| France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 15 juin 1972, 71-10368

SUR LE PREMIER MOYEN, PRIS EN SA PREMIERE BRANCHE : ATTENDU, SELON LES ENONCIATIONS DE L'ARRET CONFIRMATIF ATTAQUE, QUE DAME Z..., PROPRIETAIRE D'UN IMMEUBLE A USAGE D'HABITATION ET D'HOTEL-RESTAURANT ET DU TERRAIN SUR LEQUEL SEULE UNE SOURCE UTILISEE POUR L'ALIMENTATION ET L'APPROVISIONNEMENT DE BASSINS A TRUITES, A ASSIGNE LA SOCIETE "RAFFINERIE BOUCHON-PAJOT" EN PAIEMENT DE DOMMAGES-INTERETS, POUR LA RECLAMATION DU PREJUDICE QUI LUI AURAIT ETE CAUSE DU FAIT DE LA POLLUTION DE LA SOURCE PAR LE DEVERSEMENT DES EAUX RESIDUAIRES PROVENANT DE L'USINE DE LADITE SOCIETE ;
ATTENDU QU'IL EST FAIT GRIEF A L'ARRET D'AVOIR RETENU LA RESPONSABILITE DE LA SOCIETE, EN CONSIDERANT CELLE-CI COMME GARDIENNE DES EAUX RESIDUAIRES ET DES POCHES ET GALERIES D'ANCIENNES MARNIERES OU S'ETAIENT PRODUITS DES EFFONDREMENTS AYANT PROVOQUE LA POLLUTION, ALORS QUE LA RAFFINERIE BOUCHON-PAJOT N'AURAIT PU ETRE CONSIDEREE COMME GARDIENNE DES POCHES ET GALERIES SOUTERRAINES NI DES EAUX RESIDUAIRES LES AYANT PENETREES, FAUTE DE DISPOSER SUR CES ELEMENTS NATURELS D'UN QUELCONQUE POUVOIR DE DIRECTION ET DE CONTROLE, ET QU'IL AURAIT APPARTENU EN TOUS CAS AUX JUGES DU FOND DE SE PRONONCER SUR CE POINT ;
MAIS ATTENDU QU'IL NE RESULTE NI DE L'ARRET NI DES PRODUCTIONS QUE LE MOYEN AIT ETE SOUTENU DEVANT LES JUGES DU FOND ;
QUE MELANGE DE FAIT ET DE DROIT, LE MOYEN EST NOUVEAU, ET COMME TEL, IRRECEVABLE ;
SUR LE MEME MOYEN, PRIS EN SA SECONDE BRANCHE : ATTENDU QU'IL EST SOUTENU QUE LA COUR D'APPEL NE POUVAIT DEDUIRE DU FAIT QUE LA SOCIETE ETAIT GARDIENNE LA CONSEQUENCE QUE LES EFFONDREMENTS SURVENUS DANS LE SOUS-SOL NE CONSTITUAIENT PAS UNE CAUSE ETRANGERE, MAIS QU'ELLE AURAIT DU RECHERCHER, AINSI QUE L'Y INVITAIENT DES CONCLUSIONS LAISSEES SANS REPONSE, SI CES EFFONDREMENTS N'AVAIENT PAS ETE IMPREVISIBLES POUR LA RAFFINERIE ET INEVITABLES DANS LEURS CONSEQUENCES, CE QU'AVAIENT ADMIS L'EXPERT JUDICIAIRE ET LE TRIBUNAL LUI-MEME ;
MAIS ATTENDU, D'UNE PART, QUE PAR DES MOTIFS ADOPTES PAR L'ARRET LE TRIBUNAL AVAIT DECLARE QUE LES EFFONDREMENTS NE PRESENTAIENT PAS LE CARACTERE DE LA FORCE MAJEURE ;
QUE, D'AUTRE PART, L'ARRET, APRES AVOIR RELEVE QUE LA SOCIETE ETAIT GARDIENNE DU SOL ET DU SOUS-SOL DES BASSINS AINSI QUE DES EAUX RESIDUAIRES QU'ELLE Y DEVERSAIT, ENONCE QUE LES EFFONDREMENTS ETANT DUS, SELON LEXPERT, A LA PRESSION ENGENDREE PAR LA MASSE DES TERRAINS SUS-JACENTS, AINSI QUE PAR CELLE DES EAUX RESIDUAIRES IMBIBANT CES TERRAINS, ET PAR LA MASSE DES TERRES DEPOSEES PAR LES EAUX BOUEUSES REFOULEES, NE SAURAIENT CONSTITUER LA CAUSE ETRANGERE SUSCEPTIBLE D'EXONERER LA SOCIETE DE LA RESPONSABILITE DE L'ARTICLE 1384, ALINEA 1, DU CODE CIVIL ;
QU'EN L'ETAT DE CES ENONCIATIONS, LA COUR D'APPEL, QUI A REPONDU AUX CONCLUSIONS QUI LUI ETAIENT SOUMISES ET N'ETAIT PAS TENUE DE SUIVRE L'AVIS DE L'EXPERT, A, SANS SE CONTREDIRE, LEGALEMENT JUSTIFIE SA DECISION, DE CE CHEF ;
SUR LE SECOND MOYEN : ATTENDU QU'IL EST REPROCHE A LA COUR D'APPEL D'AVOIR REFUSE DE PRESCRIRE QU'UNE FRACTION DE L'INDEMNITE ALLOUEE A DAME Z... SERAIT AFFECTEE A DES TRAVAUX D'ADDUCTION D'EAU POTABLE, AU MOTIF QUE LA VICTIME D'UN DOMMAGE AURAIT LA LIBRE DISPOSITION DES INDEMNITES A ELLE ALLOUEES, ALORS QUE LES JUGES DU FOND ONT LE POUVOIR DE DETERMINER LE MODE DE REPARATION LE PLUS ADEQUAT, EN NATURE OU EN ARGENT, QU'ILS SONT EN DROIT D'ORDONNER L'EXECUTION DE TRAVAUX SUSCEPTIBLES DE METTRE FIN AU PREJUDICE, ET QUE LA VICTIME NE SAURAIT S'Y REFUSER ;
MAIS ATTENDU QUE LES PREMIERS JUGES, APRES AVOIR EVALUE LE PREJUDICE DE DAME Z..., AVAIENT DONNE ACTE A CELLE-CI DE CE QU'ELLE FAISAIT SON AFFAIRE PERSONNELLE DE L'ADDUCTION D'EAU POTABLE, ET QUE DE CE FAIT, TOUT PREJUDICE QUI PROVIENDRAIT DE CE DEFAUT D'ADDUCTION DE L'EAU RISQUAIT DE RESTER A SA CHARGE, ET QU'EN CONSEQUENCE IL N'Y AVAIT PAS LIEU DE RETENIR LA PROPOSITION DE L'EXPERT QUI TENDAIT A CE QU'UNE SOMME SOIT PRELEVEE SUR L'INDEMNITE A REVENIR A DAME Z... ET SOIT RESERVEE POUR CES FRAIS D'ADDUCTION ;
QU'EN ENONCANT QUE LE TRIBUNAL AVAIT EU RAISON DE REFUSER LA DEDUCTION AINSI PROPOSEE PAR L'EXPERT, LA COUR D'APPEL A ABSTRACTION FAITE DE TOUS AUTRES MOTIFS QUI PEUVENT ETRE TENUS POUR SURABONDANTS, DONNE UNE BASE LEGALE A SA DECISION ;
PAR CES MOTIFS : REJETTE LE POURVOI FORME CONTRE L'ARRET RENDU LE 17 NOVEMBRE 1970 PAR LA COUR D'APPEL DE ROUEN