| France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 12 janvier 1981, 79-95026

STATUANT SUR LE POURVOI FORME PAR :
- L'ADMINISTRATION DES DOUANES ET DES DROITS INDIRECTS,
ET PAR :
- LE MINISTRE DE L'ECONOMIE ET DES FINANCES,
CONTRE UN ARRET DE LA COUR D'APPEL DE DIJON, CHAMBRE CORRECTIONNELLE, EN DATE DU 7 DECEMBRE 1979, QUI A ANNULE LES ACTES DE LA PROCEDURE SUIVIE, DES CHEFS D'IMPORTATION SANS DECLARATION DE MARCHANDISES PROHIBEES, D'INFRACTION A LA REGLEMENTATION ET A LA LEGISLATION SUR LES RELATIONS FINANCIERES AVEC L'ETRANGER ET DE COMPLICITE D'IMPORTATION SANS DECLARATION DE MARCHANDISES PROHIBEES, CONTRE X... PIERRE, Y... DESIRE, LES ETABLISSEMENTS X... ET LES ETABLISSEMENTS Y..., S.A. ;
VU LES MEMOIRES PRODUITS EN DEMANDE ET EN DEFENSE ;
SUR LE MOYEN UNIQUE DE CASSATION, PRIS DE LA VIOLATION DES ARTICLES 64 ET 454 DU CODE DES DOUANES, 593 DU CODE DE PROCEDURE PENALE, DEFAUT DE REPONSE AUX CONCLUSIONS D'APPEL VISEES PAR LE PRESIDENT, DEFAUT ET CONTRADICTION DE MOTIFS, MANQUE DE BASE LEGALE, EN CE QUE L'ARRET CONFIRMATIF ATTAQUE, FAISANT DROIT AUX CONCLUSIONS DU PREVENU, A DECLARE NULS LA PERQUISITION PRATIQUEE LE 25 AVRIL 1973 AU DOMICILE DE X... ET DANS SES LOCAUX COMMERCIAUX, LA SAISIE SUBSEQUENTE ET TOUS LES ACTES ULTERIEURS DE LA PROCEDURE ET REJETE LES DEMANDES DE L'ADMINISTRATION DES DOUANES ET DROITS INDIRECTS ET DU MINISTRE DE L'ECONOMIE ET DES FINANCES, EXERCANT L'ACTION FISCALE, AUX MOTIFS QU'IL N'EXISTE AUCUN MOTIF POUR SUBORDONNER LA VALIDITE DES PERQUISITIONS ET SAISIES AUTORISEES PAR L'ARTICLE 454 DU CODE DES DOUANES, AUX SEULES CONDITIONS DE FORME PRESCRITES PAR L'ARTICLE 64 SUR LES VISITES DOMICILIAIRES, TEXTE AUQUEL SE REFERE L'ARTICLE 454 ET QUI SUBORDONNE AUSSI LA POSSIBILITE DE VISITES DOMICILIAIRES A LA RECHERCHE DE MARCHANDISES ; QU'A SUPPOSER LA SOLUTION CONTRAIRE, IL NE SUBSISTERAIT AUCUNE RAISON D'AMENAGER SELON LES FORMES ETROITES, LE DROIT DE COMMUNICATION A L'EGARD D'UN AUTEUR OU COMPLICE D'INFRACTION, SI LES MEMES AGENTS ETAIENT AUTORISES A PERQUISITIONNER QUEL QUE SOIT L'OBJET DE LEUR ENQUETE ; QU'IL A D'AILLEURS ETE RAPPELE PAR LA JURISPRUDENCE (C.A. AIX 26 MARS 1957, POURVOI REJETE PAR LA CHAMBRE CRIMINELLE LE 22 DECEMBRE 1958), QUE LA VALIDITE DE LA SAISIE EST SUBORDONNEE A LA COMMUNICATION VOLONTAIRE DES DOCUMENTS AUX AGENTS, LE DROIT DE COMMUNICATION N'EMPORTANT PAS CELUI DE PERQUISITION ET LE DROIT DE VISITE DOMICILIAIRE N'EMPORTANT PERQUISITION QU'A L'EGARD DES MARCHANDISES ;
ALORS QU'AUX TERMES DE L'ARTICLE 64 DU CODE DES DOUANES, POUR LA RECHERCHE DES MARCHANDISES DETENUES FRAUDULEUSEMENT DANS LE RAYON DES DOUANES, A L'EXCEPTION DES AGGLOMERATIONS DONT LA POPULATION S'ELEVE AU MOINS A 2 000 HABITANTS, AINSI QUE POUR LA RECHERCHE EN TOUS LIEUX DES MARCHANDISES SOUMISES AUX DISPOSITIONS DE L'ARTICLE 215 CI-APRES, LES AGENTS DES DOUANES PEUVENT PROCEDER A DES VISITES DOMICILIAIRES EN SE FAISANT ACCOMPAGNER D'UN OFFICIER MUNICIPAL DU LIEU OU D'UN OFFICIER DE POLICE JUDICIAIRE ; QU'EN AUCUN CAS CES VISITES NE PEUVENT ETRE FAITES LA NUIT ; QUE D'AUTRE PART, L'ARTICLE 454 APPLICABLE AU CONTENTIEUX DES RELATIONS FINANCIERES AVEC L'ETRANGER DISPOSE QUE LES AGENTS VISES A L'ARTICLE 453 (C'EST-A-DIRE CEUX QUI SONT HABILITES A CONSTATER LES INFRACTIONS A LA LEGISLATION ET A LA REGLEMENTATION DES RELATIONS FINANCIERES AVEC L'ETRANGER) SONT HABILITES A EFFECTUER EN TOUS LIEUX DES VISITES DOMICILAIRES DANS LES CONDITIONS PREVUES PAR L'ARTICLE 64 DU PRESENT CODE ; QUE L'ANALYSE COMPARATIVE DES ARTICLES 454 ET 64 DEMONTRE QUE L'OBJECTIF DE LA VISITE DOMICILIAIRE ETANT LA RECHERCHE DE MARCHANDISES DE FRAUDE EN MATIERE DOUANIERE ET LA RECHERCHE DES INFRACTIONS EN MATIERE DE RELATIONS FINANCIERES AVEC L'ETRANGER, LES " CONDITIONS PREVUES PAR L'ARTICLE 64 ", SELON LE TEXTE DE L'ARTICLE 454, NE PEUVENT ETRE QUE LES CONDITIONS DE FORME :
ASSISTANCE D'UN OFFICIER DE POLICE JUDICIAIRE, INTERDICTION D'OPERER LA NUIT ;
ALORS QUE CETTE CONCLUSION EST CONFIRMEE PAR LE FAIT QUE, DANS L'INTERPRETATION DE L'ARRET ATTAQUE, L'ARTICLE 454 SERAIT PRATIQUEMENT INAPPLICABLE ; QU'EN EFFET, D'UNE PART, EN DROIT, LES MARCHANDISES SUSCEPTIBLES DE FAIRE L'OBJET DES INFRACTIONS AUX CHANGES SONT L'OR, LES CHEQUES ET LES BILLETS DE BANQUE, TOUTES MARCHANDISES QUI NE TOMBENT PAS SOUS LE COUP DE L'ARTICLE 215 DU CODE DES DOUANES (CF. ARRETE DU 3 OCTOBRE 1968) ; QUE, DES LORRS, L'ARTICLE 454 NE PERMETTRAIT LA RECHERCHE, EN MATIERE DE CHANGES, QUE DE MARCHANDISES DE FRAUDE TROUVEES DANS LE RAYON DES DOUANES, HORS LES VILLES DE PLUS DE 2 000 HABITANTS ; QUE POURTANT, CONTRADICTOIREMENT AVEC CETTE CONSEQUENCE, L'ARTICLE 454 STIPULE SON APPLICABILITE EN TOUS LIEUX ; QUE, D'AUTRE PART, EN FAIT, LES RECHERCHES EN MATIERE DE CHANGE CONCERNENT ESSENTIELLEMENT LES ELEMENTS DE PREUVE ET NON LE CORPS DU DELIT ; QUE LES CONCLUSIONS D'APPEL, A TORT DELAISSEES, SOUTENAIENT A CET EGARD (P. 11) QUE L'ESSENTIEL DES INFRACTIONS AUX CHANGES EST REVELE SOIT PAR UNE COMPTABILITE OCCULTE, SOIT PAR L'ENSEMBLE DES DOCUMENTS AFFERENTS AUX RELATIONS FINANCIERES DECOULANT ELLES-MEMES DIRECTEMENT DE L'ENSEMBLE DES DOCUMENTS COMMERCIAUX PORTANT SUR LE COMMERCE INTERNATIONAL ; QUE L'INTERPRETATION DU JUGEMENT ABOUTIRAIT A EMPECHER LA CONSTATATION DES INFRACTIONS A LA LEGISLATION DES RELATIONS FINANCIERES AVEC L'ETRANGER DANS UNE PROPORTION QUI SERAIT AU MOINS DE L'ORDRE DE 90 % DES INFRACTIONS ACTUELLEMENT RELEVEES ;
ALORS, PAR AILLEURS, QUE L'ARGUMENT SELON LEQUEL, SI LA THESE DES DOUANES DEVAIT ETRE ACCEPTEE, IL N'Y AURAIT AUCUNE RAISON D'AMENAGER SELON DES FORMES ETROITES LE DROIT DE COMMUNICATION A L'EGARD D'UN AUTEUR OU COMPLICE D'INFRACTION SI LES MEMES AGENTS ETAIENT AUTORISES A PERQUISITIONNER QUEL QUE SOIT L'OBJET DE LEUR ENQUETE, NE TIENT PAS COMPTE DE CE QUE L'ARTICLE 454 NE CONCERNE QUE LE DOMAINE PARTICULIER DES RELATIONS FINANCIERES AVEC L'ETRANGER, A L'EXCLUSION DU DOMAINE PROPREMENT DOUANIER, DANS LEQUEL N'EST PERMISE LA SAISIE DE DOCUMENTS QUE DANS LE CADRE DE L'ARTICLE 65 DU CODE DES DOUANES, C'EST-A-DIRE LORSQUE CEUX-CI ONT ETE AU PREALABLE COMMUNIQUES ;
ALORS ENFIN QUE L'ARRET DE LA CHAMBRE CRIMINELLE DE LA COUR DE CASSATION, INVOQUE PAR LA COUR DE DIJON A L'APPUI DE SA DECISION, A STATUE EXCLUSIVEMENT EN VERTU DE L'ARTICLE 65, EN DECIDANT QUE CE TEXTE ASSORTIT LE DROIT DE COMMUNICATION DU DROIT DE SAISIR LES DOCUMENTS COMMUNIQUES, MAIS NE CONCERNE EN RIEN LES CONDITIONS D'APPLICATION DE L'ARTICLE 454 ;
VU LESDITS ARTICLES ;
ATTENDU QUE L'ARTICLE 454 DU CODE DES DOUANES AUTORISANT LES AGENTS HABILITES A CONSTATER LES INFRACTIONS A LA REGLEMENTATION ET A LA LEGISLATION SUR LES RELATIONS FINANCIERES AVEC L'ETRANGER, A EFFECTUER DES VISITES DOMICILIAIRES DANS LES CONDITIONS PREVUES PAR L'ARTICLE 64 DU CODE DES DOUANES, INSTITUE EN CETTE MATIERE UNE REGLE SPECIFIQUE QUI PEUT S'APPLIQUER, SELON LES OBLIGATIONS DE FORME EDICTEES PAR CE DERNIER TEXTE, A LA RECHERCHE NON SEULEMENT DE MARCHANDISES DETENUES FRAUDULEUSEMENT MAIS AUSSI A CELLE DES DOCUMENTS DE NATURE A CONSTITUER LE CORPS OU LA PREUVE DE CES DELITS ;
ATTENDU QU'IL RESULTE DES ENONCIATIONS DES JUGES DU FOND QUE, EN OBSERVANT LES EXIGENCES DE L'ARTICLE 64 DU CODE DES DOUANES AUQUEL RENVOIE L'ARTICLE 454 DU MEME CODE RELATIF A LA CONSTATATION DES INFRACTIONS A LA LEGISLATION SUR LES RELATIONS FINANCIERES AVEC L'ETRANGER, DES AGENTS DE L'ADMINISTRATION DES DOUANES SE SONT RENDUS LE 24 AVRIL 1973 AU SIEGE DES ETABLISSEMENTS X... ET SE SONT FAIT COMMUNIQUER PAR X... PIERRE LES DOCUMENTS COMPTABLES ET COMMERCIAUX RELATIFS A DES OPERATIONS D'IMPORTATION ; QU'ILS ONT SAISI CES DOCUMENTS ; QU'ILS ONT PROCEDE DE MEME LE LENDEMAIN A LEURS BUREAUX A L'EGARD D'AUTRES DOCUMENTS AFFERENTS A DES MOUVEMENTS FINANCIERS, AVEC LA SUISSE, COMMUNIQUES PAR X... ; PUIS, QUE, SE REFERANT AUX ARTICLES PRECITES, LES MEMES AGENTS, ASSISTES D'UN OFFICIER DE POLICE JUDICIAIRE, ONT PROCEDE ENSUITE A UNE VISITE DOMICILIAIRE DE L'HABITATION ET DES LOCAUX COMMERCIAUX DE PIERRE X... D'OU ILS ONT EMPORTE D'AUTRES DOCUMENTS DONT ILS ONT REMIS A PLUS TARD L'ANALYSE ; QUE LESDITS DOCUMENTS ONT ETE DECLARES SAISIS APRES INVENTAIRE LE 4 MAI 1973 ;
ATTENDU QU'AVANT TOUTE DEFENSE AU FOND LES PREVENUS ONT SOULEVE LA NULLITE DE CETTE DERNIERE SAISIE EN FAISANT VALOIR QUE L'ARTICLE 64 DU CODE DES DOUANES AUQUEL FAIT REFERENCE L'ARTICLE 454 DU MEME CODE RESTREINT LE DROIT EXCEPTIONNEL DE RECHERCHES DOMICILIAIRES, CONFEREES SOUS CERTAINES CONDITIONS DE FORME AUX AGENTS DE L'ADMINISTRATION DES DOUANES, A LA RECHERCHE DES MARCHANDISES DE FRAUDE ;
ATTENDU QUE POUR FAIRE DROIT A CETTE EXCEPTION ET PRONONCER LA NULLITE DES ACTES DE PROCEDURE QUI ONT SUIVI, LA COUR D'APPEL ENONCE D'UNE PART QU'IL N'EXISTE AUCUN MOTIF POUR SUBORDONNER LA VALIDITE DES PERQUISITIONS ET SAISIES AUX SEULES CONDITIONS DE FORME PRESCRITES PAR L'ARTICLE 64 DU CODE DES DOUANES ALORS QUE CE TEXTE SUBORDONNE AUSSI LA POSSIBILITE DE VISITES DOMICILIAIRES EN MATIERE DOUANIERE A LA RECHERCHE DES MARCHANDISES ; QUE NE SUBSISTERAIT AUCUNE RAISON D'AMENAGER SELON DES NORMES ETROITES LE DROIT DE COMMUNICATION A L'EGARD D'UN AUTEUR OU D'UN COMPLICE DE L'INFRACTION SI LES MEMES AGENTS ETAIENT AUTORISES A PERQUISITIONNER QUEL QUE SOIT L'OBJET DE LEUR ENQUETE ; QUE LA VALIDITE DE LA SAISIE EST SUBORDONNEE A LA COMMUNICATION VOLONTAIRE DES DOCUMENTS AUX AGENTS DES DOUANES, LE DROIT DE COMMUNICATION N'EMPORTANT PAS CELUI DE PERQUISITION ET LE DROIT DE VISITE DOMICILIAIRE N'EMPORTANT CELUI DE PERQUISITION QU'A L'EGARD DE MARCHANDISES ;
MAIS ATTENDU QU'EN STATUANT AINSI ALORS QUE LES DISPOSITIONS DE L'ARTICLE 454 DU CODE DES DOUANES QUI PERMETTENT AUX AGENTS DES DOUANES HABILITES A PROCEDER A DES VISITES DOMICILIAIRES EN MATIERE D'INFRACTIONS A LA LEGISLATION ET A LA REGLEMENTATION DES RELATIONS FINANCIERES AVEC L'ETRANGER LESQUELLES, PAR LEUR NATURE SPECIFIQUE N'IMPLIQUENT PAS NECESSAIREMENT LA DETENTION DE MARCHANDISES DE FRAUDE NE PEUVENT AVOIR SEULEMENT POUR OBJET LA RECHERCHE DE TELLES MARCHANDISES, LA COUR D'APPEL A MECONNU LE SENS ET LA PORTEE DES TEXTES VISES AU MOYEN ;
QUE LA CASSATION EST ENCOURUE DE CE CHEF ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE EN TOUTES SES DISPOSITIONS L'ARRET DE LA COUR D'APPEL DE DIJON EN DATE DU 7 DECEMBRE 1979, ET POUR ETRE JUGE A NOUVEAU CONFORMEMENT A LA LOI, RENVOIE LA CAUSE ET LES PARTIES DEVANT LA COUR D'APPEL DE LYON, A CE DESIGNEE PAR DELIBERATION SPECIALE PRISE EN CHAMBRE DU CONSEIL.