Sur le moyen unique pris en ses trois branches :
Attendu, selon les énonciations des juges du fond, que par l'effet d'ordonnances du 24 février 1971 du gouvernement algérien portant nationalisation d'une partie des droits et intérêts miniers détenus par toute personne physique ou morale étrangère dans les concessions d'hydrocarbures d'Algérie, la Compagnie française des pétroles Algérie (C.F.P.-A.), dont le siège social est à Paris, s'est trouvée dépossédée de 51% de ses droits et intérêts miniers qui ont été transférés à la Société nationale algérienne de transport et de commercialisation d'hydrocarbures (Sonatrach) ; que, par un accord dénommé " protocole " conclu le 30 juin 1971 entre l'Etat algérien, la Sonatrach et la C.F.P.-A., celle-ci a fait apport des droits miniers qui lui restaient par l'intermédiaire d'une société créée à cet effet, la société Total Algérie, dont elle détenait l'entier capital ; que le " protocole ", qui définissait le montant de l'indemnisation due à la C.F.P.-A. du fait de la nationalisation d'une partie de ses droits, a permis la conclusion en 1975 de contrats d'association entre la Sonatrach, la C.F.P.-A. et Total Algérie pour l'exploitation de certains gisements algériens, contrats qui comportaient tous une clause prévoyant que, dans le cas de leur non renouvellement à échéance, Total Algérie céderait la totalité de ses droits à la Sonatrach moyennant indemnité ; que, le 31 décembre 1980 les contrats n'ayant pas été renouvelés, Total Algérie a cédé ses droits miniers à la Sonatrach moyennant une indemnité de 212.232.981,28 dollars des Etats-Unis d'Amérique qui devait être réglée en quatre annuités égales ; que, par un contrat du 13 janvier 1981, la C.F.P.-A. a acheté à la Sonatrach un minimum de trois millions de tonnes métriques de pétrole par an tandis que C.F.P.-A. s'engageait à maintenir une aide technique à la Sonatrach dans le cadre d'un contrat dit de " work over " prévoyant des règlements mensuels ; qu'ainsi la C.F.P.-A. était créancière vis-à-vis de la Sonatrach des indemnités réparatrices des conséquences des mesures de nationalisation et du prix des prestations de " work over " tandis qu'elle était débitrice vis-à-vis de la Sonatrach du prix des livraisons de pétrole ; que, des arrêts du 20 octobre 1976, du 31 mai 1978 et du 24 juin 1980, devenus irrévocables, de la Cour d'appel de Paris ayant condamné la Sonatrach à payer aux consorts X... des indemnités pour l'occupation par elle de l'immeuble leur appartenant à Alger, qui avait été l'objet de mesures de dépossession prises, sans prévoir d'indemnité, par les autorités locales et jugées de ce fait inefficaces en France, ceux-ci, pour tenter de recouvrer ces créances, ont fait procéder le 26 juillet 1982 à des saisies-arrêts entre les mains de la C.F.P.-A. et l'ont assignée ainsi que la Sonatrach en déclaration affirmative et en validité de saisie ; que les sociétés défenderesses ont opposé à ces demandes l'effet extinctif de la compensation de leurs créances réciproques, non exigibles au jour de la saisie ; que l'arrêt confirmatif attaqué a rejeté cette défense ;
Attendu que la C.F.P.-A. reproche à la Cour d'appel d'avoir ainsi statué, alors que, lorsque deux dettes sont connexes, le juge ne peut écarter la demande en compensation au motif qu'elles ne réunissaient pas les conditions de liquidité et d'exigibilité ; qu'il est tenu de constater le principe de cette compensation, sauf à ordonner toutes mesures pour parvenir à l'apurement des comptes ; que pour en avoir jugé autrement l'arrêt attaqué aurait donc violé l'article 1291 du Code civil ; qu'il est aussi soutenu, par la deuxième branche du moyen, qu'il résulte des constatations mêmes de l'arrêt attaqué, non seulement que les dettes et les créances de la C.F.P.-A. et de la Sonatrach résultaient d'une communauté de cause et d'objet, ce qui suffisait à établir leur connexité, mais encore que, par voie de conséquence, les parties avaient eu en vue une telle communauté ; qu'ainsi, la Cour d'appel, qui eût dû, au demeurant, interpréter la volonté des parties au regard des règles du droit du commerce international qui considère qu'il y a connexité entre des contrats dès lors que leur cause réside dans un rapport économique unique et global, n'aurait pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations ; et qu'enfin, le moyen en sa troisième branche, soutient que la juridiction du second degré se serait contredite, en énonçant, d'un côté, que le contrat d'achat de pétrole, bien qu'il ait été conclu pour le cas de non renouvellement des accords du 30 juin 1971 et du 30 décembre 1980, ne permettait pas à la C.F.P.-A. de prétendre pour autant qu'une connexité se fût établie entre ces contrats et, de l'autre côté, en reconnaissant néanmoins que des liens existaient entre les parties formant ainsi une communauté d'objet et de cause des différents accords, ne serait ce que par les mobiles qui les avaient inspirés ;
Mais attendu que, tant par motifs propres qu'adoptés l'arrêt attaqué a retenu que l'analyse du " protocole " du 30 juin 1971 et de l" accord " du 17 août suivant complétés par les " accords d'association " de 1975 faisait ressortir leur caractère autonome par rapport à la convention du 13 janvier 1981 dont la C.F.P.-A prétendait que le rapprochement lui permettait d'opposer la compensation ; qu'il a relevé notamment, d'une part, que la date du 30 décembre 1980 constituait un terme à l'association qui avait été créée après la dernière phase des nationalisations et aboutissait à un rachat pur et simple des droits miniers, et, d'autre part, que le contrat d'approvisionnement en pétrole brut algérien, qui ne faisait aucune référence aux conventions de 1971 ni aux " accords " de 1975, constituait un simple contrat commercial qui n'était pas le prolongement nécessaire du protocole du 30 juin 1971 et des accords auxquels celui-ci avait donné naissance ; qu'ayant ainsi souverainement estimé que la C.F.P.-A n'apportait pas la preuve de l'existence entre les sommes que la Sonatrach lui devait et celles qu'elle-même devait à cette société, du lien allégué " au titre d'une communauté d'objet et de cause " des différents contrats et, spécialement, qu'il n'était pas établi que celui qui était en cours trouvait sa cause dans les contrats précédents, la Cour d'appel en a justement déduit, sans contradiction, qu'il n'existait pas entre les dettes réciproques de la Sonatrach et de la C.P.F.-A une connexité entraînant, par compensation, un effet extinctif au préjudice des droits acquis aux consorts X... en vertu desquels ils avaient fait
pratiquer la saisie-arrêt ; qu'en aucune de ses branches le moyen n'est donc fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi .