SUR LE PREMIER MOYEN : ATTENDU QUE LA SOCIETE D'AMENAGEMENT FONCIER ET D'ETABLISSEMENT RURAL DE BASSE-NORMANDIE FAIT GRIEF A L'ARRET D'AVOIR ANNULE LA PREEMPTION QU'ELLE A EXERCEE SUR LA VENTE D'UN DOMAINE AGRICOLE CONSENTIE LE 21 MAI 1973 PAR DAME VEUVE X... A CORVEE, ALORS, SELON LE MOYEN, QUE LE DROIT DE PREEMPTION DES SAFER S'EXERCE EN VUE, TANT DE FAVORISER L'EQUILIBRE DES EXPLOITATIONS EXISTANTES QUE DE CONSTITUER DE NOUVELLES EXPLOITATIONS EQUILIBREES, QU'AUCUNE DISPOSITION LEGISLATIVE OU REGLEMENTAIRE N'AYANT DEFINI L'EXPLOITATION AGRICOLE "EQUILIBREE", LES JUGES DU FOND, QUI DISPOSAIENT EN LA MATIERE D'UN POUVOIR DE CONTROLE ET NON D'UN POUVOIR HIERARCHIQUE, NE POUVAIENT, EN L'ABSENCE DE TOUTE VIOLATION D'UNE REGLE DE DROIT, SUBSTITUER LEUR APPRECIATION A CELLE DE LA SAFER ET, QU'EN SE DETERMINANT A PARTIR DE CONSIDERATIONS TENANT COMPTE DE LA SITUATION PARTICULIERE DES ACQUEREURS, LA COUR D'APPEL A OUTREPASSE LES LIMITES DU POUVOIR DE CONTROLE QUI LUI APPARTIENT ;
MAIS ATTENDU QU'IL INCOMBE AUX TRIBUNAUX DE L'ORDRE JUDICIAIRE D'APPRECIER LA REGULARITE DE LA DECISION DE PREEMPTION PRISE PAR UNE SAFER ;
ATTENDU QU'APRES AVOIR CONSTATE QUE LA PROPRIETE PREEMPTEE CONSTITUE UNE EXPLOITATION AGRICOLE D'UN SEUL TENANT, OU L'IMPORTANCE DES BATIMENTS EST EN HARMONIE AVEC CELLE DES TERRES, ET DONT LA SUPERFICIE EST LEGEREMENT SUPERIEURE A LA SUPERFICIE DES EXPLOITATIONS DONT IL EST SOUHAITABLE, DANS LA REGION CONSIDEREE, D'EVITER LA DISPARITION OU LE DEMEMBREMENT, LA COUR D'APPEL DECLARE A BON DROIT QUE LA SAFER NE PEUT, SANS MECONNAITRE LA FINALITE DU DROIT DE PREEMPTION QUI LUI EST ATTRIBUE PAR L'ARTICLE 7 DE LA LOI D'ORIENTATION AGRICOLE DU 8 AOUT 1962, DIVISER UNE PROPRIETE EQUILIBREE POUR EN RECONSTITUER D'AUTRES DONT ELLE VOUDRAIT REALISER L'EQUILIBRE, ET QU'AINSI LA PREEMPTION DOIT ETRE ANNULEE ;
D'OU IL SUIT QUE LE MOYEN N'EST PAS FONDE ;
SUR LE DEUXIEME MOYEN : ATTENDU QUE LA SAFER REPROCHE ENCORE A L'ARRET D'AVOIR ECARTE LE MOYEN PAR LEQUEL ELLE SOUTENAIT QUE L'ACHAT PAR CORVEE DU DOMAINE LITIGIEUX CONSTITUAIT UNE OPERATION DE CUMUL POUR LAQUELLE IL N'AVAIT PAS OBTENU L'AUTORISATION NECESSAIRE, ALORS QU'EN VERTU DE L'ARTICLE 188-1 DU CODE RURAL, TOUT CUMUL D'EXPLOITATIONS EN VUE DE LEUR MISE EN RAPPORT PAR UN MEME EXPLOITANT DOIT ETRE AUTORISE PAR LE PREFET LORSQU'IL A POUR EFFET DE PORTER LA SUPERFICIE GLOBALE EXPLOITEE AU-DELA D'UNE CERTAINE SUPERFICIE ;
QU'EN S'ABSTENANT DE RECHERCHER SI, AU JOUR DE LA VENTE, CORVEE REUNISSAIT LES CONDITIONS EXIGEES PAR CET ARTICLE ET SE TROUVAIT AINSI EN MESURE DE FAIRE ECHEC AU DROIT DE PREEMPTION DE LA SAFER, LA COUR D'APPEL N'A PAS LEGALEMENT JUSTIFIE SA DECISION ;
MAIS ATTENDU QUE LES JUGES DU SECOND DEGRE ONT DECIDE EXACTEMENT QUE LA REPRESSION DES INFRACTIONS A LA REGLEMENTATION DES CUMULS, CONFEREE A L'AUTORITE PREFECTORALE PAR LES ARTICLES 188-7 ET SUIVANTS DU CODE RURAL, ECHAPPAIT A L'INITIATIVE ET A LA COMPETENCE DES SOCIETES D'AMENAGEMENT FONCIER ET D'ETABLISSEMENT RURAL ;
D'OU IL SUIT QUE LE MOYEN NE PEUT ETRE ACCUEILLI ;
ET SUR LE TROISIEME MOYEN : ATTENDU QUE LE POURVOI FAIT ENFIN GRIEF A L'ARRET D'AVOIR CONDAMNE LA SAFER A PAYER A CORVEE 10 000 FRANCS A TITRE DE DOMMAGES-INTERETS, ALORS QUE L'EXERCICE, MEME IRREGULIER, D'UN DROIT, NE CONSTITUE UNE FAUTE SUSCEPTIBLE DE DONNER LIEU A DOMMAGES-INTERETS QUE S'IL PROCEDE D'UN ACTE DE MALICE OU DE MAUVAISE FOI OU D'UNE ERREUR GROSSIERE EQUIPOLLENTE AU DOL ET QU'EN S'ABSTENANT DE CARACTERISER L'ABUS DE DROIT QUE LA SAFER AURAIT COMMIS, LA COUR D'APPEL N'A PAS LEGALEMENT JUSTIFIE SA DECISION ;
MAIS ATTENDU QUE LA CONDAMNATION A DOMMAGES-INTERETS PRONONCEE PAR L'ARRET N'EST PAS DESTINEE A REPARER LE PREJUDICE CAUSE A CORVEE PAR UNE PROCEDURE ABUSIVE, MAIS PAR LA PRIVATION DE JOUISSANCE, PENDANT UNE DUREE DE NEUF MOIS A PARTIR DU 1ER OCTOBRE 1973, DU DOMAINE QU'IL AVAIT ACQUIS LE 21 MAI 1973 DE DAME X... ;
QUE LA COUR D'APPEL A SOUVERAINEMENT EVALUE CE PREJUDICE EN TENANT COMPTE DE LA NATURE ET DE LA SITUATION DU BIEN PREEMPTE A TORT ET QUE LE TROISIEME MOYEN N'EST PAS MIEUX FONDE QUE LES DEUX PREMIERS ;
PAR CES MOTIFS : REJETTE LE POURVOI FORME CONTRE L'ARRET RENDU LE 4 MARS 1975 PAR LA COUR D'APPEL DE CAEN.