REJET DU POURVOI DE X..., PARTIE CIVILE, CONTRE UN ARRET DE LA COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE, 13E CHAMBRE CORRECTIONNELLE, DU 8 MARS 1974, QUI DANS UNE POURSUITE POUR DIFFAMATION PUBLIQUE ENVERS UN PARTICULIER ET COMPLICITE DE CE DELIT, A DECIDE DE SURSEOIR A STATUER JUSQU'A CE QU'UNE INFORMATION JUDICIAIRE SUIVIE CONTRE LEDIT X..., DU CHEF D'ESCROQUERIE, AIT RECU SA SOLUTION. LA COUR, VU LE MEMOIRE PRODUIT ;
SUR LA RECEVABILITE DU POURVOI : ATTENDU QUE L'ARRET ATTAQUE A DIT QU'IL SERAIT SURSIS A STATUER SUR LA PREVENTION DE DIFFAMATION PUBLIQUE ENVERS UN PARTICULIER ET DE COMPLICITE DE CE DELIT JUSQU'A CE QU'UNE INFORMATION JUDICIAIRE SUIVIE DU CHEF D'ESCROQUERIE, CONTRE LA PARTIE CIVILE AIT RECU SA SOLUTION ;
ATTENDU QU'EN DECIDANT AINSI LEDIT ARRET A SUSPENDU POUR UN TEMPS INDETERMINE LE COURS DE LA JUSTICE ;
QU'IL N'ENTRE PAS, DES LORS, DANS LA CATEGORIE DES DECISIONS PRONONCANT SUR DES EXCEPTIONS OU INCIDENTS CONTRE LESQUELLES, AUX TERMES DE L'ARTICLE 59 DE LA LOI DU 29 JUILLET 1881, ET SAUF ORDONNANCE D'ADMISSION RENDUE EN VERTU DES ARTICLES 570 ET 571 DU CODE DE PROCEDURE PENALE, LE POURVOI NE PEUT ETRE FORME A PEINE DE NULLITE, QU'APRES L'ARRET SUR LE FOND ET EN MEME TEMPS QUE LE POURVOI CONTRE LEDIT ARRET ;
QU'AINSI LE POURVOI EST RECEVABLE ;
SUR LE MOYEN UNIQUE DE CASSATION PRIS DE LA VIOLATION DE L'ARTICLE 2 DE LA LOI DU 2 JUILLET 1931, VIOLATION DE L'ARTICLE 35, DERNIER ALINEA DE LA LOI DU 29 JUILLET 1881 SUR LA PRESSE, VIOLATION PAR NON APPLICATION DES ARTICLES 29 ET 32 DE LADITE LOI, NON PERTINENCE ET DEFAUT DE MOTIFS, MANQUE DE BASE LEGALE, " EN CE QUE L'ARRET ATTAQUE A DECIDE DE SURSEOIR A STATUER SUR LE DELIT DE DIFFAMATION REPROCHE A Y... ET A Z..., JUSQU'A DECISION DEFINITIVE SUR LA PLAINTE EN ESCROQUERIE DEPOSEE CONTRE LE DEMANDEUR DEVANT LE JUGE D'INSTRUCTION D'ALES ;
" AUX MOTIFS QUE " LA DISPOSITION FINALE DE L'ARTICLE 35 DE LA LOI DU 29 JUILLET 1881, QUI PERMET AU TRIBUNAL DE SURSEOIR AUX POURSUITES OU AU JUGEMENT LORSQUE LE FAIT IMPUTE FAIT L'OBJET DE POURSUITES COMMENCEES OU D'UNE PLAINTE, N'EST IMPERATIVE QUE DANS LE CAS OU LA PREUVE DE LA VERITE DU FAIT DIFFAMATOIRE NE PEUT ETRE LEGALEMENT RAPPORTEE ;
" MAIS QUE LE TRIBUNAL A TOUJOURS LA FACULTE D'ORDONNER LE SURSIS, DANS L'INTERET D'UNE BONNE ADMINISTRATION DE LA JUSTICE ;
" QUE L'INSTRUCTION SUIVIE SUR LA PLAINTE EN ESCROQUERIE PORTEE CONTRE X... PEUT APPORTER LA PREUVE DE LA VERITE DU FAIT IMPUTE OU DE SA FAUSSETE ;
" QU'ELLE EST DONC DE NATURE A ECLAIRER LA RELIGION DE LA COUR ;
" QU'IL IMPORTE, DES LORS, D'EN ATTENDRE LE RESULTAT POUR STATUER SUR LE DELIT DE DIFFAMATION REPROCHE AUX PREVENUS ;
" ALORS, D'UNE PART, QUE LE DERNIER ALINEA DE L'ARTICLE 35 DE LA LOI SUR LA PRESSE NE PREVOIT LE SURSIS A STATUER QUE SI LES POURSUITES ONT ETE INTENTEES A LA REQUETE DU MINISTERE PUBLIC, OU SI LA PLAINTE EVOQUEE EMANE DU PREVENU LUI-MEME ET NON, COMME EN L'ESPECE, D'UN TIERS, A... ;
" QU'IL ETAIT, EN CONSEQUENCE, INAPPLICABLE EN LA CAUSE ET QUE LES MOTIFS AVANCES PAR L'ARRET ATTAQUE POUR ACCORDER AUX PREVENUS LE SURSIS A STATUER SONT DENUES DE PERTINENCE ;
" ALORS, D'AUTRE PART, QUE L'ARTICLE 2 DE LA LOI DU 2 JUILLET 1931 INTERDIT DE PUBLIER, AVANT DECISION JUDICIAIRE, TOUTE INFORMATION RELATIVE A DES CONSTITUTIONS DE PARTIES CIVILES, SOUS PEINE DE L'AMENDE DE 300 A 90000 FRANCS, EDICTEE PAR L'ARTICLE 39 DE LA LOI DU 29 JUILLET 1881 ;
"QUE CE TEXTE ETAIT EXPRESSEMENT INVOQUE DANS LES CONCLUSIONS DU DEMANDEUR, RESTEES SUR CE POINT SANS REPONSE, DE MEME QU'IL N'A PAS ETE REPONDU AU CHEF PRECIS DESDITES CONCLUSIONS, SOULIGNANT QUE, MEME SI LES PREVENUS AVAIENT PU DEMONTRER LA REALITE DE FAIT DIFFAMATOIRE, ILS AURAIENT, CEPENDANT, COMMIS LE DELIT PREVU PAR LA LOI DU 2 JUILLET 1931, SUSVISEE ;
" QUE CES CONCLUSIONS OBSERVAIENT ENCORE QU'AUCUNE PLAINTE EN ESCROQUERIE N'AVAIT ETE DEPOSEE A L'EPOQUE DE L'ARTICLE INCRIMINE ET QUE, MEME S'IL EN AVAIT ETE AUTREMENT, LE DELIT DE DIFFAMATION N'EN SERAIT PAS MOINS CONSTITUE ;
" QU'EN CONSEQUENCE, L'ARRET ATTAQUE, QUI A FAIT UNE FAUSSE APPLICATION DU DERNIER ALINEA DE L'ARTICLE 35 DE LA LOI SUR LA PRESSE, A DELIBEREMENT IGNORE L'ARTICLE 2 DE LA LOI DU 2 JUILLET 1931 ET N'A PAS REPONDU AUX CONCLUSIONS DE LA PARTIE CIVILE, NE SAURAIT ECHAPPER A LA CASSATION ;
"ALORS ENFIN QUE, LA SUITE DONNEE A LA PLAINTE DE A..., EN DATE DU 26 MAI 1973, NE POURRAIT AVOIR AUCUNE INCIDENCE SUR LA REALITE DU DELIT DE DIFFAMATION, IRREMEDIABLEMENT COMMIS EN MARS 1973, PAR LA PARUTION DE L'ARTICLE INCRIMINE, ACCUSANT LE DEMANDEUR DE COMPLICITE D'ESCROQUERIE, DEUX MOIS AVANT LE DEPOT DE LADITE PLAINTE ;
" QUE LA CASSATION EST ENCORE ENCOURUE, LES MOTIFS DONNES PAR LA COUR POUR JUSTIFIER SA DECISION DE SURSIS A STATUER ETANT AINSI TOTALEMENT INOPERANTS " ;
ATTENDU QUE DANS LE NUMERO DE MARS 1973, DU PERIODIQUE L'EXPRESS-MEDITERRANEE A ETE PUBLIE SOUS LE TITRE " B... EN JUSTICE, C... L'INVENTEUR DE MEJANNES LE CAP, ASSIGNE LE PRESIDENT DU CONSEIL GENERAL QU'IL ACCUSE DE L'AVOIR DEPOSSEDE ", UN ARTICLE QUI SE TERMINAIT PAR LE PASSAGE SUIVANT : " C... (EMMANUEL) VIENT DE PORTER PLAINTE POUR ESCROQUERIE CONTRE D... (ANDRE) ET B... (PAUL) " ;
QUE S'ESTIMANT ATTEINT DANS SON HONNEUR ET SA CONSIDERATION, X..., NOTAIRE A GRASSE, A CITE DEVANT LA JURIDICTION CORRECTIONNELLE Y... QUI ETAIT, A L'EPOQUE, LA DIRECTRICE DE LA PUBLICATION DU PERIODIQUE PRECITE, ET Z... AUTEUR DE L'ARTICLE, SOUS LES PREVENTIONS RESPECTIVES DE DIFFAMATION PUBLIQUE ENVERS UN PARTICULIER ET DE COMPLICITE DE CE DELIT ;
ATTENDU QU'APRES AVOIR RELEVE QUE LES PREVENUS N'AVAIENT PAS RAPPORTE LA PREUVE DE L'EXISTENCE D'UNE PLAINTE EN ESCROQUERIE CONTRE LE NOTAIRE X..., A LA DATE DE LA PUBLICATION DE L'ARTICLE INCRIMINE, MAIS QU'IL RESULTAIT DES RENSEIGNEMENTS RECUEILLIS, QU'UNE TELLE PLAINTE AVAIT ETE PORTEE PEU APRES, LE 26 MAI 1973 AVEC CONSTITUTION DE PARTIE CIVILE, PAR UN TIERS NOMME A..., L'ARRET ATTAQUE FAIT DROIT AUX CONCLUSIONS DES PREVENUS TENDANT A CE QU'IL SOIT SURSIS A STATUER JUSQU'A CE QUE L'INFORMATION OUVERTE SUR LADITE PLAINTE AIT RECU SA SOLUTION ;
QU'A L'APPUI DE SA DECISION L'ARRET ENONCE QUE CETTE INFORMATION " PEUT APPORTER LA PREUVE DE LA VERITE DU FAIT IMPUTE OU DE SA FAUSSETE " ET CONTRIBUER AINSI " A ECLAIRER LA RELIGION DE LA COUR " ;
ATTENDU QU'IL RESULTE DE L'ARTICLE INCRIMINE QUE LES FAITS REPUTES DIFFAMATOIRES IMPUTES AU NOTAIRE X... NE CONCERNAIENT PAS LA VIE PRIVEE ;
QUE DES LORS LA PREUVE DE LA VERITE DESDITS FAITS ETAIT LEGALEMENT RECEVABLE;
QU'EN CET ETAT, C'EST SANS AUCUNEMENT VIOLER LES TEXTES MENTIONNES AU MOYEN QUE, DANS DES CONDITIONS D'AILLEURS AUTRES QUE CELLES VISEES PAR LE DERNIER ALINEA DE L'ARTICLE 35 DE LA LOI DU 29 JUILLET 1881, LA COUR D'APPEL A ORDONNE LE SURSIS A STATUER, EN SE FONDANT SUR DES RAISONS QU'ELLE A APPRECIEES SOUVERAINEMENT ET QU'ELLE A ESTIMEES PROPRES A LA BONNE ADMINISTRATION DE LA JUSTICE ;
QU'EN EFFET SI, LORSQUE LA PREUVE DES FAITS IMPUTES EST LEGALEMENT AUTORISEE, LA VERITE DES IMPUTATIONS NE CONSTITUE UN FAIT JUSTIFICATIF QUE LORSQU'ELLE EST DEMONTREE DANS LES FORMES PREVUES PAR LES ARTICLES 55 ET 56 DE LA LOI DU 29 JUILLET 1881, IL N'EST CEPENDANT PAS INTERDIT AUX JUGES, SAISIS DE FAITS DE CETTE NATURE, D'ATTENDRE POUR STATUER, QUAND CES FAITS FONT L'OBJET D'UNE POURSUITE PENALE, LES RESULTATS DE CETTE POURSUITE, AFIN D'Y RECHERCHER LES ELEMENTS D'APPRECIATION QU'ILS JUGENT UTILES QUANT A LA GRAVITE DE LA DIFFAMATION ET DU PREJUDICE QU'ELLE A PU CAUSER ;
ATTENDU D'AUTRE PART, QUE LES FAITS REPROCHES AUX PREVENUS ETAIENT POURSUIVIS A LA REQUETE DE LA PARTIE CIVILE SOUS LES SEULES QUALIFICATIONS DE DIFFAMATION PUBLIQUE ENVERS UN PARTICULIER ET DE COMPLICITE DE CE DELIT ;
QU'EN L'ETAT DE LA CAUSE, LA COUR D'APPEL N'AVAIT PAS A ENVISAGER DE SUBSTITUER A CES QUALIFICATIONS CELLE, DE DROIT COMMUN, QUE DEFINIT L'ARTICLE 2 DE LA LOI DU 2 JUILLET 1931, ET N'AVAIT PAS DAVANTAGE A S'EXPLIQUER SUR CE POINT, ALORS QUE LA PARTIE CIVILE, TOUT EN FAISANT ETAT DE CE TEXTE, DANS CES CONCLUSIONS N'AVAIT PAS DEMANDE UNE TELLE DISQUALIFICATION ;
QU'AINSI LE MOYEN NE SAURAIT ETRE ACCUEILLI ;
ET ATTENDU QUE L'ARRET EST REGULIER EN LA FORME : REJETTE LE POURVOI
