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01/12/1981 | FRANCE | N°81-90377

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 01 décembre 1981, 81-90377


Statuant sur les pourvois formés par :

- VIDAL X... - et la Société lorraine et méridionale de laminage (SOLMER) - contre un arrêt de la Cour d'appel d'AIX-EN-PROVENCE, cinquième chambre, en date du 18 décembre 1980, qui a condamné VIDAL à 2.000 francs d'amende et à des réparations civiles pour entraves à l'exercice des fonctions d'un membre du comité d'entreprise et à l'exercice du droit syndical et pour infraction aux prescriptions de l'article L. 122-29 du Code du travail, et qui a déclaré civilement responsable la société précitée ; Joignant les pourvois en raiso

n de la connexité ; Vu les mémoires produits en demande et en défense ; S...

Statuant sur les pourvois formés par :

- VIDAL X... - et la Société lorraine et méridionale de laminage (SOLMER) - contre un arrêt de la Cour d'appel d'AIX-EN-PROVENCE, cinquième chambre, en date du 18 décembre 1980, qui a condamné VIDAL à 2.000 francs d'amende et à des réparations civiles pour entraves à l'exercice des fonctions d'un membre du comité d'entreprise et à l'exercice du droit syndical et pour infraction aux prescriptions de l'article L. 122-29 du Code du travail, et qui a déclaré civilement responsable la société précitée ; Joignant les pourvois en raison de la connexité ; Vu les mémoires produits en demande et en défense ; SUR LE

PREMIER MOYEN DE CASSATION :
, pris de la violation des articles L. 461-2, L. 463-1, L. 436-1 du Code du travail, 591, 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ; "en ce que l'arrêt attaqué a condamné VIDAL à 2.000 francs d'amende et à 1.000 francs de dommages-intérêts envers le syndicat CFDT, pour avoir porté atteinte à l'exercice des fonctions de membre du comité d'entreprise, et à l'exercice du droit syndical, et a, en conséquence, déclaré la société SOLMER civilement responsable ; "aux motifs que la qualité de représentant du personnel n'était pas de nature à créer une immunité disciplinaire, cette catégorie de salariés protégés étant, comme les autres, soumises aux dispositions du règlement intérieur, que l'employeur avait en l'espèce, par application du règlement intérieur, sanctionné des fautes non contestées commises par CLAIREAU ; que cependant le règlement intérieur ne pouvait tenir en échec les règles légales de protection des représentants du personnel, et que la rétrogradation infligée à CLAIREAU constituait une modification d'une clause essentielle du contrat de travail, assimilable à un licenciement même si cette rétrogradation avait eu des conséquences pécuniaires minimes et même si elle n'avait pas été refusée par le salarié, dont le contrat de travail s'était poursuivi ; que, dans ces conditions, l'employeur, en ne sollicitant pas l'autorisation administrative, avait commis le délit d'entrave du seul fait qu'il avait enfreint la loi ; qu'il avait, en outre, manifesté une volonté de sanctionner CLAIREAU et qu'enfin, dans le cadre de la procédure disciplinaire, la sanction était irrégulière faute d'avoir été précédée d'un entretien tel que prévu par le règlement intérieur ;

"alors, d'une part, qu'en assimilant purement et simplement à un licenciement, qui a pour effet de rompre le contrat de travail, une mesure de rétrogradation qui est, au contraire, subordonnée à sa continuation et qui constitue d'ailleurs une sanction moindre dans l'échelle des peines, ainsi que le prévoit l'article 32 du règlement intérieur, les juges du fond n'ont pas caractérisé l'élément légal de l'infraction et ont violé les articles L. 463-1, L. 461-2 et L. 436-1 du Code du travail en décidant que la mesure de rérogradation aurait dû être soumise à l'autorisation préalable de l'administration ; "qu'il en est d'autant plus ainsi que la mesure de rétrogradation avait été, en l'occurrence, acceptée par le salarié sanctionné, en sorte que le contrat de travail avait subsisté par la volonté des deux parties, sans que le juge pénal puisse, à la requête d'un tiers, substituer son appréciation à celle du salarié intéressé, sur le point de savoir si le contrat de travail pouvait être maintenu en dépit de la sanction de rétrogradation ou si, au contraire, il équivalait à une rupture non acquise en l'espèce ; "alors, d'autre part, qu'il résulte des constatations de l'arrêt attaqué et des éléments de la cause que le salarié avait été convoqué et s'était présenté à l'entretien où il avait été assisté et que, de toute façon, une éventuelle méconnaissance du règlement intérieur n'était pas sanctionnée par une disposition particulière, à l'exception d'une faculté de réclamation, non utilisée par le salarié, de sorte que la Cour d'appel n'a pas caractérisé une atteinte spécifique à l'exercice des fonctions représentatives de CLAIREAU ; "alors, enfin, qu'en statuant ainsi, la Cour d'appel n'a absolument pas caractérisé l'élément intentionnel des délits d'entrave reprochés à l'employeur ; "qu'en effet, elle n'a pas constaté que VIDAL serait incapable d'apporter la pleine justification des sanctions critiquées, dès lors qu'elle relève au contraire que ces sanctions avaient pour fondement les fautes non contestées commises par CLAIREAU que sa qualité de représentant du personnel ne dispensait pas du respect de la discipline de l'entreprise ; "qu'en outre, elle n'a pas non plus constaté que les sanctions infligées à CLAIREAU auraient porté atteinte à l'exercice de ses fonctions représentatives, le salarié n'ayant jamais prétendu qu'il aurait été empêché d'exercer efficacement son mandat ; "et en dernier lieu, qu'à supposer même que le demandeur ait commis une erreur de droit sur la procédure prévue par le règlement intérieur, en matière de rétrogradation, il n'en résulte pas pour autant que la sanction infligée dans ces conditions constituerait une entrave à l'exercice des fonctions représentatives ;"

Attendu qu'il appert de l'arrêt attaqué que VIDAL, président du directoire de la société SOLMER, a engagé une procédure de licenciement contre le salarié CLAIREAU, membre titulaire du comité d'entreprise et ancien délégué syndical, alors placé dans la période de protection de six moix consécutive à la cessation de ses fonctions, auquel il reprochait des infractions au règlement intérieur de l'établissement ; que l'autorisation de licenciement lui ayant été refusée, il a mis à pied ce salarié pendant huit jours et lui a infligé une rétrogradation entraînant une diminution de son salaire ; Attendu que saisie des poursuites engagées en raison de ces faits contre VIDAL à l'initiative du syndicat de la métallurgie de FOS-ETANG-DE-BERRE, la Cour d'appel, pour déclarer la prévention établie, relève notamment que, bien que la qualité de représentant du personnel ne crée pas une immunité disciplinaire et que les salariés protégés restent soumis au règlement intérieur, ce dernier ne saurait tenir en échec les règles légales de protection ; que la rétrogradation du salarié concerné, assortie d'une diminution de sa rétribution constituait une modification des clauses substantielles de son contrat de travail, assimilable à un licenciement et subordonnée, en tant que telle, à l'autorisation de l'inspecteur du travail ; qu'en s'abstenant de solliciter ladite autorisation, VIDAL a manifesté la volonté consciente d'enfreindre la loi, son comportement mettant en évidence "une certaine intention de nuire" aux fonctions représentatives qu'assumait CLAIREAU ;

Attendu qu'en l'état de ces motifs, la Cour d'appel a donné une base légale à sa décision ; que contrairement aux griefs du moyen, l'infraction se trouve caractérisée dans tous ses éléments lorsqu'il est constaté, comme en l'espèce, qu'une mutation substantielle de son contrat de travail comportant la perte d'avantages antérieurs, a été volontairement imposée à un salarié investi de fonctions représentatives, en violation des dispositions légales ; que l'erreur de droit invoquée par les demandeurs était, en l'occurrence, sans effet, qu'enfin, la constatation faite par les juges, que le prévenu n'a pas respecté les dispositions du règlement intérieur de l'établissement en matière disciplinaire, n'a d'autre portée que de souligner le caractère volontaire de ses agissements ; D'où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ; SUR LE

SECOND MOYEN DE CASSATION :
, pris de la violation des articles L. 122-39, L. 152-1 du Code du travail, 591, 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ; "en ce que l'arrêt attaqué a condamné VIDAL à 2.000 francs d'amende et 1.000 francs de dommages-intérêts envers le syndicat CFDT pour avoir prétendument prononcé une sanction pécuniaire à l'encontre de CLAIREAU et a déclaré la société SOLMER civilement responsable ; "aux motifs qu'en rétrogradant CLAIREAU d'indice et en lui infligeant une diminution de salaire, l'employeur avait prononcé une sanction pécuniaire interdite par la loi, peu important qu'elle soit prévue par le règlement intérieur, celui-ci étant évidemment subordonné hiérarchiquement à la loi ; "alors, d'une part, que ne constitue pas une sanction pécuniaire au sens de l'article L. 122-39 toute mesure ayant pour objet une diminution ou une suspension du travail, ou une diminution de la qualification, même si les effets d'une telle mesure provoquant une variation de salaire et que tel est le cas d'une rétrogradation faisant passer le salarié de l'indice 200 à l'indice 190, mesure qui affecte essentiellement la qualification et les fonctions du salarié, et indirectement seulement sa rémunération ; "alors, d'autre part, que, faute de rechercher si la diminution de salaire subie par CLAIREAU n'était pas, en l'occurrence, liée à une réduction de ses responsabilités et à une modification de ses fonctions correspondant à la variation d'indice, la Cour d'appel ne pouvait affirmer que la mesure litigieuse correspondait à une sanction pécuniaire ;"

Attendu que pour déclarer VIDAL coupable d'infraction à l'article L. 122-29 interdisant à l'employeur de sanctionner par des amendes ou d'autres sanctions pécuniaires les manquements aux prescriptions d'un règlement intérieur, la Cour d'appel relève qu'en rétrogradant CLAIREAU et en lui infligeant une diminution de son salaire, le prévenu a transgressé cette disposition législative à laquelle ne saurait déroger une réglementation interne à l'entreprise ; Attendu qu'en statuant ainsi qu'elle l'a fait, la Cour d'appel n'a commis aucune violation de la loi ; que, contrairement à ce qui est allégué au moyen, il résulte des énonciations de l'arrêt que la sanction appliquée avait une incidence directe sur le salaire de CLAIREAU ; que les juges n'étaient nullement tenus de rechercher si cette mesure avait entraîné une modification des responsabilités ou des fonctions du salarié le prévenu n'ayant, à aucun momment, soutenu qu'il en ait été ainsi ; Que, dès lors, le moyen doit être écarté ; Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ; REJETTE LES POURVOIS ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 81-90377
Date de la décision : 01/12/1981
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

TRAVAIL - Contrat de travail - Employeur - Pouvoir disciplinaire - Sanctions - Conditions - Faute du salarié.

* TRAVAIL - Contrat de travail - Employeur - Pouvoir disciplinaire - Rétrogradation - Diminution de la rétribution de l'employé - Interdiction légale.


Références :

Code du travail L122-29

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, chambre 5, 18 décembre 1980


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 01 déc. 1981, pourvoi n°81-90377


Composition du Tribunal
Président : Pdt. M. Mongin
Avocat général : Av.Gén. M. Clerget
Rapporteur ?: Rapp. M. Berthiau
Avocat(s) : Av. Demandeur : Me Célice

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1981:81.90377
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