Sur le premier moyen :
Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt attaqué (Paris, 6 mai 1969) d'avoir regardé comme nouvelle en cause d'appel une demande en nullité d'une vente dont, seule, la résolution avait été sollicitée des premiers juges et d'avoir, selon le pourvoi, rejeté cette demande parce que le vendeur ne rapportait pas la preuve que l'acheteur avait profité des manoeuvres pratiquées par des tiers au préjudice du vendeur, alors, d'une part, que la demande n'était pas nouvelle puisque, devant les premiers juges, le vendeur avait fait état d'un dol, "d'une véritable simulation" et alors, surtout, que la Cour ne pouvait, sans contradiction, constater que l'acheteur n'avait payé que 40000 francs, et admettre que la preuve n'était pas faite qu'il ait tiré profit des manoeuvres de Ravier ;
Mais attendu, d'une part que, statuant sur l'exception d'irrecevabilité opposée par l'acheteur à une demande en nullité d'une vente formée par un vendeur qui se déclarait victime de dol, la Cour d'appel a relevé, à bon droit, qu'une telle action tendait à des fins différentes de celles de la demande originaire, laquelle avait pour objet la résolution de la vente pour défaut de payement ; du prix sur le fondement de l'article 1184 du Code civil ; Attendu, d'autre part, que, loin d'admettre, comme l'assure le pourvoi, que l'acheteur n'avait payé que 40000 francs sur le prix de 80000 francs, l'arrêt a constaté, au contraire, que le vendeur avait donné à son acheteur "quittance du payement comptant de l'intégralité du prix convenu" ; Que le moyen ne peut être accueilli ;
Sur le deuxième moyen :
Attendu qu'il est ensuite fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté Jamaa, vendeur de son fonds de commerce, de sa demande en résolution de la vente pour défaut de payement du prix, ce prix ayant été détourné par le séquestre Ravier, mandataire infidèle du vendeur, alors, d'une part, que l'arrêt laisse sans réponse les conclusions selon lesquelles c'était l'acheteur qui était responsable du choix du séquestre et alors, surtout, que le tiers séquestre des fonds doit être considéré comme détenant le prix pour le compte de l'acquéreur, ou tout au moins dans l'intérêt des deux parties et qu'il en était particulièrement ainsi dans l'espèce en ce qui concerne la deuxième partie du prix, que l'acheteur avait empruntée au séquestre pour la laisser entre ses mains ; Mais attendu que la Cour d'appel a précisé que le choix de Ravier comme séquestre du prix avait été fait par le vendeur Jamaa et que c'était à l'égard de ce dernier, son mandant, que Ravier s'était comporté en mandataire infidèle, même en ce qui concerne la somme de 40000 francs que Ravier s'était engagée à prêter à l'acheteur Harriche pour parfaire le prix fixé à l'acte ; qu'elle a ainsi répondu aux conclusions prétendument délaissées ;
Sur le troisième moyen :
Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir rejeté la demande en résolution de la vente pour défaut de payement du prix, alors, d'une part, que l'acheteur doit payer le prix et que, selon le pourvoi, il résultait des propres constatations de la Cour que la seconde moitié du prix, qui devait être fournie par un prêt de l'intermédiaire à l'acheteur, n'a jamais été versée et alors, surtout, que celui qui se prétend libéré doit justifier du payement et que l'arrêt ne pouvait, sans contradiction, tenir la quittance pour preuve du payement et constater que ni l'acheteur, ni l'intermédiaire, l'avaient acquitté le complément de 40000 francs restant dû sur le prix ;
Mais attendu que, contrairement aux affirmations du pourvoi, la Cour d'appel a constaté que le vendeur "a donné quittance à Harriche du payement comptant de l'intégralité du prix convenu" ; qu'à dater de cette quittance, Ravier détenait le total du prix pour le compte du vendeur, lequel devait supporter les risques de disposition ; que l'arrêt ne s'est donc pas contredit en constatant, d'une part, que l'acheteur était entièrement libéré à l'égard de son vendeur et, d'autre part, que cette libération s'étendait à la deuxième somme de 40000 francs, acquitté par Harriche grâce à un prêt obtenu de Ravier, en faveur duquel il avait souscrit en remboursement de ce prêt "trente traites de 1760 francs, qui sont toujours en circulation" ; Que le moyen ne peut être accueilli ;
Sur le quatrième moyen :
Attendu qu'il est enfin reproché à l'arrêt d'avoir accordé cinq mille francs de dommages et intérêts à l'acquéreur en réparation du préjudice subi par lui du fait de l'impossibilité où il s'est trouvé d'exploiter son fonds de commerce pendant quatre ans, sans tenir compte du bénéfice qu'il avait réalisé en ne payant que la moitié du prix ; Mais attendu qu'en présence de l'appel incident formé par Harriche contre la décision des premiers juges qui l'avaient débouté de sa demande en dommages-intérêts, Jamaa s'est borné à conclure à la nullité ou à l'irrecevabilité de cet appel, mais n'a avancé aucun argument quant à la détermination du préjudice subi par Harriche ; que le moyen maintenant tiré du prétendu "bénéfice" réalisé par ce dernier est donc nouveau et, par conséquent, irrecevable ; PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi formé contre l'arrêt rendu le 6 mai 1969, par la Cour d'appel de Paris.