| France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 03 novembre 1970, 69-91887

REJET ET AMNISTIE SUR LE POURVOI DE X... (MARCEL) CONTRE UN ARRET DE LA COUR D'APPEL D'ORLEANS DU 19 MAI 1969 QUI L'A CONDAMNE POUR AVOIR FAIT DES ACTES DE COMMISSAIRE-PRISEUR A 800 FRANCS D'AMENDE ET A PAYER A LA CHAMBRE DES COMMISSAIRES-PRISEURS DU CENTRE, AU CONSEIL REGIONAL DES NOTAIRES DU RESSORT DE LA COUR D'APPEL D'ORLEANS ET A LA CHAMBRE REGIONALE DES HUISSIERS DE JUSTICE DU MEME RESSORT, A CHACUN, LA SOMME DE 100 FRANCS A TITRE DE DOMMAGES ET INTERETS ;

LA COUR, VU LE MEMOIRE PRODUIT ;

SUR LE

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

ENSEMBLE VIOLATION DES ARTICLES 593 DU CODE DE PROCEDURE PENALE ET 7 DE LA LOI DU 20 AVRIL 1810 ;

DEFAUT DE CARACTERISATION DES FAITS, ERREUR DE QUALIFICATION, DEFAUT DE MOTIFS, MANQUE DE BASE LEGALE, EN CE QUE L'ARRET CONFIRMATIF ATTAQUE A DECLARE LA PREVENTION ETABLIE ;

AU MOTIF QUE L'ARTICLE 258 DU CODE PENAL S'APPLIQUE A TOUTE PERSONNE QUI AURA FAIT SANS TITRE UN ACTE D'UNE FONCTION PUBLIQUE, SANS QU'IL Y AIT A RECHERCHER SI LE PUBLIC A PU SE MEPRENDRE SUR LA QUALITE DE CELUI QUI S'EST IMMISCE DANS LES FONCTIONS PUBLIQUES ;

ALORS QUE L'ARTICLE 258 DU CODE PENAL NE PUNIT PAS L'IMMIXTION DANS LES FONCTIONS PUBLIQUES QUI NE CONFERENT PAS UNE DELEGATION DU POUVOIR SOUVERAIN, UNE AUTORITE SUR LES CITOYENS ET LE DROIT DE COMMANDEMENT;

QU'IL A POUR BUT DE PUNIR UNE ATTEINTE PORTEE A LA PUISSANCE ET A L'AUTORITE PUBLIQUES ET NON DE GARANTIR LES PARTICULIERS OU LES AGENTS INVESTIS D'UN MONOPOLE LEGAL ;

QU'AU SURPLUS, C'EST PAR SUITE D'UNE ERREUR DE L'AGENCE QUE LA VENTE DE CHEVAUX DU 5 NOVEMBRE 1966 A ETE QUALIFIEE DE VENTE AUX ENCHERES, BIEN QU'IL S'AGISSE D'UNE VENTE DE GRE A GRE, AU COURS DE LAQUELLE PAS UN SEUL CHEVAL N'A ETE VENDU AU-DESSUS DU PRIX INITIALEMENT INDIQUE, CE QUI EXCLUT FORMELLEMENT L'IDEE D'UNE VENTE AUX ENCHERES ;

QUE LE DEMANDEUR A PROCEDE A UNE VENTE AMIABLE DANS SON PROPRE DOMAINE, COMME IL AURAIT PU LE FAIRE SUR UN MARCHE OU UN CHAMP DE FOIRE, AINSI QUE TOUS LES TEMOINS L'ONT CONFIRME ;

QU'AINSI, IL NE SAURAIT LUI ETRE REPROCHE DE S'ETRE IMMISCE DANS DES FONCTIONS D'OFFICIER MINISTERIEL, DONT LE CONCOURS N'ETAIT PAS NECESSAIRE, ETANT OBSERVE QUE LE DEMANDEUR N'A JAMAIS CHERCHE A PERSUADER QU'IL ETAIT REVETU DE LA FONCTION DE COMMISSAIRE-PRISEUR, LES ACHETEURS SACHANT MEME PERTINEMMENT QU'IL NE L'ETAIT PAS;

QU'IL NE S'EST LIVRE A AUCUNE MANOEUVRE, NI MISE EN SCENE DE NATURE A FAIRE CROIRE AU POUVOIR DU FONCTIONNAIRE PRETENDU;

QU'AUCUNE INTENTION COUPABLE, ELEMENT ESSENTIEL DU DELIT, NE PEUT LUI ETRE IMPUTEE ;

QU'EN CONSEQUENCE, EN DECLARANT ETABLI A SON ENCONTRE LE DELIT PREVU PAR L'ARTICLE 258 DU CODE PENAL, ALORS, DE SURCROIT, QUE LE STATUT DES COMMISSAIRES-PRISEURS NE PREVOIT QU'UNE SIMPLE AMENDE CIVILE EN CAS D'INFRACTION, LA COUR A COMMIS UNE ERREUR DE QUALIFICITION QUI DOIT ETRE REDRESSEE PAR LA COUR SUPREME, DONT LA CENSURE EST INEVITABLE ;

ATTENDU QUE POUR DECLARER X... EXPLOITANT AGRICOLE COUPABLE D'AVOIR FAIT SANS TITRE DES ACTES DE COMMISSAIRE-PRISEUR ET LUI FAIRE APPLICATION DES DISPOSITIONS DE L'ARTICLE 258 DU CODE PENAL LES JUGES DU FOND ENONCENT QU'IL A FAIT ANNONCER PAR LA VOIE DE LA PRESSE QU'IL SERAIT PROCEDE LE 5 NOVEMBRE 1966 AU DOMAINE DES NOUES A UNE VENTE AUX ENCHERES PUBLIQUES DE 45 JUMENTS ET DE 25 POULAINS DE SELLE ;

QUE CE JOUR AUDIT DOMAINE OU TOUTES LES PERSONNES INTERESSEES PAR L'ANNONCE FAITE POUVAIENT ENTRER, X... A PRESENTE CHAQUE ANIMAL QU'IL METTAIT EN VENTE, INDIQUANT LE PRIX QU'IL VOULAIT EN OBTENIR, ATTENDANT LES ENCHERES PUIS VENDANT L'ANIMAL AU PLUS OFFRANT ;

QU'IL A VENDU AINSI AUX ENCHERES UN CERTAIN NOMBRE DE BETES ;

QU'IL A PROCEDE DE CETTE MANIERE EN VUE D'EVITER DES FRAIS ET DE PAYER DES DROITS ET QU'IL A AGI AVEC INTENTION COUPABLE ;

ATTENDU QU'EN L'ETAT DE CES ENONCIATIONS DESQUELLES RESULTE A LA CHARGE DE X... LA REUNION DE TOUS LES ELEMENTS TANT MATERIELS QU'INTENTIONNELS DU DELIT QUI LUI EST REPROCHE, LES JUGES DU FOND, SANS VIOLER AUCUN DES TEXTES VISES AU MOYEN, ONT JUSTIFIE LEUR DECISION ;

D'OU IL SUIT QUE CE MOYEN NE SAURAIT ETRE ACCUEILLI ;

SUR LE

SECOND MOYEN DE CASSATION :

DES ARTICLES 459 ET 593 DU MEME CODE, AINSI QUE DE L'ARTICLE 7 DE LA LOI DU 20 AVRIL 1810;

DEFAUT DE REPONSE AUX CONCLUSIONS, INSUFFISANCE ET DEFAUT DE MOTIFS, MANQUE DE BASE LEGALE, EN CE QUE LA COUR A ADMIS LA RECEVABILITE DE L'ACTION CIVILE DES CHAMBRES DEPARTEMENTALES DES HUISSIERS ET DES NOTAIRES DU LOIRET ;

AUX MOTIFS QUE CES DEUX DERNIERS ORGANISMES ONT LE DROIT, CONCURREMMENT AVEC LES COMMISSAIRES-PRISEURS, DE PROCEDER AUX ENCHERES PUBLIQUES D'OBJETS MOBILIERS ET QUE CHARGES DE LA DEFENSE DES INTERETS GENERAUX DE LEURS PROFESSIONS RESPECTIVES, ILS ONT SUBI UN PREJUDICE MORAL CERTAIN ;

ALORS QUE LES JURIDICTIONS CORRECTIONNELLES NE PEUVENT LEGALEMENT STATUER QUE SUR LES FAITS RELEVES PAR L'ORDONNANCE OU PAR LA CITATION QUI LES A SAISIES ;

QU'EN L'ESPECE, L'ORDONNANCE DE RENVOI DEVANT LE TRIBUNAL CORRECTIONNEL, DE MEME QUE LA CITATION DU 31 OCTOBRE 1968, VISENT UNIQUEMENT L'IMMIXTION DANS LES FONCTIONS DE COMMISSAIRE-PRISEUR ;

QU'EN CONSEQUENCE, LA CHAMBRE REGIONALE DES HUISSIERS DE JUSTICE, COMME LE CONSEIL REGIONAL DES NOTAIRES, ETAIENT IRRECEVABLES EN LEURS CONSTITUTIONS DE PARTIES CIVILES ;

ET QUE, POUR AVOIR ACCUEILLI LEUR INTERVENTION ET LEUR AVOIR ALLOUE DES DOMMAGES-INTERETS, SANS QUE LES MOTIFS PRECITES REPONDENT AUX CONCLUSIONS PEREMPTOIRES DU DEMANDEUR, L'ARRET ATTAQUE ENCOURT LA CENSURE CERTAINE DE LA COUR DE CASSATION ;

ATTENDU QUE POUR ALLOUER DES DOMMAGES ET INTERETS AU CONSEIL REGIONAL DES NOTAIRES DU RESSORT DE LA COUR D'APPEL D'ORLEANS ET DE LA CHAMBRE REGIONALE DES HUISSIERS DE JUSTICE DU MEME RESSORT, PARTIES CIVILES, L'ARRET ATTAQUE, QUI ADOPTE LES MOTIFS NON CONTRAIRES DU JUGEMENT, ENONCE QUE LES NOTAIRES ET LES HUISSIERS AVAIENT CONCURREMMENT AVEC LES COMMISSAIRES-PRISEURS LE DROIT DE PROCEDER A DES VENTES AUX ENCHERES PUBLIQUES DE MEUBLES DANS LA LOCALITE OU LE DELIT A ETE COMMIS ET QUE LES ORGANISMES SUSVISES CHARGES DE LA DEFENSE DES INTERETS GENERAUX DE LEURS PROFESSIONS RESPECTIVES ONT SUBI CHACUN UN PREJUDICE MORAL ;

ATTENDU QU'EN L'ETAT DE CES ENONCIATIONS, LA COUR D'APPEL, QUI A REPONDU AUX CONCLUSIONS, DONT ELLE ETAIT SAISIE, A JUSTIFIE SA DECISION ;

D'OU IL SUIT QUE LE MOYEN NE SAURAIT ETRE ACCUEILLI ;

ET ATTENDU QUE L'ARRET EST REGULIER EN LA FORME ;

REJETTE LE POURVOI ET ATTENDU QUE PAR SUITE DE CE REJET LA CONDAMNATION PENALE PRONONCEE CONTRE X... EST DEVENUE DEFINITIVE ;

VU L'ARTICLE 8 DE LA LOI DU 30 JUIN 1969 ;

DECLARE L'INFRACTION AMNISTIEE.