| France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 11 juillet 1978, 77-93102

LA COUR, VU LE MEMOIRE PRODUIT ;
SUR LE MOYEN UNIQUE DE CASSATION PRIS DE LA VIOLATION DES ARTICLES 2, 3, 81 ET SUIVANTS, 464 ET 593 DU CODE DE PROCEDURE PENALE, INCOMPETENCE, DEFAUT DE MOTIFS ET MANQUE DE BASE LEGALE, " EN CE QUE L'ARRET ATTAQUE DECLARE LE TRIBUNAL CORRECTIONNEL COMPETENT POUR CONNAITRE DE L'ACTION EXERCEE PAR LA VEUVE DE LA VICTIME TANT EN SON NOM PERSONNEL QU'AU NOM DE SA FILLE MINEURE, EN REPARATION DU DOMMAGE QUE LEUR A CAUSE LE DECES DE LEUR CONJOINT ET PERE ;
" AUX MOTIFS QUE LE FAIT QU'UN PREVENU AIT ETE CONDAMNE DEFINITIVEMENT POUR BLESSURES INVOLONTAIRES NE FAIT PAS OBSTACLE A CE QUE LE TRIBUNAL CORRECTIONNEL QUI A PRONONCE CONDAMNATION RESTE COMPETENT POUR CONNAITRE DE L'ACTION DES HERITIERS TENDANT A L'INDEMNISATION DU PREJUDICE NE DU DECES ULTERIEUR DU BLESSE, CE DOMMAGE, A CONDITION QUE LA RELATION DE CAUSE A EFFET ENTRE LE TRAUMATISME ET LE DECES SOIT PROUVEE, TROUVANT SON ORIGINE DANS LES FAITS DELICTUEUX TENUS POUR CONSTANTS PAR LA CONDAMNATION PENALE AYANT ACQUIS L'AUTORITE DE LA CHOSE JUGEE ;
" ALORS QUE, D'UNE PART, LES TRIBUNAUX REPRESSIFS NE PEUVENT STATUER SUR LES DOMMAGES-INTERETS QU'ACCESSOIREMENT A LA DECISION QU'ILS RENDENT SUR LE FAIT DELICTUEUX ET PAR LE JUGEMENT QUI PRONONCE SUR LA PREVENTION ; QUE DES LORS, LE TRIBUNAL CORRECTIONNEL AYANT, PAR SON JUGEMENT DU 31 DECEMBRE 1976, DEFINITIVEMENT STATUE SUR L'ACTION PUBLIQUE EN CONDAMNANT LA DEMANDERESSE POUR LE DELIT DE BLESSURES INVOLONTAIRES COMMIS SUR LA PERSONNE DE BERNARD X..., ET AYANT FAIT DROIT A L'ACTION CIVILE EXERCEE PAR BERNARD X... ET PAR SON EPOUSE, EN REPARATION DU DOMMAGE CAUSE PAR CE DELIT, LE TRIBUNAL N'ETAIT PLUS COMPETENT POUR STATUER ULTERIEUREMENT SUR L'ACTION CIVILE EXERCEE PAR LA VEUVE DE LA VICTIME EN SON PROPRE NOM ET AU NOM DE SA FILLE EN REPARATION DU DOMMAGE A ELLES PERSONNELLEMENT CAUSE PAR LE DECES DE LA VICTIME ;
" ALORS QUE, D'AUTRE PART, L'ACTION EN REPARATION DU DOMMAGE CAUSE PAR LE DECES DE LA VICTIME, EXERCEE PAR SA VEUVE EN SON NOM ET AU NOM DE SA FILLE MINEURE, N'AVAIT PAS DE LIEN DE CAUSE A EFFET AVEC LE DELIT DE BLESSURE PAR IMPRUDENCE, DEFINITIVEMENT SANCTIONNE PAR LE JUGEMENT DU 31 DECEMBRE 1976, ETANT OBSERVE QUE LA DEMANDERESSE AYANT ETE DEFINITIVEMENT CONDAMNEE POUR BLESSURES INVOLONTAIRES NE POUVAIT, A RAISON DES MEMES FAITS, ETRE POURSUIVIE POUR UN DELIT D'HOMICIDE PAR IMPRUDENCE, CES POURSUITES NE POUVANT AVOIR LIEU UNE SECONDE FOIS A RAISON DES MEMES FAITS, SOUS UNE QUALIFICATION DIFFERENTE ;
" ALORS ENFIN QUE, DES LORS QUE PAR JUGEMENT DU 31 DECEMBRE 1976, LE TRIBUNAL CORRECTIONNEL DE NOUMEA AVAIT DEFINITIVEMENT STATUE SUR L'ACTION CIVILE, EXERCEE PAR L'EPOUSE DE LA VICTIME DES BLESSURES, CELLE-CI NE POUVAIT A NOUVEAU SAISIR LE TRIBUNAL CORRECTIONNEL D'UNE ACTION CIVILE EN REPARATION DU PREJUDICE A ELLE CAUSE PAR LES MEMES FAITS " ;
VU LESDITS ARTICLES ;
ATTENDU QUE LES TRIBUNAUX REPRESSIFS NE SONT COMPETENTS POUR CONNAITRE D'UNE ACTION CIVILE EN REPARATION D'UN DOMMAGE PROVENANT D'UN DELIT QU'ACCESSOIREMENT A L'ACTION PUBLIQUE ; QUE LE JUGEMENT DEFINITIF DE CELLE-CI LES REND INCOMPETENTS POUR CONNAITRE DE L'ACTION ULTERIEUREMENT ENGAGEE DEVANT EUX PAR LES VICTIMES DE L'INFRACTION, POUR OBTENIR L'INDEMNISATION DE LEUR PREJUDICE PRETENDU ;
ATTENDU QU'IL RESULTE TANT DE L'ARRET ATTAQUE QUE DU JUGEMENT CONFIRME PAR LEDIT ARRET, QUE PAR JUGEMENT CORRECTIONNEL DU 31 DECEMBRE 1976, LA DAME Y..., EPOUSE Z..., A ETE CONDAMNEE POUR INOBSERVATION D'UN SIGNAL STOP ET BLESSURES INVOLONTAIRES SUR LA PERSONNE DE BERNARD X... ; QUE STATUANT SUR LES CONCLUSIONS DE CE DERNIER QUI S'ETAIT CONSTITUE PARTIE CIVILE, LE TRIBUNAL CORRECTIONNEL LUI A ALLOUE UNE PROVISION TOUT EN ORDONNANT UNE EXPERTISE MEDICALE EN VUE D'EVALUER LE PREJUDICE CORPOREL QU'IL AVAIT SUBI ; QUE LE TRIBUNAL, SAISI EGALEMENT D'UNE ACTION CIVILE FORMEE PAR LA DAME X..., A ALLOUE A CELLE-CI 10. 000 FRANCS CFP DE DOMMAGES-INTERETS " TOUS PREJUDICES CONFONDUS " ;
ATTENDU QUE X... ETANT DECEDE LE 10 MARS 1977, LE JUGEMENT SUR L'ACTION PUBLIQUE EST DEVENU DEFINITIF ; QUE LA DAME VEUVE X..., AGISSANT TANT EN SON NOM PERSONNEL QU'EN SA QUALITE D'ADMINISTRATRICE LEGALE DES BIENS DE SA FILLE MINEURE, A SAISI LE TRIBUNAL CORRECTIONNEL, PAR VOIE DE CITATION, D'UNE DEMANDE TENDANT A LA REPARATION NON SEULEMENT DU PREJUDICE SUBI PAR X... AU JOUR DE SON DECES MAIS AUSSI DU PREJUDICE MATERIEL ET MORAL EPROUVE PAR ELLE ET SA FILLE DU FAIT DU DECES DE LEUR AUTEUR ;
ATTENDU QUE PAR JUGEMENT DU 27 MAI 1977, LE TRIBUNAL A CONDAMNE LA DAME Z... A PAYER LA SOMME DE 515. 845 FRANCS CFP AU TITRE DES PERTES DE SALAIRES DE X... DU JOUR DE SON ACCIDENT A CELUI DE SON DECES ET A ORDONNE UNE EXPERTISE MEDICALE EN VUE DE DETERMINER SI CE DECES ETAIT BIEN LA CONSEQUENCE DE L'ACCIDENT ;
ATTENDU QUE LA COUR D'APPEL APRES AVOIR CONFIRME LA DECISION DES PREMIERS JUGES EN CE QUE CEUX-CI S'ETAIENT DECLARES COMPETENTS POUR CONNAITRE DE LA DEMANDE EN REPARATION DU PREJUDICE PERSONNEL EPROUVE PAR LA DAME X... ET SA FILLE, A EVOQUE LE FOND, A CONSTATE LA RELATION DE CAUSE A EFFET EXISTANT ENTRE L'ACCIDENT ET LE DECES, A EVALUE LES DIFFERENTS CHEFS DE PREJUDICE ET A ALLOUE A LA DEMANDERESSE LES SOMMES GLOBALES DE 13. 062. 405 FRANCS CFP POUR ELLE-MEME ET 1. 650. 000 FRANCS CFP POUR LA MINEURE ;
MAIS ATTENDU QUE LA JURIDICTION CORRECTIONNELLE QUI AVAIT DEFINITIVEMENT STATUE TANT SUR L'ACTION PUBLIQUE QUE SUR L'ACTION CIVILE INITIALEMENT ENGAGEE PAR LA DAME X... AVAIT EPUISE A CET EGARD SES POUVOIRS JURIDICTIONNELS ET NE DEMEURAIT SAISIE QUE DE L'ACTION EN REPARATION DU DOMMAGE SUBI PAR X... LUI-MEME, DOMMAGE DONT L'EVALUATION AVAIT ETE SUBORDONNEE A UNE MESURE D'INSTRUCTION ; QU'EN ACCUEILLANT LA NOUVELLE DEMANDE FORMEE PAR LA DAME X... SANS FAIRE DE DISTINCTION ENTRE LE DOMMAGE DONT ELLE POUVAIT OBTENIR REPARATION EN REPRENANT EN QUALITE D'HERITIERE L'INSTANCE INTRODUITE PAR SON AUTEUR ET LE DOMMAGE PERSONNEL QU'ELLE-MEME ET SA FILLE EPROUVAIENT DU FAIT DU DECES DE X..., LA COUR D'APPEL A MECONNU LES PRINCIPES RAPPELES CI-DESSUS ;
QUE DES LORS LA CASSATION EST ENCOURUE ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE L'ARRET DE LA COUR D'APPEL DE NOUMEA EN DATE DU 6 SEPTEMBRE 1977, ET, POUR ETRE STATUE A NOUVEAU CONFORMEMENT A LA LOI SUR LES INTERETS CIVILS :
RENVOIE LA CAUSE ET LES PARTIES DEVANT LA COUR D'APPEL DE VERSAILLES.