STATUANT SUR LE POURVOI FORME PAR :
- B... EPOUSE L... ;
CONTRE UN ARRET DE LA COUR D'APPEL DE PARIS, 11E CHAMBRE, EN DATE DU 15 NOVEMBRE 1979, QUI L'A CONDAMNE, POUR DIFFAMATION PUBLIQUE ENVERS UN PARTICULIER, A 1 500 FRANCS D'AMENDE AINSI QU'A DES REPARATIONS CIVILES ;
VU LE MEMOIRE PRODUIT ;
SUR LE MOYEN UNIQUE DE CASSATION, PRIS DE LA VIOLATION DES ARTICLES 43 DE LA LOI DU 29 JUILLET 1881, 1382 DU CODE CIVIL, 485 ET 593 DU CODE DE PROCEDURE PENALE, DEFAUT DE MOTIFS, ET MANQUE DE BASE LEGALE, EN CE QUE L'ARRET ATTAQUE DECLARE DAME L..., DIRECTEUR DE PUBLICATION DU JOURNAL L'A COUPABLE DU DELIT DE DIFFAMATION ;
AUX MOTIFS QUE L'INTENTION DE NUIRE N'A PAS A ETRE APPRECIEE DANS LA PERSONNE DU DIRECTEUR DE LA PUBLICATION DONT LE DEVOIR EST DE SURVEILLER ET VERIFIER TOUT CE QUI EST INSERE DANS LE JOURNAL QU'IL PUBLIE ET QUE CE DIRECTEUR EST RESPONSABLE AUX TERMES DE L'ARTICLE 42 DE LA LOI DU 29 JUILLET 1881 EN SA QUALITE ET COMME AUTEUR PRINCIPAL DES DELITS COMMIS PAR LA VOIE DE CE JOURNAL ;
ALORS QUE, DES LORS QUE LA COUR AVAIT JUGE QUE LE JOURNALISTE AUTEUR DE L'ARTICLE N'AVAIT COMMIS AUCUN DELIT ET N'A FAIT QUE REMPLIR SON ROLE D'INFORMATEUR, ELLE NE POUVAIT SANS ENTACHER SA DECISION DE DEFAUT DE MOTIFS, RETENIR LA CULPABILITE DU DIRECTEUR DE LA PUBLICATION EN SE BORNANT A DECLARER QUE CELUI-CI AVAIT MANQUE A SON DEVOIR DE SURVEILLER CE QUI EST INSERE DANS LE JOURNAL ;
ET ALORS QUE CE DEFAUT DE MOTIFS ENTRAINERA NECESSAIREMENT LA CENSURE ;
VU LESDITS ARTICLES ;
ATTENDU QUE TOUT JUGEMENT OU ARRET DOIT CONTENIR LES MOTIFS PROPRES A JUSTIFIER SA DECISION QUE L'INSUFFISANCE OU LA CONTRADICTION DES MOTIFS EQUIVAUT A LEUR ABSENCE ;
ATTENDU QUE DANS LE NUMERO 9982, DATE DU 14 OCTOBRE 1976, DU JOURNAL L'A, DONT DAME L... ETAIT DIRECTEUR DE LA PUBLICATION, UN ARTICLE A PARU, SIGNE PAR PHILIPPE B..., JOURNALISTE, SOUS LE TITRE L'EXTRAORDINAIRE AFFAIRE DE L'HERITAGE M..., DANS LEQUEL, APRES L'EVOCATION D'UN CONFLIT OPPOSANT JEAN-MARIE M..., LEGATAIRE UNIVERSEL DU MILLIARDAIRE HUBERT M... A LA FAMILLE DE CE DERNIER, ET A SON SECRETAIRE, JEAN F..., ETAIENT NOTAMMENT REPRODUITS LES PROPOS SUIVANTS DE CE DERNIER : JE SUIS A CENT POUR CENT DERRIERE LA FAMILLE, M... S'EST SERVI DE MANOEUVRES CAPTIEUSES POUR ARRACHER SES TESTAMENTS A UNE VIEILLE DAME DE 85 ANS ET A UN ENFANT DE 42 ANS, CAR HUBERT N'A JAMAIS REUSSI A COUPER LE CORDON OMBILICAL ;
ATTENDU QUE SUR PLAINTE AVEC CONSTITUTION DE PARTIE CIVILE DE M..., A RAISON DE CETTE PUBLICATION, DAME L..., B... ET F... ONT ETE POURSUIVIS ET RENVOYES DEVANT LA JURIDICTION CORRECTIONNELLE, SOUS LES PREVENTIONS RESPECTIVES, LA PREMIERE DE DIFFAMATIONS PUBLIQUES ENVERS UN PARTICULIER ET ENVERS LA MEMOIRE D'UN MORT, LES AUTRES DE COMPLICITE DE CES DELITS ;
ATTENDU QU'APRES AVOIR RELAXE LES PREVENUS, DU CHEF DE DIFFAMATION ENVERS LA MEMOIRE D'UN MORT, L'ARRET ATTAQUE A RELEVE, A JUSTE RAISON, LE CARACTERE DIFFAMATOIRE DES PROPOS TENUS ENVERS M... PAR F..., DECLARE CELUI-CI COUPABLE DE COMPLICITE DE DIFFAMATION PUBLIQUE ENVERS UN PARTICULIER, MAIS RELAXE, DE CE CHEF, B..., EN RAISON DE SA BONNE FOI, QUE SUR CES DIVERS POINTS, LA DECISION EST DEVENUE DEFINITIVE ;
ATTENDU QUE POUR RETENIR, A LA CHARGE DE DAME L..., LE DELIT DE DIFFAMATION PUBLIQUE ENVERS UN PARTICULIER, L'ARRET ENONCE QUE L'INTENTION DE NUIRE N'A PAS A ETRE APPRECIEE DANS LA PERSONNE DU DIRECTEUR DE LA PUBLICATION DONT LE DEVOIR EST DE SURVEILLER ET DE VERIFIER TOUT CE QUI Y EST INSERE, ET QUE CE DIRECTEUR, AUX TERMES DE L'ARTICLE 42 DE LA LOI DU 29 JUILLET 1881, EST PENALEMENT RESPONSABLE EN SA QUALITE ET COMME AUTEUR PRINCIPAL DES DELITS COMMIS PAR LA VOIE DE CE JOURNAL, SANS QU'IL Y AIT LIEU DE DISTINGUER LES ARTICLES PUBLIES SELON LEUR ORIGINE OU LEUR NATURE, L'ARTICLE INCRIMINE CONTENANT DES IMPUTATIONS DIFFAMATOIRES ENVERS LA PARTIE CIVILE ;
MAIS ATTENDU QUE LA COUR D'APPEL N'A PU, SANS SE CONTREDIRE, CONSIDERER QUE LA REPRODUCTION DES PROPOS DIFFAMATOIRES PAR L'AUTEUR DE L'ARTICLE INCRIMINE ETAIT JUSTIFIEE, TANDIS QUE LEUR PUBLICATION PAR LE RESPONSABLE DU JOURNAL NE L'ETAIT PAS, QU'EN STATUANT AINSI, ALORS QUE, DE PLUS, S'IL EST VRAI QUE L'INTENTION DE NUIRE DOIT ETRE APPRECIEE EN LA PERSONNE DE L'AUTEUR DE L'ARTICLE DIFFAMATOIRE, L'EXISTENCE DE FAITS JUSTIFICATIFS SUFFISANTS POUR FAIRE ADMETTRE LA BONNE FOI DE CE DERNIER A POUR EFFET D'EXCLURE, TANT LA RESPONSABILITE PENALE DE CET AUTEUR QUE CELLE DU DIRECTEUR DE LA PUBLICATION DU JOURNAL DANS LEQUEL L'ARTICLE INCRIMINE A ETE INSERE, LA COUR D'APPEL N'A PAS DONNE UNE BASE LEGALE A SA DECISION, QUE LA CASSATION EST ENCOURUE DE CE CHEF ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE L'ARRET DE LA COUR D'APPEL DE PARIS, EN DATE DU 15 NOVEMBRE 1979, MAIS SEULEMENT EN CELLES DE SES DISPOSITIONS AYANT CONDAMNE DAME L... POUR DIFFAMATION PUBLIQUE ENVERS UN PARTICULIER, TOUTES AUTRES DISPOSITIONS DUDIT ARRET ETANT EXPRESSEMENT MAINTENUES, ET POUR ETRE STATUE A NOUVEAU CONFORMEMENT A LA LOI, DANS LES LIMITES DE LA CASSATION AINSI PRONONCEE, RENVOIE LA CAUSE ET LES PARTIES DEVANT LA COUR D'APPEL D'AMIENS, A CE DESIGNEE PAR DELIBERATION SPECIALE PRISE EN CHAMBRE DU CONSEIL.