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09/05/1983 | FRANCE | N°82-12227

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 09 mai 1983, 82-12227


SUR LE PREMIER MOYEN, PRIS EN SES DEUX BRANCHES : ATTENDU QUE, SELON L'ARRET ATTAQUE, LE DOCTEUR Y... A PRATIQUE UNE LIGATURE DES TROMPES SUR LA PERSONNE DE MME X... ;

QUE CELLE-CI S'EST CEPENDANT TROUVEE EN ETAT DE GROSSESSE MOINS D'UN MOIS APRES L'INTERVENTION ;

QUE, LES EPOUX X... AYANT ASSIGNE LE MEDECIN EN REPARATION DU PREJUDICE CAUSE, COMPTE TENU, NOTAMMENT DE L'ETAT DE SANTE PRECAIRE DE LA FEMME QUI, AGEE DE 28 ANS, AVAIT DEJA EU CINQ GROSSESSES ET ETAIT INTOLERANTE AUX CONTRACEPTIFS ORDINAIRES, LA COUR D'APPEL L'A CONDAMNE A LEUR PAYER DES DOMMAGES-INTERETS ;

ATTE

NDU QUE LE DOCTEUR Y... REPROCHE AUX JUGES DU SECOND DEGRE D'AVOI...

SUR LE PREMIER MOYEN, PRIS EN SES DEUX BRANCHES : ATTENDU QUE, SELON L'ARRET ATTAQUE, LE DOCTEUR Y... A PRATIQUE UNE LIGATURE DES TROMPES SUR LA PERSONNE DE MME X... ;

QUE CELLE-CI S'EST CEPENDANT TROUVEE EN ETAT DE GROSSESSE MOINS D'UN MOIS APRES L'INTERVENTION ;

QUE, LES EPOUX X... AYANT ASSIGNE LE MEDECIN EN REPARATION DU PREJUDICE CAUSE, COMPTE TENU, NOTAMMENT DE L'ETAT DE SANTE PRECAIRE DE LA FEMME QUI, AGEE DE 28 ANS, AVAIT DEJA EU CINQ GROSSESSES ET ETAIT INTOLERANTE AUX CONTRACEPTIFS ORDINAIRES, LA COUR D'APPEL L'A CONDAMNE A LEUR PAYER DES DOMMAGES-INTERETS ;

ATTENDU QUE LE DOCTEUR Y... REPROCHE AUX JUGES DU SECOND DEGRE D'AVOIR AINSI STATUE AUX MOTIFS QUE, LA PARFAITE OBTENTION DU RESULTAT ESPERE PAR LA PATIENTE NE POUVANT ETRE ASSUREE, IL AVAIT EU LE TORT DE NE PAS INFORMER LES EPOUX X... DU RISQUE MINIME, MAIS POSSIBLE, D'UNE NOUVELLE GROSSESSE, ALORS, SELON LE MOYEN, D'UNE PART, QUE LA COUR D'APPEL A FAIT PESER SUR LE CHIRURGIEN UNE OBLIGATION DE RESULTAT, ET ALORS, D'AUTRE PART, QU'ELLE NE POUVAIT, SANS VIOLER LES ARTICLES 1147 ET SUIVANTS DU CODE CIVIL, LUI FAIRE GRIEF DE NE PAS AVOIR INFORME SA PATIENTE D'UN RISQUE MINIME DONT LA SURVENANCE ETAIT DU RESTE INDEPENDANTE DE L'INTERVENTION QU'IL AVAIT PRATIQUEE, CE QUI, EN L'ABSENCE DE TOUTE FAUTE TECHNIQUE, N'ETAIT PAS DE NATURE A ENGAGER SA RESPONSABILITE ;

MAIS ATTENDU, D'ABORD, QU'EN ENONCANT QUE LE CHIRURGIEN DEVAIT INFORMER SA CLIENTE DE L'INCERTITUDE DU RESULTAT RECHERCHE, LA COUR D'APPEL NE L'A PAS DECLARE TENU DE PARVENIR A CE RESULTAT ;

QUE LE GRIEF EST TOTALEMENT DEPOURVU DE FONDEMENT ;

ATTENDU, ENSUITE, QUE LE RISQUE DESIGNE PAR L'ARRET ATTAQUE N'ETAIT PAS LE RISQUE D'UNE COMPLICATION PROVOQUEE PAR L'INTERVENTION ELLE-MEME, LEQUEL, S'IL NE SE REALISE QU'EXCEPTIONNELLEMENT ET N'EST JUSTIFIABLE D'AUCUNE MESURE DE PREVENTION, PEUT, SANS QUE CE SOIT CONSTITUTIF D'UNE FAUTE, NE PAS ETRE SIGNALE AU PATIENT PAR LE CHIRURGIEN ;

QU'IL S'AGISSAIT, AU CONTRAIRE, DU RISQUE D'UNE NOUVELLE GROSSESSE, C'EST-A-DIRE D'UN RISQUE RESIDUEL QUI, COMME L'ADMET LA REDACTION DU MOYEN, SUBSISTAIT MALGRE L'INTERVENTION ET DONT LES INTERESSES, S'ILS EN AVAIENT CONNU L'EXISTENCE, AURAIENT ETE EN MESURE D'EVITER LA REALISATION ;

QUE LA COUR D'APPEL A DONC PU ESTIMER QUE LE CHIRURGIEN DEVAIT SIGNALER CE RISQUE AUX EPOUX X... ET QU'IL AVAIT MANQUE A SON DEVOIR DE CONSEIL ;

D'OU IL SUIT QUE LE MOYEN N'EST PAS NON PLUS FONDE EN SA SECONDE BRANCHE ET DOIT ETRE REJETE ;

SUR LE SECOND MOYEN, PRIS EN SES DEUX BRANCHES : ATTENDU QU'IL EST ENCORE SOUTENU, D'UNE PART, QUE, CONTRAIREMENT A CE QU'AURAIT JUGE LA COUR D'APPEL, LA NAISSANCE D'UN ENFANT N'EST PAS EN SOI GENERATRICE D'UN PREJUDICE ET, D'AUTRE PART, QUE POUR NE PAS AVOIR PRECISE SI LE PREJUDICE DONT ELLE ORDONNE REPARATION EST EFFECTIVEMENT IMPUTABLE - ET DANS QUELLES PROPORTIONS - A LA FAUTE D'ABSTENTION RETENUE, LA COUR D'APPEL N'AURAIT PAS DONNE DE BASE LEGALE A SA DECISION, AURAIT ASSORTI CELLE-CI DE MOTIFS INCERTAINS, ET AURAIT FAUSSEMENT APPLIQUE L'ARTICLE 1147 DU CODE CIVIL ;

MAIS ATTENDU QU'APRES AVOIR CONSTATE QUE LE DEFAUT D'AVERTISSEMENT AVAIT PARTICIPE A LA SURVENANCE DE LA NOUVELLE GROSSESSE, LA COUR D'APPEL A ENONCE QUE, POUR DES RAISONS D'ORDRE MEDICAL QUI SONT ENUMERES DANS SON ARRET, CETTE NOUVELLE GROSSESSE AVAIT OCCASIONNE DES DIFFICULTES NON SEULEMENT MATERIELLES ET DE SANTE POUR LA MERE, MAIS AUSSI D'ORDRE PSYCHIQUE ET RELATIONNEL ;

QU'ELLE EN A DEDUIT QUE, L'ABSENCE DE MISE EN GARDE DU DOCTEUR Y... AYANT, DANS UNE CERTAINE MESURE, PARTICIPE A LA REALISATION DE CES DIFFICULTES ET PERTURBATIONS, CONSTITUTIVES D'UN DOMMAGE OUVRANT DROIT A REPARATION, IL EST JUSTIFIE, COMPTE TENU DE L'ENSEMBLE DES CIRCONSTANCES DE L'ESPECE ET SANS QU'IL Y AIT LIEU DE RECOURIR A UNE EXPERTISE, DE LE CONDAMNER A PAYER AUX EPOUX X... UNE INDEMNITE DE 20000 FRANCS ;

QU'AINSI, LES JUGES DU SECOND DEGRE N'ONT AUCUNEMENT DECLARE QUE LA NAISSANCE D'UN ENFANT ETAIT, EN SOI, GENERATRICE D'UN PREJUDICE ;

ET ATTENDU QU'EN REPETANT QUE LE PREJUDICE ETAIT DANS UNE CERTAINE MESURE - C'EST-A-DIRE PARTIELLEMENT - IMPUTABLE AU MANQUEMENT DU MEDECIN A SON DEVOIR DE CONSEIL, ET EN ALLOUANT DES LORS 20000 FRANCS DE DOMMAGES-INTERETS AUX EPOUX X..., LA COUR D'APPEL, SANS USER DE MOTIFS DUBITATIFS, A LEGALEMENT JUSTIFIE SA DECISION ;

D'OU IL SUIT QUE LE SECOND MOYEN N'EST PAS MIEUX FONDE QUE LE PREMIER ;

PAR CES MOTIFS : REJETTE LE POURVOI FORME CONTRE L'ARRET RENDU LE 2 MARS 1982 PAR LA COUR D'APPEL DE ROUEN.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 82-12227
Date de la décision : 09/05/1983
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Analyses

1) MEDECIN CHIRURGIEN - Responsabilité - Obligation de renseigner - Etendue - Intervention chirurgicale - Risque résiduel évitable.

MEDECIN CHIRURGIEN - Responsabilité - Obligation de renseigner - Etendue - Intervention chirurgicale - Ligature des trompes - Risque de nouvelle grossesse - * RESPONSABILITE CONTRACTUELLE - Obligation de renseigner - Médecin chirurgien - Intervention chirurgicale - Risque résiduel évitable.

Si un chirurgien peut, sans que ce soit constitutif d'une faute, ne pas signaler à son patient le risque minime d'une complication provoquée par l'intervention chirurgicale elle-même, dès lors que ce risque ne se réalise qu'exceptionnellement et n'est justiciable d'aucune mesure de prévention, il en va différemment lorsque le risque consiste en la possibilité d'une nouvelle grossesse malgré une opération de ligature des trompes, la réalisation de ce risque résiduel pouvant être évitée si son existence est connue. Une Cour d'appel peut donc estimer qu'en ne signalant pas ce risque à sa patiente, qui s'était trouvée en état de grossesse moins d'un mois après l'intervention, un chirurgien avait manqué à son devoir de conseil.

2) CASSATION - Moyen - Motifs de la décision attaquée - Défaut de motifs - Motifs dubitatifs - Responsabilité contractuelle - Lien de causalité - Dommage - Dommage imputable "dans une certaine mesure" à la faute constatée.

Ne statue pas un motif dubitatif la Cour d'appel qui énonce qu'un préjudice était "dans une certaine mesure" - c'est-à-dire partiellement - imputable au manquement d'un médecin à son devoir de son conseil.


Références :

Décision attaquée : Cour d'appel Rouen (Chambre 1), 02 mars 1982

CF. Cour de Cassation (Chambre civile 1) 1978-05-02 Bulletin 1978 I N. 165 p. 132 (REJET) .


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 09 mai. 1983, pourvoi n°82-12227, Bull. civ. des arrêts Cour de Cassation Civ. 1re N. 140
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles des arrêts Cour de Cassation Civ. 1re N. 140

Composition du Tribunal
Président : Pdt M. Joubrel
Avocat général : Av.Gén. M. Gulphe
Rapporteur ?: Rpr M. Raoul Béteille
Avocat(s) : Av. Demandeur : SCP Fortunet et Mattei-Dawance

Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1983:82.12227
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