Sur le premier moyen :
Vu les articles 1165 du Code civil et 35, 36 du Code de l'industrie cinématographique ;
Attendu qu'il résulte de ces derniers textes que le privilège résultant du contrat de nantissement s'établit par le seul fait de l'inscription au registre de la cinématographie et que le bénéficiaire encaisse seu et directement le montant des produits du film ;
Attendu que, par acte du 15 février 1974, et par "lettre additive" du 5 mars 1975, la société Ciné International a concédé à la société Ursulines Distribution jusqu'au 25 avril 1980 les droits de distribution et d'exploitation, y compris par télévision, du film "Aguirre ou la colère de Dieu" ; que cette société a, par mention sur la même lettre additive, concédé à la société Michèle Dimitri Films (société Dimitri) le "partage à 50-50 de la recette télévision" sur ce film "soit 17,50 %" à la société Dimitri "sur la part revenant" à la société Ursulines Distribution ; que la société Dimitri a, par contrat du 21 novembre 1975, publié le 25 novembre 1975 au registre de la cinématographie, donné en nantissement à la Banque privée de dépôts et de crédit, à concurrence de 200.000 francs, toutes les sommes à provenir de l'exploitation par voie de radiodiffusion ou de télévision du film en cause ; que la liquidation des biens de cette société ayant été prononcée le 28 mars 1977, le syndic et la société Ursulines Distribution, par acte du 30 juin 1977 publié au registre de la cinématographie le 13 septembre 1977, sont convenus de résilier à compter du 28 mars 1977 le contrat du 5 mars 1975 ; que, le 13 septembre 1977, la société nationale de télévision Antenne 2 (Antenne 2) a acquis de la société Ursulines Distribution les droits de diffusion du film "Aguirre ou la colère de Dieu" ;
Attendu que, pour débouter la banque de sa demande, dirigée contre Antenne 2, en paiement de la somme de 200.000 francs, la Cour d'appel énonce "que les redevances données en nantissement à la banque sont donc exclusivement celles auxquelles a pu prétendre la société Michèle Dimitri Films du 21 novembre 1975, date du contrat conclu entre ces deux sociétés, au 28 mars 1977, date d'effet de la convention de résiliation signée le 30 juin 1977 par la société Les Ursulines et le syndic de la liquidation des biens de la société Michèle Dimitri Films, étant observé qu'en raison de sa mise en liquidation des biens à la date du 28 mars 1977, la société Michèle Dimitri Films ne pouvait plus assurer la distribution du film, considérant, par suite, que les sommes dues par Antenne 2, en contrepartie de l'acquisition ultérieure des droits de diffusion du film le 13 septembre 1977, échappent au nantissement dont peut se prévaloir la banque" ;
Attendu qu'en statuant ainsi, alors que la résiliation du contrat du 5 mars 1975 était inopposable à la banque, tiers par rapport à ce contrat et à celui du 30 juin 1977, la Cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le second moyen :
CASSE ET ANNULE l'arrêt rendu entre les parties le 6 mai 1982 par la Cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties au même et semblable état où elles étaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la Cour d'appel de Reims.