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25/07/1984 | FRANCE | N°83-12011

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 25 juillet 1984, 83-12011


Sur le moyen unique, pris en ses deux premières branches :

Attendu que, le 20 juin 1978, aux établissements Hivert, une charpente métallique s'est décrochée d'un palan et est tombée sur l'ouvrier X... qui a été tué ;

Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir retenu une faute inexcusable à sa charge, alors que, d'une part, la faute retenue ne présentait pas un caractère de gravité exceptionnelle puisque les ouvriers de l'entreprise disposaient de tout le matériel nécessaire pour manipuler, en toute sécurité, les éléments de charpente sur le

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Sur le moyen unique, pris en ses deux premières branches :

Attendu que, le 20 juin 1978, aux établissements Hivert, une charpente métallique s'est décrochée d'un palan et est tombée sur l'ouvrier X... qui a été tué ;

Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir retenu une faute inexcusable à sa charge, alors que, d'une part, la faute retenue ne présentait pas un caractère de gravité exceptionnelle puisque les ouvriers de l'entreprise disposaient de tout le matériel nécessaire pour manipuler, en toute sécurité, les éléments de charpente sur lesquels ils travaillaient, et qu'ils n'en ont pas fait usage, sans qu'il fût possible de leur rappeler leurs obligations à cet égard, par la voie d'instructions générales, chaque pièce manipulée posant un problème particulier, et alors que, d'autre part, la faute de l'employeur n'a pas été déterminante dans la réalisation du dommage, puisque la victime, circulant sans raison sérieuse, en dehors des couloirs de sécurité qui lui étaient assignés, a concouru, par son imprudence, à cette réalisation ;

Mais attendu qu'il résulte des constatations de l'arrêt attaqué que l'élément de charpente qui a causé la mort de M. X... est tombé parce que l'employeur avait négligé de rappeler aux ouvriers, par tout moyen approprié, la nécessité de fixer les pièces métalliques en cours de manipulation de manière à empêcher qu'elles puissent se décrocher inopinément en cours de manoeuvre, qu'il appartenait également à l'employeur, d'exercer une surveillance plus attentive sur les conditions dans lesquelles, au sein de l'entreprise, se déroulaient ces opérations ; qu'une telle surveillance aurait créé chez les salariés une conscience plus exacte des règles de sécurité et de l'obligation de s'y soumettre ; que la Cour d'appel en déduit que l'employeur, en méconnaissant ainsi les obligations qui lui incombaient d'édicter des règles efficaces de sécurité, de veiller à leur bonne exécution, et d'instruire le personnel appelé à les appliquer, a commis une faute d'une gravité exceptionnelle, présentant tous les caractères de la faute inexcusable ; que l'arrêt attaqué, tout en admettant que M. X... a commis une faute en circulant en dehors des couloirs de sécurité qui lui étaient assignés, énonce que cette pratique était constante de la part du personnel, que l'employeur la connaissait, mais n'avait pris aucune disposition pour y mettre fin, et que cette imprudence n'a donc pas joué un rôle déterminant dans la réalisation du dommage, que la Cour d'appel a ainsi justifié sa décision sans encourir les griefs du pourvoi ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE les première et deuxième branches du moyen unique ;

Mais sur la troisième branche du même moyen :

Vu l'article L. 468 du Code de la sécurité sociale ;

Attendu que la majoration de rente en matière de faute inexcusable doit être fixée en considération du degré de gravité de celle-ci ; que, dans l'appréciation de ce degré de gravité il doit être tenu compte, s'il y a lieu, du comportement de la victime, susceptible d'atténuer la gravité de la faute inexcusable de l'employeur ;

Attendu que la Cour d'appel après avoir rappelé l'imprudence commise par X... et ayant consisté pour lui, à se trouver, sans motifs sérieux, dans un secteur de l'usine rendu dangereux par les travaux qui s'y exécutaient, n'en a pas moins fixé au maximum la majoration de la rente mise à la charge de l'employeur ; en quoi elle a violé l'article susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais uniquement sur la fixation de la majoration de la rente, les autres dispositions de l'arrêt était expressément maintenues, l'arrêt rendu entre les parties le 19 janvier 1983 par la Cour d'appel d'Angers, remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties au même et semblable état où elles étaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la Cour d'appel de Rennes.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 83-12011
Date de la décision : 25/07/1984
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Analyses

1) SECURITE SOCIALE ACCIDENTS DU TRAVAIL - Faute inexcusable de l'employeur - Définition - Défaut de surveillance - Non rappel des consignes de sécurité.

SECURITE SOCIALE ACCIDENTS DU TRAVAIL - Faute inexcusable de l'employeur - Exonération - Faute de la victime - Faute dérivant nécessairement de celle de l'employeur - * SECURITE SOCIALE ACCIDENTS DU TRAVAIL - Faute inexcusable de l'employeur - Exonération - Faute de la victime - Lien de causalité avec l'accident.

La mort d'un ouvrier par suite de la chute d'un élément de charpente est due à la faute inexcusable de l'employeur dès lors que ce dernier avait négligé de rappeler à ses salariés, par tout moyen approprié, la nécessité de fixer les pièces métalliques en cours de manipulation de manière à empêcher qu'elles puissent se décrocher inopinément en cours de manoeuvre et qu'il lui appartenait d'exercer une surveillance plus attentive sur les conditions dans lesquelles se déroulaient ces opérations au sein de l'entreprise, ce qui aurait créé chez les salariés une conscience plus exacte des règles de sécurité et de l'obligation de s'y soumettre, méconnaissant par là même les obligations qui lui incombaient d'édicter des règles efficaces de sécurité, de veiller à leur bonne exécution et d'instruire le personnel appelé à les appliquer. Et l'imprudence commise par la victime en circulant en dehors des couloirs de sécurité qui lui étaient assignés n'a pas joué un rôle déterminant dans la réalisation du dommage dès lors que cette pratique était constante de la part du personnel et que l'employeur qui la connaissait n'avait pris aucune disposition pour y mettre fin.

2) SECURITE SOCIALE ACCIDENTS DU TRAVAIL - Faute inexcusable de l'employeur - Majoration de l'indemnité - Montant - Détermination - Incidence de la faute de la victime.

SECURITE SOCIALE ACCIDENTS DU TRAVAIL - Faute inexcusable de l'employeur - Majoration de l'indemnité - Montant - Détermination - Pouvoirs des juges du fond.

La majoration de rente en matière de faute inexcusable doit être fixée en considération du degré de gravité de celle-ci et, dans l'appréciation de ce degré de gravité, il doit être tenu compte, s'il y a lieu, du comportement de la victime susceptible d'atténuer la gravité de la faute inexcusable. Les juges ne sauraient donc, tout en retenant l'imprudence commise par un salarié, fixer au maximum la majoration de rente mise à la charge de l'employeur.


Références :

Code de la Sécurité Sociale L468

Décision attaquée : Cour d'appel d'Angers, 19 janvier 1983

(1) A rapprocher : Cour de Cassation, chambre sociale, 1980-05-21, Bulletin 1980 V N° 457 p. 346 (Cassation). Cour de Cassation, Assemblée plénière, 1980-07-18, Bulletin 1980 N° 5 p. 9 (Cassation). Cour de Cassation, chambre sociale, 1984-02-01, Bulletin 1984 V N° 40 p. 33 (Cassation) et les arrêts cités. Cour de Cassation, chambre sociale, 1984-03-26, Bulletin 1984 V N° 118 p. 91 (Rejet) et les arrêts cités. (2) Cour de Cassation, chambre sociale, 1979-05-16, Bulletin 1979 V N° 420 p. 305 (Cassation).


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 25 jui. 1984, pourvoi n°83-12011, Bull. civ. 1984 V N° 323
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 1984 V N° 323

Composition du Tribunal
Président : Pdt. M. Vellieux
Avocat général : Av.Gén. M. Ecoutin
Rapporteur ?: Rapp. M. Chazelet
Avocat(s) : Av. Demandeur : Me Rouvière

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1984:83.12011
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