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22/05/1984 | FRANCE | N°81-94450

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 22 mai 1984, 81-94450


STATUANT SUR LES POURVOIS FORMES PAR :
- X... ALAIN,
- Y... CLAUDE,
CONTRE UN ARRET DE LA COUR D'APPEL DE VERSAILLES, CHAMBRE CORRECTIONNELLE, DU 23 OCTOBRE 1981, QUI, DANS UNE PROCEDURE SUIVIE CONTRE EUX DU CHEFS DE DIFFAMATION PUBLIQUE ENVERS UN PARTICULIER, A, APRES AVOIR REQUALIFIE LES FAITS EN INJURE NON PUBLIQUE ET DECLARE L'ACTION PUBLIQUE ETEINTE EN APPLICATION DES DISPOSITIONS DE LA LOI D'AMNISTIE DU 4 AOUT 1981, FAIT DROIT A LA DEMANDE EN REPARATION DE Z... JEAN-CLAUDE, PARTIE CIVILE ;
VU LES MEMOIRES PRODUITS EN DEMANDE ET EN DEFENSE ;
JOIGNANT LES POURVOIS EN RAIS

ON DE LEUR CONNEXITE ;
ATTENDU QU'IL RESULTE DE L'ARRET ATTAQ...

STATUANT SUR LES POURVOIS FORMES PAR :
- X... ALAIN,
- Y... CLAUDE,
CONTRE UN ARRET DE LA COUR D'APPEL DE VERSAILLES, CHAMBRE CORRECTIONNELLE, DU 23 OCTOBRE 1981, QUI, DANS UNE PROCEDURE SUIVIE CONTRE EUX DU CHEFS DE DIFFAMATION PUBLIQUE ENVERS UN PARTICULIER, A, APRES AVOIR REQUALIFIE LES FAITS EN INJURE NON PUBLIQUE ET DECLARE L'ACTION PUBLIQUE ETEINTE EN APPLICATION DES DISPOSITIONS DE LA LOI D'AMNISTIE DU 4 AOUT 1981, FAIT DROIT A LA DEMANDE EN REPARATION DE Z... JEAN-CLAUDE, PARTIE CIVILE ;
VU LES MEMOIRES PRODUITS EN DEMANDE ET EN DEFENSE ;
JOIGNANT LES POURVOIS EN RAISON DE LEUR CONNEXITE ;
ATTENDU QU'IL RESULTE DE L'ARRET ATTAQUE QU'A ETE APPOSEE DANS DIVERS LOCAUX DE LA SOCIETE RANK-XEROX, SUR LES PANNEAUX RESERVES AUX COMMUNICATIONS SYNDICALES, UNE AFFICHE AINSI LIBELLEE " POUR ETRE INFORME-APPELEZ LA CGC-...- BULLETIN PERMANENT D'INFORMATION-TELEPHONE CGC RXF " ;
QUE DIVERS RESPONSABLES DE CETTE SOCIETE AYANT FORME CE NUMERO ONT PU AINSI ENTENDRE, PAR LE CANAL D'UN REPONDEUR AUTOMATIQUE, UN CERTAIN NOMBRE DE PROPOS, PREALABLEMENT ENREGISTRES SUR UNE CASSETTE, QUI LES METTAIENT EN CAUSE ;
QUE, POUR CONSERVER UNE PREUVE DE LA TENEUR DE CES PROPOS, LA SOCIETE RANK-XEROX A REQUIS UN HUISSIER AUX FINS D'EN DRESSER CONSTAT ;
QUE LES 24 ET 26 OCTOBRE ET 14 NOVEMBRE 1979 D'UNE PART, LE 28 NOVEMBRE ET 4 DECEMBRE 1979 D'AUTRE PART, CET HUISSIER A PRIS NOTE DE DEUX COMMUNICATIONS DONT IL A REPRODUIT LE CONTENU DANS DEUX PROCES-VERBAUX ;
ATTENDU QUE Z... JEAN-CLAUDE A PORTE PLAINTE AVEC CONSTITUTION DE PARTIE CIVILE, LE 18 DECEMBRE 1979, CONTRE X, LE TITULAIRE DE LA LIGNE... AYANT DEMANDE A NE PAS FIGURER DANS L'ANNUAIRE DES ABONNES AU TELEPHONE, DU CHEF DE DIFFAMATION ENVERS PARTICULIER, EN VISANT LES ARTICLES 32 DE LA LOI DU 29 JUILLET 1881 DONT L'APPLICATION ETAIT REQUISE ;
ATTENDU QUE LA PLAINTE AVEC CONSTITUTION DE PARTIE CIVILE AINSI QUE LE REQUISITOIRE INTRODUCTION DU PROCUREUR DE LA REPUBLIQUE SONT CONFORMES AUX PRESCRIPTIONS DE L'ARTICLE 50 DE LA LOI PRECITEE ;
ATTENDU QUE LES PROPOS ARTICULES PAR Z... JEAN-CLAUDE SONT LES SUIVANTS : " DEPUIS PLUSIEURS MOIS, EN EFFET, PATRICK A... S'ACHARNAIT ENTRE AUTRES, SUR L'UN DE SES VENDEURS, DONT LE SEUL TORT EST D'ETRE UN DELEGUE DU PERSONNEL ACTIF ; PAS DE CHANCE, LE VENDEUR A EN CE MOMENT D'EXCELLENTS RESULTATS " TU PARLES, ON A DONC ATTENDU UNE OCCASION PROPICE ;
" JEAN-CLAUDE Z..., VOUS SAVEZ LE DEFROQUE L'ANCIEN DELEGUE SYNDICAL ET PROVISOIREMENT CHEF DU PERSONNEL REGIONAL A PARIS II (QUEL CAMELEON) ANNONCE VERBALEMENT LA MISE A PIED DU VENDEUR ;
" MAIS PATRICK A... ET JEAN-CLAUDE Z... N'ETAIENT PAS SEULS ILS ETAIENT ACCOMPAGNES DU CELEBRE CLAUDE B..., LE MERCENAIRE ANTI-SYNDICALISTE BIEN CONNU, C'EST LA SAINTE TRINITE DANS REGLEMENT DE COMPTE A OK CORAL " ON FAIT DANS L'EXPORTATION EN GROS A PARIS II OU LA SAVAK SEMBLE REGNER EN MAITRE " ;
ATTENDU QUE L'INFORMATION A PERMIS D'IDENTIFIER Y... CLAUDE, SECRETAIRE DE LA SECTION CGC DE LA RXF, COMME ETANT LE TITULAIRE DE LA LIGNE... ET X... ALAIN, MEMBRE DU BUREAU DE LADITE SECTION COMME ETANT LE REDACTEUR DES BULLETINS AINSI DIFFUSES QU'IL AVAIT, LUI-MEME, ENREGISTRE ;
ATTENDU QUE PAR ORDONNANCE DU 24 NOVEMBRE 1980, CONFORME AUX REQUISITIONS DU PROCUREUR DE LA REPUBLIQUE, LE JUGE D'INSTRUCTION A RENVOYE DEVANT LE TRIBUNAL CORRECTIONNEL X... COMME AUTEUR PRINCIPAL ET Y... COMME COMPLICE PAR AIDE ET ASSISTANCE DU SEUL DELIT DE DIFFAMATION PUBLIQUE ENVERS UN PARTICULIER EN VISANT LES ARTICLES 23 ALINEA 1, 29 ALINEA 1 ET 32 ALINEA 1 DE LA LOI DU 29 JUILLET 1881 ;
ATTENDU QUE PAR L'ARRET ATTAQUE DU 23 OCTOBRE 1981, LA COUR D'APPEL DE VERSAILLES, AYANT CONSTATE QUE L'ELEMENT DE PUBLICITE RETENU TANT DANS LA CONSTITUTION DE PARTIE CIVILE QUE DANS L'ORDONNANCE DE RENVOI, FAISAIT DEFAUT MAIS QUE LES PROPOS INCRIMINES ETAIENT " INDENIABLEMENT DIFFAMATOIRES ENVERS LE PLAIGNANT, " A RETENU A L'ENCONTRE DES PREVENUS LA CONTRAVENTION PREVUE ET REPRIMEE PAR L'ARTICLE R. 26 11 DU CODE PENAL, DECLARE EN CONSEQUENCE L'ACTION PUBLIQUE ETEINTE EN APPLICATION DES DISPOSITIONS DE L'ARTICLE 1ER DE LA LOI DU 4 AOUT 1981 ET, STATUANT SUR LA SEULE ACTION CIVILE, A FAIT DROIT A LA DEMANDE EN REPARATION DE LA PARTIE CIVILE ;
EN L'ETAT :
SUR LE

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :
, PRIS DE LA VIOLATION DES ARTICLES 50, 53 DE LA LOI DU 29 JUILLET 1881, DU PRINCIPE DE NON-DISQUALIFICATION ET DES DROITS DE LA DEFENSE, VIOLATION DE L'ARTICLE 593 DU CODE DE PROCEDURE PENALE, DEFAUT DE MOTIFS, MANQUE DE BASE LEGALE ;
EN CE QUE L'ARRET ATTAQUE DIT QUE LES FAITS VISES DANS LES POURSUITES SONT CONSTITUTIFS DE LA CONTRAVENTION PREVUE ET REPRIMEE PAR L'ARTICLE R. 26 11 DU CODE PENAL ;
AUX MOTIFS QUE PAR EXCEPTION AUX REGLES DE POURSUITE DEFINIES PAR LA LOI DU 29 JUILLET 1881, LE JUGE N'EST PAS LIE PAR LA QUALIFICATION DONNEE AUX FAITS DANS L'ACTE QUI LE SAISIT ALORS QUE LES DISPOSITIONS IMPERATIVES DES ARTICLES 50 ET 53 DE LA LOI DU 29 JUILLET 1881 INTERDISANT LA DISQUALIFICATION D'UN DELIT DE PRESSE EN UN AUTRE DELIT DE PRESSE LA COUR D'APPEL, SAISIE DU CHEF DE DIFFAMATION, NE POUVAIT SANS VIOLER LA REGLE DE NON-DISQUALIFICATION, APRES AVOIR CONSTATE L'ABSENCE DE PUBLICITE, REQUALIFIER EN INJURE DES PROPOS INITIALEMENT QUALIFIES DE DIFFAMATOIRES ;
AUX MOTIFS QUE LES PROPOS VISES DANS LA PLAINTE ONT UN CARACTERE DIFFAMATOIRE ET INJURIEUX VIS-A-VIS DE Z... ET QUE LES TERMES EMPLOYES A SON EGARD, S'ILS NE CONTIENNENT PAS L'IMPUTATION D'UN FAIT, ONT DIRECTEMENT MIS CELUI-CI EN CAUSE ;
ALORS, D'UNE PART, QU'EN RETENANT A LA FOIS, AU MOINS POUR UNE PARTIE DES PROPOS INCRIMINES, LEUR CARACTERE DIFFAMATOIRE TOUT EN CONSTATANT QUE CES PROPOS NE CONTENAIENT PAS L'IMPUTATION D'UN FAIT, L'ARRET SE CONTREDIT ET QUE CETTE CONTRADICTION EQUIVAUT A UNE ABSENCE DE MOTIFS ;
ALORS, D'AUTRE PART, QU'UN MEME FAIT NE PEUT ETRE POURSUIVI A LA FOIS COMME DIFFAMATION ET COMME INJURE ET QUE LA COUR D'APPEL NE PRECISE PAS, PARMI LES PROPOS QU'ELLE INCRIMINE, LESQUELS ONT UN CARACTERE DIFFAMATOIRE ET LESQUELS ONT LE CARACTERE D'INJURES ;
A) SUR LA PREMIERE BRANCHE DU MOYEN :
ATTENDU QUE CONTRAIREMENT A CE QUI EST ALLEGUE AU MOYEN, LES JUGES DU FOND, APRES AVOIR CONSTATE QUE LES PROPOS JUGES DIFFAMATOIRES N'AVAIENT PAS ETE PROFERES PUBLIQUEMENT, POUVAIENT, SANS MECONNAITRE LE PRINCIPE DE LA NON-DISQUALIFICATION EN MATIERE DES DELITS DE PRESSE QUI RECOIT ICI SA SEULE EXCEPTION, DIRE QUE LES FAITS RETENUS CONSTITUAIENT LA CONTRAVENTION D'INJURE NON PUBLIQUE PREVUE ET REPRIMEE PAR L'ARTICLE R. 26 11 DU CODE PENAL ;
QU'EN EFFET, SI L'INFRACTION POURSUIVIE COMME DIFFAMATION PUBLIQUE, FAUTE DE PUBLICITE, DEGENERE EN CONTRAVENTION DE DIFFAMATION NON PUBLIQUE, CELLE-CI EST ASSIMILEE A L'INJURE NON PUBLIQUE ET REPRIMEE INDIFFEREMMENT SOUS L'UNE OU L'AUTRE DE CES QUALIFICATIONS, D'AUTANT QUE LA LOI DU 1ER JUILLET 1972, SI ELLE A ECARTE DE L'ARTICLE 32 DE LA LOI DU 29 JUILLET 1881 LES DISPOSITIONS RELATIVES A LA REPRESSION DE L'INJURE NON PUBLIQUE, N'EN A PAS POUR AUTANT EXCLU CETTE CONTRAVENTION DU DOMAINE D'APPLICATION DES REGLES PARTICULIERES DE PROCEDURE EDICTEES PAR LA LOI SUR LA PRESSE ;
B) SUR LA SECONDE BRANCHE DU MOYEN :
ATTENDU QUE S'IL EST EXACT QUE L'ARRET ATTAQUE, APRES AVOIR EXPOSE LES MOTIFS DESQUELS IL RESULTAIT " QUE LES PROPOS VISES DANS LA PLAINTE AVAIENT INDENIABLEMENT UN CARACTERE DIFFAMATOIRE ", A ENONCE QUE LES TERMES EMPLOYES A L'EGARD DE Z... JEAN-CLAUDE, " S'ILS NE CONTIENNENT PAS L'IMPUTATION D'UN FAIT, ONT DIRECTEMENT MIS CELUI-CI EN CAUSE ", IL SE DEDUIT DE LA DECISION CRITIQUEE QUE LES JUGES DU FOND ONT SIMPLEMENT ESTIME QU'IL N'Y AVAIT PAS LIEU DE RETENIR SUR LE TERRAIN DE LA BONNE FOI OU DE LA PROVOCATION REVENDIQUEES PAR LES PREVENUS LES CIRCONSTANCES DANS LESQUELLES UN ANCIEN DELEGUE SYNDICAL ET DELEGUE DU PERSONNEL, C... ETIENNE, AVAIT FAIT L'OBJET D'UNE PROCEDURE DISCIPLINAIRE QUI AURAIT ETE A L'ORIGINE DES PROPOS INCRIMINES ;
QU'IL S'ENSUIT QU'IL NE SAURAIT Y AVOIR DE CONTRADICTION DE NATURE A VICIER L'ARRET ENTRE DES MOTIFS QUI CONSTATENT LE CARACTERE DIFFAMATOIRE DES FAITS POURSUIVIS ET UN MOTIF QUI ECARTE UN FAIT QUI AURAIT ETE DE NATURE S'IL AVAIT ETE ETABLI A SERVIR DE BASE A UNE EVENTUELLE RECONNAISSANCE DE LA BONNE FOI OU DE LA PROVOCATION INVOQUEES PAR LES PREVENUS ;
QUE, POUR AUSSI REGRETTABLE QUE SOIT LA FORMULATION ADOPTEE PAR LA COUR D'APPEL, LES GRIEFS ALLEGUES AU MOYEN NE SAURAIENT ETRE EN CONSEQUENCE RETENUS ;
D'OU IL SUIT QUE LE MOYEN NE PEUT QU'ETRE ECARTE ;
SUR LE
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :
, PRIS DE LA VIOLATION DES ARTICLES 23, 32 1, 33 2 DE LA LOI DU 29 JUILLET 1881, 593 DU CODE DE PROCEDURE PENALE, DEFAUT DE MOTIFS, MANQUE DE BASE LEGALE ;
EN CE QUE L'ARRET ATTAQUE DECIDE QUE LA DIFFUSION PAR REPONDEUR TELEPHONIQUE ENTRE DANS LE CADRE DEFINI PAR L'ARTICLE 23 DE LA LOI DU 29 JUILLET 1881 BIEN QUE LE SUPPORT DE L'ECRIT (OU DE LA PAROLE) N'AIT PAS ETE VENDU OU DISTRIBUE, MIS EN VENTE OU EXPOSE ;
AUX MOTIFS QUE L'ENREGISTREMENT SUR CASSETTE DOIT ETRE ASSIMILE AU SUPPORT DE L'ECRIT VISE PAR CE TEXTE ET QUE LA DIFFUSION DE SON TEXTE MEME NON PUBLIQUE EST SUSCEPTIBLE D'ETRE SANCTIONNEE PENALEMENT, QU'EN OUTRE, LES IMPRIMES VISES PAR L'ARTICLE 23 PRECITE DOIVENT S'ENTENDRE DE TOUTE REPRODUCTION, QUEL QUE SOIT LE PROCEDE TECHNIQUE UTILISE ;
ALORS QUE LES TEXTES D'INCRIMINATION DOIVENT ETRE INTERPRETES STRICTEMENT ET QU'IL N'APPARTIENT PAS AUX TRIBUNAUX DE PRONONCER PAR ANALOGIE ;
QUE POUR ETRE PUNISSABLES, LES DELITS PREVUS PAR LES ARTICLES 32 1 ET 33 2 DE LA LOI DU 29 JUILLET 1881 DOIVENT AVOIR ETE REALISES PAR L'UN DES MOYENS LIMITATIVEMENT SPECIFIES DANS L'ARTICLE 23 DE LA MEME LOI ET QU'EN L'ESPECE, IL EST CONSTANT ET NON CONTESTE QUE LE SUPPORT DE L'ECRIT (OU DE LA PAROLE) N'A ETE NI DISTRIBUE, NI MIS EN VENTE, NI VENDU, NI EXPOSE ;
QUE LE SEUL FAIT QU'IL AIT ETE DIFFUSE PAR VOIE D'INFORMATIONS TELEPHONEES STRICTEMENT RESERVEES AU SEUL PERSONNEL DE L'ENTREPRISE, EXCLUT QUE L'ENUMERATION LIMITATIVE DE L'ARTICLE 23 DE LA LOI PUISSE LUI ETRE ETENDUE PAR ASSIMILATION ;
ATTENDU QUE L'ARRET ATTAQUE A ENONCE, A BON DROIT, QUE " LES MEMBRES D'UNE ENTREPRISE, QUELQUE NOMBREUX QU'ILS SOIENT, NE CONSTITUENT PAS LE PUBLIC AU SENS DE L'ARTICLE 23 DE LA LOI DU 29 JUILLET 1881 " ET A, EN CONSEQUENCE, COMME IL ETAIT EN SON POUVOIR DE LE FAIRE, DISQUALIFIE LES FAITS DE DIFFAMATION PUBLIQUE EN INJURES NON PUBLIQUES ;
QU'IL S'EN SUIT QUE LES DEMANDEURS NE SONT PAS FONDES A INVOQUER UNE VIOLATION DE L'ARTICLE 23 PRECITE DONT L'ARRET A JUSTEMENT ECARTE L'APPLICATION ALORS MEME QUE LEDIT ARRET AURAIT PAR AILLEURS ENONCE, DANS UN MOTIF ERRONE MAIS SURABONDANT, " QUE L'INJURE ET LA DIFFAMATION NON PUBLIQUE NE SONT PUNISSABLES QU'A LA CONDITION D'AVOIR ETE COMMIS PAR L'UN DES MOYENS DUDIT ARTICLE 23 " ;
QU'ENFIN, LA COUR D'APPEL A FAIT UNE EXACTE APPLICATION DE LA LOI EN RETENANT LA CONTRAVENTION D'INJURES NON PUBLIQUES, LES PROPOS QUALIFIES DE DIFFAMATOIRES S'ILS VISAIENT DES PERSONNES AUTRES QUE CELLES QUI ECOUTAIENT LES CASSETTES LITIGIEUSES AYANT ETE, AINSI QUE CELA RESSORT A L'EVIDENCE, DES CONSTATATIONS DE L'ARRET, TENUS DANS DES CONDITIONS EXCLUSIVES DE TOUT CARACTERE SECRET OU CONFIDENTIEL ;
QUE LE MOYEN NE SAURAIT EN CONSEQUENCE ETRE ACCUEILLI ;
SUR LE
QUATRIEME MOYEN DE CASSATION :
, PRIS DE LA VIOLATION DES ARTICLES 43 ALINEA 2 DE LA LOI DU 29 JUILLET 1881, 60 DU CODE PENAL, 593 DU CODE DE PROCEDURE PENALE, INSUFFISANCE DE MOTIFS, MANQUE DE BASE LEGALE ;
EN CE QUE L'ARRET ATTAQUE DECIDE DE RETENIR Y... DANS LES LIENS DE LA PREVENTION EN QUALITE DE CO-AUTEUR ;
AUX MOTIFS QUE CE DERNIER, TITULAIRE DE L'ABONNEMENT TELEPHONIQUE, CONNAISSAIT AVANT LEUR DIFFUSION LES TEXTES DES INFORMATIONS ENREGISTREES SUR CASSETTE ;
QUE X... A PRECISE QUE LA SYNTHESE DE CES INFORMATIONS ETAIT GENERALEMENT FAITE LORS DE REUNIONS DU BUREAU SYNDICAL, QUE LE MODE DE PARTICIPATION DE CHACUN NE PEUT GUERE ETRE APPRECIE EN TERMES INEGAUX ;
ALORS QU'IL RESULTE DE L'INSTRUCTION QUE Y... N'AVAIT CONNAISSANCE DES ENREGISTREMENTS QU'APRES LEUR MISE EN PLACE ET LE BRANCHEMENT DU REPONDEUR ET QUE L'ARRET ATTAQUE NE PRECISE PAS LES FAITS DONT IL DEDUIT QUE LE DEMANDEUR AVAIT CONNAISSANCE DES TEXTES AVANT LEUR DIFFUSION ;
ET ALORS QU'EN TOUTE HYPOTHESE, LE SEUL FAIT QUE Y... AIT PARTICIPE AUX REUNIONS DE SYNTHESE DES INFORMATIONS NE SUFFIT PAS A LUI CONFERER LA QUALITE D'AUTEUR ;
ATTENDU QUE LA COUR D'APPEL QUI N'ETAIT PAS LIEE SUR CE POINT PAR L'ORDONNANCE DE RENVOI, A PU ESTIMER QUE, COMPTE TENU DES CIRCONSTANCES DE FAIT SOUVERAINEMENT APPRECIEES PAR ELLE, QUE Y... DEVAIT ETRE RETENU DANS LE LIEN DE LA PREVENTION COMME CO-AUTEUR ET NON PAS COMME COMPLICE DE L'INFRACTION POURSUIVIE ;
QU'EN EFFET, CONTRAIREMENT A CE QUI EST ALLEGUE AU MOYEN, IL APPARTIENT AUX JUGES DU FOND D'APPRECIER SOUVERAINEMENT, AU VU DES ELEMENTS DE LA CAUSE, LE MODE DE PARTICIPATION AU FAIT INCRIMINE DES PERSONNES POURSUIVIES ;
ATTENDU QUE, PAR AILLEURS, LA COUR DE CASSATION EST A MEME DE S'ASSURER QUE LES JUGES DU FOND ONT MOTIVE LEUR DECISION CONTRAIREMENT AUX ALLEGATIONS DU MOYEN ;
QU'AU SURPLUS, L'ACTION CIVILE ETANT DESORMAIS SEULE EN JEU, Y... EST SANS INTERET A CRITIQUER CETTE DISPOSITION DE L'ARRET ATTAQUE ;
D'OU IL SUIT QUE LE MOYEN NE SAURAIT ETRE ACCUEILLI ;
MAIS SUR LE
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
, PRIS DE LA VIOLATION DES ARTICLES 50 ET 53 DE LA LOI DU 29 JUILLET 1881, DU PRINCIPE DE NON-DISQUALIFICATION ET DES DROITS DE LA DEFENSE, VIOLATION DE L'ARTICLE 593 DU CODE DE PROCEDURE PENALE, DEFAUT DE MOTIFS, MANQUE DE BASE LEGALE ;
" EN CE QUE L'ARRET ATTAQUE A REFUSE DE PRONONCER LA NULLITE DES POURSUITES EN RAISON DE LA DISQUALIFICATION EN DIFFAMATION, OPEREE PAR LE REQUISITOIRE DEFINITIF, L'ORDONNANCE DE RENVOI ET LES CITATIONS DEVANT LE TRIBUNAL CORRECTIONNEL ET LA COUR D'APPEL, DE CERTAINS PROPOS INITIALEMENT QUALIFIES D'INJURES PUBLIQUES ;
" AUX MOTIFS QUE LE MAGISTRAT INSTRUCTEUR AVAIT LA FACULTE DE RETENIR LA QUALIFICATION QUI SEMBLAIT LA MIEUX FONDEE ET QUE L'ARTICLE 53 DE LA LOI DU 29 JUILLET 1881 N'ENVISAGE QUE LES SEULES CITATIONS INTRODUCTIVES D'INSTANCE ;
" ALORS, D'UNE PART, QUE LA QUALIFICATION EST FIXEE PAR LE REQUISITOIRE INTRODUCTIF JUSQU'AU TERME DE LA POURSUITE ET QUE LE PRINCIPE POSE PAR L'ARTICLE 50 DE LA LOI SUR LA PRESSE INTERDIT LA DISQUALIFICATION D'UN DELIT DE PRESSE EN UN AUTRE DELIT DE PRESSE ;
" ALORS, D'AUTRE PART, QU'EN MATIERE DE PRESSE, LA JURIDICTION DE JUGEMENT EST SAISIE NON PAR L'ORDONNANCE DE RENVOI MAIS PAR LA CITATION PRECEDEE OU NON D'UNE INFORMATION ;
QUE CETTE CITATION NE PEUT DONC, PAS PLUS QUE LE REQUISITOIRE DEFINITIF OU L'ORDONNANCE DE RENVOI, MODIFIER LA QUALIFICATION PORTEE AU REQUISITOIRE DEFINITIF ;
" VU LESDITS ARTICLES ;
ATTENDU QU'EN MATIERE D'INFRACTIONS A LA LOI SUR LA PRESSE, LE REQUISITOIRE INTRODUCTIF OU LA PLAINTE AVEC CONSTITUTION DE PARTIE CIVILE, LORSQUE CELLE-CI A MIS L'ACTION PUBLIQUE EN MOUVEMENT, FIXENT IRREVOCABLEMENT LA NATURE ET L'ETENDUE DE LA POURSUITE ;
QU'IL S'ENSUIT QUE LE JUGE D'INSTRUCTION SAISI D'UN DELIT DE PRESSE NE PEUT MODIFIER, D'APRES LES RESULTATS DE L'INFORMATION, LA QUALIFICATION ORIGINAIREMENT DONNEE AUX FAITS POURSUIVIS, SAUF LES CAS OU LA QUALIFICATION NOUVELLE SERAIT FONDEE SUR UN TEXTE DE DROIT COMMUN OU BIEN, LORSQUE FAUTE D'ELEMENTS CARACTERISANT LA PUBLICITE, LE DELIT DE DIFFAMATION PUBLIQUE SERAIT SUSCEPTIBLE DE CONSTITUER LA CONTRAVENTION DE DIFFAMATION NON PUBLIQUE, LAQUELLE EST ASSIMILEE A L'INJURE NON PUBLIQUE ;
ATTENDU QU'IL APPERT DES PIECES DE LA PROCEDURE QUE L'ACTION PUBLIQUE A ETE MISE EN MOUVEMENT PAR LA CONSTITUTION DE PARTIE CIVILE DE Z... JEAN-CLAUDE ;
QUE CE DERNIER, ARTICULAIT UN CERTAIN NOMBRE DE FAITS QU'IL QUALIFIAIT LES UNS DE DIFFAMATION PUBLIQUE ENVERS PARTICULIER, LES AUTRES D'INJURES PUBLIQUES ENVERS PARTICULIER ET VISAIT COMME TEXTES DE LOI DONT L'APPLICATION ETAIT REQUISE LES ARTICLES 32 ET 33 DE LA LOI DU 29 JUILLET 1881 ;
QUE LE JUGE D'INSTRUCTION A INCULPE X... ET Y... DES DEUX INFRACTIONS CI-DESSUS SPECIFIEES ;
QUE PAR ORDONNANCE CONFORME AUX REQUISITIONS DU PROCUREUR DE LA REPUBLIQUE IL A RENVOYE LES DEUX INCULPES DEVANT LE TRIBUNAL CORRECTIONNEL DU SEUL CHEF DE DIFFAMATION PUBLIQUE ENVERS PARTICULIER ;
QUE CE FAISANT, LE MAGISTRAT INSTRUCTEUR QUI N'A D'AILLEURS PAS MOTIVE SA DECISION, A IMPLICITEMENT MAIS NECESSAIREMENT REQUALIFIE LE DELIT D'INJURES PUBLIQUES EN DIFFAMATION PUBLIQUE ENVERS PARTICULIER ;
ATTENDU QUE LA COUR D'APPEL A REFUSE DE FAIRE DROIT AUX CONCLUSIONS REGULIEREMENT PRODUITES PAR LES PREVENUS QUI TENDAIENT A VOIR DECLARER NULLES LES POURSUITES ET LES CITATIONS A COMPARAITRE ;
ATTENDU QUE LES JUGES DU FOND ONT PU, A BON DROIT, DECLARER QUE LES CITATIONS CRITIQUEES, ETANT SIMPLEMENT INDICATIVES DE DATE, N'AVAIENT PAS A SE CONFORMER AUX PRESCRIPTIONS DE L'ARTICLE 53 DE LA LOI DU 29 JUILLET 1881 ;
QU'EN EFFET, C'EST L'ORDONNANCE DE RENVOI QUI, A L'ISSUE DE L'INFORMATION, SAISIT LA JURIDICTION DE JUGEMENT DE LA POURSUITE DONT LA NATURE ET L'ETENDUE ONT ETE FIXEES PAR LA CONSTITUTION DE PARTIE CIVILE OU LE REQUISITOIRE INTRODUCTIF ;
MAIS ATTENDU QUE LA COUR NE POUVAIT, SANS MECONNAITRE LE SENS ET LA PORTEE DU PRINCIPE CI-DESSUS RAPPELE, REFUSER DE PRONONCER LA NULLITE DES POURSUITES AU MOTIF QUE " LORS DE LA CLOTURE DE L'INFORMATION LE MAGISTRAT INSTRUCTEUR AVAIT LA FACULTE DE RETENIR LA QUALIFICATION QUI SEMBLAIT LA MIEUX FONDEE AU POINT DE VUE JURIDIQUE " ALORS QUE LA CONSTITUTION DE PARTIE CIVILE ET LE REQUISITOIRE INTRODUCTIF AVAIENT IRREVOCABLEMENT FIXE LES POINTS SUR LESQUELS LES PREVENUS AURAIENT A SE DEFENDRE ET, SAUF DECISION DE NON-LIEU PARTIEL, DEFINITIVEMENT DELIMITE LA POURSUITE ;
D'OU IL SUIT QUE LA CASSATION EST ENCOURUE DE CE CHEF, LA COUR D'APPEL N'AYANT PAS, DE SURCROIT, COMME ELLE EN AVAIT LE POUVOIR, STATUE SUR LA PREVENTION TELLE QU'ELLE RESULTAIT DE LA PLAINTE AVEC CONSTITUTION DE PARTIE CIVILE OU DU REQUISITOIRE INTRODUCTIF ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE L'ARRET DE LA COUR D'APPEL DE VERSAILLES, EN DATE DU 23 OCTOBRE 1981, ET POUR ETRE STATUE A NOUVEAU CONFORMEMENT A LA LOI, SUR L'ACTION CIVILE DEMEUREE SEULE EN JEU, RENVOIE LA CAUSE ET LES PARTIES DEVANT LA COUR D'APPEL D'AMIENS, A CE DESIGNEE PAR DELIBERATION SPECIALE PRISE EN CHAMBRE DU CONSEIL.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 81-94450
Date de la décision : 22/05/1984
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

1) PRESSE - Procédure - Disqualification - Délit de diffamation publique en contravention d'injures non publiques - Nécessité.

L'article 466 du Code de Procédure pénale est applicable aux jugements des délits prévus par la loi du 29 juillet 1881. Il s'ensuit que si aux termes des débats l'élément constitutif de la publicité n'apparaît pas établi en matière de diffamation, les juges du fond doivent disqualifier les faits en contravention d'injures non publiques (1).

2) PRESSE - Injures - Injures non publiques - Moyens - Répondeur automatique - Infraction constituée - Conditions.

Les propos diffamatoires ou injurieux transmis au moyen du téléphone par l'intermédiaire d'un répondeur automatique alimenté par une cassette enregistrée ne tombent sous le coup de la loi que s'ils concernent ceux qui les écoutent ou s'il s'agit de tiers que s'ils ont été tenus dans des conditions exclusives de tout caractère secret ou confidentiel (2).

3) PRESSE - Procédure - Juridictions correctionnelles - Pouvoirs - Mode de participation du prévenu aux faits spécifiés et qualifiés.

Même dans une poursuite exercée en vertu de la loi du 29 juillet 1881, la juridiction correctionnelle a le pouvoir d'apprécier le mode de participation du prévenu aux faits spécifiés et qualifiés dans ladite poursuite, les restrictions que la loi précitée impose aux pouvoirs de cette juridiction étant relatives uniquement à la qualification par rapport au fait incriminé (3).

4) PRESSE - Procédure - Instruction - Ordonnance de renvoi - Disqualification ordonnée par le juge d'instruction - Pouvoirs de la juridiction de jugement.

Encourt la cassation l'arrêt qui après avoir constaté que le juge d'instruction a requalifié des faits poursuivis comme constituant des injures publiques en diffamation publique, n'annule pas l'ordonnance de renvoi et la citation délivrée à la suite de ladite ordonnance et ne statue pas sur la base de faits et des qualifications visées dans la constitution de partie civile ou dans le réquisitoire introductif (4).


Références :

Code de procédure pénale 466
Loi du 29 juillet 1881

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles, chambre correctionnelle, 23 octobre 1981

A rapprocher : (1) Cour de Cassation, chambre criminelle, 1954-06-29 Bulletin criminel 1954 n° 239 p. 408. (1) Cour de Cassation, chambre criminelle, 1975-07-02 Bulletin criminel 1975 n° 175 p. 479. (2) Tribunal correctionnel de Bourges 1934-07-19 Dalloz 34.2.121. Cour de Cassation, chambre criminelle, 1937-08-03 Gazette du Palais 1937.2.556. (2) Cour de Cassation, chambre criminelle, 1979-10-08 Bulletin criminel 1979 n° 272 p. 735. (2) Cour de Cassation, chambre criminelle, 1980-12-02 Bulletin criminel 1980 n° 328 p. 843. (2) Cour de Cassation, chambre criminelle, 1981-01-20 Bulletin criminel 1981 n° 28 p. 88. (3) Cour de Cassation, chambre criminelle, 1920-12-02 Bulletin 328 p. 843. (4) Cour de Cassation, chambre criminelle, 1963-10-10 Bulletin criminel 1963 n° 279 p. 583. (4) Cour de Cassation, chambre criminelle, 1974-01-09 Bulletin criminel 1974 n° 12 p. 28.


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 22 mai. 1984, pourvoi n°81-94450, Bull. crim. criminel 1984 n° 188
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 1984 n° 188

Composition du Tribunal
Président : Pdt. M. Berthiau conseiller le plus ancien
Avocat général : Av.Gén. M. Clerget
Rapporteur ?: Rapp. M. Cruvellié
Avocat(s) : Av. Demandeur : Me Desaché

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1984:81.94450
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