COUR D'APPEL DE VERSAILLES Code nac : 80A 15ème chambre ARRET No CONTRADICTOIRE DU 28 SEPTEMBRE 2006 R.G. No 05/03843 AFFAIRE :
Mohamed X... C/ S.A. MAP en la personne de son représentant légal ... Décision déférée à la cour : Jugement rendu(e) le 26 Mai 2005 par le Conseil de Prud'hommes de NANTERRE Section : Encadrement No RG : 04/00471 Expéditions exécutoires Expéditions Copies délivrées le : à : REPUBLIQUE FRANCAISE AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS LE VINGT HUIT SEPTEMBRE DEUX MILLE SIX, La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :
Monsieur Mohamed X... ... 75020 PARIS représenté par Me Laurent BACHELARD, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : C. 220 APPELANT S.A. MAP en la personne de son représentant légal 10-12-14, rue d'Athènes 75009 PARIS représentée par Me Marilyne HAGEGE, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : D139 ASSEDIC PARIS (Association Loi 1901) 4 rue Traversière 75134 PARIS CEDEX 11 représenté par Me Véronique DAGONET, avocat au barreau de CRETEIL, vestiaire : PC 003 INTIMES Composition de la cour : En application des dispositions de l'article 945-1 du nouveau code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 21 Juin 2006, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Monsieur Jean-François DE CHANVILLE, conseiller chargé d'instruire l'affaire. Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composé de :
Monsieur Gérard POIROTTE, conseiller faisant fonction de président,
Monsieur François MALLET, conseiller,
Monsieur Jean-François DE CHANVILLE, conseiller, Greffier, lors des débats : Monsieur Pierre-Louis LANE
FAITS, PROCÉDURE ET MOYENS DES PARTIES
M. Mohamed X... a été embauché par contrat du de travail à durée indéterminée du 1er janvier 2001 en qualité d'ingénieur d'affaire, statut cadre, position 2.3, coefficient hiérarchique 150 par la société MAP, qui a pour activité le conseil et l'offre de services spécialisés en management de l'assurance projet. La convention collective applicable est celle des bureaux d'études, cabinet d'ingénieurs conseil. L'entreprise compte au moins onze salariés.
Par lettre du 20 octobre 2003 remise en main propre l'employeur a convoqué le salarié à un entretien préalable fixé au 27 octobre 2003 en vue de son licenciement. Il lui était en même temps notifié sa mise à pied à titre conservatoire dès la réception de la correspondance et jusqu'à la prise d'une décision.
La rupture a été portée à sa connaissance par lettre du 3 novembre 2003 dans les termes suivants : Nous avons découvert début octobre, que vous aviez proféré des menaces violentes à l'égard d'un de nos consultants, Monsieur Abdelkrim Y...
Alors de ce salarié est une personne consciencieuse, effectuant avec sérieux son travail, vous l'avez menacé de lui donner un coup de tête au motif qu'il refusait d'obtempérer à une demande de votre part de modifier ses congés afin d'exécuter une mission que vous entendiez lui confier. Notre collaborateur a suffisamment pris au sérieux votre menace, pour établir une attestation qu'il nous a remise, très précise et circonstanciée, révélant en outre des faits antérieurs de même nature. A lui seul, ce motif justifierait votre licenciement pour faute grave. Cependant, alerté par cette révélation, j'ai tenu personnellement à m'informer, dans un souci d'équité, auprès d'autres membres de notre personnel. J'ai alors découvert que vous étiez coutumier d'une attitude particulièrement irrespectueuse envers les personnes, et que vous aviez, à l'encontre d'un autre collaborateur,
Monsieur Nadir Z..., adopté un comportemen qui pourrait recevoir la qualification de harcèlement moral. Plusieurs autres collaborateurs se sont plaints également de vos méthodes et de vos violences verbales. Nous constatons que chaque fois, c'est pour pallier les manquements à l'organisation et la gestion de vos activités que vous avez recours à des propos ou des pressions dévalorisant voire terrorisant vos collègues, qu'ils fassent partie de vos équipes ou non. Ces faits sont inadmissibles, et nous n'admettons pas que vous puissiez traiter ainsi des ingénieurs, consultants, pour masquer vos propres défaillances. Lors de l'entretien préalable, vous vous êtes contenté de nier en bloc l'intégralité des faits qui vous ont été reprochés, adoptant cependant au cours de cet entretien un comportement très agressif qui ne fait malheureusement que nous confirmer dans la conviction que les écrits qui nous ont été remis, et qui émanent de personnes n'ayant aucun intérêt à vous nuire, sont conformes à une triste réalité. L'ensemble des ces faits rend impossible le maintien de votre contrat de travail fût-ce pendant la durée limitée du préavis. La présente notification marquera, dès première présentation, la rupture de votre contrat de travail, pour faute grave, privative de toute indemnité de rupture. .
Le salaire versé à M. X... au titre du mois de septembre 2003 était de 4 065,30 ç.
Contestant cette mesure, le salarié a saisi le conseil des prud'hommes de NANTERRE aux fins de se voir allouer les sommes suivantes : ô
5 674 ç de rappel de prime d'octobre 2003 et 567,40 de congés payés incidents ; ô
2 439,19 ç de salaire correspondant à la mise à pied et 243,91 ç de congés payés incidents ; ô
29 793,12 ç de préavis et 2 979,31 ç de congés payés incidents ; ô
8 859,24 ç d'indemnité conventionnelle de licenciement ; ô
194 947,02 ç d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ; ô
9 931,04 ç de dommages intérêts pour procédure vexatoire ; ô
3 000 ç en application l'article 700 du Nouveau code de procédure civile.
Il demandait en outre de recouvrer ses droits sur ses attributions de stock options ALTRAN et la délivrance des documents sociaux sous astreinte.
Par jugement du 26 mai 2005, la juridiction saisie a déclaré le licenciement dénué de cause réelle et sérieuse, a débouté le demandeur de ses demandes de rappel de prime et congés payés y afférents ainsi que de sa demande relative aux stocks options. Elle a en outre condamné la société MAP à payer au salarié les sommes suivantes : ô
2 439,19 ç au titre des salaires de la période de mise à pied ; ô
243,91 ç de congés payés incidents ; ô
19 930,00 ç au titre du préavis ; ô
1 993,00 ç au titre des congés payés y afférents ; ô
8 396,01 ç d'indemnité conventionnelle de licenciement ; ô
40 000 ç d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ; ô
2 500 ç au titre de la procédure vexatoire ; ô
1 000 ç en application de l'article 700 du Nouveau code de procédure civile.
La société MAP puis M. X... ont régulièrement interjeté appel. Les deux procédures ont respectivement été enregistrées sous les numéros 05/03388 et 05/03843.
Par conclusions écrites déposées et visées par le greffier et
soutenues oralement à l'audience, la société MAP sollicite le débouté de l'ensemble des demandes formées contre elle.
Par conclusions écrites déposées et visées par le greffier et soutenues oralement à l'audience, le salarié conclut à la confirmation sur l'absence de cause réelle et sérieuse, mais à l'infirmation pour le surplus et à la condamnation de l'employeur à lui verser les sommes suivantes : ô
5 674 ç de prime ; ô
567,40 de congés payés incidents ; ô
2 439,19 ç au titre du salaire de mise à pied ; ô
243,91 ç de congés payés incidents ; ô
29 793,12 ç d'indemnité de préavis ; ô
2 979,31 ç de congés payés incidents ; ô
8 859,24 ç d'indemnité légale de licenciement ; ô
194 947,02 ç de dommages intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ; ô
3 000 ç en répétition des frais non compris dans les dépens.
Enfin il sollicite la délivrance des documents sociaux sous astreinte et prie la cour de dire qu'il recouvrera rétroactivement au 3 novembre 2003 son droit à percevoir ses stock options, conformément au plan d'option de souscription d'actions ALTRAN TECHNOLOGIES SA et de condamner la société MAP à l'indemniser pour la perte subie au titre des participations qu'il détient conformément au plan d'option de souscription d'actions.
L'ASSEDIC de PARIS demande la confirmation du jugement et la condamnation de l'employeur à lui verser les sommes de 23 680,02 ç en remboursement des allocations chômage versées au salarié et de 500 ç en application de l'article 700 du Nouveau code de procédure civile. Pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, la
cour, conformément aux dispositions de l'article 455 du Nouveau code de procédure civile, renvoie aux conclusions déposées et soutenues à l'audience ainsi qu'aux prétentions orales telles qu'elles sont rappelées ci-dessus. DÉCISION
Considérant qu'il convient d'ordonner la jonction des procédures no 05/03843 et 05/03388 ;
Sur le rappel de prime
Considérant que le contrat de rémunération de 28 janvier 2003 stipule le versement d'une part d'une prime de croissance versée au mois de décembre égale à 3 % de la marge commerciale brute cumulée constatée sur le compte d'exploitation des activités du pôle industrie jusqu'à 1 067 000 ç hors taxe et une prime de croissance égale à 5 % de la marge commerciale brute cumulée au delà de 1 067 000 ç, chaque prestation devant dégager au minimum une marge commerciale de 2 287 ç ;
Considérant que le salarié réclame 6 % de la marge commerciale réalisée en octobre 2003 en alléguant l'adoption d'un nouveau taux de commission postérieurement à celui précédemment cité ;
Considérant que l'annexe au bulletin de salaire de septembre produit par l'intimé et dont l'authenticité n'est pas contestée fait en effet ressortir un taux d'intéressement de 6 % sur lequel l'employeur ne s'exprime pas;
Qu'il convient d'ordonner la réouverture des débats pour que l'employeur s'explique sur ce taux et que le salarié s'explique par un calcul précis sur la somme de 5 674,14 ç censée correspondre à la marge commerciale d'octobre susceptible de servir de base au calcul la prime demandée ;
Sur le licenciement
Considérant que l'employeur produit une série d'attestations qui établissent chez M. X... un manque de doigté et de qualités
humaines dans les relations de travail qui nuisaient à l'harmonie de son équipe et à son efficacité, sans que pour autant ces témoignages caractérisent des violences verbales ou des propos ou pressions excédant le pouvoir de direction de l'employeur ;
Que son attitude, serait-elle maladroite n'est en tout cas pas de nature à caractériser une faute disciplinaire ;
Que seul constitue un agissement susceptible d'être qualifié de faute le fait d'avoir dit à M. Y... placé sous son autorité si on était dehors je vais te donner un coup de tête ;
Mais que ces paroles violemment agressives ne peuvent être datées avec précision autrement qu'à la veille des vacances prises vers le 20 août 2003 par la victime de ces propos ;e 20 août 2003 par la victime de ces propos ;
Qu'il n'est pas démontré que ceux-ci ont été proférés moins de deux mois avant l'engagement de la procédure disciplinaire qui résulte de l'envoi de la lettre de convocation à l'entretien préalable datée du 20 octobre 2003, ni même que l'employeur n'en a pris connaissance que dans ce délai, de sorte que l'employeur ne justifie pas que ce manquement n'est pas prescrit au sens de l'article L 122-44 du Code du travail ;
Considérant qu'il s'ensuit que le licenciement est dénué de cause réelle et sérieuse ;
Sur les conséquences pécuniaires du licenciement
Considérant que compte tenu des derniers salaires versés au salarié avant son licenciement, il lui sera alloué la somme de 2 439,19 ç au titre de la période de mise à pied, outre 243,91 ç au titre des congés payés incidents ;
Considérant que la période de préavis qui est de trois mois en application de l'article 15 de la convention collective sera rémunérée par l'allocation d'une somme de 26 046,17 ç outre 2 604,61ç
au titre des congés payés incidents ;
Considérant qu'en application de l'article 19 de la convention collective, l'indemnité de licenciement qui est d'un tiers de mois, correspondant au douzième de la rémunération des douze derniers mois précédant la notification précédent la notification de la rupture, par année de présence, doit être fixée à la somme demandée de 8 859,24 ç au vu des feuilles de paie produites et compte tenu de ce que l'évaluation du montant de l'indemnité doit être faite en tenant compte de l'ancienneté à l'expiration du contrat, c'est-à-dire à l'expiration normale du préavis même s'il y a eu dispense de l'exécuter ;
Considérant qu'un licenciement infondé pour faute grave fondé sur des faits de harcèlement et violence verbale avec mise à pied conservatoire revêt un caractère vexatoire qui a été exactement évalué par les premiers juges à la somme de 2 500 ç ;
Considérant sur le préjudice lié à la perte de la possibilité d'exercer ses droits sur les stock options, que cette demande n'étant pas chiffrée il convient d'ordonner la réouverture des débats ; qu'il lui sera également demandé d'indiquer compte tenu des mentions contradictoires de ses écritures développées oralement, s'il ne demande à la cour que de lui donner acte de ce qu'il recouvrera son droit à percevoir rétroactivement ses stocks options ou de dire qu'il bénéficiera d'un tel droit ; Et qu'enfin il lui sera demandé de sexpliquer sur la compatibilité entre une demande d'indemnisation pour le préjudice né de la perte subie au titre des stock options et l'admission du principe qu'il conserve des droits à lever les stock options ;
Considérant que le préjudice né de l'impossibilité d'exercer ses droits sur les stock options n'étant qu'un aspect de celui qui est né du licenciement sans cause réelle et sérieuse, il ne sera statué sur
l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse qu'après la clôture des débats à intervenir ;
Sur la délivrance des documents sociaux et l'application de l'article 700 du Nouveau code de procédure
civile
Considérant qui'il convient de surseoir à statuer sur la délivrance des documents sociaux et les demandes d'indemnité en répétition des frais d'appel non compris dans les dépens ;
Sur la demande de l'ASSEDIC de PARIS
Considérant qu'en application du second alinéa de l'article L 122-14-4 du Code du travail, il sera fait droit à la demande de remboursement formée par l'ASSEDIC de PARIS, des indemnités de chômage qu'elle a versées au salarié et qu'elle fixe sans être contestée à la somme de 23 680,02 ç correspondant à la période du 1er janvier 2004 au 30 juin 2004 ; PAR CES MOTIFS LA COUR Statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort ;
Ordonne la jonction des procédures no 05/03843 et 05/03388 ;
Confirme le jugement mais uniquement sur la condamnation de la société MAP à payer à M. Mohamed X... les sommes de 2 439,19 ç de salaire de mise à pied, de 243,91 ç d'indemnité de congés payés incidents, de 8 396,01 ç à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement, 2 500 ç de dommages-intérêts pour procédure vexatoire et 1 000 ç en application de l'article 700 du Nouveau code de procédure civile ;
Avant dire droit sur l'exercice futur des droits du salarié sur les stock options, sur le préjudice né de l'impossibilité d'exercer ses droits et sur l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et sur le rappel de prime, ordonne la réouverture des débats sur les points suivants : ô
contenu exact de la demande de M. Mohamed X... sur l'exercice futur
de ses droits sur les stock options; ô
valeur d'engagement unilatéral du taux de 6 % servant de base au calcul de la prime dont M. X... demande paiement, figurant sur l'annexe au bulletin de salaire de septembre 2003 ; ô
chiffrage par M. Mohamed X... de sa demande au titre de la perte de ses droits sur les stock options à raison du licenciement ; ô
mode de calcul de la prime d'intéressement et notamment mode détermination de la marge commerciale d'octobre susceptible de servir de base à cette opération ; ô
compatibilité de la demande de M. X... au titre de la perte des droits sur les stock options et de la demande sur le bénéfice futur des droits sur les stock options ;
Renvoie à l'audience du jeudi 7 juin 2007 à 14 heures, salle numéro 3,
Dit que la notification du présent arrêt vaudra convocation des parties à ladite audience ;
Infirme pour le surplus ;
Statuant à nouveau
Condamne la société MAP à payer à M. Mohamed X... les sommes de 26 046,17ç au titre de la période de préavis et de 2 604,61 ç au titre des congés payés incidents ;
Y ajoutant
Condamne la société MAP à payer à l'ASSEDIC de PARIS la somme de 23 680,02 çen remboursement des indemnités de chômage ;
Réserve les dépens.
Arrêt prononcé par Monsieur Gérard POIROTTE, Conseiller faisant fonction de président, et signé par Monsieur Gérard POIROTTE, Conseiller faisant fonction de président et par Monsieur Pierre-Louis LANE, Greffier présent lors du prononcé Le GREFFIER, Le PRÉSIDENT,