REJET DU POURVOI DES EPOUX X... (JEAN), PARTIES CIVILES, CONTRE UN ARRET DE LA CHAMBRE D'ACCUSATION DE LA COUR D'APPEL DE DIJON, EN DATE DU 6 DECEMBRE 1973, QUI A CONFIRME L'ORDONNANCE DU JUGE D'INSTRUCTION DISANT N'Y AVOIR LIEU A INFORMER SUR LEUR PLAINTE AVEC CONSTITUTION DE PARTIES CIVILES CONTRE Y... (ROBERT) DU CHEF DE DIFFAMATION. LA COUR, VU LE MEMOIRE PRODUIT ;
SUR LA RECEVABILITE DU POURVOI ;
ATTENDU QUE, MEME EN L'ABSENCE DE POURVOI DU MINISTERE PUBLIC, LA PARTIE CIVILE EST RECEVABLE, AUX TERMES DE L'ARTICLE 575, PARAGRAPHE 1ER, DU CODE DE PROCEDURE PENALE, A SE POURVOIR CONTRE L'ARRET DE LA CHAMBRE D'ACCUSATION DISANT N'Y AVOIR LIEU A INFORMER ;
QUE TEL EST LE CAS DE L'ESPECE ET QU'IL CONVIENT DE DECLARER LE POURVOI RECEVABLE ;
AU FOND : SUR LE MOYEN UNIQUE DE CASSATION PRIS DE LA VIOLATION DE L'ARTICLE 86 DU CODE DE PROCEDURE PENALE, VIOLATION DES ARTICLES 29 ET 41 DE LA LOI DU 29 JUILLET 1881 SUR LA PRESSE ;
ENSEMBLE VIOLATION DES ARTICLES 459, 485 ET 593 DU CODE DE PROCEDURE PENALE, AINSI QUE DE L'ARTICLE 7 DE LA LOI DU 20 AVRIL 1810, DEFAUT DE REPONSE AUX CONCLUSIONS DE LA PARTIE CIVILE, INSUFFISANCE ET DEFAUT DE MOTIFS, ERREUR DE QUALIFICATION, MANQUE DE BASE LEGALE, "EN CE QUE L'ARRET CONFIRMATIF ATTAQUE A DECLARE LES DEMANDEURS MAL FONDES EN LEUR APPEL DE L'ORDONNANCE DE REFUS D'INFORMER DU 3 AOUT 1973 ;
"SANS DONNER AUCUN MOTIF A L'APPUI DE SA DECISION ;
SANS ADOPTER CEUX DU MAGISTRAT INSTRUCTEUR ET SANS REPONDRE AUX CONCLUSIONS REGULIERES DEPOSEES PAR LES PARTIES CIVILES ;
"ALORS, D'UNE PART, QUE LE POURVOI DES DEMANDEURS EST RECEVABLE, EN VERTU DE L'ARTICLE 575-1° DU CODE DE PROCEDURE PENALE, S'AGISSANT D'UNE DECISION DE REFUS D'INFORMER ;
"QUE LES JURIDICTIONS D'INSTRUCTION ONT LE DEVOIR D'INSTRUIRE, CONFORMEMENT A L'ARTICLE 86 DU CODE DE PROCEDURE PENALE ET A LA JURISPRUDENCE CONSTANTE DE LA COUR DE CASSATION ;
"ET QU'EN TOUT ETAT DE CAUSE, LA CHAMBRE D'ACCUSATION NE POUVAIT CONFIRMER L'ORDONNANCE ENTREPRISE SANS DONNER DE MOTIFS PROPRES OU SANS ADOPTER CEUX DU MAGISTRAT INSTRUCTEUR ;
"QUE LA VIOLATION DE L'ARTICLE 86 DU CODE DE PROCEDURE PENALE ET CE DEFAUT TOTAL DE MOTIFS JUSTIFIENT LA CASSATION DE L'ARRET ATTAQUE ;
"ALORS, D'AUTRE PART, QUE, DANS LEURS CONCLUSIONS REGULIEREMENT DEPOSEES, VISEES ET SIGNEES PAR LE PRESIDENT, LES DEMANDEURS SOUTENAIENT QUE Y..., DANS SA LETTRE DU 10 AVRIL 1973 A M LE JUGE COMMISSAIRE, AVAIT INTRODUIT, PAR SES PROPOS, UN ELEMENT ETRANGER AU TEMOIGNAGE QU'IL DEVAIT SOUSCRIRE ET QUE LADITE LETTRE, AYANT ETE ECRITE AVANT L'OUVERTURE DE L'ENQUETE, NE CONSTITUAIT PAS UN ECRIT PRODUIT DEVANT UN TRIBUNAL ET NE BENEFICIAIT, DONC, PAS DE L'IMMUNITE PREVUE PAR L'ARTICLE 41, PARAGRAPHE 3, DE LA LOI DU 29 JUILLET 1881 ;
"QU'IL S'AGISSAIT LA DE CHEFS ESSENTIELS DE DEFENSE ET QUE LA CHAMBRE D'ACCUSATION ETAIT TENUE D'Y REPONDRE, CONFORMEMENT A LA JURISPRUDENCE CONSTANTE DE LA COUR SUPREME ;
"ET QUE, FAUTE DE L'AVOIR FAIT, L'ARRET ATTAQUE ENCOURT UNE CASSATION CERTAINE ;
"ALORS ENFIN QUE L'IMMUNITE ETABLIE PAR L'ARTICLE 41, PARAGRAPHE 3, PRECITE, NE COMPORTE AUCUNE INTERPRETATION EXTENSIVE ET QUE C'EST EN VIOLATION DE CE TEXTE QUE L'ARRET CONFIRMATIF ATTAQUE A DECIDE DE N'Y AVOIR LIEU A INFORMER ;
"QU'EN RAISON DE CETTE VIOLATION, LA DECISION, QUI N'A PAS RETENU A L'ENCONTRE DE Y... LE DELIT DE DIFFAMATION ET A, AINSI, COMMIS UNE ERREUR DE QUALIFICATION MANIFESTE, NE SAURAIT ECHAPPER A LA CENSURE DE LA COUR DE CASSATION" ;
ATTENDU QU'IL APPERT DE L'ARRET ATTAQUE ET DE LA PROCEDURE QU'A LA SUITE D'UN ACCIDENT DE LA CIRCULATION SURVENU DANS LE VAR EN 1964, ET AU COURS DUQUEL JEAN-CLAUDE X... A TROUVE LA MORT, LES EPOUX X..., QUI N'ONT CESSE DE SOUTENIR QUE CET ACCIDENT AVAIT ETE PROVOQUE PAR UN CAMION MILITAIRE DONT LE CONDUCTEUR SERAIT DEMEURE INCONNU, ONT ETE ASSIGNES DEVANT LE TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE DIJON PAR UN SIEUR Z..., GARAGISTE A ONEX (SUISSE), EN PAIEMENT DE FRAIS DE GARDIENNAGE DU VEHICULE DE LEUR FILS ;
QU'ILS ONT APPELE EN GARANTIE L'ETAT FRANCAIS ET L'AGENT JUDICIAIRE DU TRESOR PUBLIC ;
ATTENDU QU'AU COURS DE CETTE PROCEDURE, LE JUGE DE LA MISE EN ETAT A ORDONNE UNE ENQUETE EN LA FORME ORDINAIRE AU SUJET DE CERTAINS FAITS INVOQUES PAR LES EPOUX X..., CONCERNANT TANT LES CIRCONSTANCES DE L'ACCIDENT QUE LES CONDITIONS DANS LESQUELLES ETAIENT INTERVENUS CERTAINS TEMOIGNAGES RELATIFS A CES CIRCONSTANCES, ET QU'IL A ETE PROCEDE A CETTE ENQUETE PAR M BRAY, JUGE COMMIS A CETTE FIN ;
QUE LE CHEF D'ESCADRON DE GENDARMERIE ROBERT Y..., ANTERIEUREMENT EN POSTE A FREJUS, A ETE CITE EN QUALITE DE TEMOIN PAR LES DEMANDEURS ;
QUE, TANT DANS UNE LETTRE ADRESSEE AU JUGE ENQUETEUR ET ANNEXEE AU PROCES-VERBAL D'ENQUETE QUE DANS SA DEPOSITION FAITE SOUS SERMENT DEVANT CE MAGISTRAT, IL A RAPPORTE DES PROPOS PERMETTANT DE DOUTER DE LA SINCERITE DU TEMOIGNAGE D'UN SIEUR A..., ENTENDU AU COURS DE L'INFORMATION PENALE OUVERTE A LA SUITE DE LA MORT DE JEAN-CLAUDE X..., ET A EXPRIME, EN TERMES D'AILLEURS MESURES, SES PROPRES RESERVES A CET EGARD ;
ATTENDU QUE LES EPOUX X..., ESTIMANT QUE CES PROPOS LEUR IMPUTAIENT D'AVOIR DICTE LES DECLARATIONS FAITES PAR A... ET ETAIENT DE NATURE A PORTER ATTEINTE A LEUR HONNEUR, ONT ALORS PORTE PLAINTE AVEC CONSTITUTION DE PARTIE CIVILE CONTRE Y... DU CHEF DE "DIFFAMATION" ;
ATTENDU QUE, POUR CONFIRMER L'ORDONNANCE DU JUGE D'INSTRUCTION DISANT N'Y AVOIR LIEU A INFORMER SUR CETTE PLAINTE, LA CHAMBRE D'ACCUSATION ENONCE, ABSTRACTION FAITE DE MOTIFS SURABONDANTS "QUE Y... AVAIT ETE CITE COMME TEMOIN A LA REQUETE DES EPOUX X... ET QUE LES ECRITS ET PROPOS INCRIMINES N'ETAIENT PAS ETRANGERS A LA CAUSE QUI OPPOSAIT LES PLAIGNANTS A L'ETAT FRANCAIS ;
QUE, DES LORS, Y... JOUISSAIT DE L'IMMUNITE EDICTEE PAR L'ARTICLE 41, ALINEA 3, DE LA LOI DU 29 JUILLET 1881 ET COUVRANT LES DISCOURS PRONONCES ET LES ECRITS PRODUITS EN JUSTICE" ;
ATTENDU QU'EN STATUANT AINSI, ET EN ADMETTANT QUE POUR DES CAUSES AFFECTANT L'ACTION PUBLIQUE ELLE-MEME LES FAITS DENONCES NE POUVAIENT LEGALEMENT COMPORTER UNE POURSUITE, LES JUGES D'APPEL, LOIN D'AVOIR VIOLE LES TEXTES VISES AU MOYEN, EN ONT FAIT L'EXACTE APPLICATION ;
QU'EN EFFET, ET D'UNE PART, L'ARTICLE 41 DE LA LOI DU 29 JUILLET 1881 POSE EN PRINCIPE QUE LES DISCOURS PRONONCES ET LES ECRITS PRODUITS DEVANT LES TRIBUNAUX NE PEUVENT DONNER LIEU A AUCUNE ACTION EN DIFFAMATION ;
QUE CETTE REGLE, DESTINEE A GARANTIR AUSSI BIEN LA SINCERITE DU TEMOIGNAGE QUE LA LIBERTE DE LA DEFENSE, NE RECOIT D'EXCEPTION QUE DANS LE CAS OU LES FAITS DIFFAMATOIRES SONT ETRANGERS A LA CAUSE ;
QUE, D'AUTRE PART, L'IMMUNITE AINSI PREVUE S'APPLIQUE AUX PROPOS TENUS ET AUX PIECES PRODUITES DEVANT LE JUGE COMMIS PAR LE TRIBUNAL A L'EFFET DE PROCEDER A ENQUETE ET DEVANT LEQUEL LES DROITS DE LA DEFENSE PEUVENT S'EXERCER ;
D'OU IL SUIT QUE LE MOYEN NE SAURAIT ETRE ACCUEILLI EN AUCUNE DE SES BRANCHES ;
ET ATTENDU QUE L'ARRET EST REGULIER EN LA FORME ;
REJETTE LE POURVOI