Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Vu l'article 18, alinéa 2, de la loi du 10 juillet 1970 ;
Attendu que, pour le calcul de l'indemnité d'expropriation, la valeur des biens est appréciée, compte tenu du caractère impropre à l'habitation des locaux et installations expropriés, à la valeur du terrain nu, déduction faite des frais entraînés par leur démolition ;
Attendu que, pour fixer l'indemnité due à Borderie à la suite de l'expropriation pour cause d'utilité publique prononcée au profit de la commune de Bordeaux d'un immeuble déclaré insalubre et interdit à l'habitation et loué par Borderie à usage de commerce et d'habitation, l'arrêt attaqué énonce que si en principe et d'une manière générale, l'indemnité d'expropriation concernant les immeubles déclarés insalubres, ayant fait l'objet d'une interdiction d'habiter, doit correspondre à la seule valeur du terrain nu, et encore sans déduction des frais de démolition de constructions qui y sont élevées, par contre les fonds de commerce n'ayant pas pour objet l'utilisation des lieux comme habitation donnent lieu à une indemnité d'éviction calculée selon les règles habituelles, sauf à tenir compte de la précarité de l'exploitation dans le cas où l'occupation commerciale existait en vertu d'une location intervenue avant la notification par le préfet de la déclaration d'insalubrité ; que la commune de Bordeaux ne discute pas l'antériorité des locations commerciales consenties par Borderie dans les locaux envisagés par rapport à la notification de l'arrêté d'insalubrité ; qu'il s'ensuit que les locaux dans lesquels s'exerçaient lesdits commerces peuvent bénéficier d'une indemnisation calculée selon le régime de droit commun ;
Attendu qu'en statuant ainsi, alors que l'article 18, alinéa 2, de la loi susvisée n'édicte aucune exception pour la partie des locaux qui est à usage commercial, la Cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres branches du moyen ; CASSE et ANNULE l'arrêt rendu entre les parties le 15 février 1978, par la Cour d'appel de Bordeaux (chambre des expropriations) ; remet, en conséquence, la cause et les parties au même et semblable état où elles étaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la Cour d'appel de Paris (chambre des expropriations), à ce désignée par délibération spéciale prise en la Chambre du conseil ;