COUR D'APPEL D'ORLÉANS CHAMBRE CIVILE GROSSES + EXPÉDITIONS la SCP LAVAL-LUEGER Me Estelle GARNIER 23/10/2006 ARRÊT du : 23 OCTOBRE 2006 No : No RG : 05/03376 DÉCISION DE PREMIÈRE INSTANCE : Jugement du Tribunal de Grande Instance d'ORLEANS en date du 28 Octobre 2005 PARTIES EN CAUSE APPELANT : Monsieur Tony X... 7 Rue des Aulnes 37550 SAINT-AVERTIN Représenté par la S.C.P. LAVAL-LUEGER avoués à la Cour Ayant pour avocat la S.C.P. BERTRAND-RADISSON-BROSSAS du barreau d'ORLEANS D'UNE PART INTIMÉ : Monsieur Michel Y... 887 Route de la Source 45160 OLIVET Représenté par Maître Estelle GARNIER avoué à la Cour Ayant pour avocat la S.C.P. CEBRON DE LISLE-BENZEKRI du barreau de TOURS D'AUTRE PART DÉCLARATION D'APPEL EN DATE DU 12 Décembre 2005 ORDONNANCE DE CLÈTURE DU 27 Juillet 2006 COMPOSITION DE LA COUR Lors des débats, à l'audience publique du 12 SEPTEMBRE 2006, Madame Elisabeth HOURS, Conseiller, a entendu les avocats des parties, avec leur accord, par application des articles 786 et 910 alinéa 2 du Nouveau Code de Procédure Civile. Lors du délibéré :
Monsieur Alain RAFFEJEAUD, Président de Chambre, Madame Marie-Brigitte NOLLET, Conseiller, Madame Elisabeth HOURS, Conseiller, Rapporteur, qui en a rendu compte à la collégialité. Greffier : Mademoiselle Nathalie Z... faisant fonction de Greffier. ARRÊT :
Prononcé publiquement le 23 OCTOBRE 2006 par mise à la disposition des parties au Greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du nouveau Code de procédure civile. Exposé du litige : Le 11 août 2001, Monsieur Tony X... a acquis de Monsieur Michel Y..., moyennant le prix de 10.214,08 euros, un véhicule d'occasion de marque AUDI totalisant un kilométrage de 116.680 kilomètres. Ce véhicule est tombé en panne le 21 août 2001 et son moteur est désormais hors d'usage. Une expertise amiable n'a pas
permis aux parties de parvenir à un accord. Par ordonnance en date du 17 avril 2002, le juge des référés du tribunal de grande instance d'Orléans a ordonné une expertise confiée à Monsieur A... qui a déposé son rapport le 7 décembre 2002. Par jugement en date du 28 octobre 2001, le tribunal de grande instance d'Orléans, saisi par Monsieur X... de demandes tendant à la résolution de la vente pour vice caché et à l'indemnisation de ses préjudices, l'a débouté de l'ensemble de ses prétentions. Pour statuer ainsi, le premier juge a considéré que le vice caché, dont était atteint le véhicule lors de la vente, ne pouvait être qualifié de rédhibitoire dès lors qu'il n'était pas suffisant pour rendre le véhicule impropre à sa destination, cette impropriété résultant de la conjonction d'autres facteurs postérieurs à la vente. Monsieur X... a relevé appel de ce jugement par déclaration en date du 12 décembre 2005. Les dernières écritures des parties, prises en compte par la Cour au titre de l'article 954 du nouveau code de procédure civile, ont été déposées : - le 10 juillet 2006 pour Monsieur Y..., - le 27 juin 2006 pour Monsieur X... Monsieur X... soutient que le véhicule était, au moment de la vente, affecté d'un vice caché ayant seul entraîné sa panne définitive. Il sollicite en conséquence l'infirmation de la décision entreprise, le prononcé de la résolution de la vente et la condamnation de Monsieur Y... à lui restituer la somme de 10.214,08 euros ainsi qu'à lui payer 5.000 euros à titre de dommages et intérêts pour préjudice de jouissance et 3.000 euros au titre des frais irrépétibles. Monsieur Y... conclut à la confirmation du jugement attaqué. A titre subsidiaire, si la résolution de la vente devait être prononcée, il sollicite le rejet des demandes formées par Monsieur X... au titre des dommages et intérêts et réclame condamnation de celui-ci à lui verser la somme de 5.500 euros de ce chef, l'attitude fautive de l'appelant ayant, selon lui, entraîné la
destruction complète du moteur du véhicule vendu. L'intimé sollicite de plus un délai de 24 mois pour s'acquitter des condamnations éventuellement mises à sa charge et, en tout état de cause, demande le versement, par Monsieur X..., de 2.000 euros en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile. CELA ETANT EXPOSE, LA COUR : Attendu qu'il résulte de l'expertise judiciaire que le véhicule vendu avait été accidenté et présentait des traces de choc sur le côté gauche et sur l'avant ; que les réparations rendues nécessaires par cet accident n'ont pas été effectuées dans les règles de l'art puisque le circuit de climatisation se trouvait placé trop près du radiateur ; que Monsieur Y... affirme qu'il n'a jamais eu connaissance de cet accident ou de ces réparations, ce qui n'est pas démenti par l'expertise, laquelle précise que la culasse du véhicule a été changée, très vraisemblablement en raison de l'accident, en 1999, tandis que Monsieur Y... a acquis l'AUDI litigieuse le 19 juillet 2000 ; Attendu qu'il résulte des déclarations des parties, ainsi que des courriers échangés et des factures produites, que le véhicule a été acquis par Monsieur X... le 11 août 2001 alors qu'il présentait un kilométrage de 116.680 kilomètres ; que, dès le 14 août, la courroie de distribution a dû être changée ; que, de manière surprenante, la facture émise à cette occasion par le garage AAS mentionne un kilométrage de 116.401 kilomètres ; Qu'après avoir repris son véhicule et avoir seulement parcouru quelques kilomètres, Monsieur X... s'est aperçu que la climatisation ne fonctionnait pas et a ramené son AUDI au même garage ; que la facture établie indique qu'a été effectuée, le 21 août 2001 une "réparation par soudure sur condenseur de climatisation, traceur et huile" et mentionne un kilométrage de 116.462 kilomètres, soit 218 kilomètres de moins que six jours auparavant ; que la société MARCEUL, intervenue sur le véhicule le même jour pour la recharge de la climatisation, signale,
quant à elle, que le compteur indique 117.090 kilomètres ; Qu'il est certain que Monsieur X... a repris son véhicule au garage AAS le 21 août à 11 heures et est tombé en panne à 12 heures 30 sur l'autoroute ; que le véhicule, remorqué au garage TARDIVEL présentait alors un kilométrage de 117.162 kilomètres ; Attendu que les deux expertises concluent que les désordres ont été provoqués par une combustion anormale affectant l'ensemble des cylindres et que les destructions constatées sur les pistons, la bouche de préchauffage et les soupapes démontrent qu'il s'agit d'une combustion détonante ; que cette sorte de combustion peut être provoquée par un carburant défectueux, hypothèse écartée en l'espèce, un mauvais calage de la distribution, une combustion parasite et une surchauffe du moteur ; Attendu que la première expertise amiable, effectuée alors que le véhicule était resté en l'état, relevait que la distribution avait été calée par le garage AAS sans respecter les repères prévus par le constructeur, sur un cylindre non prévu pour ce faire ; Que l'expert judiciaire a précisé que, le moteur ayant été démonté avant l'expertise judiciaire, il n'avait pu lui- même vérifier ce point et qu'une épure précise de la distribution n'avait pu être réalisée ; qu'il estimait cependant que le calage de la distribution ne pouvait pas être à l'origine des désordres constatés au motif que le véhicule avait pu parcourir 761 kilomètres depuis le remplacement de la courroie ; Attendu cependant que, pour retenir ce kilométrage, l'expert s'est manifestement fondé sur les factures émises par le garage AAS qui mentionnaient un kilométrage inexact ; qu'en effet , si l'on compare le kilométrage du véhicule lors de la vente, celui relevé par la société MARCEUL, et celui indiqué lors des expertises amiable et judiciaire, on constate que le véhicule n'avait parcouru au total que 482 kilomètres, la majorité de ce kilométrage ayant été effectuée avant la réparation de la courroie de distribution puisque Monsieur
X... a repris son véhicule le 15 août, après cette première réparation, et l'a ramené dès le 16 août au garage AAS en raison de la panne de climatisation ; qu'après la nouvelle réparation il n'a roulé qu'une heure trente avec son véhicule et n'a parcouru que 72 kilomètres ; que les conclusions de l'expert judiciaire, selon lesquelles l'hypothèse d'un mauvais calage de la courroie de distribution doit être écartée uniquement en raison du kilométrage parcouru, ne peuvent donc être retenues ; Attendu, en ce qui concerne une combustion parasite, que les deux experts ont constaté que de l'huile avait pénétré en sortie du turbo- compresseur vers le moteur ; que cette huile a servi de carburant en brûlant en dehors de la phase d'injection- combustion- détente du cycle de fonctionnement du moteur ; que l'huile se trouvant sous la forme de gouttelettes, sa combustion ne peut être progressive et est détonante ; que le rapport d'expertise amiable a indiqué que le niveau d'huile du carter moteur était situé au repère maximum de la jauge , ce que n'a pu constater l'expert judiciaire, le moteur n'ayant pas été conservé en l'état ; qu'il convient cependant de préciser que les constatations du premier expert, qui indique qu' il a été mis 0,75 litre de plus que ce qui est préconisé par le constructeur, ne sont pas contestées ; qu'un niveau trop important , surtout sur un moteur à injection directe, comme c' était le cas en l'espèce, entraîne une surchauffe du moteur en pleine charge ; que la température excessive entraîne alors une destruction des pistons, voire de l'ensemble du moteur ; que, si l'expert judiciaire, qui n'a pu constater lui même le trop-plein indique qu"aucune certitude ne peut être apportée", il précise cependant que, selon lui, le moteur a été effectivement soumis à des combustions parasites qui sont partiellement à l'origine des désordres constatés ; Attendu, en ce qui concerne la surchauffe du moteur, que les deux experts ont relevé que le condenseur du circuit
de climatisation était déformé et se trouvait trop près du radiateur ; que l'expert judiciaire précise que cette proximité pouvait modifier la trajectoire du flux d'air devant refroidir le radiateur, ce qui serait partiellement à l'origine des désordres constatés ; Attendu qu'il résulte ainsi des expertises effectuées que la détérioration du moteur est due à un ensemble de facteurs : le mauvais calage de la courroie de distribution, un trop-plein d'huile, ces deux facteurs n'étant pas des vices cachés antérieurs à la vente, et une surchauffe du moteur, due à une trop grande proximité du condenseur du circuit de distribution avec le radiateur, ce facteur préexistant à la vente intervenue entre les parties ; que cette surchauffe a été aggravée par le fait que Monsieur X... n'a pas stoppé son véhicule alors qu'il avait constaté que le tableau de bord lui indiquait une température de l'eau très élevée ; Attendu qu'aux termes de l'article 1641 du code civil, le vendeur n'est tenu de la garantie des vices cachés que lorsque ceux-ci rendent la chose vendue impropre à l'usage auquel elle est destinée ou diminuent fortement cet usage ; Qu'en l'espèce cette impropriété ou cette diminution ne sont démontrées par aucune des deux expertises produites aux débats, celles-ci établissant au contraire que la proximité anormale du circuit de climatisation et du radiateur ne pouvait, en l'absence des trois autres causes sus-visées et indépendantes de ce vice caché, affecter le fonctionnement du véhicule et entraîner la destruction du moteur ; Que le jugement entrepris ayant débouté Monsieur X... de l'ensemble de ses demandes sera dès lors confirmé ; Attendu qu'il y a lieu de faire application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ; PAR CES MOTIFS Statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort, CONFIRME la décision entreprise, Y AJOUTANT, CONDAMNE Monsieur X... à payer à Monsieur Y... la somme de 1.200 euros au titre des
dispositions de l'article 700 du nouveau code de procédure civile, CONDAMNE Monsieur X... aux dépens d'appel, ACCORDE à Maître GARNIER , avoué, le bénéfice des dispositions de l'article 699 du nouveau code de procédure civile. Arrêt signé par Monsieur Alain RAFFEJEAUD, président et Mademoiselle Nathalie Z... faisant fonction de greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire. LE GREFFIER,
LE PRÉSIDENT.