| France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 08 novembre 1973, 73-91121

REJET DU POURVOI DE X... (JEAN), CONTRE UN ARRET DE LA COUR D'APPEL DE PARIS, 9EME CHAMBRE, DU 26 FEVRIER 1973, QUI L'A CONDAMNE POUR DETOURNEMENT DE CORRESPONDANCE ET ABUS DE CONFIANCE, A DIX-HUIT MOIS D'EMPRISONNEMENT AVEC SURSIS, 4000 F D'AMENDE ET A DES REPARATIONS CIVILES. LA COUR, VU LE MEMOIRE PRODUIT ;

SUR LE

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

" ALORS QUE L'ARRET CONSTATE QUE DAME Y... AVAIT DONNE A X... UNE PROCURATION GENERALE POUR TRAITER SES AFFAIRES ET FAIRE TOUT CE QUI POURRA ETRE UTILE ET NECESSAIRE A CET EFFET, QUE X... POUVAIT DONC EN TOUTE BONNE FOI ESTIMER QUE CE MANDAT L'AUTORISAIT A OUVRIR LES LETTRES EMANANT DE CES ORGANISMES, ET QUE DANS SES CONCLUSIONS AUXQUELLES IL N'A PAS ETE REPONDU, X... FAISAIT VALOIR QU'AUCUN EXPEDITEUR PRETENDU DE LETTRE-MISSIVE NE S'ETAIT PLAINT QU'UNE LETTRE EMANANT DE LUI N'AIT PAS ETE EFFECTIVEMENT RECUE PAR DAME Y... ET QUE LA COMPTABILITE DE CELLE-CI AVAIT ETE TENUE AVEC MINUTIE PAR LUI ;

" AUX MOTIFS, D'AUTRE PART, QU'IL AURAIT ETE RETROUVE DANS LA CANTINE UNE ENVELOPPE REDIGEE PAR LA DAME Y... A L'ADRESSE DE MAITRE Z..., NOTAIR A PARIS, ET CONTENANT UN TESTAMENT OLOGRAPHE DATE DU 4 NOVEMBRE 1968 ET UNE LETTRE DE LA DAME Y... EGALEMENT DESTINEE A MAITRE Z... ET DATEE DU 31 OCTOBRE 1958 ;

" ALORS QUE, DANS SES CONCLUSIONS, ICI EGALEMENT LAISSEES SANS REPONSE, X... FAISAIT VALOIR QUE DAME Y... S'ETAIT ELLE-MEME DESSAISIE DE CES LETTRES ENTRE SES MAINS SANS LUI DONNER MANDAT DE LES TRANSMETTRE A SON DESTINATAIRE ;

ATTENDU QU'IL APPERT DE L'ARRET ATTAQUE, ET DU JUGEMENT DONT IL ADOPTE LES MOTIFS, QUE X... A, D'UNE PART, DETOURNE LA CORRESPONDANCE ADRESSEE A LA DAME Y... PAR L'ETABLISSEMENT BANCAIRE ET LE CENTRE DE CHEQUES POSTAUX QUI TENAIENT LES COMPTES OUVERTS AU NOM DE CELLE-CI ;

ATTENDU QUE L'ARRET CONSTATE QUE SI LA DAME Y... A DONNE A X... PROCURATION POUR " TRAITER SES AFFAIRES, ET FAIRE TOUT CE QUI POURRA ETRE UTILE ET NECESSAIRE A CET EFFET ", " CE POUVOIR D'ADMINISTRATION N'IMPLIQUAIT PAS CELUI DE S'EMPARER ET DE DISPOSER DE DOCUMENTS NECESSAIRES A SON EXERCICE ", ET QUE LA MANDANTE S'EST TROUVEE AINSI " PRIVEE DU SEUL MOYEN DE CONTROLE QUE LUI PERMETTAIENT SON AGE ET SON ETAT DE SANTE " ;

ATTENDU, D'AUTRE PART, QU'AUX TERMES DU MEME ARRET, IL A ETE RETROUVE DANS LES BAGAGES DE X... UNE ENVELOPPE DECACHETEE, REDIGEE PAR LA DAME Y..., ET ADRESSEE PAR ELLE A Z..., NOTAIRE, CONTENANT UN TESTAMENT QUI REVOQUAIT CELUI " FAIT SOUS LA MENACE " EN FAVEUR DE LA DEMOISELLE A..., CONCUBINE DE X..., ET UNE AUTRE LETTRE, ADRESSEE PAR LA VICTIME, QUI " IMPLORAIT " L'AIDE DU NOTAIRE Z..., ET ACCUSAIT LE COUPLE X...-A... " DE LUI AVOIR FAIT SIGNER DES CHEQUES EN BLANC, ET RETENU SON COURRIER " ;

ATTENDU QUE LES JUGES DU FOND ENONCENT QUE CES AGISSEMENTS ONT EU POUR EFFET DE PRIVER LES DESTINATAIRES DE LA CORRESPONDANCE QUI LEUR ETAIT ADRESSEE ;

QU'ILS ONT ETE COMMIS PAR X..., VOLONTAIREMENT ET DE MAUVAISE FOI " DANS LE BUT DE CONSERVER PAR TOUS LES MOYENS A A... MICHELE, SA MAITRESSE, LE BENEFICE DE DISPOSITIONS TESTAMENTAIRES INTERVENUES DANS DES CONDITIONS POUR LE MOINS EQUIVOQUES " ;

ATTENDU QU'EN L'ETAT DE CES ENONCIATIONS, EXEMPTES D'INSUFFISANCE OU DE CONTRADICTION, ET DEDUITES PAR LES JUGES DU FOND DES ELEMENTS DE PREUVE CONTRADICTOIREMENT DEBATTUS DEVANT EUX, LA COUR D'APPEL, QUI A REPONDU AUX CONCLUSIONS DU DEMANDEUR, A JUSTIFIE SA DECISION ;

QU'EN EFFET, L'ARTICLE 187, ALINEA 2, DU CODE PENAL REPRIME TOUS LES AGISSEMENTS MALVEILLANTS DE NATURE A PRIVER DE LEURS CORRESPONDANCES CEUX QUI EN SONT LES DESTINATAIRES VERITABLES ;

D'OU IL SUIT QUE LE MOYEN DOIT ETRE ECARTE ;

SUR LE

SECOND MOYEN DE CASSATION :

QU'IL AVAIT ENCAISSE LES COUPONS SOUS LA FORME ANONYME ET QU'IL S'ETAIT AINSI COMPORTE EN VERITABLE PROPRIETAIRE DES BONS ;

" ALORS QUE, D'AUTRE PART, L'ARRET RECONNAIT QUE X... AVAIT ACQUIS LA POSSESSION DE CES BONS, EN VERTU D'UN MANDAT D'ACHETER;

" ALORS QUE, D'AUTRE PART, LE MANDAT QUI LUI AVAIT ETE DONNE PAR DAME Y... POUR LA GESTION DE SES AFFAIRES ETAIT UN MANDAT D'ADMINISTRATION GENERALE, ET QUE LA DIFFERENCE DE COMPORTEMENT ENTRE UN TEL MANDATAIRE ET LE PROPRIETAIRE N'EST PAS EVIDENTE ;

" ALORS QU'ENFIN L'ARRET NE CONSTATE NI QUE X... AIT EU LA VOLONTE DE S'APPROPRIER D'UNE MANIERE DEFINITIVE LES BONS QU'IL AVAIT AINSI REGULIEREMENT ACQUIS, NI QU'IL AIT ETE DANS L'IMPOSSIBILITE DE LES RESTITUER, NI QU'IL Y AIT EU DE SA PART UNE QUELCONQUE INTENTION FRAUDULEUSE ;

ATTENDU QU'IL RESULTE DE L'ARRET ATTAQUE QUE X... A RECU DE LA DAME Y... MANDAT D'ACHETER DES VALEURS, A CHARGE DE LES RENDRE OU REPRESENTER ;

QUE LE PREVENU, AU MOYEN D'UNE PROCURATION QU'IL S'ETAIT FAIT REMETTRE, A OPERE UN RETRAIT DE 6000 F SUR LE COMPTE EN BANQUE DE LA VICTIME ;

QU'IL A ACHETE 15 BONS PTT, 6,50%, ET LES A FAIT ETABLIR AU PORTEUR ;

QU'IL EN A CONSERVE LA DISPOSITION PENDANT PLUS D'UNE ANNEE, PUIS LES A DEPOSES, DANS UNE ENVELOPPE A SON NOM, AU DOMICILE DE SON BEAU-FRERE ;

QU'IL A ENCAISSE LES COUPONS SOUS FORME ANONYME, ET QU'IL EN A DETOURNE LE MONTANT ;

QUE LA DAME Y..., MALGRE SES RECLAMATIONS, N'A JAMAIS PU OBTENIR LA REMISE DE CES TITRES, ET QU'ELLE A ECRIT AU NOTAIRE Z..., DANS UNE DES LETTRES INTERCEPTEES PAR X..., QUE CELUI-CI AVAIT "ACHETE DES VALEURS AU PORTEUR QU'IL A GARDEE PAR DEVERS LUI", ET A DEMANDE AU NOTAIRE D'INTERVENIR ;

ATTENDU QUE PAR CES ENONCIATIONS, LA COUR D'APPEL, QUI A RELEVE L'EXISTENCE DE TOUS LES ELEMENTS CONSTITUTIFS DU DELIT PREVU ET PUNI PAR LES ARTICLES 406 ET 408 DU CODE PENAL, ET NOTAMMENT L'INTENTION FRAUDULEUSE, A JUSTIFIE SA DECISION ;

QUE DES LORS, LE MOYEN NE SAURAIT ETRE ACCUEILLI ;

ET ATTENDU QUE L'ARRET EST REGULIER EN LA FORME ;

REJETTE LE POURVOI