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04/09/2006 | FRANCE | N°3576

France | France, Cour d'appel de Pau, Chambre civile 1, 04 septembre 2006, 3576


JLP / CD

Numéro / 06

COUR D'APPEL DE PAU
1ère Chambre

ARRET DU 04 / 09 / 2006

rectifié par arrêt
du 12 / 02 / 2007

Dossier : 04 / 00436

Nature affaire :

Demande d'exécution de travaux, ou de dommages-intérêts, formée par le maître de l'ouvrage contre le constructeur ou son garant, ou contre le fabricant d'un élément de construction

Affaire :

S. A. AXA FRANCE

C /

S. A. ATLANTHAL,
SOCAE ATLANTIQUE, Société T. S. B. ETANCHEITE, Société DE TRAVAUX SPECIAUX BERHO (TSB), Jean-Pierre Y..

.

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

A R R E T

prononcé par Monsieur PARANT, Président,
en vertu de l'article 452 du ...

JLP / CD

Numéro / 06

COUR D'APPEL DE PAU
1ère Chambre

ARRET DU 04 / 09 / 2006

rectifié par arrêt
du 12 / 02 / 2007

Dossier : 04 / 00436

Nature affaire :

Demande d'exécution de travaux, ou de dommages-intérêts, formée par le maître de l'ouvrage contre le constructeur ou son garant, ou contre le fabricant d'un élément de construction

Affaire :

S. A. AXA FRANCE

C /

S. A. ATLANTHAL,
SOCAE ATLANTIQUE, Société T. S. B. ETANCHEITE, Société DE TRAVAUX SPECIAUX BERHO (TSB), Jean-Pierre Y...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

A R R E T

prononcé par Monsieur PARANT, Président,
en vertu de l'article 452 du Nouveau Code de Procédure Civile,

assisté de Madame BATAN, Greffier,

à l'audience publique du 4 septembre 2006
date à laquelle le délibéré a été prorogé.

* * * * *

APRES DÉBATS

à l'audience publique tenue le 16 Mai 2006, devant :

Monsieur PARANT, Président

Madame RACHOU, Conseiller

Madame PERRIER, Conseiller, magistrat chargé du rapport conformément à l'article 785 du nouveau Code de procédure civile

assistés de Madame PEYRON, Greffier, présent à l'appel des causes.

Les magistrats du siège ayant assisté aux débats ont délibéré conformément à la loi.

dans l'affaire opposant :

APPELANTE :

S. A. AXA FRANCE
venant aux droits de l'UAP
163 avenue du Haut l'Evêque
BP 197
33608 PESSAC CEDEX

représentée par Me VERGEZ, avoué à la Cour
assistée de Me DE TASSIGNY, avocat au barreau de PAU

INTIMES :

S. A. ATLANTHAL
prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège
153 boulevard des Plages
64600 ANGLET

représentée par la SCP MARBOT / CREPIN, avoués à la Cour
assistée de la SCP BONNET ASTABIE BASTERREIX, avocats au barreau de BAYONNE

SOCAE ATLANTIQUE
prise en la personne de son représentant légal, domicilié en cette qualité audit siège
183 cours du Médoc
33000 BORDEAUX

représentée par la SCP LONGIN, avoués à la Cour
assistée de Me VELLE-LIMONAIRE, avocat au barreau de BAYONNE

Société T. S. B. ETANCHEITE
prise en la personne de son représentant légal, domicilié en cette qualité audit siège
Zone artisanale et commerciale de Maignon
64600 ANGLET

Société DE TRAVAUX SPECIAUX BERHO (TSB)
prise en la personne de son représentant légal, domicilié en cette qualité audit siège
Zone industrielle de Layats
64500 SAINT JEAN DE LUZ

Maître Jean-Pierre Y...,
ès qualités de liquidateur à la liquidation judiciaire de la Société TSB
...
64100 BAYONNE

assigné

sur appel de la décision
en date du 20 OCTOBRE 2003
rendue par le TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE BAYONNE

La société ATLANTHAL, en vue de la construction à Anglet (Pyrénées Atlantiques) d'un complexe sportif et de thalassothérapie financé dans le cadre d'un crédit-bail immobilier conclu le 17 novembre 1987, a signé le 14 janvier 1988 avec la société SOCAE ATLANTIQUE intervenant en qualité d'entreprise générale un marché de travaux pour un montant de 25. 744. 502 francs, désormais 3. 924. 724 euros.

Un second marché a été conclu entre ces mêmes parties le 28 juillet 1988 pour l'aménagement de la thalassothérapie pour un montant de 7. 300. 330 francs, soit 1. 112. 928 euros.

Ce second marché a prévu l'intervention de la société TSB ETANCHEITE en qualité de sous-traitante de l'entreprise générale pour la réalisation de l'étanchéité des installations de thalassothérapie.

La société ATLANTHAL a souscrit auprès de la compagnie UAP-aux droits de laquelle vient aujourd'hui la société AXA France-une police unique de chantier qui a été étendue au second marché par un avenant du 11 avril 1999. Cette police couvre l'assurance dommages-ouvrage et l'assurance de responsabilité décennale des constructeurs et comporte, outre les garanties obligatoires, des garanties complémentaires.

La réception des travaux, assortie de réserves, est intervenue le 07 janvier 1989 entre la société ATLANTHAL et la SOCAE.

La société ATLANTHAL a formalisé deux déclarations de sinistres auprès de la compagnie UAP, une première en 1993 qui a donné lieu à une prise en charge par l'assureur, et une seconde le 23 février 1995 pour des désordres d'infiltrations d'eau affectant le plancher d'une zone dite de transit et le bassin-piscine de remise en forme et pour lesquels l'assureur a refusé sa garantie.

Le 25 août 1995, la société ATLANTHAL a fait assigner la SOCAE et la compagnie UAP en référé et au fond devant le tribunal de grande instance de Bayonne.

Une ordonnance du juge des référés en date du 27 septembre 1995 a confié une mesure d'expertise à Monsieur B..., qui a déposé un rapport le 28 juin 1996.

La société ATLANTHAL a ensuite appelé en la cause la société TSB ETANCHEITE dans la procédure au fond par assignation du 10 octobre 1996.

Une ordonnance du juge de la mise en état du 02 novembre 1998 a autorisé la société ATLANTHAL à faire exécuter à ses frais avancés les travaux de remise en état préconisés par l'expert B...et évalués à 104. 845, 71 euros, ceci sous le contrôle de bonne fin de Monsieur C...qui a déposé un rapport d'exécution le 19 novembre 2001.

En outre par deux décisions des 21 octobre 1997 et 02 novembre 1998, le juge de la mise en état a commis Madame D...en qualité d'expert aux fins d'évaluation du préjudice financier subi par la société ATLANTHAL. Celle-ci a déposé un premier rapport le 11 mai 1998 et un rapport complémentaire le 26 octobre 2001.

Au résultat de ces expertises, la société ATLANTHAL a sollicité :

- en premier lieu, la condamnation de la société AXA France seule en sa qualité d'assureur dommages-ouvrage à lui payer, sous déduction d'un règlement opéré à hauteur de 104. 845, 74 euros, la somme de 354. 759, 69 euros hors taxes en réparation de ses dommages matériels, ceci par application de l'article L. 242-1 du Code des assurances et en faisant valoir une non-réponse apportée dans le délai légal de 60 jours à sa déclaration de sinistre du 23 février 1995 ;

- en second lieu, la condamnation de la SOCAE sur le fondement de l'article 1792 du Code civil et de la société TSB ETANCHEITE sur le fondement des articles 1382 et 1383 du Code civil, celles-ci in solidum avec leur assureur commun la société AXA France, à lui payer la somme de 131. 218, 66 euros hors taxes au titre de ses pertes d'exploitation ;

- à titre subsidiaire, dans la mesure où sa qualité de maître de l'ouvrage lui est contestée, de prononcer ces mêmes condamnations à titre de dommages et intérêts sur le fondement de l'article 123 du nouveau Code de procédure civile, pour cause de tardiveté de la fin de non-recevoir qui lui est opposée par la SOCAE et son assureur plus de dix ans après la réception des travaux ;

- à titre encore plus subsidiaire, de prononcer ces condamnations sur le fondement des articles 1382 et 1383 du Code civil.

Le 14 octobre 2002, la société TSB ETANCHEITE a été placée en redressement judiciaire et le 14 novembre 2002, la société ATLANTHAL a appelé en la cause Maître E...en sa qualité d'administrateur judiciaire et Maître Y...en celle de représentant des créanciers.

Par un jugement en date du 20 octobre 2003, le tribunal de grande instance de Bayonne :

1) sur le fondement juridique de l'action :

- a dit la société ATLANTHAL irrecevable à agir sur le fondement des articles 1792 et suivants du Code civil mais recevable à le faire contre la SOCAE sur le fondement des articles 1382 et 1383 du Code civil et contre la société AXA en sa qualité de bénéficiaire de la police dommages-ouvrage ;

2) sur les dommages matériels :

- a condamné la société AXA à payer à la société ATLANTHAL la somme de 354. 759, 69 euros hors taxes au titre de la réparation des désordres, avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation ;

3) sur les dommages immatériels :

- a condamné in solidum la SOCAE et la société AXA à payer à la société ATLANTHAL, au titre des parties d'exploitation, la somme de 131. 218, 66 euros avec intérêt au taux légal de droit ;
- a dit que la société TSB ETANCHEITE doit garantie à la SOCAE du montant de cette condamnation à concurrence de moitié, soit 65. 609, 33 euros ; fixé à ce montant la créance à figurer au redressement judiciaire de la société TSB ETANCHEITE et condamné la société AXA à garantir la société TSB ETANCHEITE pour le montant de cette créance ;

- a condamné la SOCAE à régler à la société AXA le montant de la franchise contractuelle de 70. 126, 55 euros prévue à la police unique de chantier ;

4) sur les autres demandes :

- a ordonné l'exécution provisoire ;

- a condamné in solidum la SOCAE et la société AXA à payer à la société ATLANTHAL la somme de 7. 700 euros sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ;

- a dit que les dépens, y compris les frais de référé et d'expertise, seront supportés par moitié par la SOCAE et la société AXA.

Par déclaration en date du 09 décembre 2003, la société AXA France a relevé appel principal de cette décision ; la SOCAE et la société ATLANTHAL ont relevé appels incidents.

Maître Y..., pris en sa nouvelle qualité de mandataire-liquidateur à la liquidation judiciaire de la société TSB ETANCHEITE, a été assigné à domicile par acte du 19 avril 2005 réitéré les 06 juin 2005 et 12 juillet 2005 : il n'a pas constitué avoué.

La société de travaux spéciaux BERHO (TSB) assignée le 03 novembre 2004 par procès-verbal de recherches infructueuses, n'a pas comparu.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 17 mars 2006.

*
* *

Dans le dernier état de ses conclusions déposées le 21 février 2006, la SA AXA France, en sa qualité d'assureur dommages-ouvrage d'une part et d'assureur responsabilité décennale de la SOCAE d'autre part, fait valoir que :

1) sur la recevabilité de l'action de la société ATLANTHAL au titre de la garantie dommages-ouvrage :

- la société ATLANTHAL a uniquement la qualité de crédit-preneur et de locataire des locaux tant qu'elle n'a pas réalisé leur acquisition prévue pour le faire à l'échéance du contrat de crédit-bail fixée au 30 juin 2007 ; elle n'a donc pas eu qualité pour souscrire la police dommages-ouvrage, n'étant ni propriétaire, ni vendeur et ni mandataire du propriétaire de l'ouvrage ; elle ne peut donc, et par application de l'article L. 122-1 du Code des assurances, se prévaloir de la qualité d'assurée ;

- en outre, le contrat de crédit-bail immobilier prévoit expressément que les indemnités versées par les assureurs au titre des assurances dommages reviendront au bailleur ;

2) sur le dépassement des délais de mise en oeuvre de la garantie dommages-ouvrage :

- ce moyen soulevé par la société ATLANTHAL est inopérant puisque, n'étant pas l'assurée, elle n'a pas eu qualité pour déclarer le sinistre ;

- en toute hypothèse, s'il est exact qu'elle a notifié sa décision de refus de garantie hors le délai légal de 60 jours suivant la déclaration de sinistre, la sanction du paiement d'un intérêt égal au double du taux légal ne peut être exigée par l'assuré qu'à la condition que celui-ci ait engagé les dépenses nécessaires à la réparation des dommages après notification à l'assureur ; à défaut de cette notification, la société ATLANTHAL doit être déboutée de sa demande au titre des intérêts sur la somme de 104. 845, 71 euros pour la période allant du 23 mai 1995 au 07 mai 1997 et représentant la somme de 12. 098, 74 euros ;

3) sur la recevabilité de l'action de la société ATLANTHAL sur le fondement des articles 1792 et suivants du Code civil :

- seul le maître ou l'acquéreur de l'ouvrage peut invoquer l'application de ces textes ;

- or, aux termes du contrat de crédit-bail, la société ATLANTHAL ne s'est vue déléguer la maîtrise d'ouvrage que jusqu'à l'issue des opérations de construction et, après réception, elle s'est engagée à dénoncer au bailleur, qui conserve la qualité de maître de l'ouvrage pendant toute la durée du bail, tous défauts ou vices de construction pour lui permettre d'exercer les recours adéquats ;

- la société ATLANTHAL n'a donc aucune qualité pour agir au titre de la garantie décennale ;

4) sur la demande subsidiaire de la société ATLANTHAL sur le fondement de l'article 123 du nouveau Code de procédure civile :

- la SOCAE comme elle-même n'ont eu connaissance de la qualité de crédit-preneur de la société ATLANTHAL qu'en cours d'instance, à la suite d'une communication de pièce par acte du 24 mai 2000 alors que le délai de garantie décennale a expiré le 07 janvier 1999 ;

- celle-ci, qui leur avait dissimulé l'existence du contrat de crédit-bail, ne peut leur reprocher d'avoir laissé passer ce délai avant de lui opposer la fin de non-recevoir tirée de son défaut de qualité de maître de l'ouvrage ;

5) sur la demande encore plus subsidiaire de la société ATLANTHAL sur le fondement des articles 1382 et 1383 du Code civil :

- si le crédit-preneur peut agir contre les constructeurs sur le fondement de la responsabilité civile délictuelle, les demandes formées par la société ATLANTHAL ne peuvent prospérer en ce qu'elles sont dirigées contre elle qui ne garantit que la responsabilité civile décennale de l'assuré ;

- en outre le crédit-preneur ne peut demander que la réparation se son préjudice propre mais non celle des dommages à l'ouvrage ;

6) sur les franchises :

- la police unique de chantier a inclus, pour la garantie assurance de responsabilité décennale des constructeurs, une franchise de 70. 126, 55 euros pour le lot gros oeuvre et, pour la garantie facultative de responsabilité du sous-traitant, une franchise de 2. 286, 73 euros pour les lots autres que le gros oeuvre ; cette franchise, inopposable au maître de l'ouvrage dans le cadre de la garantie responsabilité décennale, lui est en revanche opposable en ce qui concerne la responsabilité de TSB ETANCHEITE, sous-traitante ;

- la société ATLANTHAL sollicitant la condamnation in solidum de la SOCAE et d'elle-même en sa qualité d'assureur responsabilité décennale, la SOCAE devra lui rembourser le montant de la franchise ;

7) sur le montant des réparations :

- les travaux de reprise réalisés par l'entreprise VENESSON ne sont pas conformes à ceux qui étaient prévus par l'expert B...et le montant global de la réparation due au titre du dommage matériel ne saurait excéder la somme de 282. 779, 82 euros ;

- les conditions particulières de la police unique de chantier ont limité la garantie au titre des dommages immatériels à la somme de 152. 449, 02 euros.

Et la SA AXA France demande à la Cour :

1) à titre principal :

- de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a dit la société ATLANTHAL irrecevable à agir sur le fondement de l'article 1792 du Code civil et en ce qu'il l'a déboutée de ses demandes sur le fondement de l'article 123 du nouveau Code de procédure civile ;

- de le réformer pour le surplus ;

- de débouter la société ATLANTHAL de sa demande en paiement de la somme de 354. 759, 69 euros au titre du coût des travaux de remise en état et de ses demandes sur le fondement des articles 1382 et 1383 du Code civil qui ne peuvent en aucun cas concerner la réparation des dommages à l'ouvrage ;

- de la condamner à lui restituer la provision versée de 104. 845, 71 euros et la somme de 604. 103, 37 euros réglée au titre de l'exécution provisoire du jugement déféré ;

- de la condamner à lui payer la somme de 4. 574, 47 euros au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ;

2) à titre subsidiaire :

- sur la police dommages-ouvrage, de lui donner acte de ce qu'elle a payé à la société ATLANTHAL le 07 mai 1997 la somme de 100. 334, 31 euros ;

- sur la police d'assurance responsabilité décennale, de condamner la SOCAE à lui verser la somme de 70. 126, 55 euros au titre de la franchise, de dire que la franchise de 2. 274, 21 euros au titre de la garantie des sous-traitants est opposable à la société ATLANTHAL et de limiter en conséquence le montant de la réparation ;

- de limiter le montant des dommages matériels à la somme de 282. 779, 81 euros et des dommages immatériels à la somme de 152. 449, 02 euros ;

3) en toute hypothèse :

- de dire que les indemnités à allouer à la société ATLANTHAL seront hors taxes.

*
* *

Par ses dernières conclusions déposées le 20 septembre 2005, la société SOCAE ATLANTIQUE expose que :

1) sur l'action de la société ATLANTHAL sur le fondement des articles 1792 et suivants du Code civil :

- seul le maître ou l'acquéreur de l'ouvrage peut invoquer l'application de ces textes et aux termes du contrat de crédit-bail, la société ATLANTHAL ne s'est vue déléguer la maîtrise d'ouvrage que jusqu'à l'issue des opérations de construction et elle s'est engagée, après réception, à dénoncer au bailleur, qui conserve seul la qualité de maître de l'ouvrage jusqu'à l'expiration du bail devant intervenir en 2007, tous défauts ou vices de construction pour lui permettre d'exercer les recours adéquats ;

- en sa qualité de tiers au contrat de crédit-bail, elle est fondée à invoquer à son profit comme fait juridique la situation créée par ce contrat ;

- la garantie décennale a expiré au 07 janvier 1999, elle est définitivement prescrite et la fin de non-recevoir pour défaut de qualité à agir opposée à la société ATLANTHAL ne peut pas faire l'objet d'une régularisation ;

- la société ATLANTHAL a dissimulé l'existence du contrat de crédit-bail et elle ne peut lui reprocher de lui opposer tardivement cette fin de non-recevoir ;

2) sur l'action de la société ATLANTHAL sur le fondement des articles 1382 et 1383 du Code civil :

- si le crédit-preneur peut agir contre les constructeurs sur le fondement de la responsabilité civile délictuelle, les demandes formées par la société ATLANTHAL ne peuvent prospérer qu'à charge pour elle de rapporter la preuve de sa faute ;

- or, elle n'a pas réalisé les travaux incriminés qui ont été sous-traités à la société TSB ETANCHEITE et, s'agissant de vices de construction, elle ne peut être tenue responsable de droit des fautes de son sous-traitant qu'à l'égard du maître de l'ouvrage mais non du crédit-preneur ;

- en toute hypothèse, le crédit-preneur ne peut demander que la réparation se son préjudice propre mais non celle des dommages à l'ouvrage ;

3) sur la faute de la société ATLANTHAL qui s'est immiscée dans le choix de la société TSB ETANCHEITE et des techniques mises en oeuvre pour l'étanchéité :

- la société ATLANTHAL a assuré la maîtrise d'oeuvre partielle du chantier en rémunérant un ingénieur salarié pour la durée des travaux et, elle-même assurée au titre de la police unique de chantier en qualité de maître d'oeuvre, elle n'est pas fondée à lui reprocher une faute dans l'exécution d'une telle mission ;

4) sur la responsabilité de la société TSB ETANCHEITE, les désordres sont exclusivement de son fait et celle-ci, tenue à son égard d'une obligation de résultat, devra être condamnée à la garantir et relever pour toutes condamnations qui pourraient être prononcées contre elle ;

5) sur la responsabilité de la SA AXA France, celle-ci a fait preuve de négligence lors de sa première intervention au titre de l'assurance dommages-ouvrage puisque les travaux préconisés par son expert n'ont pas eu pour effet de faire cesser le dommage ; elle doit donc la garantir et relever pour l'intégralité des sommes qui pourraient être mises à sa charge ;

6) sur le montant des réparations, la société ATLANTHAL a fait effectuer des réaménagements importants des lieux qui n'ont rien à voir avec la réparation des désordres originaires fixés à la somme hors taxes de 104. 845, 71 euros ;

7) sur le montant des franchises, en admettant que la société TSB ETANCHEITE ait été son sous-traitant, il s'agit d'un seul et même sinistre et la SA AXA France ne peut voir appliquer deux franchises ; selon le principe de la garantie due par le sous-traitant, la société TSB ETANCHEITE devra la garantir pour une éventuelle condamnation relative à la franchise de 70. 126, 55 euros ;

8) sur le problème des intérêts, la société ATLANTHAL doit être déboutée de sa demande en paiement de la somme de 130. 707, 20 euros correspondant à des intérêts calculés sur une créance de 354. 759, 69 euros puisqu'elle a été indemnisée par la SA AXA France de la somme de 104. 845, 71 euros dès le 09 février 1997 et que, au regard des nouvelles dispositions de l'article L. 121-17 du Code des assurances, après exécution des travaux, il appartient à l'assureur dommages-ouvrage de payer directement l'entreprise intervenue.

Et la société SOCAE ATLANTIQUE demande par suite à la Cour :

1) à titre principal :

- de confirmer la décision entreprise en ce qu'elle a déclaré la société ATLANTHAL irrecevable à agir sur le fondement de l'article 1792 du Code civil et de débouter par conséquence la SA AXA France de ses demandes récursoires présentées contre elle ;

- de la confirmer en ce qu'elle a rejeté l'action de la société ATLANTHAL sur le fondement de l'article 123 du nouveau Code de procédure civile ;

- de la réformer en ce qu'elle a prononcé des condamnations pécuniaires à son encontre ;

2) à titre subsidiaire :

- de prononcer sa mise hors de cause compte tenu de l'immixtion fautive de la société ATLANTHAL et de dire que la réparation des désordres ne peut excéder 60. 868, 89 euros ;

- de constater la faute de la SA AXA France en sa qualité d'assureur dommages-ouvrage quant aux reprises des désordres consécutives à la première déclaration de sinistre ;

3) à titre encore pus subsidiaire :

- de réformer la décision entreprise en ce qu'elle l'a condamnée à payer à la SA AXA France la franchise contractuelle de 70. 126, 55 euros ;

4) en toute hypothèse, de condamner la partie succombante à lui payer la somme de 15. 000 euros au titre de ses frais irrépétibles.

*
* *

Dans le dernier état de ses conclusions déposées le 08 novembre 2005, la société ATLANTHAL répond que :

1) sur la garantie due par l'assurance dommages-ouvrage :

- aucun texte ne réserve le pouvoir et la qualité de déclarer le sinistre au maître de l'ouvrage ; c'est à l'assuré de le faire et, en sa qualité de souscripteur de la police, elle a bien la celle d'assurée et elle est en droit d'obtenir le bénéfice des garanties souscrites ;

- lorsque le crédit-preneur a souscrit le contrat d'assurance dommages-ouvrage, fût-ce en qualité de mandataire du crédit-bailleur, le contrat, qui doit produire effet à titre principal au profit de ce dernier, peut à défaut bénéficier au crédit-preneur dès lors que le crédit-bailleur n'entend pas le faire jouer à son profit ; tel est ici le cas ;

- elle a réglé les travaux de remise en état et elle est fondée à obtenir le paiement des indemnités dues au titre de la police dommages-ouvrage ;

2) sur la sanction du silence de l'assureur dommages-ouvrage :

- la SA AXA France est restée plus de soixante jours sans lui faire connaître sa décision quant au principe de mise en jeu de la garantie ; cela la prive du droit de formuler tout motif de contestation, qu'il s'agisse d'une irrégularité de forme ou d'une non garantie de fond et l'oblige à réparer les dommages sur la base des estimations faites par l'assuré ou pouvant résulter du rapport d'un expert judiciaire ;

- l'évaluation des réparations à 459. 605, 43 euros donnée par les rapports B...et C...s'impose donc à la SA AXA France ; il convient d'en déduire la provision de 104. 845, 74 euros réglée le 07 mai 1997 ;

- cette somme est à majorer de plein droit des intérêts au double du taux légal à compter du 23 mai 1995 jusqu'à la date du paiement du 07 mai 1997 et des intérêts sur le solde du 08 mai 1997 au 23 décembre 2003 ; ces intérêts représentent une somme de 275. 086, 13 euros ;

3) sur la responsabilité de la SOCAE garantie par la SA AXA France :

a-sur le fondement de l'article 1792 Code civil :

- il n'est pas contesté que les dommages sont de nature physique décennale ;

- c'est elle qui a conclu les marchés avec les entreprises, elle a également assumé le financement de l'opération et elle a effectivement été considérée comme maître de l'ouvrage par la SOCAE ;

- la compagnie UAP, puis la SA AXA France venant à ses droits avaient d'ailleurs admis en sa qualité d'assureur de la SOCAE et de la société TSB ETANCHEITE le principe de la réparation qui lui était due en une qualité de maître de l'ouvrage ;

b-sur le fondement de l'article 123 du nouveau Code de procédure civile :

- c'est des mains du crédit-bailleur que la SOCAE a reçu la majeure partie de ses paiements ; en outre la convention de crédit-bail a résulté d'actes publiés en 1987, 1988 et 1995 qui lui ont été opposables comme à son assureur ;

- ces parties ont attendu le 23 mai 2000, soit l'expiration du délai de garantie décennale, pour verser aux débats ces actes qu'elles détenaient en leur intégralité ; elles se sont abstenues dans une intention dilatoire de soulever plutôt une fin de non-recevoir tirée du défaut de sa qualité de maître de l'ouvrage ;

- elle-même a pu légitimement et de bonne foi ne pas prendre l'initiative de cette communication et il y lieu à application de la sanction prévue à l'article 123 du nouveau Code de procédure civile ;

c-sur le fondement des articles 1382 et 1383 du Code civil :

- la SOCAE a commis une faute en faisant le choix de confier les travaux d'étanchéité à la société TSB ETANCHEITE non suffisamment qualifiée pour réaliser ce type d'ouvrage ;

- sa responsabilité est engagée pour un manquement à son devoir de conseil ;

- au surplus, la SOCAE en sa qualité d'entrepreneur principal est garant envers le maître de l'ouvrage avec lequel elle a contracté des fautes et défaillances de son sous-traitant ;

- elle s'en remet à justice sur les observations de la SA AXA France quant à une non garantie des conséquences pécuniaires de la responsabilité civile de l'assurée sur le fondement des articles 1382 et 1383 du Code civil ;

d-sur le montant de la dette de la SOCAE garantie par la SA AXA France :

- celle-ci est d'un montant de 632. 540, 55 euros se décomposant comme suit :

-354. 759, 69 euros au titre de la réparation des désordres et 130. 707, 20 euros au titre des intérêts au taux légal simple dus sur cette créance à compter de l'assignation du 25 août 1995 jusqu'au jour des paiements opérés les 07 mai 1997et 23 décembre 2003 ;

-131. 218, 66 euros en indemnisation des pertes d'exploitation et 15. 855 euros au titre des intérêts au taux légal sur cette somme à compter 15 novembre 2000, date de fermeture de l'établissement, au 23 décembre 2003 ;

4) sur la responsabilité de la société TSB ETANCHEITE sur le fondement des articles 1382 et 1383 du Code civil et la garantie de la SA AXA France :

- la société TSB ETANCHEITE a été assurée au titre d'une police responsabilité décennale et, dès lors que les désordres sont de nature décennale, la SA AXA France lui doit garantie sans pouvoir opposer aux tiers les clauses de franchise et de plafond de garantie ;

- la dette de la société TSB ETANCHEITE garantie par la SA AXA France est de 632. 540, 55 euros au titre des dommages matériels et immatériels et des intérêts au taux légal ;

5) sur son immixtion en une qualité de maître d'oeuvre :

- l'ingénieur qu'elle a rémunéré pendant la durée des travaux n'a eu aucune qualification de maître d'oeuvre et a eu pour seul rôle de la représenter aux réunions de chantier.

Et la société ATLANTHAL demande par conséquent à la Cour :

- de confirmer le jugement déféré en ce qu'il est entré en voie de condamnation contre la SA AXA France en sa qualité d'assureur dommages-ouvrage et d'assureur de responsabilité, contre la SOCAE en sa qualité d'entreprise générale et contre la société TSB ETANCHEITE en sa qualité de sous-traitant ;
- y ajoutant,

- sur le fondement de la police dommages-ouvrage, de condamner la SA AXA France à lui payer, sous déduction de la provision versée le 07 mai 1997, la somme de 629. 846, 82 euros ;

- sur le fondement des responsabilités des entreprises, de condamner solidairement la SOCAE en vertu de l'article 1792 du Code civil, la SA AXA France en sa qualité d'assureur de responsabilité décennale de la SOCAE et d'assureur de responsabilité de la société TSB ETANCHEITE, à lui payer, sous déduction de la provision versée le 07 mai 1997, la somme de 632. 540, 55 euros ;

- subsidiairement, de prononcer les mêmes condamnations contre la SOCAE et la SA AXA France en vertu de l'article 123 du nouveau Code de procédure civile ou sur le fondement des articles 1382 et 1383 du Code civil ;

- de dire que les condamnations prononcées contre la SA AXA France en tant qu'assureur dommages-ouvrage et en tant qu'assureur de responsabilité ne se cumuleront pas ;

- de fixer sa créance à valoir à la liquidation judiciaire de la société TSB ETANCHEITE à la somme de 632. 540, 55 euros ;

- de condamner la SA AXA France, la SOCAE et Maître Y...ès qualités de mandataire-liquidateur de la société TSB ETANCHEITE aux dépens et à lui payer sous le bénéfice de la solidarité une somme complémentaire de 5. 000 euros au titre de ses frais irrépétibles ;

SUR CE LA COUR

A. LA RÉPARATION DES DOMMAGES A L'OUVRAGE :

I. Sur la qualité de la société ATLANTHAL pour agir sur le fondement de l'article 1792 du Code civil ou, subsidiairement, sur le fondement des articles 1382 et 1383 du Code civil :

Attendu que par acte authentique en date du 17 novembre 1987 et modifié par avenants des 17 novembre 1988 et 09 novembre 1995, les sociétés IMMOBAIL, BTP, SOFICOMI et PARICOMI ont consenti à la société ATLANTHAL un crédit-bail immobilier aux termes duquel le crédit-bailleur s'est engagé à financer la réalisation d'un complexe hôtelier et de thalassothérapie sur un terrain lui appartenant en vue de son exploitation par le crédit-preneur au bénéfice duquel a été stipulé une promesse de vente à l'échéance du contrat fixée au 30 juin 2007 ;

Que le contrat a confié à la société ATLANTHAL la charge de mener à bien l'ensemble de l'opération de construction en prenant l'entière responsabilité de la conception, de la surveillance et de l'exécution des constructions qui seront de plein droit la propriété du bailleur au fur et à mesure de leur édification ; qu'elle a reçu mandat de signer les marchés avec les entreprises mais avec l'assentiment au moins tacite du bailleur qui en aura eu connaissance préalablement ;
Qu'en outre les dispositions définissant les droits et obligations du bailleur et du preneur après achèvement des travaux ont fait obligation à la société ATLANTHAL de dénoncer au bailleur dans le délai de un mois de leur constatation les désordres éventuels afin de lui permettre d'exercer à son profit tout recours qu'il jugera utile, en particulier sur le fondement des articles 1792 et 2270 du Code civil ;

Attendu que le procès-verbal de réception des travaux est intervenu le 07 janvier 1989 ;

Que la société ATLANTHAL, au profit de laquelle la maîtrise de l'ouvrage n'a été déléguée que pour la durée des opérations de constructions, n'a plus depuis leur achèvement que la qualité de locataire des locaux et ceci tant qu'elle n'aura pas réalisé leur acquisition prévue au terme du contrat de crédit-bail, lequel est toujours en cours à ce jour ;

Attendu que le contrat de crédit-bail et ses avenants ont été régulièrement publiés à la conservation des hypothèques de Bayonne les 16 janvier 1989 et 20 novembre 1995 ;

Que les tiers à ce contrat peuvent invoquer comme fait juridique la situation qu'il crée et qui leur est opposable ;

Que dès lors la SOCAE et la SA AXA France sont fondées à dénier à la société ATLANTHAL une qualité de maître de l'ouvrage pour agir, sur le fondement de la garantie décennale de l'article 1792 du Code civil, en réparation de désordres survenus après réception ;

Que cette fin de non-recevoir, recevable en tout état de la cause, doit être admise, ceci sans préjudice de l'application éventuelle de la sanction prévue par l'article 123 du nouveau Code de procédure civile s'il devait être retenu qu'elle l'a été de manière tardive et dilatoire ;

Attendu en outre que, sur le fondement des articles 1382 et 1383 du Code civil, la société ATLANTHAL qui n'est pas propriétaire de l'ouvrage, reste seulement recevable à demander la réparation de son propre préjudice d'exploitation consécutif aux désordres, ce qui fera l'objet d'un examen ci-après ;

II. Sur la mise en jeu de l'assurance dommages-ouvrage :

Attendu que le contrat de crédit-bail avait mis à la charge du bailleur le soin de souscrire la police obligatoire dommages-ouvrage ;

Qu'il est cependant acquis aux débats qu'aucune assurance n'a été souscrite par le crédit-bailleur et que la société ATLANTHAL, qui y avait intérêt puisqu'elle assumait à l'égard de son bailleur l'entière responsabilité des opérations de construction, a souscrit auprès de la compagnie UAP-devenue la SA AXA France-la police unique de chantier couvrant l'assurance dommages-ouvrage et la responsabilité des constructeurs ;

Attendu qu'à la suite des désordres qui sont apparus au niveau du plancher de la zone de transit et du bassin-piscine, la société ATLANTHAL a déclaré le sinistre à la SA AXA France le 23 février 1995 ;

Attendu que lorsque le crédit-preneur a souscrit le contrat d'assurance dommages-ouvrage qui doit produire effet à titre principal au profit du crédit-bailleur, il peut à défaut bénéficier au crédit-preneur dès lors comme en l'espèce :

- qu'ainsi qu'il l'est dit aux articles 4 et 16 du contrat de crédit-bail, l'ensemble de l'opération a été réalisé à l'initiative et sous la responsabilité du crédit-preneur qui a pris les lieux en leur état à l'entrée en jouissance sans pouvoir exiger du bailleur aucun aménagement, ni recourir contre lui pour vices apparents ou cachés, ceci par dérogation expresse aux articles 1720 et 1721 du Code civil ;

- que le crédit-preneur justifie, du seul fait de ces dispositions, d'un intérêt à se prévaloir du contrat d'assurance, intérêt qui s'est trouvé ici renforcé puisqu'il a assumé seul le financement des travaux de reprise des désordres ;

- que le crédit-bailleur, et peu en importe le motif, n'entend pas lui-même faire jouer la garantie à son profit ;

Attendu que la société ATLANTHAL doit donc être dite comme ayant qualité pour bénéficier de l'indemnité d'assurance ;

Attendu en outre que la compagnie UAP, en notifiant à la société ATLANTHAL un refus de garantie le 15 mai 1997, n'a pas respecté le délai de soixante jours à compter de la déclaration de sinistre qui lui était imparti par l'article L. 242-1 du Code des assurances pour prendre position quant au principe de la mise en jeu de la garantie ;

Que le non-respect de ce délai prive la SA AXA France, venant aux droits de la compagnie UAP, du droit de contester sa garantie pour quelque motif que ce soit, qu'il s'agisse d'une irrégularité de forme ou de fond ;

Que ce non-respect a également eu pour effet de lui imposer de formuler une offre d'indemnisation dans les quatre vingt dix jours de la déclaration de sinistre et que, n'ayant pas davantage respecté cette obligation, elle se trouve déchue du droit de contester l'évaluation des dommages telle qu'elle est sollicitée par la société ATLANTHAL conformément à celle proposée par l'expert C...;

Et attendu que cet expert a chiffré le montant des travaux de reprise qui ont été réalisés et devant être admis comme étant en relation avec le sinistre à la somme hors taxes de 3. 014. 814 francs, désormais 459. 605, 43 euros dont il y a lieu de déduire la provision de 104. 845, 74 euros réglée le 07 mai 1997 ;

Que la décision du premier juge qui a condamné la SA AXA France à payer le solde en principal de 354. 759, 69 euros doit donc être confirmée ;

Attendu, sur la question des intérêts, qu'aux termes de l'article L. 242-1 du Code des assurances, en cas de non-respect des délais de soixante ou de quatre vingt dix jours, l'assuré peut, après l'avoir notifié à l'assureur, engager les dépenses nécessaires à la réparation des dommages et l'indemnité versée par l'assureur est alors majorée de plein droit d'un intérêt égal au double du taux légal ;

Que ce texte est muet sur le point de départ du calcul de l'indemnité complémentaire liée à la majoration des intérêts ; qu'il est admis que cette indemnité qui sanctionne le manquement de l'assureur n'est pas subordonnée à l'engagement préalable par l'assuré des dépenses nécessaires à la réparation des dommages (cf Cass- 1o civile 12-02-2002 et 3o civile 06-10-2004) et que le point de départ doit en être fixé au jour où l'assureur est défaillant et donc à l'expiration du délai non respecté ;

Qu'il convient par conséquent de réformer sur ce point la décision entreprise et de dire que la société ATLANTHAL est en droit d'obtenir le paiement des intérêts au double du taux légal sur la somme de 459. 605, 43 euros à compter du 23 mai 1995 jusqu'au 07 mai 1997, date du paiement de la provision de 104. 845, 74 euros, et sur le solde de 354. 759, 69 euros à compter du 08 mai 1997 jusqu'au 23 décembre 2003, date de son règlement ;

Que la Cour renvoie les parties à procéder au calcul de cette indemnité selon les taux en vigueur pour les années concernées ;

III. Sur l'application de l'article 123 du nouveau Code de procédure civile :

Attendu que la SOCAE et la SA AXA France, auxquelles le contrat de crédit-bail a été rendu opposable de par sa publication à la conservation des hypothèques, ont tardivement et après l'expiration du délai de garantie décennale opposé à la société ATLANTHAL la fin de non-recevoir tirée de son défaut de qualité de maître de l'ouvrage ;

Que, toutefois, il n'y a pas lieu à statuer sur la demande de la société ATLANTHAL en paiement de dommages et intérêts pour un montant égal à celui correspondant à la réparation des désordres majorés d'intérêts au taux légal puisqu'il est fait droit à cette prétention indépendamment de l'admission de la fin de non-recevoir qui ne laisse subsister aucun dommage ;

B. LA RÉPARATION DES DOMMAGES IMMATÉRIELS :

I. Sur l'action de la société ATLANTHAL contre la SOCAE sur le fondement des articles 1382 et 1383 du Code civil :

Attendu que le sinistre déclaré en 1995 a eu pour cause, en ce qui concerne les infiltrations en périphérie du bassin animé, une rupture du complexe d'étanchéité à l'endroit de la jonction de la dalle du fond avec les parois verticales qui a occasionné des coulures de calcite chloridrique sur les voiles béton et, en ce qui concerne les infiltrations d'eau de mer dans la zone dite de transit, une insuffisance du revêtement d'étanchéité ;

Attendu que le premier juge a fait une parfaite analyse de la nature et l'origine des désordres et des relations entre les parties pour retenir que la SOCAE, qui avait passé avec la société ATLANTHAL un marché d'entreprise générale et sous-traité les travaux d'étanchéité intérieurs à la société TSB ETANCHEITE, a commis une faute engageant sa responsabilité délictuelle en donnant à un sous-traitant qui n'avait pas la qualification OPQCB requise pour réaliser ce type d'ouvrage des instructions pour que le procédé d'étanchéité à mettre en place soit d'un coût le plus bas possible ;

Attendu que si la société ATLANTHAL a eu recours à un ingénieur salarié, notamment pour l'assister à l'occasion des réunions de chantier, il ne peut pour autant être valablement soutenu comme le fait la SOCAE qu'elle a ainsi décidé d'assurer un rôle de maîtrise d'oeuvre ou qu'elle s'est immiscée de manière fautive dans la direction et la surveillance des travaux incriminés alors qu'elle-même, en sa qualité d'entrepreneur général, en a assumé l'entière responsabilité à l'égard de sa cliente qui n'a pas de compétence notoire dans le domaine de la construction ;

Qu'enfin, et compte tenu du caractère évolutif des dommages, la SOCAE ne démontre pas que les premiers travaux de reprise des désordres pris en charge par la compagnie UAP en 1993 au vu du rapport de son expert le cabinet SARETEC aient pu dès cette date être jugés insuffisants ; qu'il doit d'ailleurs être observé que la SOCAE a participé aux côtés de la société TSB ETANCHEITE aux opérations du cabinet SARETEC, qu'elle n'a alors émis aucune réserve sur les conclusions de son rapport et qu'elle est mal venue à vouloir faire supporter à son assureur une part de responsabilité pour une prétendue inefficacité des premiers remèdes ;

Attendu, par voie de conséquence, qu'il convient de confirmer le jugement dont appel en ce qu'il a condamné la SOCAE à payer à la société ATLANTHAL, au titre de ses pertes d'exploitation et selon l'évaluation non critiquée de l'expert D..., la somme hors taxes de 131. 218, 66 euros ;

Que les intérêts sur cette somme ne sont dus qu'à compter du jugement du 20 octobre 2003 qui a été attributif de droit à cet égard ;

II. Sur l'action de la société ATLANTHAL contre la SA AXA France en sa qualité d'assureur de la SOCAE et de la société TSB ETANCHEITE :

Attendu que la police unique de chantier a couvert les intervenants à l'acte de construction au titre de l'assurance obligatoire de responsabilité décennale et qu'une garantie complémentaire a porté sur la réparation des dommages immatériels dans un plafond de 152. 449, 02 euros ;

Que l'assurance de responsabilité décennale a été étendue aux sous-traitants des entrepreneurs participant à l'opération de construction ;

Que l'article 2. 2. 1. 4 des conventions spéciales précise que la garantie complémentaire s'applique à la réparation des dommages immatériels subis par le propriétaire de l'ouvrage ou l'occupant et qui sont consécutifs à un dommage matériel garanti au titre des articles 1792 et 1792-2 du Code civil ;

Que l'indemnisation prévue au profit de l'occupant n'est pas subordonnée à la mise en oeuvre préalable par le propriétaire ou le maître de l'ouvrage de l'action en garantie décennale et qu'il suffit donc pour qu'elle puisse prospérer que la démonstration soit faite d'un dommage immatériel en relation avec un dommage de nature physique décennale ;

Et attendu que les désordres touchant au gros oeuvre ont compromis la solidité de l'ouvrage tout en le rendant impropre à sa destination et que la société ATLANTHAL est fondée à obtenir de la SA AXA France en sa qualité d'assureur de la SOCAE et de la société TSB ETANCHEITE la mise en jeu de la garantie complémentaire ;

Que cette garantie complémentaire a présenté un caractère facultatif et que la SA AXA France est fondé à opposer à la société ATLANTHAL la franchise de 70. 126, 55 euros stipulée à la police d'assurance pour les sinistres affectant le lot gros oeuvre, et en particulier les travaux d'étanchéité ;

Qu'elle doit en revanche voir rejeter l'application cumulative d'une franchise de 2. 286, 73 euros qui n'a été prévue pour les sous-traitants que pour les lots autres que le gros oeuvre ;

Attendu, par suite, que l'obligation in solidum de la SA AXA France doit être limitée à la somme de 61. 092, 11 euros ;

III. Sur le recours de la SOCAE contre la société TSB ETANCHEITE :

Attendu que la société TSB ETANCHEITE, qui était tenue de livrer un ouvrage exempt de vice, a commis une faute en utilisant un procédé qui était insuffisant pour garantir une étanchéité effective ; que le choix de ce procédé a résulté de contraintes financières et de délais d'exécution imposés par la SOCAE qui, en sa qualité d'entrepreneur général, n'a pas non plus veillé et ainsi qu'elle le devait à la conformité du matériau ;

Qu'au regard de leurs manquements respectifs, la part de responsabilité du sous-traitant dans la réalisation du dommage doit être retenue pour un tiers seulement et que la créance de la SOCAE à inscrire au passif de la liquidation judiciaire de la société TSB ETANCHEITE sera réduite à la somme de 23. 375, 52 euros pour ce qui est de la franchise restant à la charge des entreprises ;

Que la SOCAE, garantie pour le surplus par son assureur, n'est pas fondée à faire figurer à la procédure collective une somme plus importante ;

*
* *

Attendu que la SA AXA France et la SOCAE, qui succombent en leurs appels principal et incident, devront supporter les dépens de l'appel à concurrence des trois quarts pour la première et de un quart pour la seconde et verront rejeter leurs demandes respectives au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ;

Que la SA AXA France devra payer à la société ATLANTHAL une indemnité complémentaire de 2. 500 euros à la société ATLANTHAL ;

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Statuant publiquement, par arrêt de défaut à l'égard de Maître Y...pris en sa qualité de mandataire-liquidateur de la société TSB ETANCHEITE et de la société BERHO, et en dernier ressort ;

Confirme le jugement du tribunal de grande instance de BAYONNE en date du 20 octobre 2003 en ce qu'il a :

- dit la société ATLANTHAL irrecevable à agir sur le fondement des articles 1792 et suivants du Code civil mais recevable à le faire contre la société SOCAE ATALANTIQUE sur le fondement des articles 1382 et 1383 du Code civil et contre la SA AXA France en sa qualité de bénéficiaire de la police dommages-ouvrage ;

- a condamné la SA AXA France à payer à la société ATLANTHAL, sous déduction de la provision de 104. 845, 71 euros déjà réglée, la somme en principal de trois cent cinquante quatre mille sept cent cinquante neuf euros et soixante neuf centimes (354. 759, 69 €) hors taxes au titre de la réparation des désordres ;

- condamné la société SOCAE ATLANTIQUE à payer à la société ATLANTHAL, au titre des pertes d'exploitation, la somme de cent trente et un mille deux cent dix huit euros et soixante six centimes (131. 218, 66 €) avec intérêts au taux légal de droit à compter du jugement ;

- condamné in solidum la société SOCAE ATLANTIQUE et la SA AXA France à payer à la société ATLANTHAL la somme de sept mille sept cent euros (7. 700 €) sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ;

- dit que les dépens, y compris les frais de référé et d'expertise, seront supportés par moitié par la société SOCAE ATLANTIQUE et la SA AXA France ;

Le réformant pour le surplus,

Condamne la SA AXA France à payer à la société ATLANTHAL les intérêts au double du taux légal sur la somme de quatre cent cinquante neuf mille six cent cinq euros et quarante trois centimes (459. 605, 43 €) à compter du 23 mai 1995 jusqu'au 07 mai 1997, date du paiement de la provision de cent quatre mille huit cent quarante cinq euros et soixante quatorze centimes (104. 845, 74 €), et sur le solde de trois cent cinquante quatre mille sept cent cinquante neuf euros et soixante neuf centimes (354. 759, 69 €) à compter du 08 mai 1997 jusqu'au 23 décembre 2003, date de son règlement et renvoie les parties à procéder au calcul de ces intérêts selon le taux légal en vigueur pour chaque année concernée ;

Condamne la SA AXA France in solidum avec la SOCAE ATLANTIQUE au paiement des pertes d'exploitation dans la limite de la somme de soixante et un mille quatre vingt douze euros et onze centimes (61. 092, 11 €) ;

Dit que la société TSB ETANCHEITE doit garantie à la société SOCAE ATLANTIQUE pour le montant de la franchise de soixante dix mille cent vingt six euros et cinquante cinq centimes (70. 126, 55 €) restant à sa charge à concurrence du tiers et fixe la créance de cette dernière à figurer au passif de la liquidation judiciaire de la société TSB ETANCHEITE à la somme de vingt trois mille trois cent soixante quinze euros et cinquante deux centimes (23. 375, 52 €) ;

Y ajoutant,

Condamne la SA AXA France à payer à la société ATLANTHAL la somme de deux mille cinq cents euros (2. 500 €) au titre de ses frais irrépétibles ;

Dit que les dépens de l'appel seront supportés à concurrence des trois quarts par la SA AXA France et d'un quart par la société SOCAE ATLANTIQUE et seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau Code de procédure civile par la SCP MARBOT-CRÉPIN, et Maître VERGEZ, avoués, qui en font la demande.

LE GREFFIER, LE PRESIDENT,

Ghyslaine BATANAndré PARANT

En vertu de l'arrêt rectificatif en date du 12 février 2007,

La Cour,

" Après en avoir délibéré, statuant publiquement, par défaut et en dernier ressort ;

Vu l'arrêt en date du 04 septembre 2006 rendu dans l'affaire opposant la SA AXA France à la société ATLANTHAL, la société SOCAE ATLANTIQUE et la société TSB ETANCHEITE ;

Vu l'article 462 du nouveau Code de procédure civile ;

Dit que dans le dispositif il y a lieu d'ajouter :

" Déboute la société SOCAE ATLANTIQUE de sa demande à être garantie par la SA AXA France pour la somme de vingt trois mille trois cent soixante quinze euros et cinquante deux centimes (23. 375, 52 €) mise à la charge de la société TSB ETANCHEITE et correspondant au tiers de la franchise applicable tant à la société SOCAE ATLANTIQUE qu'à la société TSB ETANCHEITE. "

Dit que mention de l'arrêt rectificatif sera portée en marge de l'arrêt du 04 septembre 2006 ;

Laisse les dépens de l'instance en rectification à la charge du Trésor public. "

LE GREFFIER,

Mireille PEYRON

.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Pau
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 3576
Date de la décision : 04/09/2006
Type d'affaire : Civile

Références :

ARRET du 02 mars 2010, Cour de cassation, civile, Chambre civile 3, 2 mars 2010, 09-11.273, Inédit

Décision attaquée : Tribunal de grande instance de Bayonne, 20 octobre 2003


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.pau;arret;2006-09-04;3576 ?
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