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10/12/1985 | FRANCE | N°84-15015

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 10 décembre 1985, 84-15015


SUR LE MOYEN UNIQUE, PRIS EN SES DEUX BRANCHES : ATTENDU, SELON L'ARRET ATTAQUE, QUE LES EPOUX ROGATIEN B... ET ANGELE Z..., REPRESENTES PAR LEUR FILS, FELIX B..., ONT, PAR ACTE DRESSE LE 17 NOVEMBRE 1979 PAR M. X..., NOTAIRE, VENDU A M. Y..., POUR LE PRIX DE 250.000 FRANCS, UN FONDS DE COMMERCE DE BAR, RESTAURANT, CABARET, SITUE A TOULOUSE A L'ENSEIGNE "1900 LITTLE BUNNY" ;

QUE LEDIT ACTE PRECISAIT QUE L'UN DES ELEMENTS DU FONDS VENDU ETAIT "LE DROIT A LA LICENCE DE QUATRIEME CATEGORIE OCTROYEE AUX VENDEURS" ;

QU'APRES LA SIGNATURE DE L'ACTE, M. Y..., POUR FAIRE TRANSFERER LA LI

CENCE A SON NOM, A EFFECTUE LES DECLARATIONS NECESSAIRES DO...

SUR LE MOYEN UNIQUE, PRIS EN SES DEUX BRANCHES : ATTENDU, SELON L'ARRET ATTAQUE, QUE LES EPOUX ROGATIEN B... ET ANGELE Z..., REPRESENTES PAR LEUR FILS, FELIX B..., ONT, PAR ACTE DRESSE LE 17 NOVEMBRE 1979 PAR M. X..., NOTAIRE, VENDU A M. Y..., POUR LE PRIX DE 250.000 FRANCS, UN FONDS DE COMMERCE DE BAR, RESTAURANT, CABARET, SITUE A TOULOUSE A L'ENSEIGNE "1900 LITTLE BUNNY" ;

QUE LEDIT ACTE PRECISAIT QUE L'UN DES ELEMENTS DU FONDS VENDU ETAIT "LE DROIT A LA LICENCE DE QUATRIEME CATEGORIE OCTROYEE AUX VENDEURS" ;

QU'APRES LA SIGNATURE DE L'ACTE, M. Y..., POUR FAIRE TRANSFERER LA LICENCE A SON NOM, A EFFECTUE LES DECLARATIONS NECESSAIRES DONT IL LUI A ETE DELIVRE RECEPISSE ;

QUE, LE 4 FEVRIER 1980, IL A ETE INFORME PAR LE PARQUET QUE, LE FONDS ACQUIS PAR LUI AYANT ETE EXPLOITE ILLEGALEMENT PAR M. FELIX B... SOUS COUVERT D'UNE LICENCE ETABLIE AU NOM DE SA MERE, DES POURSUITES PENALES AVAIENT ETE ENGAGEES CONTRE CELUI-CI, QU'UN ARRET DE LA COUR D'APPEL AVAIT ORDONNE LA FERMETURE DEFINITIVE DE L'ETABLISSEMENT, ET QU'EN CAS DE REJET DU POURVOI EN CASSATION EN COURS, CETTE FERMETURE DEVIENDRAIT EXECUTOIRE ET ENTRAINERAIT LA SUPPRESSION DE LA LICENCE ;

QUE M. Y..., QUI AVAIT ENTREPRIS L'EXPLOITATION DU FONDS A ETE, PAR JUGEMENT DU TRIBUNAL DE COMMERCE DU 18 NOVEMBRE 1980, DECLARE EN ETAT DE REGLEMENT JUDICIAIRE, PUIS, PAR JUGEMENT DU MEME TRIBUNAL DU 13 NOVEMBRE 1981, EN LIQUIDATION DES BIENS, TANDIS QUE LA CHAMBRE CRIMINELLE DE LA COUR DE CASSATION, PAR ARRET DU 8 JANVIER 1981, A REJETE LE POURVOI FORME PAR FELIX B... CONTRE L'ARRET ORDONNANT LA FERMETURE DEFINITIVE DU DEBIT DE BOISSONS ;

QUE M. Y..., AUQUEL S'EST JOINT EN CAUSE D'APPEL M. A..., SYNDIC A LA LIQUIDATION DE SES BIENS, A ASSIGNE LE NOTAIRE AYMARD EN REPARATION DE SON PREJUDICE, EN LUI REPROCHANT DE N'AVOIR PAS VERIFIE, PREALABLEMENT A LA SIGNATURE DE L'ACTE DE VENTE, LA SITUATION DE LA LICENCE ET DU FONDS AU REGARD DE LA LEGISLATION SUR LES DEBITS DE BOISSONS ;

QUE L'ARRET ATTAQUE A RETENU LA RESPONSABILITE DU NOTAIRE ET A DESIGNE UN EXPERT EN VUE DE L'EVALUATION DU PREJUDICE ;

ATTENDU QUE M. X... REPROCHE A LA COUR D'APPEL D'AVOIR AINSI STATUE, ALORS QUE, SELON LE MOYEN, D'UNE PART, LE NOTAIRE N'EST PAS RESPONSABLE DES INEXACTITUDES DECOULANT DES DECLARATIONS MENSONGERES DES PARTIES, CORROBOREES PAR DES DOCUMENTS ADMINISTRATIFS ;

QU'EN L'ESPECE, LA SUPPRESSION DE LA LICENCE AVAIT ETE DISSIMULEE AU NOTAIRE PAR LE MANDATAIRE DES VENDEURS ET QUE LA VALIDITE DE CETTE LICENCE AVAIT ETE CORROBOREE PAR LES RECEPISSES DE DECLARATION DELIVRES POSTERIEUREMENT A L'ACQUEREUR PAR L'ADMINISTRATION, DE SORTE QUE LE NOTAIRE POUVAIT LEGITIMEMENT CROIRE A LA VALIDITE DE LA LICENCE LITIGIEUSE ET N'AVAIT PAS A PROCEDER A DES RECHERCHES AUPRES DE L'ADMINISTRATION JUDICIAIRE ;

QU'EN DECIDANT LE CONTRAIRE, LA COUR D'APPEL A VIOLE L'ARTICLE 1382 DU CODE CIVIL ;

ALORS QUE, D'AUTRE PART, EN RETENANT QUE LE PREJUDICE NE SE TROUVAIT PAS, EN RAISON DE LA LIQUIDATION DES BIENS, DANS L'ARRET DE L'EXPLOITATION, MAIS DANS LE FAIT QUE LA VENTE PAR LE SYNDIC DE CE QUI RESTE DU FONDS DE COMMERCE SE FERA A UN PRIX INFERIEUR A CELUI QU'AURAIT PRODUIT UN FONDS NON FRAPPE DE FERMETURE ET DOTE D'UNE LICENCE, LA COUR D'APPEL QUI A AINSI ADMIS QUE LA VENTE DU FONDS ETAIT LA CONSEQUENCE DE LA LIQUIDATION DES BIENS, ET NON DE LA FAUTE DU NOTAIRE, A REPARE UN PREJUDICE INDIRECT ET N'A PAS TIRE LES CONSEQUENCES LEGALES DE SES PROPRES CONSTATATIONS ;

MAIS ATTENDU QUE LA COUR D'APPEL A RELEVE QUE LE FONDS DE COMMERCE DE DEBIT DE BOISSONS ETAIT, EN L'ESPECE, UN CABARET DE NUIT QUI, EN RAISON DE LA REGLEMENTATION ET DES SURVEILLANCES AUXQUELLES CE GENRE D'ETABLISSEMENT EST SOUMIS, EST EXPOSE A DES MESURES DE FERMETURE ENTRAINANT LA SUPPRESSION DE LA LICENCE, ET QUE LES VENDEURS ETAIENT DOMICILIES EN CORSE, CE QUI POSAIT NECESSAIREMENT LA QUESTION DE SAVOIR COMMENT ET PAR QUI CE FONDS, SITUE A TOULOUSE, AVAIT ETE PRECEDEMMENT EXPLOITE ;

QU'ELLE A EXACTEMENT ENONCE QUE LE NOTAIRE APPELE A DRESSER L'ACTE DE VENTE D'UN TEL FONDS AVAIT L'OBLIGATION, POUR SATISFAIRE A SON DEVOIR DE CONSEIL, DE VERIFIER PREALABLEMENT LA SITUATION DE CE FONDS AU REGARD DE LA LEGISLATION SUR LES DEBITS DE BOISSONS, EN S'ADRESSANT TANT AU PROCUREUR DE LA REPUBLIQUE QU'A L'ADMINISTRATION FISCALE COMPETENTE, POUR S'ASSURER QUE LE FONDS NE FAISAIT L'OBJET D'AUCUNE DECISION LIMITANT OU EMPECHANT SON EXPLOITATION NORMALE ET ENTRAINANT LE RETRAIT DE LA LICENCE ;

QU'AYANT CONSTATE QU'UNE TELLE VERIFICATION AURAIT PERMIS A M. X... DE CONNAITRE L'EXISTENCE DE LA DECISION DE FERMETURE DONT LE CARACTERE DEFINITIF DEPENDAIT DU POURVOI EN COURS ET POUVAIT ENTRAINER A BREVE ECHEANCE LA SUPPRESSION DE LA LICENCE, LA COUR D'APPEL A PU EN DEDUIRE QU'EN NE PROCEDANT PAS A CETTE VERIFICATION QUI AURAIT EU POUR BUT DE METTRE EVENTUELLEMENT EN GARDE M. Y... CONTRE LES CONSEQUENCES D'UNE TELLE ACQUISITION, LE NOTAIRE AVAIT COMMIS UNE FAUTE ;

QU'AYANT RETENU QUE LE PREJUDICE DE M. Y... CONSISTAIT, EN PREMIER LIEU, DANS LE FAIT QUE CELUI-CI AVAIT ACQUIS LE FONDS DE COMMERCE AU PRIX D'UN DEBIT DE BOISSONS EXPLOITABLE, TANDIS QUE LA VENTE, PAR LE SYNDIC, DE CE QUI RESTE DE CE FONDS, EN RAISON DE LA MESURE DE FERMETURE ET DE LA SUPPRESSION DE LA LICENCE, NE SE FERA QU'AU PRIX D'UN SIMPLE PAS DE PORTE, ET EN SECOND LIEU, DANS LES FRAIS D'ACQUISITION ET LES DEPENSES DE TRANSFORMATION ET D'EQUIPEMENT DU FONDS DANS LA MESURE OU CELLES-CI AVAIENT ETE ENGAGEES AVANT QUE L'ACQUEREUR EUT CONNAISSANCE DE L'ALEA QUI AFFECTAIT L'EXPLOITATION, LA COUR D'APPEL, QUI N'A PAS REPARE UN PREJUDICE INDIRECT, ET QUI A PU ESTIMER QUE CE PREJUDICE ETAIT LA CONSEQUENCE DE LA FAUTE DU NOTAIRE, A LEGALEMENT JUSTIFIE SA DECISION SUR CE POINT ;

QU'AINSI, LE MOYEN N'EST FONDE EN AUCUNE DE SES BRANCHES ;

PAR CES MOTIFS : REJETTE LE POURVOI.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 84-15015
Date de la décision : 10/12/1985
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Analyses

1) OFFICIERS PUBLICS OU MINISTERIELS - Notaire - Responsabilité - Obligation de vérifier - Vente - Débit de boissons - Situation du fonds au regard de la législation sur les débits de boissons.

DEBIT DE BOISSONS - Licence - Vente du fonds - Décision entraînant la suppression de la licence - Notaire - Obligation de vérifier.

Le notaire, chargé de dresser l'acte de vente d'un débit de boissons, qui peut faire l'objet de mesures de fermeture entraînant la suppression de la licence et dont les vendeurs étaient domiciliés loin de l'endroit où se trouvait ce fonds de commerce - ce qui posait la question de savoir comment et par qui il avait été précédemment exploité - a l'obligation, pour satisfaire à son devoir de conseil, de vérifier préalablement la situation de ce fonds de commerce au regard de la législation sur les débits de boissons, en s'adressant tant au Procureur de la République qu'à l'administration fiscale compétente pour s'assurer qu'il ne faisait l'objet d'aucune décision limitant ou empêchant son exploitation normale et entraînant la suppression de la licence.

2) OFFICIERS PUBLICS OU MINISTERIELS - Notaire - Responsabilité - Dommage - Réparation - Préjudice direct - Vente - Débit de boissons - Omission de vérification du maintien de la licence - Suppression postérieure à la vente - Revente au prix d'un simple pas de porte.

RESPONSABILITE CONTRACTUELLE - Dommage - Préjudice direct - Vente - Débit de boissons - Notaire - Omission de vérification du maintien de la licence - Suppression postérieure à la vente - Revente au prix d'un simple pas de porte.

Ayant retenu que le préjudice subi par l'acquéreur d'un débit de boissons - dont la licence avait été supprimée après la vente, mais en raison d'une situation antérieure à l'acquisition - consistait, d'une part, dans le fait qu'il avait acquis le fonds au prix d'un débit de boissons exploitable, qui n'avait pu être revendu ensuite du fait de la suppression de la licence qu'au prix d'un simple pas de porte, d'autre part, dans les frais afférents au fonds engagés par l'acheteur avant qu'il n'ait eu connaissance de l'aléa l'affectant, une Cour d'appel peut en déduire que ce préjudice - qui n'était pas indirect - était la conséquence de la faute du notaire rédacteur de l'acte de vente, qui avait omis de vérifier si la licence n'était pas susceptible d'être supprimée.


Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Toulouse, chambre 1, 16 avril 1984

A rapprocher : Cour de cassation, chambre civile 1, 1985-06-04 Bulletin 1985 I n° 179 p. 162 (Rejet) et l'arrêt cité.


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 10 déc. 1985, pourvoi n°84-15015, Bull. civ. 1985 I n° 340 p. 305
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 1985 I n° 340 p. 305

Composition du Tribunal
Président : Pdt. M. Joubrel
Avocat général : P.Av.Gén. M. Sadon
Rapporteur ?: Rapp. M. Jégu
Avocat(s) : Av. demandeur : SCP Boré et Xavier

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1985:84.15015
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