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24/04/2006 | FRANCE | N°JURITEXT000007628801

France | France, Cour d'appel de Saint-Denis-de-la-Réunion, Ct0041, 24 avril 2006, JURITEXT000007628801


ARRÊT No Avant Dire Droit R.G : 05/01359 Décision déférée :Appel d'un décision rendue par le JUGE DE L'EXPROPRIATION DE ST DENIS en date du 08 JUIN 2005 suivant déclaration d'appel en date du 29 JUILLET 2005 COUR D'APPEL DE SAINT - DENIS CHAMBRE DES EXPROPRIATIONS ARRÊT Avant Dire Droit DU 24 AVRIL 2006 APPELANT :Monsieur Henri X... ... Assisté de Maître KICHENIN, avocat au barreau de Saint-Denis INTIMEES :L'ETAT. DIRECTION DÉPARTEMENTALE DE L'EQUIPEMENT, en la personne de Monsieur Y..., muni d'un pouvoir spécial. ... En présence de M. le Commissaire du Gouvernement désigné par

décision de M. le Directeur des Services Fiscaux en date du 06...

ARRÊT No Avant Dire Droit R.G : 05/01359 Décision déférée :Appel d'un décision rendue par le JUGE DE L'EXPROPRIATION DE ST DENIS en date du 08 JUIN 2005 suivant déclaration d'appel en date du 29 JUILLET 2005 COUR D'APPEL DE SAINT - DENIS CHAMBRE DES EXPROPRIATIONS ARRÊT Avant Dire Droit DU 24 AVRIL 2006 APPELANT :Monsieur Henri X... ... Assisté de Maître KICHENIN, avocat au barreau de Saint-Denis INTIMEES :L'ETAT. DIRECTION DÉPARTEMENTALE DE L'EQUIPEMENT, en la personne de Monsieur Y..., muni d'un pouvoir spécial. ... En présence de M. le Commissaire du Gouvernement désigné par décision de M. le Directeur des Services Fiscaux en date du 06 août 2002 ; Débats :L'affaire a été débattue le 27 février 2006, en audience publique, devant la Cour composée de :Président : Monsieur Jean-François CREZE, Président de chambre Assesseur : Monsieur Jean-Luc RAYNAUD, Conseiller Assesseur : Monsieur Jean-Pierre SZYSZ, Conseiller régulièrement désignés par ordonnance de M. Le Premier Président de la Cour d'Appel de Saint-Denis No 2005/93 du 25 novembre 2005 conformément aux dispositions de l'article 84 de l'ordonnance du 23 octobre 1958 et de l'article 6 du décret du 20 novembre 1959, assistés de Guy LORDELOT, Adjoint Administratif faisant fonctio de greffier. OUI Monsieur le Président en son rapport ;Ou' Monsieur le Commissaire du gouvernement en ses observations ;La Cour a indiqué, à l'issue des débats, que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe le 24 AVRIL 2006. Arrêt : Prononcé par mise à disposition des parties le 24 Avril 2006 Greffier : Guy LORDELOT, Adjoint administratif faisant fonction de greffier. Origine du litige

La procédure d'expropriation a été diligentée pour parvenir à la

création de la route des Tamarins. L'enquête préalable à la déclaration d'utilité publique s'est déroulée du 13 novembre 2000 au 12 janvier 2001, puis du 22 octobre aux 23 novembre 2001 en raison d'une modification affectant les secteurs de Saint-Paul et de Saint-Leu.

La déclaration d'utilité publique a été prise le 03 mai 2002 et l'ordonnance d'expropriation rendue le 24 octobre 2003.

Les terrains propriété de M. Henri X... sur lesquels s'exerce l'expropriation figurent au cadastre de la commune de Saint-Leu sous les références CU numéro 599,601, 611,613, et CS numéro 657.Les emprises respectives sur ces parcelles sont les suivantes :û pour la parcelle CU numéro 599 , emprise de 611 m .û pour la parcelle CU numéro 601, emprise de 4662 m .û pour la parcelle CU numéro 611, emprise de 1476 m .û pour la parcelle CU numéro 613, emprise de 2465 m .û pour la parcelle CS numéro 657, emprise de 47 m .

Au plan local d'urbanisme de la commune de Saint-Leu, les parcelles CU 599,6 01,611 et 613 sont classées en zone NC, tandis que la parcelle CS 657 est classée en zone NC PF.

Suivant le procès-verbal de transport du 27 avril 2005, ces terrains sont décrits de la façon suivante : û CS 657, dont emprise de 47 m : terrain de grande superficie mais de configuration irrégulière au sol, dénivelé et tourmenté, bordé par les lacets du chemin Dubuisson. L'emprise s'exerce sur une partie de terrain située en façade du chemin Dubuisson sur 70 mètres. Il s'agit d'un terrain en nature de talus, broussailleux et rocailleux de forme triangulaire encombré de nombreux détritus.û CU 599 et 601, dont emprise de 611 m et de 4662 m : terrain de grande superficie de configuration irrégulière, longeant au nord la ravine des Poux, savanes herbacées et friches avec affleurement rocheux. Lors du transport sur les lieux, ces terrains ont été déclarés conformes à ce descriptif.û CU 611 et 613,

dont emprise de 1476 m et de 2465 m : terrain massif d'assez bonne configuration traversé par différents chemins, avec façade sur chemin goudronné. Sur ce terrain, il existe un îlot abritant diverses constructions en bois sous tôle. Lors du transport sur les lieux du 27 avril 2005, les mentions suivantes ont été ajoutées : pour CU 611, parcelle en végétation naturelle avec chemin de terre pour accès. Pour CU 613, tranchée et végétation à l'état naturel ; travaux en cours pour un basculement des eaux.

Il est encore ajouté sur le procès-verbal de transport une mention générale dont on ne sait si elle s'applique à l'un des terrains expropriés ou à l'ensemble. Terrains en forte pente avec rocher.

L'autorité expropriante offrait une indemnité globale d'expropriation de 8781 ç en indemnités principale et de remploi, sur la base de 0,81 ç le m correspondant à des terrains agricoles.

Cette évaluation était contestée par M. Henri X... qui relevait que les terrains expropriés devaient être inclus en zone d'extension urbaine en application du schéma d'aménagement régional dont les normes s'imposent au plan d'occupation des sols de la commune, lequel aurait dû être révisé en conséquence. Dès lors, il sollicitait une indemnisation sur la base de terrains nus constructibles par référence aux études de l'Agorah, soit 70 ç le mètre carré, portant ainsi sa demande indemnitaire à 645027 ç, indemnité de remploi en sus.

L'autorité expropriante saisissait alors la juridiction départementale de l'expropriation.État de la procédure

Par jugement du 08 juin 2005, la juridiction départementale de l'expropriation fixait l'indemnité d'expropriation des parcelles litigieuses à 7

418 ç pour l'indemnité principale et à 1363 ç pour l'indemnité de remploi.

M. Henri X... interjetait appel de cette décision par acte du 29

juillet 2005.

Suivant mémoire d'appel du 08 septembre 2005 et mémoire complémentaire du 14 février 2006, il demande à la cour de dire qu'en raison du dol de la partie expropriante, l'évaluation des terrains expropriés doit se faire sans tenir compte de leur classement en zone NC du plan d'occupation des sols du 29 mars 1999, mais par référence à leur situation en zone constructible suivant les prescriptions du schéma d'aménagement régional. En conséquence, il sollicite les indemnités suivantes :û parcelle CS 657 ................................ ( 47 m x 1 ç) = 47 çû parcelle CU 599,6 101,611 et 613.... (9214 m x 70 ç) = 645027 çû indemnité de remploi : 15 % sur 500

000 ç; 10 % sur le surplus.

L'autorité expropriante conteste l'intention dolosive, et se réfère au classement NC et NCPF des parcelles litigieuses au plan d'occupation des sols de la commune pour conclure à une indemnisation sur la base de terrains agricoles par confirmation de la décision entreprise.

Le commissaire du gouvernement estimant la preuve du dol allégué non rapportée, conclut également à la confirmation du jugement déféré.Sur quoi, la cour

La cour se réfère à la décision entreprise et aux écritures des parties et du commissaire du gouvernement pour plus ample exposé des faits, prétentions et moyens des parties. 1) sur le critère de constructibilité des parcelles expropriées.

Aux termes de l'article L. 13 û 15 du code de l'expropriation, l'évaluation des terrains à bâtir tient compte des possibilités légales et effectives de construction qui existaient à la date de référence, un an avant l'ouverture de l'enquête préalable à la déclaration d'utilité publique, soit en l'espèce le 13 novembre1999.

Selon cette disposition, les restrictions administratives aux droits

de construire s'appliquent , sauf si leur institution révèle de la part de l'expropriant une intention dolosive.

Il n'est pas contesté en l'espèce que les parcelles CU concernées par la présente procédure se situent en zone d'extension urbaine en application du schéma d'aménagement régional (SAR) approuvé le 06 novembre 1995. Or, selon la hiérarchie des normes telles que résultant de l'article L.111 û 1 û 1 du code de l'urbanisme , le schéma d'aménagement régional qui a valeur de directive territoriale d'aménagement est supérieur au plan d'occupation des sols ou au plan local d'urbanisme.

Il en résulte que le plan d'occupation des sols ou le plan local d'urbanisme devait être révisé pour être rendu compatible avec ce schéma d'aménagement régional. Or, la procédure de révision initiée par la commune le 27 juin 1996 et à laquelle l'autorité expropriante était associée n'a pas abouti à une mise en compatibilité du secteur concerné avec le schéma d'aménagement puisque les parcelles concernées et classées en zone NC auraient dû être représentées en zone U dans le POS révisé et approuvé par le conseil municipal suivant délibération du 29 mars 1999.

Ainsi l'État , dont l'obligation de faire respecter par la commune cette mise en compatibilité des documents d'urbanisme résulte de l'article L. 123 û 14 du code de l'urbanisme , a failli à sa mission de contrôleur de la légalité avec pour conséquence une très forte sous-évaluation des terrains expropriés catégoriés en terrains agricoles alors qu'ils devaient être classés en terrains à bâtir.

L'intention dolosive de l'autorité expropriante se déduit à la fois de cette faute par omission dans la mise en compatibilité des documents d'urbanisme, et du fait que celle-ci a été associée aux travaux de révision du plan d'occupation des sols de la commune de Saint-Leu initiés par délibération du 03 juillet 1996 et mis en

oeuvre par arrêté municipal du 22 août 1997, avec mention des membres associés au titre des services de l'État. Cette intention dolosive est encore révélée par la persistance de l'autorité expropriante à considérer les parcelles litigieuses comme terrains agricoles alors que cette disqualification résulte de la seule carence des services de l'État.

Il s'ensuit que les parcelles CU propriétés de M. Henri X... devront être évaluées par référence au marché des terrains constructibles sur la commune de Saint-Leu. 2) Sur l'évaluation des parcelles expropriées.

Les termes de comparaison fournis par l'autorité expropriante et par le commissaire du gouvernement en zone NC ou NC PF doivent être écartés puisqu'ils s'appliquent à des terrains agricoles situés en zone non constructible.

Les termes de comparaison fournis par l'autorité expropriante en zone constructible varient de 10,98 ç le m à 57,86 ç le m sans être accompagnés d'un descriptif suffisant pour permettre une comparaison utile avec les parcelles CU expropriées.

Enfin, les références générales fournies par la partie expropriée au titre des mutations de terrains constructibles, études et analyses sur les transactions foncières réalisées par l'Agorah ne permettent pas une comparaison individualisée avec les parcelles expropriées. Il convient à cet égard de rappeler que l'accès au fichier immobilier est ouvert aux particuliers comme au commissaire du gouvernement, avec cette seule différence qu'il est payant pour les premiers, étant précisé encore que la récupération des frais exposés de ce chef est récupérable au titre des frais irrépétibles d'instance.

En dernier lieu, le descriptif des terrains expropriés est encore insuffisant au niveau de la réalité des voies de desserte et des équipements existants.Pour tous ces motifs, il y a lieu d'ordonner

une expertise.* * * Par Ces MotifsLa Cour statuant publiquement, contradictoirement en matière d'expropriation, et en dernier ressort, Déclare l'appel recevable.

Infirme le jugement entrepris.û

Dit que les parcelles CU expropriées devront être évaluées par référence au marché des terrains constructibles sur la commune de Saint-Leu.Avant faire autrement droit,û

Ordonne une expertiseû

Désigne pour y procéder M. Z... Bertrand, .... Avec pour mission de : 1) se rendre sur les lieux en présence des parties ou celles-ci dûment convoquées. Examiner et décrire les parcelles concernées par l'expropriation ; en dresser le plan avec la situation de l'emprise ; décrire les voies d'accès, dessertes , et éléments d'équipements. 2) consulter le dossier de la procédure et se faire remettre tous documents utiles. Impartir un délai de d'un mois aux parties pour produire les termes de comparaison qu'ils entendent invoquer à l'appui de leurs estimations. 3) donner son avis sur les termes de comparaison les plus pertinents sur le marché des terrains constructibles au regard de la configuration des lieux, des dessertes existantes, des éléments d'équipement existants ou des possibilités de raccordement. 4) répondre aux dires des parties. 5) dresser du tout un rapport qui sera déposé au greffe de la cour dans les trois mois de sa saisine.û

Fixe à 1500 ç le montant de la provision à valoir sur la rémunération de l'expert, et que l'autorité expropriante devra déposer au greffe de la cour dans le mois du présent arrêt.û

Dit qu'en cas d'empêchement, il sera pourvu au remplacement de l'expert par ordonnance du président rendue sur simple requête.û

Réserve les dépens et les frais irrépétibles.Le présent arrêt a été

signé par Monsieur François CREZE, Président de Chambre, et par Monsieur Guy LORDELOT, Adjoint Administratif faisant fonction de greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.Le Greffier

Le Président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Saint-Denis-de-la-Réunion
Formation : Ct0041
Numéro d'arrêt : JURITEXT000007628801
Date de la décision : 24/04/2006

Analyses

EXPROPRIATION POUR CAUSE D'UTILITE PUBLIQUE - Indemnité - Immeuble - Situation juridique de l'immeuble - Plan d'occupation des sols - Intention dolosive

En matière d'expropriation, les restrictions administratives aux droits de construire s'appliquent, sauf si leur institution révèle de la part de l'expropriant une intention dolosive. Caractérise ainsi une intention dolosive, le fait par une commune, autorité expropriante ayant été associée aux travaux de révision du plan d'occupation des sols, d'omettre de procéder à la mise en compatibilité des documents d'urbanisme avec le schéma d'aménagement régional et de persister à considérer les parcelles litigieuses comme des terrains agricoles et non des terrains à bâtir alors qu'une telle sous-évaluation résultait de la carence de l'Etat dans sa mission de contrôleur de la légalité


Références :

article L. 13-15 du code de l'expropriationarticles L.111- 1- 1 et L 123-14 du code de l'urbanisme

Décision attaquée : DECISION (type)


Composition du Tribunal
Président : M. CREZE, président

Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.saint-denis-de-la-reunion;arret;2006-04-24;juritext000007628801 ?
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