais que l'officier de l'état civil, après en avoir référé au procureur de la République, a refusé de recevoir le premier de ces trois prénoms ; que les époux X... ont présenté requête au tribunal de grande instance afin de faire admettre comme prénom le vocable qu'avait refusé l'officier de l'état civil ; que l'arrêt confirmatif attaqué a rejeté cette requête ;
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Attendu que Mme Marie-Patrice Y..., épouse de M. Gérard X..., a mis au monde le 7 avril 1983 un enfant de sexe féminin ; que les époux avaient choisi de prénommer leur fille Fleur de Marie, Armine, Angèle mais que l'officier de l'état civil, après en avoir référé au procureur de la République, a refusé de recevoir le premier de ces trois prénoms ; que les époux X... ont présenté requête au tribunal de grande instance afin de faire admettre comme prénom le vocable qu'avait refusé l'officier de l'état civil ; que l'arrêt confirmatif attaqué a rejeté cette requête ;

Sur le premier moyen :

Attendu que M. et Mme X... reprochent à la cour d'appel d'avoir statué sans que les conclusions du ministère public leur aient été signifiées et d'avoir ainsi violé le principe de la contradiction ;

Mais attendu que l'action par laquelle les père et mère demandent au tribunal de grande instance d'ordonner l'inscription d'un prénom sur les registres de l'état civil relève de la matière gracieuse ; que les conclusions du ministère public, qui ont d'ailleurs été développées à l'audience des débats, n'avaient pas à être signifiées aux époux X... ; que le moyen n'est donc pas fondé ;

Sur le second moyen, pris en sa première branche :

Attendu qu'il est encore reproché à la cour d'appel d'avoir violé les articles 4 et 5 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen du 26 août 1789, les articles 8, 9 et 14 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 et le préambule de la constitution du 4 octobre 1958 en restreignant, soit sur le fondement de la loi du 11 germinal an XI, soit de son propre chef, le principe supérieur du libre choix par les parents du prénom de leurs enfants ;

Mais attendu, d'abord, que les tribunaux doivent appliquer la loi sans pouvoir en écarter certaines dispositions en raison de leur prétendue contrariété à des principes de caractère constitutionnel et en particulier aux dispositions de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen du 26 août 1789 auxquelles le préambule de la constitution du 4 octobre 1958 s'est borné à renvoyer ;

Et attendu, ensuite, que les dispositions de l'article 1er de la loi du 11 germinal an XI ne sont pas contraires aux articles précités de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales qui se bornent à poser des principes généraux relatifs au respect de la vie privée et familiale, à la liberté de conscience et à l'interdiction des discriminations entre les individus ;

Que la critique énoncée par la première branche du second moyen ne peut donc être accueillie ;

Et sur le second moyen pris en ses deuxième, troisième et quatrième branches :

Attendu qu'il est enfin fait grief à l'arrêt attaqué, d'une part, d'avoir violé les dispositions de la loi du 11 germinal an XI en se refusant à admettre comme prénom celui d'une héroïne célèbre de la littérature française composé de deux prénoms en usage dans les calendriers séparés par la préposition " de " ; d'autre part, d'avoir laissé sans réponse les conclusions de M. et Mme X... qui faisaient valoir que les prénoms articulés autour de cette préposition sont fréquents ; enfin de n'avoir pas donné de base légale à sa décision en écartant le prénom " Fleur de Marie " sans dire en quoi il était ridicule ;

Mais attendu que la cour d'appel, qui n'était pas tenue de suivre les parties dans le détail de leur argumentation, énonce, dans l'exercice de son pouvoir souverain, qu'en raison de sa trop grande fantaisie et de son originalité, le prénom choisi, serait-il celui porté par l'héroïne d'une oeuvre littéraire célèbre, risque de nuire à l'intérêt de l'enfant ; qu'elle a, ce faisant, légalement justifié sa décision et que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 84-17090
Date de la décision : 01/10/1986
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Analyses

1°) LOIS ET REGLEMENTS - Loi - Constitutionnalité - Appréciation par le juge (non).

POUVOIRS DES JUGES - Loi - Constitutionnalité - Appréciation (non).

1°) Les Tribunaux doivent appliquer la loi sans pouvoir en écarter certaines dispositions en raison de leur prétendue contrariété à des principes de caractère constitutionnel et en particulier aux dispositions de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen du 26 août 1789 auxquelles le préambule de la constitution du 4 octobre 1958 s'est borné à renvoyer.

2°) NOM - Prénom - Attribution - Article 1er de la loi du 11 germinal an XI - Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales - Compatibilité.

CONVENTION EUROPEENNE DES DROITS DE L'HOMME - Nom - Prénom - Attribution - Article 1er de la loi du 11 germinal an XI - Compatibilité.

2°) Les dispositions de l'article 1er de la loi du 11 germinal an XI ne sont pas contraires aux articles de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales qui se bornent à poser des principes généraux relatifs au respect de la vie privée et familiale, à la liberté de conscience et à l'interdiction des discriminations entre les individus.

3°) NOM - Prénom - Attribution - Intérêt de l'enfant - Appréciation souveraine.

NOM - Prénom - Attribution - Conditions.

3°) C'est dans l'exercice de leur pouvoir souverain que les juges ont estimé que, par sa trop grande fantaisie et son originalité, le prénom, " Fleur de Marie ", serait-il celui porté par l'héroïne d'une oeuvre de littérature française célèbre, risquait de nuire à l'intérêt de l'enfant.


Références :

Loi du 26 août 1789 art. 1

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles, 18 septembre 1984

(1) A RAPPROCHER : Cour de Cassation, chambre criminelle, 1974-02-26, bulletin criminel 1974 N° 81 (2) p. 201 (Rejet). (3) A RAPPROCHER : Cour de Cassation, chambre civile 1, 1984-07-17, bulletin 1984 I N° 234 p. 197 (Rejet) et l'arrêt cité.


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 01 oct. 1986, pourvoi n°84-17090, Bull. civ. 1986 I N° 232 p. 222
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 1986 I N° 232 p. 222

Composition du Tribunal
Président : Président : M. Fabre
Avocat général : Avocat général :M. Rocca
Rapporteur ?: Rapporteur :M. Massip
Avocat(s) : Avocat :la SCP Tiffreau et Thouin-Palat

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1986:84.17090
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