La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

16/01/1888 | FRANCE | N°JURITEXT000006953102

France | France, Cour de cassation, Chambre civile, 16 janvier 1888, JURITEXT000006953102


ANNULATION, sur le pourvoi du sieur Z..., d'un Arrêt rendu, le 3 juin 1885, par la Cour de Douai, au profit du sieur A....

LA COUR,

Ouï M. le conseiller Crépon, en son rapport ; l'avocat du pourvoi, en ses observations ; M. l'avocat général Desjardins, dans ses conclusions, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Donne défaut contre le défendeur à la cassation ;

Et sur les premier et deuxième moyens du pourvoi ;

Vu les articles 1121, 1690 et 2075 du Code civil ;

Attendu, en droit, que le contrat d'assurances sur la vie, lorsqu

e le bénéfice de l'assurance est stipulé au profit d'une personne déterminée, comporte essentielle...

ANNULATION, sur le pourvoi du sieur Z..., d'un Arrêt rendu, le 3 juin 1885, par la Cour de Douai, au profit du sieur A....

LA COUR,

Ouï M. le conseiller Crépon, en son rapport ; l'avocat du pourvoi, en ses observations ; M. l'avocat général Desjardins, dans ses conclusions, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Donne défaut contre le défendeur à la cassation ;

Et sur les premier et deuxième moyens du pourvoi ;

Vu les articles 1121, 1690 et 2075 du Code civil ;

Attendu, en droit, que le contrat d'assurances sur la vie, lorsque le bénéfice de l'assurance est stipulé au profit d'une personne déterminée, comporte essentiellement l'application de l'article 1121 du Code civil, c'est-à-dire, des règles qui régissent la stipulation pour autrui ;

Que vainement on voudrait prétendre comme l'a fait l'arrêt attaqué que dans un pareil contrat, l'assuré ne stipulant pas pour lui-même les dispositions de l'article 1121 ne sauraient être invoquées par le tiers bénéficiaire ;

Attendu, en effet que, d'une part, le profit de l'assurance peut, dans de certaines éventualités, revenir au stipulant, et que d'ailleurs le profit moral résultant des avantages faits aux personnes désignées suffit pour constituer un intérêt personnel dans le contrat ; que, d'autre part, le stipulant s'engage à verser à la compagnie d'assurances des primes annuelles, de telle sorte qu'à quelque point de vue qu'on se place, il est impossible de soutenir que le stipulant ne stipule pas pour lui-même et que, par suite, l'article 1121 n'est pas applicable ;

Attendu, conformément à la dernière partie de cet article que lorsque le tiers spécialement désigné par la police d'assurance a déclaré vouloir profiter de la stipulation faite en sa faveur, il en résulte pour lui un droit personnel irrévocable, en vertu duquel le promettant sera tenu de lui payer le montant de l'assurance au moment du décès du stipulant, si d'ailleurs les primes ont été régulièrement payées, soit par ce dernier, soit, à son défaut, par le tiers lui-même ;

Attendu que la faillite du stipulant survenue avant son décès ne saurait faire disparaître ce droit et autoriser le syndic à prétendre, au nom de la masse créancière, que la police d'assurance constitue purement et simplement une valeur mobilière demeurée dans le patrimoine du failli et devant servir de gage à ses créanciers ;

Attendu, d'autre part, qu'une police dans laquelle le bénéfice de l'assurance est stipulé au profit d'un tiers nommément désigné, peut, tant que ce tiers ne s'est pas, par une acceptation, approprié, les effets de la stipulation, être modifiée par un avenant substituant un autre nom à celui qui avait été primitivement inscrit ; que cet avenant laisse au contrat son caractère spécial de contrat d'assurance sur la vie, qui comporte, pour sa régularité l'intervention du stipulant et du promettant, autrement dit de la compagnie d'assurances et qui ne saurait être confondu avec un contrat de transport dont la validité et les effets seraient subordonnés aux significations prescrites par les articles 1690 et 2075 du Code civil ;

Attendu, en fait, qu'il résulte des constatations de l'arrêt attaqué :

Que, le 26 juin 1868, le sieur X... a souscrit à la compagnie d'assurances générales une police d'assurance de 10000 francs au profit de sa femme et de ses enfants, lesquels n'ont jamais accepté la stipulation faite en leur faveur ;

Que, le 12 avril 1881, par un avenant à la police de 1868, le nom du sieur Z... a été substitué à celui de la femme et des enfants du sieur Y... comme bénéficiaire du contrat d'assurance ;

Que dans cet avenant ont figuré comme parties contractantes et ont signé : Y..., le stipulant, le représentant de la compagnie d'assurance et Z..., le bénéficiaire de la police ;

Attendu qu'en l'état de ces constatations, en décidant que la police n'avait cessé d'être une créance dont le cessionnaire ne pouvait être saisi à l'égard des tiers que la signification faite au débiteur conformément aux prescriptions des articles 1690 et 2075 du Code civil et en ordonnant au sieur Z... de restituer ladite police aux mains du syndic de la faillite X..., l'arrêt attaqué a violé les articles de loi susvisés, ainsi que les principes en matière de contrat d'assurance sur la vie ;

Par ces motifs, CASSE.


Synthèse
Formation : Chambre civile
Numéro d'arrêt : JURITEXT000006953102
Date de la décision : 16/01/1888
Sens de l'arrêt : Annulation
Type d'affaire : Civile

Analyses

ASSURANCES SUR LA VIE - Stipulation pour autrui - Acceptation du tiers - Faillite du stipulant

Le contrat d'assurances sur la vie, lorsque le bénéfice de l'assurance est stipulé au profit d'une personne déterminée comporte essentiellement l'application des règles qui régissent la stipulation pour autrui. De l'acceptation par ce tiers de la stipulation faite en sa faveur résulte pour lui un droit personnel et irrévocable que la faillite du stipulant survenue avant son décès ne saurait faire disparaître. Tant que cette acceptation n'a pas eu lieu, la police peut être modifiée par un avenant substituant un autre nom à celui qui avait été primitivement inscrit. Cet avenant laisse au contrat son caractère spécial de contrat d'assurance sur la vie, qui comporte pour sa régularité l'intervention du stipulant et de la compagnie et qui ne saurait être confondu avec un contrat de transport dont la validité et les effets seraient subordonnés aux significations prescrites par les articles 1690 et 2075 du Code civil.


Références :

Code civil 1690
Code civil 2075

Décision attaquée : Cour d'appel de Douai, 03 juin 1885


Publications
Proposition de citation : Cass. Chambre civile, 16 jan. 1888, pourvoi n°JURITEXT000006953102, Bull. civ. 1888 N° 11
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 1888 N° 11

Composition du Tribunal
Avocat général : Av.Gén. M. Desjardins
Rapporteur ?: Rapp. M. Crépon

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1888:JURITEXT000006953102
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award