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09/07/1984 | FRANCE | N°83-12223

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 09 juillet 1984, 83-12223


Sur les premier et deuxième moyens réunis :

Attendu, selon l'arrêt confirmatif attaqué (Bordeaux, 21 mars 1983), que Mme X..., ayant vendu en 1974 un domaine agricole à la Société civile immobilière du domaine de Sermet, dont M. Y... est le gérant, a ultérieurement consenti à celui-ci des avances constatées par une reconnaissance de dette sous seing privé du 6 août 1978, aux termes de laquelle le débiteur s'engageait à restituer les sommes prêtées "au moment de la vente du château" ; qu'après avoir pris, sur autorisation de justice, une inscription provisoire d'hypot

hèque judiciaire sur le domaine, Mme Hayter a formé une demande en paieme...

Sur les premier et deuxième moyens réunis :

Attendu, selon l'arrêt confirmatif attaqué (Bordeaux, 21 mars 1983), que Mme X..., ayant vendu en 1974 un domaine agricole à la Société civile immobilière du domaine de Sermet, dont M. Y... est le gérant, a ultérieurement consenti à celui-ci des avances constatées par une reconnaissance de dette sous seing privé du 6 août 1978, aux termes de laquelle le débiteur s'engageait à restituer les sommes prêtées "au moment de la vente du château" ; qu'après avoir pris, sur autorisation de justice, une inscription provisoire d'hypothèque judiciaire sur le domaine, Mme Hayter a formé une demande en paiement du montant du prêt et en "validation" de l'inscription provisoire ;

Attendu que M. Y... et la Société civile immobilière font grief à l'arrêt d'avoir, pour les condamner au paiement des sommes réclamées, retenu que Mme X..., bénéficiaire d'une reconnaissance de dette, n'avait point à prouver autrement sa créance, alors, selon le premier moyen, "que toute obligation est nulle lorsqu'elle a été contractée sous une condition potestative de la part de celui qui s'oblige, de telle sorte que le débiteur conserve la faculté de ne pas exécuter ; qu'ainsi, la Cour d'appel, qui a constaté que la restitution n'était prévue ; qu'au moment de la vente du château, de sorte que seul le débiteur pouvait empêcher la condition de se réaliser, a, en statuant comme elle l'a fait, violé, par refus d'application, l'article 1174 du Code civil" ; que le deuxième moyen soutient, d'une part, "que, la convention stipulant que la restitution devait intervenir au moment de la vente du château, la Cour d'appel, qui a estimé que la condition telle que stipulée n'entraîne pas la nullité de la convention et demeurait donc licite, a, en prononçant la condamnation incriminée avec effet immédiat, dénaturé l'acte du 6 août 1978 et violé l'article 1134 du Code civil ; d'autre part, que ce qui est dû à terme ne peut être : exigé avant l'échéance du terme, qu'ainsi, la Cour d'appel a violé l'article 1186 du Code civil ; qu'enfin, les juges d'appel n'ont pu, sans se contredire et violer l'article 455 du nouveau Code de procédure civile, admettre que la clause critiquée était valable puisqu'elle ne constituait pas une condition potestative ; de la dette mais seulement de la date de son règlement, et prononcer une condamnation à paiement immédiat, estimant ainsi nécessairement qu'aucune condition n'avait été stipulée" ;

Mais attendu qu'appréciant souverainement l'influence de la clause en litige sur les obligations des parties, l'arrêt retient que la clause de remboursement "au moment de la vente du château" affectait seulement la date du paiement de la dette et non l'existence de l'obligation ; qu'ayant ainsi constaté que la convention laissait à la discrétion des emprunteurs la fixation de l'époque du remboursement, la Cour d'appel, qui n'était pas saisie par ces derniers d'une demande de délai, a pu, sans, encourir les critiques du moyen, les condamner à rembourser le prêt sans délai, par application des articles 1900 et 1901 du Code civil qui dérogent à l'article 1186 de ce code ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le troisième moyen ;

Attendu qu'il est reproché à la Cour d'appel d'avoir, par confirmation du jugement entrepris, "validé" l'inscription provisoire d'hypothèque prise par Mme X..., alors, selon le moyen, "que, d'une part, les juges du fond sont liés par les conclusions des parties et ne peuvent modifier les termes du litige dont ils sont saisis, qu'ainsi, en retenant un moyen tiré de la nullité d'un engagement général et du caractère d'ordre public d'une renonciation à des droits, qui n'avait pas été invoqué, la Cour d'appel a violé l'article 4 du nouveau Code de procédure civile ; alors que, d'autre part, en relevant d'office un moyen qui n'avait fait l'objet d'aucune discussion entre les parties, la Cour d'appel a violé le principe de la contradiction et l'article 16 du nouveau Code de procédure civile ; alors qu'enfin, la renonciation à un droit, fût-il d'ordre public, est toujours possible, à la condition que cette renonciation intervienne après la naissance de ce droit, qu'ainsi, en statuant dans les conditions susvisées, alors que la créancière bénéficiait, aux termes de l'acte de vente, du privilège du vendeur et de l'action résolutoire, la Cour d'appel a violé l'article 1134 du Code civil" ;

Mais attendu que, par motifs adoptés, l'arrêt constate que Mme X... avait été autorisée par ordonnance sur requête à prendre une inscription provisoire d'hypothèque judiciaire et retient que cette personne, qui bénéficie d'un jugement de condamnation, peut, comme tout créancier disposant d'un titre exécutoire, prendre une inscription d'hypothèque judiciaire sur les biens de son débiteur, sans qu'il lui soit besoin de demander au juge la validation d'une hypothèque provisoire ; que la Cour d'appel a ainsi légalement justifié sa décision, abstraction faite des motifs critiqués par le moyen, qui sont surabondants dès lors que M. Y... et la Société civile immobilière Seriner n'avaient pas soutenu, dans leurs conclusions d'appel, que Mme X... aurait renoncé par convention au droit de prendre inscription provisoire ou définitive d'hypothèque judiciaire ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi formé contre l'arrêt rendu le 21 mars 1983 par la Cour d'appel de Bordeaux.


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 83-12223
Date de la décision : 09/07/1984
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Analyses

PRET - Prêt d'argent - Remboursement - Terme - Terme indéterminé - Fixation par les juges du fond.

* CONTRATS ET OBLIGATIONS - Modalités - Conditions - Conditions potestatives - Prêt - Remboursement dépendant de la seule volonté de l'emprunteur.

* CONTRATS ET OBLIGATIONS - Terme - Terme indéterminé - Fixation par les juges du fond.

Ayant souverainement apprécié l'incidence sur les obligations des parties de la clause d'une reconnaissance de dette par laquelle un débiteur s'engageait à restituer les sommes prêtées dans un délai laissé à sa discrétion, la Cour d'appel, qui retient que cette clause affectait seulement la date du paiement de la dette et non l'existence de l'obligation, peut condamner ce débiteur à rembourser le prêt sans délai par application des articles 1900 et 1901 du code civil qui dérogent à l'article 1186 du même code.


Références :

Code civil 1186, 1900, 1901

Décision attaquée : Cour d'appel de Bordeaux, chambre 1, 21 mars 1983

A rapprocher : Cour de Cassation, chambre civile 1, 1976-10-06, Bulletin 1976 I N° 287 p. 232 (Rejet) et les arrêts cités.


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 09 jui. 1984, pourvoi n°83-12223, Bull. civ. 1984 III N° 135
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 1984 III N° 135

Composition du Tribunal
Président : Pdt. M. Léon
Avocat général : Av. Gén. M. Marcelli
Rapporteur ?: Rapp. M. Roche
Avocat(s) : Av. Demandeur : SCP Nicolay

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1984:83.12223
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