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04/02/1986 | FRANCE | N°84-13202

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 04 février 1986, 84-13202


Sur le moyen unique, pris en ses trois branches :

Attendu que les consorts X... reprochent d'abord à l'arrêt attaqué de les avoir déboutés de l'action en responsabilité contractuelle qu'ils avaient intentée contre le docteur Y... à la suite de la mort de Gérard X..., alors que, selon le moyen, le retard du chirurgien à traiter une complication postopératoire dont il a connaissance constitue une faute, qu'en l'espèce il ressort des propres constatations de cet arrêt que le docteur Y... avait eu connaissance, dès le matin, de pertes de sang de son malade, porteur d'un drain

pour avoir été par lui récemment opéré d'un cancer du colon sigmoin...

Sur le moyen unique, pris en ses trois branches :

Attendu que les consorts X... reprochent d'abord à l'arrêt attaqué de les avoir déboutés de l'action en responsabilité contractuelle qu'ils avaient intentée contre le docteur Y... à la suite de la mort de Gérard X..., alors que, selon le moyen, le retard du chirurgien à traiter une complication postopératoire dont il a connaissance constitue une faute, qu'en l'espèce il ressort des propres constatations de cet arrêt que le docteur Y... avait eu connaissance, dès le matin, de pertes de sang de son malade, porteur d'un drain pour avoir été par lui récemment opéré d'un cancer du colon sigmoinde, qu'il avait dès lors ordonné une transfusion sanguine et s'était rendu trois fois auprès de lui dans la journée - ce qui révélait la conscience qu'il avait de l'état alarmant de Gérard X... - et qu'il n'en est pas moins allé au spectacle dans la soirée du même jour, retardant ainsi la nouvelle intervention indispensable pour juguler l'hémorragie, de sorte que la Cour d'appel n'a pu nier la faute du médecin sans violer l'article 1147 du Code civil ;

Mais attendu que pour adopter les conclusions du rapport d'expertise aux termes desquelles " il n'a pas été relevé, ni dans les indications opératoires, ni dans la surveillance du malade, ni dans les soins médicaux et chirurgicaux qui ont été prodigués, l'existence d'une faute professionnelle ", la Cour d'appel énonce que Gérard X..., qui se trouvait en clinique, n'a pas été négligé ni abandonné, qu'un anesthésiste est intervenu lorsque l'hémorragie proprement dite s'est annoncée pendant l'absence du docteur Y..., qu'il a assuré les soins nécessaires en " faisant passer " tout de suite un flacon de sang et " en mettant en oeuvre la surveillance habituelle dans ce genre d'accident " ; que le docteur Y... lui-même est arrivé vers 23 h. 30 et que l'hémorragie " importante et pulsive " ne s'est produite que vers 24 heures lorsqu'il a déplacé le drain, geste nécessaire qui, réalisé plus tôt, aurait eu les mêmes conséquences accidentelles et non fautives sur le déclenchement de l'hémorragie massive, puisque celle-ci s'explique par l'ulcération de l'artère au contact du drain, lui-même indispensable et correctement posé lors de l'opération initiale, et qu'enfin, l'accident s'étant ainsi produit, il a été procédé sans attendre à l'intervention destinée à juguler l'hémorragie, à savoir la ligature de l'artère iliaque externe, opération au cours de laquelle est survenu un arrêt cardiaque de dix minutes qui, maîtrisé, a cependant entraîné la mort quelques jours plus tard ;

Attendu que, de ces constatations et énonciations, la Cour d'appel a pu déduire que le fait, notamment, que le docteur Y... n'ait pas répondu sur le champ à l'appel téléphonique à lui adressé au début de la soirée, " principal reproche que formulent les demandeurs ", n'a pas constitué une faute ;

Et attendu, par suite, que sont inopérants et doivent être écartés les deux autres griefs du moyen, qui consistent à reprocher à la Cour d'appel d'avoir refusé d'admettre que la faute prétendument commise, avait causé, sinon le décès, du moins une perte de chances, et d'avoir inversé la charge de la preuve de l'existence des chances de survie qu'avait le malade ;

D'où il suit que le moyen ne peut être accueilli en aucune de ses trois branches ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 84-13202
Date de la décision : 04/02/1986
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Analyses

PROFESSIONS MEDICALES ET PARAMEDICALES - Médecin chirurgien - Responsabilité - Faute - Intervention chirurgicale - Hémorragie post-opératoire - Chirurgien ne se rendant pas immédiatement auprès du malade - Intervention adéquate entreprise sur-le-champ

Le fait qu'un chirurgien, informé des pertes de sang post opératoires subies par son patient, ne se rende pas immédiatement auprès de lui n'est pas constitutif d'une faute dès lors que le malade a fait l'objet de la surveillance et des soins nécessaires et que l'hémorragie importante ne s'est produite qu'après l'intervention, non fautive, de ce chirurgien, et qu'il avait été procédé sans attendre à l'intervention destinée à la juguler, intervention au cours de laquelle est survenu un arrêt cardiaque entraînant la mort quelques jours après.


Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Toulouse, chambre 1, 06 mars 1984


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 04 fév. 1986, pourvoi n°84-13202, Bull. civ. 1986 I N° 10 p. 10
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 1986 I N° 10 p. 10

Composition du Tribunal
Président : Pdt. M. Joubrel
Avocat général : Av.Gén. M. Gulphe
Rapporteur ?: Rapp. M. Raoul Béteille
Avocat(s) : Av. demandeur : SCP Boré et Xavier

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1986:84.13202
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