Sur les trois moyens réunis, pris en leurs diverses branches :
Attendu, selon les énonciations des juges du fond, que la société Gaumont a vendu le 5 décembre 1979 à la société Ritz Promotion, un terrain et la salle de cinéma édifiée sur ce terrain ; que l'ensemble des salles de cinéma de la société Gaumont étaient garanties contre le risque d'incendie par un groupement de compagnie d'assurances ayant pour compagnie apéritrice les Assurances Générales de France ; qu'à l'occasion de la vente, dont le paiement comportait un très important différé, la société Gaumont s'était réservée la possibilité de continuer à assurer l'immeuble au cas où l'acquéreur ne s'acquitterait pas de l'obligation d'assurance mise à sa charge par le contrat ; que le 17 juillet 1980, une explosion d'origine criminelle qui pouvait avoir eu pour instigateurs des dirigeants de Ritz Promotion, détruisait le cinéma ; que la société Gaumont, qui n'avait pas reçu le reliquat du prix, a introduit une instance en résolution de la vente et demandé à la compagnie A.G.F., sous réserve du résultat de cette instance, de lui verser l'indemnité relative à la destruction de l'immeuble ; que celle-ci a refusé en soutenant que du fait de l'article L.121-10 du Code des assurances, l'assuré était désormais l'acquéreur et qu'elle était en droit de lui opposer sa faute intentionnelle et dolosive ; que la Cour d'appel a condamné les A.G.F. à indemniser la société Gaumont ;
Attendu qu'en un premier moyen, la compagnie A.G.F. fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir ainsi statué alors, en premier lieu, qu'en énonçant, pour refuser de considérer que la police avait été transférée à l'acquéreur que la prime globale n'était pas divisible, la Cour d'appel, qui avait d'autre part constaté que l'immeuble incendié figurait sur un état des immeubles assurés annexé à la police, n'aurait pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations ; alors, en second lieu, qu'elle aurait dénaturé une lettre adressée par la société Gaumont à son courtier d'assurances, en considérant qu'elle lui donnait instruction de stipuler le maintien de la garantie à son bénéfice au lieu qu'elle aurait seulement souhaité le maintien de la garantie des A.G.F. jusqu'à souscription par l'acquéreur d'une nouvelle police ; alors, en troisième lieu, que la nécessité pour l'acquéreur d'exécuter les obligations dont le vendeur était tenu envers l'assureur n'aurait constitué qu'une condition du maintien par l'assureur de sa garantie et non, comme l'auraient dit les juges d'appel, une condition du transfert de la garantie au nouvel acquéreur, et alors, en quatrième lieu et enfin, qu'ils se seraient abstenus de rechercher si la souscription par la société Ritz Promotion d'une nouvelle police pour le même immeuble n'avait pas eu pour effet, en se substituant à l'ancienne police, de rendre celle-ci caduque ;
Attendu qu'en un second moyen, il est encore fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir dit que la police continuait à bénéficier à la société Gaumont, alors, d'une part, qu'à la date du sinistre elle n'aurait plus été propriétaire et que la société Ritz Promotion se serait assurée par ailleurs, alors, d'autre part, que l'intérêt de la société Gaumont à faire assurer l'immeuble sur lequel s'est fondé le tribunal dont la décision a été confirmée, pour justifier le maintien de la garantie à son profit, aurait disparu avec la souscription par la société Ritz Promotion d'un autre contrat avec une autre compagnie ; alors de troisième part, que la qualité de vendeur impayé qu'avait la société Gaumont lui aurait donné uniquement un droit à l'indemnité éventuellement due à l'acquéreur et dont l'assureur de celui-ci aurait seul été redevable ; alors, de quatrième part, que la résolution de la vente n'aurait pu avoir pour effet de faire renaître un contrat passé avec un tiers et devenu caduc entre temps et d'obliger ainsi ce tiers à une prestation dont il était libéré et alors, de cinquième part, (et derechef enfin, qu'en admettant, par impossible, que la société Gaumont ait été co-assurée pour un immeuble appartenant à la société Ritz Promotion, le caractère volontaire du sinistre causé par son co-assuré lui aurait été opposable ;
Attendu qu'en un troisième moyen, la compagnie A.G.F. soutient qu'en tout état de cause, la Cour d'appel n'aurait pu fixer l'indemnité au prix de la reconstruction des bâtiments détruits au jour du sinistre, vétusté déduite, sans rechercher si les mentions de l'acte selon lesquelles ces bâtiments auraient été destinés à la destruction n'impliquaient pas la reconnaissance par les parties au contrat de l'absence totale de valeur desdits bâtiments ;
Mais attendu, sur les deux premiers moyens, que la Cour d'appel a relevé que le bâtiment incendié était, au moment du sinistre, garanti par la police d'assurance souscrite par la société Gaumont renouvelée par elle à compter du 1er janvier 1980 donc postérieurement à la vente, et à laquelle il n'avait pas été sérieusement soutenu devant les juges du fond que se fût substituée une police souscrite par la société Ritz Promotion ; qu'elle a également relevé que la vente de l'immeuble s'était trouvée résolue par un arrêt irrévocable du 2 mars 1983 et que, par conséquent, la société Gaumont n'avait jamais cessé d'être propriétaire du bâtiment assuré ; qu'il s'ensuit, la résolution de la vente d'un bien étant opposable, comme la vente elle-même, à la compagnie d'assurances assurant ce bien, que la société Gaumont avait, indépendament même de tous autres motifs, la qualité d'assuré au moment du sinistre ; que dès lors, en dehors de la troisième branche du second moyen à laquelle il est ainsi répondu, aucune autre branche ni du premier ni du deuxième moyen ne mérite d'être examinée ;
Attendu, sur le troisième moyen, qu'en accordant une indemnité conforme à la valeur de reconstruction de la chose détruite par le sinistre, vétusté déduite, comme le prévoyait le contrat d'assurance, la Cour d'appel, qui n'avait pas à rechercher l'utilisation qu'avait l'intention de faire ou de ne pas faire de cette chose la société Gaumont, ne s'est pas écartée du principe indemnitaire énoncé par l'article L.121-1 du Code des assurances ; que le troisième moyen ne peut davantage être accueilli ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi