STATUANT SUR LE POURVOI FORME PAR :
- X... KLAUS,
CONTRE UN ARRET DE LA CHAMBRE D'ACCUSATION DE LA COUR D'APPEL DE LYON, EN DATE DU 28 OCTOBRE 1983, QUI, DANS LA PROCEDURE SUIVIE CONTRE LUI POUR CRIMES CONTRE L'HUMANITE, A CONFIRME L'ORDONNANCE DU JUGE D'INSTRUCTION REJETANT SA DEMANDE DE MISE EN LIBERTE ;
VU LES MEMOIRES PRODUITS, EN DEMANDE ET EN DEFENSE ;
SUR LE MOYEN UNIQUE DE CASSATION PROPOSE ET PRIS DE LA VIOLATION DE L'ARTICLE 637 DU CODE D'INSTRUCTION CRIMINELLE ET DE L'ARTICLE 7 DU CODE DE PROCEDURE PENALE, DE L'ARTICLE 8 DE LA DECLARATION DES DROITS DE L'HOMME A LAQUELLE SE REFERE LE PREAMBULE DE LA CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958, DE L'ARTICLE 66 DE LADITE CONSTITUTION, DE L'ARTICLE 6 DE L'ACCORD DE LONDRES DU 8 AOUT 1945 PUBLIE PAR DECRET DU 6 OCTOBRE 1945, VIOLATION PAR FAUSSE APPLICATION DE LA LOI DU 26 DECEMBRE 1964, VIOLATION DES ARTICLES 591 ET 593 DU CODE DE PROCEDURE PENALE, DEFAUT DE MOTIF, MANQUE DE BASE LEGALE,
" EN CE QUE L'ARRET ATTAQUE A JUGE QUE L'ACTION PUBLIQUE ENGAGEE EN 1982 CONTRE LE DEMANDEUR POUR DES FAITS QUALIFIES CRIMES CONTRE L'HUMANITE COMMIS EN 1943 ET 1944 N'ETAIT PAS PRESCRITE ET A REJETE SA DEMANDE DE MISE EN LIBERTE, AUX MOTIFS QU'IL N'APPARTIENT PAS A L'AUTORITE JUDICIAIRE DE CENSURER UNE ATTEINTE QUI SERAIT PORTEE PAR LE LEGISLATEUR LUI-MEME AU PRINCIPE DE LA NON-RETROACTIVITE DE LA LOI PENALE, QUI DERIVE DE CELUI DE LA LEGALITE DES DELITS ET DES PEINES ;
QUE SANS DOUTE LA LOI DU 26 DECEMBRE 1964 QUI DECLARE IMPRESCRIPTIBLES PAR LEUR NATURE LES CRIMES CONTRE L'HUMANITE TELS QU'ILS SONT DEFINIS DANS LA CHARTE DU TRIBUNAL INTERNATIONAL ANNEXEE AUX ACCORDS DE LONDRES DU 8 AOUT 1945, NE CONTIENT AUCUNE DISPOSITION FAISANT EXPRESSEMENT ECHEC AU PRINCIPE FONDAMENTAL DE LA NON-RETROACTIVITE DES LOIS DE REPRESSION MAIS QUE LA PORTEE DE CETTE LOI DOIT S'APPRECIER PAR REFERENCE AU TEXTE INTERNATIONAL SUR LEQUEL ELLE S'ARTICULE ;
QU'IL RESULTE DE L'INTERPRETATION DES STATUTS DU TRIBUNAL MILITAIRE INTERNATIONAL, DONNEE OFFICIELLEMENT LE 15 JUIN 1979 PAR LE MINISTRE DES AFFAIRES ETRANGERES, QUE LE SEUL PRINCIPE EN MATIERE DE PRESCRIPTION DES CRIMES CONTRE L'HUMANITE QU'ON DOIT CONSIDERER COMME SE DEDUISANT DE CE TEXTE EST LE PRINCIPE D'IMPRESCRIPTIBILITE ;
QUE SI L'ARTICLE 7 DE LA CONVENTION EUROPEENNE DE SAUVEGARDE DES DROITS DE L'HOMME ET DES LIBERTES FONDAMENTALES CONSACRE LE PRINCIPE DE LA LEGALITE DES DELITS ET DES PEINES ET DE LA NON-RETROACTIVITE DE LA LOI PENALE, IL PERMET, AINSI QU'IL RESULTE ENCORE DE L'INTERPRETATION OFFICIELLE DU MINISTRE DES AFFAIRES ETRANGERES DU 15 JUIN 1979, QUE LE DROIT D'UNE DES PARTIES A LA CONVENTION DEROGE A CE PRINCIPE DE NON-RETROACTIVITE POUR LES ACTES QUI, LORSQU'ILS ONT ETE COMMIS, ETAIENT CRIMINELS D'APRES LES PRINCIPES GENERAUX DE DROIT RECONNUS PAR LES NATIONS CIVILISEES, CE QUI EST LE CAS DES CRIMES CONTRE L'HUMANITE ;
QU'IL N'EN IRAIT AUTREMENT QUE SI LE DROIT A LA PRESCRIPTION DES CRIMES DE CETTE NATURE ETAIT, CONFORMEMENT A L'ARTICLE 60 DE LA MEME CONVENTION EUROPEENNE, ASSURE SOIT PAR LA LOI FRANCAISE, SOIT PAR UN AUTRE CONVENTION INTERNATIONALE A LAQUELLE LA FRANCE SERAIT PARTIE ;
QUE TEL N'EST PAS LE CAS, LA FRANCE N'ETANT PARTIE A AUCUNE CONVENTION RECONNAISSANT LE DROIT A PRESCRIPTION DES CRIMES CONTRE L'HUMANITE COMME UN DROIT DE L'HOMME OU UNE LIBERTE FONDAMENTALE ET LA PRESCRIPTION DES INFRACTIONS NE CONSTITUANT PAS PAR AILLEURS, DANS L'ORDRE JURIDIQUE INTERNE FRANCAIS, UN DOGME ABSOLU DE DROIT NATUREL ;
QU'EN DEFINITIVE, L'INCRIMINATION DE CRIMES CONTRE L'HUMANITE EST CONFORME AUX PRINCIPES GENERAUX DE DROIT RECONNUS PAR LES NATIONS CIVILISEES, QU'A CE TITRE CES CRIMES ECHAPPENT AU PRINCIPE DE LA NON-RETROACTIVITE DES LOIS DE REPRESSION ET QUE LA LOI DU 26 DECEMBRE 1964, EN CONSTATANT LEUR IMPRESCRIPTIBILITE, N'A FAIT QUE CONFIRMER L'INTEGRATION EN DROIT INTERNE FRANCAIS A LA FOIS DE LEUR INCRIMINATION ET DE LEUR IMPRESCRIPTIBILITE DECOULANT DU STATUT DU TRIBUNAL MILITAIRE INTERNATIONAL ;
ALORS, D'UNE PART QUE, DANS LA HIERARCHIE DES NORMES JURIDIQUES DONT LE JUGE DOIT ASSURER LE RESPECT, C'EST LA NORME CONSTITUTIONNELLE QUI L'EMPORTE MEME SUR LES TRAITES INTERNATIONAUX, PUISQUE C'EST D'ELLE (ARTICLE 55 DE LA CONSTITUTION) QUE DECOULE LA REGLE DE LA SUPERIORITE DES TRAITES SUR LA LOI ;
QU'EN FRANCE, NUL TRAITE NE PEUT DONC DEROGER AU PRINCIPE DE LA NON-RETROACTIVITE DES LOIS PENALES, POSE EN TERMES ABSOLUS PAR L'ARTICLE 8 DE LA DECLARATION DES DROITS DE L'HOMME A LAQUELLE SE REFERE LE PREAMBULE DE LA CONSTITUTION ET SELON LEQUEL " NUL NE PEUT ETRE " PUNI QU'EN VERTU D'UNE LOI ETABLIE ET PROMULGUEE ANTERIEUREMENT AU DELIT " ;
QU'IL S'ENSUIT QUE LE JUGE PENAL, GARDIEN DE LA LIBERTE INDIVIDUELLE, CHARGE PAR L'ARTICLE 66 DE LA CONSTITUTION D'ASSURER LE RESPECT DU PRINCIPE SUIVANT LEQUEL NUL NE PEUT ETRE ARBITRAIREMENT DETENU, NE SAURAIT TROUVER DANS AUCUNE CONVENTION INTERNATIONALE POSTERIEURE AUX FAITS REPROCHES AU PREVENU, LA SUPPRESSION RETROACTIVE DU DROIT A LA PRESCRIPTION QUI, DANS L'ORDRE JURIDIQUE INTERNE, EST DEMEURE EN VIGUEUR JUSQU'A PROMULGATION DE LA LOI DU 26 DECEMBRE 1964 DONT LA COUR D'APPEL RECONNAIT QU'ELLE N'A, PAR ELLE-MEME, AUCUN EFFET RETROACTIF ;
ALORS, D'AUTRE PART, QUE SI LE MINISTRE DES AFFAIRES ETRANGERES EST COMPETENT POUR INTERPRETER LES DISPOSITIONS OBSCURES OU AMBIGUES D'UN TRAITE, IL NE LUI APPARTIENT PAS EN REVANCHE DE LE COMPLETER SUR DES POINTS QU'IL NE REGLE PAS ;
QUE LES ACCORDS DE LONDRES DU 8 AOUT 1945 ET LE STATUT DU TRIBUNAL INTERNATIONAL Y ANNEXE SONT RIGOUREUSEMENT MUETS SUR LA PRESCRIPTION DES CRIMES CONTRE LA PAIX, DES CRIMES DE GUERRE ET DES CRIMES CONTRE L'HUMANITE DEFINIS A L'ARTICLE 6 DU STATUT, CETTE QUESTION ETANT INUTILE PUISQUE LE TRIBUNAL DE NUREMBERG ETAIT UNE JURIDICTION TEMPORAIRE QUI A SIEGE PEU APRES LA FIN DES HOSTILITES ET PUISQUE, POUR LES CRIMINELS NON JUSTICIABLES DE CETTE JURIDICTION, L'ARTICLE 6 DE L'ACCORD PREVOYAIT LEUR JUGEMENT PAR LES JURIDICTIONS ET SELON LES LOIS DES ETATS DU LIEU OU LES CRIMES AVAIENT ETE COMMIS, DE SORTE QUE LE RENVOI A CES LOIS S'ETEND A LA PRESCRIPTION, CE QUI A ETE ADMIS POUR LES CRIMES CONTRE L'HUMANITE, LA CONVENTION NE FAISANT AUCUNE DIFFERENCE ENTRE LES UNS ET LES AUTRES A CET EGARD, ET ALORS ENFIN QU'IL RESULTE DE LA CONVENTION EUROPEENNE DES DROITS DE L'HOMME ET DES LIBERTES FONDAMENTALES TELLE QU'INTERPRETEE PAR LE MINISTRE DES AFFAIRES ETRANGERES QUE, POUR LES ACTES RECONNUS CRIMINELS " D'APRES LES PRINCIPES GENERAUX DE DROIT RECONNUS PAR LES NATIONS CIVILISEES ", LE DROIT INTERNE DES HAUTES PARTIES CONTRACTANTES PEUT DEROGER AU PRINCIPE DE LA NON-RETROACTIVITE DE LA LOI PENALE, MAIS QU'AUCUNE DEROGATION A CE PRINCIPE NE DECOULE DE LA CONVENTION ELLE-MEME ;
QU'AUCUNE DISPOSITION DE LA LOI DU 26 DECEMBRE 1964 NE FAIT ECHEC AU PRINCIPE FONDAMENTAL DE LA NON-RETROACTIVITE DES LOIS DE REPRESSION, CETTE LOI POUVANT PARFAITEMENT RECEVOIR APPLICATION POUR LES CRIMES QUI N'ETAIENT PAS ENCORE PRESCRITS LORS DE SA PROMULGATION PUISQUE LA DEFINITION DES CRIMES CONTRE L'HUMANITE, A LAQUELLE ELLE SE REFERE, PEUT S'APPLIQUER A DES ACTES COMMIS A TOUTE EPOQUE ;
QUE PAR SUITE, MEME SI LE DROIT A LA PRESCRIPTION N'EST PAS GARANTI PAR UNE CONVENTION INTERNATIONALE ET S'IL NE CONSTITUE PAS UN " DOGME ABSOLU DE DROIT NATUREL " AUQUEL LA LOI INTERNE NE POURRAIT DEROGER, IL N'EN A PAS MOINS ETE ACQUIS AU DEMANDEUR PAR APPLICATION DE LA LOI EN VIGUEUR JUSQU'EN 1964 ET CE DROIT LUI DEMEURE ACQUIS DES LORS QUE LA LOI DU 26 DECEMBRE 1964 N'A EU AUCUN EFFET RETROACTIF " ;
ATTENDU QU'IL RESULTE DE L'ARRET ATTAQUE, QUE L'INFORMATION OUVERTE LE 12 FEVRIER 1982 CONTRE X..., DU CHEF DE CRIMES CONTRE L'HUMANITE, PORTE SUR DES FAITS COMMIS EN 1943 ET 1944 ;
ATTENDU QUE LA CHAMBRE D'ACCUSATION, QUI S'EST A BON DROIT RECONNUE COMPETENTE POUR REPONDRE AUX CONCLUSIONS DE L'INCULPE REPRISES AU MOYEN ET SELON LESQUELLES CES FAITS ETAIENT COUVERTS PAR LA PRESCRIPTION DECENNALE A LA DATE DE MISE EN MOUVEMENT DE L'ACTION PUBLIQUE, RELEVE QUE LA LOI DU 26 DECEMBRE 1964, SUR LE FONDEMENT DE LAQUELLE SONT EXERCEES LES POURSUITES, " CONTIENT UNE REFERENCE PRECISE A LA CHARTE DU TRIBUNAL " INTERNATIONAL, JOINTE EN ANNEXE A L'ACCORD DE LONDRES DU 8 AOUT 1945 ", LUI-MEME INTEGRE A L'ORDRE JURIDIQUE INTERNE, ET QUE LA PORTEE DE CETTE LOI " PROCEDE NECESSAIREMENT DU TEXTE INTERNATIONAL SUR LEQUEL ELLE S'ARTICULE EXPRESSEMENT " ;
QUE L'ARRET, SE CONFORMANT A L'INTERPRETATION DONNEE OFFICIELLEMENT DE L'ACCORD DE LONDRES LE 15 JUIN 1979 PAR LE MINISTRE DES AFFAIRES ETRANGERES, CONSULTE A L'OCCASION D'UNE AUTRE PROCEDURE MAIS DONT L'AVIS, S'AGISSANT DE QUESTIONS TOUCHANT L'ORDRE PUBLIC INTERNATIONAL, REVET UNE PORTEE GENERALE ET S'IMPOSE A L'AUTORITE JUDICIAIRE, CONSTATE QUE " LE SEUL PRINCIPE EN MATIERE DE PRESCRIPTION DES CRIMES CONTRE L'HUMANITE QU'ON PEUT CONSIDERER COMME SE DEDUISANT DU STATUT DU TRIBUNAL MILITAIRE INTERNATIONAL, EST LE PRINCIPE D'IMPRESCRIPTIBILITE " ;
QU'APRES AVOIR ENONCE SANS ERREUR QUE, AU SENS DE L'ARTICLE 60 DE LA CONVENTION EUROPEENNE DE SAUVEGARDE DES DROITS DE L'HOMME ET DES LIBERTES FONDAMENTALES, " LE DROIT A L'ACQUISITION DE LA PRESCRIPTION " NE SAURAIT CONSTITUER UN DROIT DE L'HOMME OU UNE LIBERTE FONDAMENTALE, LES JUGES SE SONT REFERES A JUSTE TITRE A L'ARTICLE 7 PARAGRAPHE 2 DE LADITE CONVENTION, AINSI QU'A L'ARTICLE 15 PARAGRAPHE 2 DU PACTE INTERNATIONAL RELATIF AUX DROITS CIVILS ET POLITIQUES ;
QU'IL NE RESULTE, EN EFFET, DE CES TEXTES NI DEROGATION NI RESTRICTION A LA REGLE DE L'IMPRESCRIPTIBILITE, APPLICABLE AUX CRIMES CONTRE L'HUMANITE EN VERTU DES PRINCIPES DE DROIT RECONNUS PAR L'ENSEMBLE DES NATIONS ;
QU'AINSI, SELON L'ARRET, LA LOI DU 26 DECEMBRE 1964, EN " CONSTATANT L'IMPRESCRIPTIBILITE DES CRIMES CONTRE L'HUMANITE ", S'EST BORNEE A CONFIRMER QU'ETAIT DEJA ACQUISE EN DROIT INTERNE, PAR L'EFFET DES ACCORDS INTERNATIONAUX AUXQUELS LA FRANCE AVAIT ADHERE, L'INTEGRATION " A LA FOIS DE L'INCRIMINATION DONT S'AGIT ET DE L'IMPRESCRIPTIBILITE DE CES FAITS " ;
ATTENDU QU'EN L'ETAT DE CES MOTIFS, DONT ELLE A DEDUIT QUE LA PRESCRIPTION DE L'ACTION PUBLIQUE NE POUVAIT AVOIR BENEFICIE AU DEMANDEUR, EN RAISON DE LA NATURE DES CRIMES DONT IL EST INCULPE, QUELLE QUE SOIT LA DATE A LAQUELLE ILS ONT PU ETRE COMMIS, LA CHAMBRE D'ACCUSATION A FAIT L'EXACTE APPLICATION DE LA LOI ;
QUE, DES LORS, LE MOYEN PROPOSE DOIT ETRE ECARTE ;
ET ATTENDU QUE LES ENONCIATIONS DE L'ARRET ATTAQUE METTENT LA COUR DE CASSATION EN MESURE DE S'ASSURER QUE LE REJET DE LA DEMANDE DE MISE EN LIBERTE DE X... A ETE ORDONNE DANS LES CONDITIONS PREVUES PAR LES ARTICLES 144, 145 ET 148 DU CODE DE PROCEDURE PENALE ;
QUE LEDIT ARRET EST REGULIER EN LA FORME ;
REJETTE LE POURVOI.