STATUANT SUR LE POURVOI FORME PAR :
- X... JEAN, PARTIE CIVILE,
CONTRE UN ARRET DE LA COUR D'APPEL DE RENNES, CHAMBRE CORRECTIONNELLE, EN DATE DU 30 JUIN 1982 QUI, SUR RENVOI APRES CASSATION, L'A DEBOUTE DE SES DEMANDES DANS UNE POURSUITE EXERCEE CONTRE Y... MICHELINE DU CHEF D'ATTEINTE A L'INTIMITE DE LA VIE PRIVEE ;
VU LES MEMOIRES PRODUITS EN DEMANDE ET EN DEFENSE ;
SUR LE MOYEN UNIQUE DE CASSATION, PRIS DE LA VIOLATION DES ARTICLES 368 DU CODE PENAL ET 8 DE LA CONVENTION EUROPEENNE DE SAUVEGARDE DES DROITS DE L'HOMME, 591 ET 593 DU CODE DE PROCEDURE PENALE, DEFAUT DE MOTIFS ET MANQUE DE BASE LEGALE,
" EN CE QUE L'ARRET ATTAQUE, APRES AVOIR CONSTATE QUE LA PREVENUE A BIEN ENREGISTRE AU MOYEN D'UN APPAREIL QUELCONQUE DES PAROLES PRONONCEES PAR X... SANS AVOIR LE CONSENTEMENT DE CE DERNIER, A NEANMOINS DECLARE QUE LE DELIT D'ATTEINTE A L'INTIMITE DE LA VIE PRIVEE N'ETAIT PAS CONSTITUE ET A DEBOUTE LA PARTIE CIVILE DE SA DEMANDE EN REPARATION ;
AUX MOTIFS QUE LE BUREAU DANS LEQUEL SE SONT PRODUITS LES FAITS ETAIT UN BUREAU PUBLIC (ARRET, P. 10 PARAGRAPHE 3) ;
QUE L'ENREGISTREMENT N'AVAIT PAS PORTE ATTEINTE A L'INTIMITE DE LA VIE PRIVEE DU PLAIGNANT (ARRET P. 10 IN FINE ET P. 11 PARAGRAPHE 1 A 3. ADDE : JUGEMENT, P. 4 PARAGRAPHE 1 A 3) ;
QUE LA DEMOISELLE Y... N'AURAIT PAS EU ENFIN L'INTENTION DE PORTER ATTEINTE A L'INTIMITE DE CETTE VIE (ARRET, P. 11 PARAGRAPHE 4 A 6) ;
ALORS, D'UNE PART, QU'UN BUREAU PROFESSIONNEL D'UNE ENTREPRISE EST UN " LIEU PRIVE " POUR L'APPLICATION DE L'ARTICLE 368 DU CODE PENAL ;
ALORS, D'AUTRE PART, QUE L'ARTICLE 368 DU CODE PENAL REPRIME NOTAMMENT LE FAIT D'ENREGISTRER AU MOYEN D'UN APPAREIL QUELCONQUE DES PAROLES PRONONCEES DANS UN LIEU PRIVE PAR UNE PERSONNE, SANS LE CONSENTEMENT DE CELLE-CI : QU'IL N'Y A DONC PAS LIEU D'ETABLIR LE CONTENU INTIME DES PAROLES AINSI ENREGISTREES ;
QU'EN EXIGEANT DE LA PARTIE CIVILE UNE TELLE PREUVE, L'ARRET ATTAQUE A AJOUTE UNE CONDITION A L'ARTICLE SUSVISE, LEQUEL A ETE VIOLE PAR FAUSSE APPLICATION ;
ALORS, DE TROISIEME PART, ET EN TOUTE HYPOTHESE, QU'UNE CONVERSATION TELEPHONIQUE RELATIVE A UNE INSTRUCTION JUDICIAIRE APPARTIENT A L'INTIMITE DE LA VIE PRIVEE DE LA PERSONNE INTERESSEE ;
QU'EN DECIDANT LE CONTRAIRE, L'ARRET A VIOLE, PAR REFUS D'APPLICATION, L'ARTICLE 368 DU CODE PENAL ;
ALORS, SUBSIDIAIREMENT, QUE LA COUR DEVAIT RECHERCHER SI LES CONVERSATIONS LITIGIEUSES AVAIENT EU LIEU ENTRE LE PLAIGNANT ET LE CERCLE DES PERSONNES APPARTENANT A SES " INTIMES " ;
ALORS, ENFIN, QUE LES MOBILES SONT INDIFFERENTS EN DROIT PENAL ;
QUE L'INTENTION DELICTUEUSE DE L'ARTICLE 368 RESULTE DU SEUL FAIT, CONSTATE PAR L'ARRET, DE L'ENREGISTREMENT DES PAROLES LITIGIEUSES A L'INSU DE L'INTERESSE (ARRET P. 10 PARAGRAPHE 1) ;
QU'EN DECIDANT LE CONTRAIRE, L'ARRET A DERECHEF VIOLE PAR FAUSSE INTERPRETATION L'ARTICLE SUSVISE ;
" VU LESDITS ARTICLES ;
ATTENDU, D'UNE PART, QU'IL RESULTE DE L'ARTICLE 368 1° DU CODE PENAL QUE LE DELIT QU'IL PREVOIT ET REPRIME EST CONSTITUE LORSQU'UNE ATTEINTE VOLONTAIRE EST PORTEE A L'INTIMITE DE LA VIE PRIVEE D'AUTRUI, NOTAMMENT PAR L'ENREGISTREMENT AU MOYEN D'UN APPAREIL QUELCONQUE DES PAROLES PRONONCEES DANS UN LIEU PRIVE PAR UNE PERSONNE, SANS LE CONSENTEMENT DE CELLE-CI ;
ATTENDU, D'AUTRE PART, QUE TOUT JUGEMENT OU ARRET DOIT CONTENIR LES MOTIFS PROPRES A JUSTIFIER SA DECISION ;
QUE LA CONTRADICTION DES MOTIFS EQUIVAUT A LEUR ABSENCE ;
ATTENDU QU'IL RESULTE DE L'ARRET ATTAQUE ET DU JUGEMENT DONT IL ADOPTE LES MOTIFS NON CONTRAIRES QUE, DANS LA NUIT DU 30 AU 31 JANVIER 1977, UN INCENDIE EST SURVENU DANS LES LOCAUX DE LA S. A. ETABLISSEMENTS Z... ;
QUE LE 17 MARS SUIVANT Z..., PRESIDENT-DIRECTEUR GENERAL DE LA SOCIETE, A ETE INCULPE DU CHEF D'INCENDIE VOLONTAIRE ET PLACE SOUS MANDAT DE DEPOT, QU'IL A BENEFICIE PAR LA SUITE D'UN NON-LIEU ;
QUE PENDANT L'ABSENCE DE SON DIRECTEUR GENERAL, X..., DIRECTEUR COMMERCIAL, A PRIS LA DIRECTION DE L'ENTREPRISE ;
QUE LE 21 MARS DE LA MEME ANNEE, USANT D'UN APPAREIL INSTALLE DANS LE LOCAL ADMINISTRATIF PROVISOIRE DE L'ENTREPRISE INCENDIEE, IL A EU DES ENTRETIENS PAR TELEPHONE, NOTAMMENT AVEC SON AVOCAT PERSONNEL ET MME Z..., EPOUSE DU PRESIDENT-DIRECTEUR GENERAL ECROUE, AU SUJET DE L'INFORMATION EN COURS ;
QUE MICHELINE Y..., COMPTABLE DE LA SOCIETE, PRESENTE DANS LE LOCAL AINSI QUE DEUX AUTRES EMPLOYEES, A, AU MOYEN D'UN MAGNETOPHONE DISSIMULE, A ENREGISTRE LES PROPOS QUE TENAIT X... ;
QU'ELLE A ETE POURSUIVIE POUR ATTEINTE A L'INTIMITE DE LA VIE PRIVEE ;
ATTENDU QUE PAR ARRET DE LA COUR D'APPEL D'ANGERS, EN DATE DU 30 OCTOBRE 1980, LA PREVENUE A ETE RELAXEE, LA PARTIE CIVILE X... ETANT DEBOUTEE DE SA DEMANDE ;
QUE, SUR LE SEUL POURVOI DE CETTE DERNIERE, LA COUR DE CASSATION A, PAR ARRET DU 19 MAI 1981, CASSE LA DECISION ;
ATTENDU QUE PAR L'ARRET ATTAQUE, LA COUR DE RENVOI, POUR DEBOUTER DE SA DEMANDE LA PARTIE CIVILE, A ESTIME QUE LE BUREAU DANS LEQUEL S'ETAIENT PRODUITS LES FAITS ETAIT UN BUREAU PUBLIC, ET QUE MICHELINE Y..., EN PROCEDANT AUX ENREGISTREMENTS INCRIMINES, N'AVAIT PAS EU L'INTENTION DE PORTER ATTEINTE A L'INTIMITE DE LA VIE PRIVEE DU PLAIGNANT ;
MAIS ATTENDU, EN CET ETAT, D'UNE PART, QU'IL NE RESULTE PAS DES ENONCIATIONS DE L'ARRET ATTAQUE QUE X..., EN TELEPHONANT DE L'UN DES DEUX SEULS BUREAUX D'OU IL POUVAIT ETRE EN RELATION AVEC SES CORRESPONDANTS, AIT RENONCE AU CARACTERE INTIME PAR NATURE DES COMMUNICATIONS DONT L'OBJET EST PRECISE PAR LES JUGES ;
QUE D'AUTRE PART, IL SE DEDUIT DES MEMES ENONCIATIONS QUE MICHELINE Y..., QUI A PROCEDE A DES ENREGISTREMENTS SUCCESSIFS, N'IGNORAIT PAS QUE LE BUREAU AVAIT, PAR SON UTILISATION, RECU LE CARACTERE D'UN LIEU PRIVE AU SENS DE L'ARTICLE 368 DU CODE PENAL, ET QUE LES COMMUNICATIONS DONT ELLE A VOLONTAIREMENT MECONNU LE CARACTERE PERSONNEL ETAIENT DE CELLES QUI ENTRAIENT DANS LE DOMAINE DE L'INTIMITE DE LA VIE PRIVEE DE X... ;
ATTENDU DES LORS QU'EN STATUANT AINSI QU'ELLE L'A FAIT, LA COUR D'APPEL A VIOLE LE TEXTE ET LE PRINCIPE CI-DESSUS RAPPELES ;
D'OU IL SUIT QUE LA CASSATION EST ENCOURUE PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE L'ARRET DE LA COUR D'APPEL DE RENNES, EN DATE DU 30 JUIN 1982, ET POUR ETRE STATUE A NOUVEAU, CONFORMEMENT A LA LOI, RENVOIE LA CAUSE ET LES PARTIES DEVANT LA COUR D'APPEL DE CAEN, A CE DESIGNEE PAR DELIBERATION SPECIALE PRISE EN CHAMBRE DU CONSEIL.