La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

17/06/1986 | FRANCE | N°85-90313

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 17 juin 1986, 85-90313


CASSATION sans renvoi sur le pourvoi formé par :
- X... Alain,
contre un arrêt de la Chambre d'accusation de la Cour d'appel de Paris du 21 décembre 1984 qui a confirmé l'ordonnance du juge d'instruction disant n'y avoir lieu à informer sur sa plainte avec constitution de partie civile contre Y... Laurent du chef de coups et blessures volontaires.
LA COUR,
Vu les mémoires produits en demande et en défense ;
Vu l'article 575 alinéa 2-1° du Code de procédure pénale ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 26 de la Constitution du 4 oc

tobre 1958, 2, 3, 85 et 593 du Code de procédure pénale, ensemble 575-1° du ...

CASSATION sans renvoi sur le pourvoi formé par :
- X... Alain,
contre un arrêt de la Chambre d'accusation de la Cour d'appel de Paris du 21 décembre 1984 qui a confirmé l'ordonnance du juge d'instruction disant n'y avoir lieu à informer sur sa plainte avec constitution de partie civile contre Y... Laurent du chef de coups et blessures volontaires.
LA COUR,
Vu les mémoires produits en demande et en défense ;
Vu l'article 575 alinéa 2-1° du Code de procédure pénale ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 26 de la Constitution du 4 octobre 1958, 2, 3, 85 et 593 du Code de procédure pénale, ensemble 575-1° du même Code, défaut de motifs et manque de base légale ;
" en ce que l'arrêt confirmatif attaqué a décidé n'y avoir lieu à informer sur les faits énoncés dans la plainte avec constitution de partie civile déposée par Alain X..., à l'encontre de Laurent Y..., député du Val-de-Marne, du chef de coups et blessures volontaires ;
" aux motifs que le 19 octobre 1983, date du versement de la consignation, le Parlement était en session et qu'aucune autorisation de l'Assemblée nationale, dont Y... est membre, ne figurait à la procédure ;
" alors que, s'agissant des poursuites, l'inviolabilité parlementaire est temporaire et limitée à la durée des sessions ; en revanche, pendant l'intersession, les poursuites peuvent être librement exercées contre un parlementaire ; que le juge d'instruction saisi d'une plainte avec constitution de partie civile est obligé d'informer ; qu'en conséquence, saisi par la plainte avec constitution de partie civile de Alain X..., le juge d'instruction avait l'obligation, pendant l'intersession qui s'étendait du 22 décembre 1983 au 2 avril 1984, d'ouvrir une instruction à l'encontre de Laurent Y... " ;
Vu lesdits articles, ensemble les articles 1er, alinéa 2 et 88, alinéa 1 du Code de procédure pénale ;
Attendu que le versement au greffe de la somme présumée nécessaire pour les frais de la procédure, dans le délai fixé par le juge d'instruction, a pour effet de rendre recevable la plainte avec constitution de partie civile à la date du dépôt de celle-ci dûment constaté par ordonnance ; qu'il s'en suit que c'est à cette même date que l'action publique est mise en mouvement et qu'il convient de se placer pour apprécier la légalité de la poursuite ;
Attendu qu'il appert de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure que X... Alain a adressé le 14 juin 1983 au juge d'instruction au Tribunal de grande instance de Créteil une plainte dans laquelle il énonçait sa volonté formelle de se constituer partie civile contre Y... Laurent, député du Val-de-Marne et maire de Créteil, pour des faits qualifiés de coups et blessures volontaires ayant entraîné une incapacité de travail personnel supérieure à huit jours ; que le juge d'instruction ayant communiqué cette plainte au procureur de la République, celui-ci a, en application de l'article 681 du Code de procédure pénale, présenté requête à la Chambre criminelle de la Cour de Cassation laquelle, par arrêt du 20 août 1983, a dit qu'il n'y avait pas lieu de désigner une juridiction, aux termes des dispositions de l'article L. 115 du Code électoral ;
Attendu que, par ordonnance du 29 septembre 1983, le juge d'instruction a fixé le montant de la somme à consigner au greffe comme présumée nécessaire pour les frais de la procédure et imparti un délai d'un mois à compter de la signification pour y procéder ;
Que le 19 octobre 1983 X... a effectué ladite consignation ;
Que, par ordonnance du 19 avril 1984, le juge d'instruction a dit n'y avoir lieu à informer contre Y... en application des dispositions de l'article 26 de la Constitution du 4 octobre 1958 ;
Que, par l'arrêt attaqué, la Chambre d'accusation saisie par l'appel de la partie civile a confirmé l'ordonnance entreprise en énonçant que l'action publique avait été mise en mouvement le 19 octobre 1983, date du versement de la consignation, c'est-à-dire à un moment où, conformément à l'article 28 de la Constitution, le Parlement était en session, ce qui interdisait toute poursuite contre Y..., député, en l'absence d'autorisation de l'Assemblée nationale ;
Mais attendu qu'en statuant ainsi, la Chambre d'accusation a méconnu le sens et la portée du principe ci-dessus rappelé ;
D'où il suit que la cassation est encourue de ce chef ;
Attendu cependant qu'aux termes de l'article L. 131-5 du Code de l'organisation judiciaire, la Cour de Cassation peut casser sans renvoi lorsque la cassation n'implique pas qu'il soit statué à nouveau sur le fond ;
Que tel est le cas en l'espèce ;
Qu'en effet ainsi qu'il a été dit ci-dessus si c'est à tort que, par l'arrêt attaqué, la Chambre d'accusation a dit n'y avoir lieu à informer contre Y... Laurent, député du Val-de-Marne, bien que la plainte avec constitution de partie civile de X... suivie du versement dans le délai imparti par le juge d'instruction ait été susceptible de mettre en mouvement l'action publique à la date où son dépôt a été constaté, encore eût-il fallu, pour ce faire, qu'à cette date, soit en l'occurrence le 14 juin 1983, le Parlement n'ait pas été réuni en session ;
Mais attendu qu'il appert des dispositions de l'article 28, alinéa 3 de la Constitution du 4 octobre 1958, que la seconde session ordinaire du Parlement s'ouvre le 2 avril pour une durée qui ne peut excéder 90 jours ; qu'il s'en déduit que le 14 juin 1983, Y... ne pouvait être poursuivi ou arrêté en matière criminelle ou correctionnelle qu'avec l'autorisation de l'assemblée dont il faisait partie, sauf le cas de flagrant délit ;
Que, dans ces conditions, X... ne pouvait valablement mettre en mouvement l'action publique ledit 14 juin 1983, un tel acte de poursuite fait sans l'autorisation précitée du Parlement étant frappé d'une nullité d'ordre public ;
Par ces motifs :
CASSE ET ANNULE l'arrêt de la Chambre d'accusation de la Cour d'appel de Paris, du 21 décembre 1984 ;
Et attendu qu'il ne reste rien à juger, dit n'y avoir lieu à renvoi.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 85-90313
Date de la décision : 17/06/1986
Sens de l'arrêt : Cassation sans renvoi
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

1° ACTION PUBLIQUE - Mise en mouvement - Partie civile - Plainte avec constitution - Consignation - Effet.

ACTION CIVILE - Partie civile - Constitution - Constitution à l'instruction - Manifestation expresse de volonté - Consignation des frais - Consignation effectuée dans le délai imparti par le juge d'instruction - Effets.

1° La qualité de partie civile s'acquiert par le dépôt d'une plainte auprès du juge d'instruction compétent contenant la manifestation expresse du plaignant de se constituer partie civile. Lorsque le dépôt d'une telle plainte a été dûment constaté et si la consignation des frais arbitrée par le juge a été effectuée dans le délai imparti, l'action publique est valablement mise en mouvement dès le jour du dépôt de ladite plainte (1). En effet le versement de la consignation dans les conditions ci-dessus précisées a pour seul effet, aux termes de l'article 88 du Code de procédure pénale, de rendre recevable une telle plainte

2° ACTION PUBLIQUE - Mise en mouvement - Poursuites - Poursuite contre un membre du Parlement - Autorisation préalable - Immunité parlementaire - Mainlevée - Défaut - Plainte avec constitution de partie civile - Nullité.

IMMUNITE PARLEMENTAIRE - Poursuites - Poursuite contre un membre du Parlement - Poursuite engagée pendant la durée d'une session - Plainte avec constitution de partie civile - Nullité.

2° Aucun acte de poursuite, constitution de partie civile régulière en la forme ou réquisitoire introductif du procureur de la République, ne peut être exercé, sous peine de nullité, à l'encontre d'un membre du Parlement pendant la durée des sessions qu'avec l'autorisation de l'assemblée dont il fait partie, sauf le cas de flagrant délit, en application des dispositions des articles 26, 28 et 29 de la Constitution du 4 octobre 1958 (2).


Références :

(2)
Code de procédure pénale 1 al. 2, 88 al. 2
Constitution du 04 octobre 1958 art. 26, 28, 29

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 21 décembre 1984

(1) A RAPPROCHER : Cour de Cassation, chambre criminelle, 1979-10-02, bulletin criminel 1979 N° 265 p. 719 (Cassation). Cour de Cassation, chambre criminelle, 1983-07-07, bulletin criminel 1983 N° 169 p. 417 (Cassation sans renvoi). Cour de Cassation, chambre criminelle, 1983-12-13, bulletin criminel 1983 N° 338 p. 872 (Cassation sans renvoi) et les arrêts cités. Cour de Cassation, chambre criminelle, 1985-04-23, bulletin criminel 1985 N° 155 p. 396 (Rejet). (1) A CONTRARIO : Cour de cassation, chambre criminelle, 1979-01-03, bulletin criminel 1979 N° 1 p. 1 (Cassation). (2) A RAPPROCHER : Cour de cassation, chambre criminelle, 1955-02-03, bulletin criminel 1955 N° 81 p. 140 (Cassatiion). Cour de cassation, chambre criminelle, 1955-02-03, bulletin criminel 1955 N° 82 p. 141 (Cassation). Cour de cassation, chambre criminelle, 1973-04-11, bulletin criminel 1973 N° 190 p. 455 (Rejet). Cour de cassation, chambre criminelle, 1983-12-08, bulletin criminel 1983 N° 334 p. 863 (Rejet).


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 17 jui. 1986, pourvoi n°85-90313, Bull. crim. criminel 1986 N° 208 p. 533
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 1986 N° 208 p. 533

Composition du Tribunal
Président : Président :M. Berthiau, Conseiller le plus ancien faisant fonctions
Avocat général : Avocat général : M. Clerget
Rapporteur ?: Rapporteur : M. Cruvellié
Avocat(s) : Avocats : MM. Le Bret et Blanc.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1986:85.90313
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award