REJET du pourvoi de Merbouche abd el Kader Ben Messaoud et de Merbouche Messaoud X... contre un arrêt de la Cour d'Appel, du 17 décembre 1951, qui a déclaré le premier, mineur de 16 ans, coupable du crime d'incendie volontaire et a ordonné son placement pour deux ans dans une maison d'éducation surveillée et a déclaré le second civilement responsable de condamnations pécuniaires intervenues.
LA COUR,
Sur le rapport de Monsieur le conseiller Patin, les observations de Maîtres Vidart et Mayer, avocats en la Cour, et les conclusions de Monsieur l'avocat général Lebègue ;
Vu les mémoires produits ;
Sur le premier moyen, pris de la violation de l'article 19 de la loi du 22 juillet 1912 et de l'article 215 du Code d'Instruction Criminelle, ensemble violation de l'article 7 de la loi du 20 avril 1810, pour défaut de motifs et manque de base légale en ce que l'arrêt attaqué, tout en infirmant la décision entreprise, l'a néanmoins confirmée en ce qu'elle a retenu le prévenu dans les liens de la prévention, alors que la Cour aurait dû d'office ordonner la nullité et statuer par évocation, du fait que le tribunal de Tizi-Ouzou, avait statué en audience publique sans que soient respectées les prescriptions de l'article 19 de la loi du 22 juillet 1912 susvisée applicable à l'époque en Algérie ;
Attendu que la nullité de procédure invoquée, à supposer qu'elle existât, commise en première instance et non relevée en cause d'appel, ne saurait, d'après l'article 2 de la loi du 29 avril 1806, être invoquée pour la première fois devant la Cour de Cassation ;
Sur le second moyen, pris de la violation par fausse application de l'article 17 de l'ordonnance du 2 février 1945 modifiée par la loi du 24 mai 1951, de l'article 66 du code pénal et de l'avis du Conseil d'Etat du 12 novembre 1806, ensemble violation de l'article 7 de la loi du 20 avril 1810, pour défaut de motifs et manque de base légale, en ce que l'arrêt attaqué a en l'absence d'appel du Ministère public, ordonné le placement du mineur dans une maison d'éducation surveillée à compter du prononcé dudit arrêt, alors que, d'une part, une telle mesure n'était pas prévue par la législation applicable à l'époque des faits et se trouvait de ce fait illégale, et que, d'autre part, elle constituait une mesure accessoire non envisagée par les premiers juges et qui ne pouvait, de ce fait, être prononcée par la Cour d'Appel en l'absence d'appel du Ministère public ;
Attendu que Merbouche a été jugé par le tribunal pour enfants et adolescents de Tizi-Ouzou, en application de la loi du 22 juillet 1912, alors encore en vigueur en Algérie, et que ce Tribunal, ayant admis qu'il avait agi avec discernement l'a condamné à 6 mois d'emprisonnement ; qu'il a relevé appel de cette décision, et que la Cour d'Appel, statuant en conformité de l'ordonnance du 2 février 1945 modifiée par la loi du 24 février 1951, entre temps devenue applicable en Algérie, a déclaré, après avoir constaté sa culpabilité, qu'il n'y avait pas lieu de prononcer contre lui une peine, mais qu'il convenait de le confier pour deux années à un établissement d'éducation surveillée ;
Attendu qu'en faisant ainsi application immédiate, dès sa promulgation en Algérie, de l'ordonnance du 2 février 1945 modifiée par la loi du 24 février 1951, les juges d'appel n'ont pas violé le principe de la non-rétroactivité des lois pénales, ladite ordonnance établissant, pour le jugement des mineurs délinquants, un système qui leur est plus favorable ;
Attendu, d'autre part, que ces mêmes juges ont pu, sur le seul appel du prévenu, substituer à la peine d'emprisonnement prononcée par les premiers juges, sans aggraver le sort du prévenu une des mesures prévues par l'article 16 de l'ordonnance précitée ; ces mesures ainsi autorisées par la loi à l'égard des mineurs reconnus coupables d'infractions à la loi pénale n'étant pas des peines et ayant pour seul but leur protection et leur rééducation ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE les pourvois ;