CASSATION sans renvoi sur le pourvoi formé par :
- le Procureur général près la Cour de Cassation d'ordre du garde des Sceaux, ministre de la Justice,
contre un jugement du Tribunal correctionnel de Paris du 4 novembre 1983 qui, dans une procédure suivie contre X... (Jean Haig) du chef de recel de documents administratifs falsifiés ou contrefaits l'a condamné, par décision contradictoire, à la peine de 4 mois d'emprisonnement ;
LA COUR,
Vu la lettre du garde des Sceaux, ministre de la Justice, en date du 3 juillet 1985 ;
Vu la requête du procureur général près la Cour de Cassation en date du 18 juillet 1985 ;
Vu l'article 620 du Code de procédure pénale ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation de l'article 10 de la Convention franco-belge d'extradition du 15 août 1874, ensemble les articles 21, 22 et 26 de la loi du 10 mars 1927 ;
Vu lesdits articles ;
Attendu que l'individu qui aura été livré ne pourra être poursuivi ou jugé contradictoirement pour aucune infraction autre que celle ayant motivé l'extradition ;
Attendu que le gouvernement belge a accordé l'extradition de X... Jean Haig, né le 10 janvier 1945, à PARIS, pour l'exécution :
a) d'une condamnation par défaut prononcée le 18 mai 1979 par le tribunal correctionnel de Paris aux peines de 4 ans d'emprisonnement et de 30 000 francs d'amende pour escroqueries, faux en écritures de commerce et usage, endossement de chèques sans provision ;
b) d'une condamnation du 9 mai 1984 de la Cour d'appel de PARIS l'ayant condamné aux peines d'un an d'emprisonnement et de 10 000 francs d'amende pour vols, escroqueries, falsifications de chèques et usage ;
c) d'une condamnation par défaut du 12 janvier 1978 du tribunal correctionnel de Paris aux peines de 5 mois d'emprisonnement et 2 000 francs d'amende pour escroquerie, vol, faux en écritures de commerce et usage, infraction à la législation sur les chèques ;
Attendu que X... a été remis par les autorités belges aux autorités françaises le 10 août 1983 ;
Que le 25 août 1983 il a été inculpé par un juge d'instruction au tribunal de grande instance de Paris pour des infractions non comprises dans la demande d'extradition, inculpation qui fut suivie le 4 novembre 1983 d'une condamnation à la peine de 4 mois d'emprisonnement pour recel de documents administratifs falsifiés, condamnation devenue définitive ;
Mais attendu que l'extradition n'avait pas été demandée et accordée pour ces faits et qu'en conséquence X... n'aurait pu, au regard des textes précités, faire l'objet d'une inculpation ou d'un jugement contradictoire ; qu'il n'en serait autrement que s'il avait consenti à être jugé pour ces faits et que son consentemment ait été communiqué au gouvernement belge ou qu'en cas de non-consentement, ledit gouvernement ait préalablement donné son adhésion aux nouvelles poursuites qu'enfin si l'extradé n'avait pas quitté le territoire français dans les trente jours à compter de son élargissement définitif ;
Que tel n'est pas le cas de l'espèce ;
D'où il suit que la condamnation du 4 novembre 1983 est entachée de nullité pour avoir méconnu le principe de la spécialité de l'extradition et que la cassation est encourue de ce chef ;
Par ces motifs :
CASSE ET ANNULE le jugement du 4 novembre 1983 du tribunal correctionnel de Paris ayant condamné X... à la peine de 4 mois d'emprisonnement pour recel de documents administratifs falsifiés ou contrefaits ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi.