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07/11/2008 | FRANCE | N°644

France | France, Cour d'appel de Paris, Ct0151, 07 novembre 2008, 644


Grosses délivrées
aux parties le : RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

14ème Chambre-Section B

ARRÊT DU 07 NOVEMBRE 2008

(no 644, 6 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 08 / 02390

Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 09 Janvier 2008- Tribunal de Grande Instance de PARIS-RG no 08 / 50102 et 08 / 50104

APPELANTE

S. A. ARTEDIS agissant poursuites et diligences en la personne de ses représentants légaux
...
75016 PARIS

représentée par la S

CP MONIN-D'AURIAC DE BRONS, avoués à la Cour
assistée de Me Sébastien X..., avocat au barreau de PARIS, toque : P 189 (Cabinet BITOU...

Grosses délivrées
aux parties le : RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

14ème Chambre-Section B

ARRÊT DU 07 NOVEMBRE 2008

(no 644, 6 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 08 / 02390

Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 09 Janvier 2008- Tribunal de Grande Instance de PARIS-RG no 08 / 50102 et 08 / 50104

APPELANTE

S. A. ARTEDIS agissant poursuites et diligences en la personne de ses représentants légaux
...
75016 PARIS

représentée par la SCP MONIN-D'AURIAC DE BRONS, avoués à la Cour
assistée de Me Sébastien X..., avocat au barreau de PARIS, toque : P 189 (Cabinet BITOUN AVOCAT)

INTIMÉ

Monsieur Claude Y...
...
75003 PARIS

représenté par la SCP ROBLIN-CHAIX DE LAVARENE, avoués à la Cour
assisté de Me Virginie Z..., avocat au barreau de PARIS, toque : L 0292, substituant Me Bernard-Lionel A..., avocat au barreau de PARIS (SELARL DORE CONSEILS ")

*

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 9 octobre 2008, en audience publique, devant la Cour composée de :

Madame Henriette SCHOENDOERFFER, président
Madame Martine PROVOST-LOPIN, conseiller
Madame Sophie DARBOIS, conseiller
qui en ont délibéré

sur le rapport de Madame Sophie DARBOIS

Greffier, lors des débats : Madame Emmanuelle TURGNÉ

ARRÊT :

- CONTRADICTOIRE
-prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Madame Henriette SCHOENDOERFFER, président, qui a remis la minute à Madame Emmanuelle TURGNÉ greffier, pour signature.

*

Vu l'appel formé par la S. A. ARTEDIS de l'ordonnance de référé rendue le 9 janvier 2008 par le président du tribunal de grande instance de PARIS qui, après avoir ordonné la jonction des deux instances, a :
- constaté que la société ARTEDIS a opéré la reddition des comptes afférents à l'exploitation des oeuvres dénommées " les biches ", " une partie de plaisir ", " que la bête meurt ", " la femme infidèle ", " la rupture ", " la décade prodigieuse ", " les noces rouges ", " les innocents aux mains sales ", " nada ", " le boucher ", " juste avant la nuit ", " la route de Corinthe " arrêtés au 30 juin, 30 septembre, 31 décembre 2006, 31 mars, 30 juin et 30 septembre 2007,
- enjoint à la société ARTEDIS de communiquer les comptes afférents aux oeuvres " les biches ", " une partie de plaisir ", " que la bête meurt ", " la femme infidèle ", " la rupture ", " la décade prodigieuse ", " les noces rouges ", " les innocents aux mains sales ", " nada ", " le boucher ", " juste avant la nuit ", " la route de Corinthe " aux dates fixées par les contrats et ce, sous astreinte de 2 000 € par jour et par contrat passé, ladite astreinte prenant effet dès que la date contractuelle aura été dépassée,
- s'est réservé la liquidation de l'astreinte,
- a constaté que les contrats relatifs à la cession des droits pour le remake de " la femme infidèle " intitulé " unfaithful " n'ont pas été communiqués en exécution de l'ordonnance de référé du 15 mars 2007,
en conséquence,
- a liquidé l'astreinte prononcée par l'ordonnance du 15 mars 2007 à la somme de 200 000 €,
- condamné la société ARTEDIS à payer à M. Claude Y... la somme de 200 000 € représentant le montant de l'astreinte liquidée à ce jour et celle de 4 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- a débouté les parties du surplus de leurs demandes,
- a condamné la société ARTEDIS aux dépens ;

Vu les dernières conclusions en date du 12 juin 2008 par lesquelles l'appelante demande à la cour, au visa des articles 36 et suivants de la loi du 9 juillet 1991, L. 132-28 du code de la propriété intellectuelle, 5, 145, 808 et 809 du code de procédure civile et sous divers constats, de :
- dire que la condamnation de la société ARTEDIS au paiement d'une astreinte de 200 000 € présente un caractère purement indemnitaire et illégal,
- dire que la société ARTEDIS a rencontré des difficultés réelles dans la communication des contrats du film " unfaithful " et, à titre subsidiaire, que l'inexécution de l'injonction découle d'une cause étrangère,
- dire que le juge des référés en condamnant à une astreinte au titre de la communication des comptes et contrats ultérieurs au prononcé de la décision a statué ultra petita,
en conséquence,
- infirmer en toutes ses dispositions l'ordonnance entreprise,
- déclarer M. Claude Y... irrecevable dans l'intégralité de ses demandes,
en tout état de cause,
- débouter M. Claude Y... de ses moyens, fins et conclusions,
- condamner M. Claude Y... au paiement de la somme de 5 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens ;

Vu les dernières conclusions en date du 27 juin 2008 par lesquelles l'intimé demande à la cour, au visa des articles 33 et suivants de la loi du 9 juillet 1991, de :
- confirmer intégralement l'ordonnance entreprise,
- débouter ARTEDIS de toutes ses demandes,
- condamner ARTEDIS à verser à M. Claude Y... la somme de 1 €,
- ordonner la publication d'extraits de l'arrêt à intervenir dans trois organes de presse du choix de M. Claude Y... sans que le coût de ces insertions n'excède la somme de 20 000 €,
- condamner ARTEDIS au paiement de la somme de 20 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens ;

SUR CE, LA COUR,

Considérant que, selon ordonnance rendue contradictoirement le 15 mars 2007, le délégataire du président du tribunal de grande instance de PARIS a, notamment :
- donné acte à la société ARTEDIS de ce qu'elle accepte de transmettre à M. Claude Y... les pièces comptables afférentes à l'adaptation de son oeuvre " La femme infidèle " pour la période comprise entre le 1er janvier 2002 et le 31 décembre 2006 dans un délai de deux mois à compter du jour de la décision,
- dit qu'à défaut de communication desdites pièces dans le délai prévu, l'obligation de communication sera assortie d'une astreinte provisoire de 1 000 € par jour de retard,
- enjoint à la société ARTEDIS de communiquer à M. Y... l'ensemble des contrats ayant permis la réalisation du film " Unfaithful " issue de l'oeuvre " La femme infidèle " dans un délai de deux mois à compter de la signification de la décision, sous astreinte de 2 000 € par jour et par contrat passé ce délai,
- s'est réservé la liquidation des astreintes ;

Que cette ordonnance a été signifiée le 29 mars 2007 à la société ARTEDIS qui n'en a pas relevé appel ;

Que, par acte du 8 novembre 2007, M. Claude Y... a assigné en référé d'heure à heure la société ARTEDIS afin qu'il soit ordonné à cette dernière de communiquer les redditions de compte à lui revenir, arrêtées au 30 juin, 30 septembre, 31 décembre 2006, 31 mars, 30 juin et 30 septembre 2007 ainsi que toutes pièces comptables y afférentes et copie de l'intégralité des conventions conclues aux fins d'exploitation de ses oeuvres, sous astreinte non comminatoire de 5 000 € par jour de retard à compter du prononcé de la décision à intervenir et par contrat ;

Qu'il a en outre, par assignation en référé d'heure à heure délivrée le même jour, sollicité la liquidation de l'astreinte fixée dans l'ordonnance du 15 mars 2007 précitée à la somme de 310 000 € ;

Que c'est dans ces conditions qu'a été rendue l'ordonnance entreprise, après jonction des deux instances ;

Considérant qu'au soutien de son appel, la société ARTEDIS fait valoir, pour l'essentiel, que, contrairement à ce qui est prétendu, la société BRINTER existe toujours, qu'elle-même est totalement étrangère à l'établissement du remake du film " La femme infidèle " et n'est tenue à aucune obligation contractuelle envers M. Y..., qu'elle a fait toutes diligences pour tenter d'obtenir la copie des contrats issus du film " Unfaithful " mais a rencontré des difficultés pour n'être pas mêlée à la production de ce film, lequel fut un échec commercial, que par sa décision, le premier juge a donné à la liquidation de l'astreinte un caractère indemnitaire qu'elle ne peut avoir d'une part, faute d'avoir tenu compte du comportement du débiteur de l'obligation, des obstacles dans l'exécution de cette dernière et de l'existence d'une cause étrangère, et d'autre part, en raison des critères d'appréciation de son montant, sans lien avec les termes de l'ordonnance du 15 mars 2007 et des articles 34 et suivants de la loi du 9 juillet 1991 ;

Qu'elle fait en outre grief au premier juge d'avoir, en fixant une nouvelle astreinte pour l'avenir, statué ultra petita ;

Considérant qu'il n'est pas contesté que la société ARTEDIS a procédé à la reddition des comptes et à la communication des pièces relatives aux films " Les biches ", " Une partie de plaisir ", " Que la bête meurt ", " La femme infidèle ", " La rupture ", " La décade prodigieuse ", " Les noces rouges ", " Les innocents aux mains sales ", " Nada ", " Le boucher ", " Juste avant la nuit ", " La route de Corinthe ", sollicitées par M. Y... pour la période du 30 juin 2006 au 30 septembre 2007 ; que l'ordonnance entreprise sera donc confirmée en ce qu'elle a constaté l'exécution de cette mesure ;

Considérant, s'agissant de la nouvelle astreinte assortissant l'obligation de reddition de comptes pour l'avenir, qu'il n'apparaît pas, au vu de l'exposé des prétentions des parties, qu'une telle demande avait été formée par M. Y... ; que le premier juge ayant statué ultra petita, ainsi que le relève justement l'appelante, la cour, statuant dans les limites de l'appel, infirmera (au lieu d'annuler) l'ordonnance de ce chef ;

Considérant que l'article 36 de la loi du 9 juillet 1991 dispose :
" Le montant de l'astreinte provisoire est liquidé en tenant compte du comportement de celui à qui l'injonction a été adressée et des difficultés qu'il a rencontrées pour l'exécuter.
(...)
L'astreinte provisoire ou définitive est supprimée en tout ou partie s'il est établi que l'inexécution ou le retard dans l'exécution de l'injonction du juge provient, en tout ou partie, d'une cause étrangère. " ;

Qu'en vertu de l'article 34 alinéa 1er, " l'astreinte est indépendante des dommages-intérêts " ;

Considérant que, sous couvert des difficultés et de l'existence d'une prétendue cause étrangère qu'elle invoque pour s'opposer à la liquidation de l'astreinte dont elle est assortie, la société ARTEDIS ne saurait remettre en cause l'obligation jugée à sa charge de remettre à M. Y... l'ensemble des contrats ayant permis la réalisation du film " Unfaithful " issue de l'oeuvre " La femme infidèle ", aux termes de l'ordonnance du 15 mars 2007 aujourd'hui définitive faute par elle d'en avoir relevé appel ; que les développements relatifs à la situation de la société BRINTER sont donc inopérants ;

Qu'à supposer que la société ARTEDIS n'ait pas en sa possession lesdits contrats, comme elle le prétend, elle ne justifie cependant pas de démarches en vue de les récupérer auprès de ceux qui, selon elle, les auraient conclus et devraient répondre de leur exécution auprès de M. Y... et ce, en vain ;

Qu'en outre, la société ARTEDIS étant chargée du " règlement des droits d'auteurs, de co-producteurs ", aux termes du contrat de mandat portant notamment sur le film " La femme infidèle " consenti le 1er août 1994 par la société BRINTER, qui en avait expressément reçu de M. Y... la faculté, et publié le 22 août au registre public de la cinématographie et de l'audiovisuel, ne peut sérieusement prétendre remplir cette mission sans avoir connaissance des contrats relatifs au remake dont l'auteur avait précisément autorisé la réalisation aux termes de la clause E du contrat portant sur ce film, conclu avec la société BRINTER le 8 juin 1990 ;

Qu'en conséquence, l'appelante n'établit pas la réalité des difficultés et de la cause étrangère qu'elle allègue pour tenter d'expliquer l'inexécution de l'injonction prononcée à son encontre ;

Considérant que l'ordonnance du 15 mars 2007 ayant été signifiée le 29 mars 2007, l'astreinte a pris effet le 29 mai 2007 ; qu'ainsi que l'a rappelé le premier juge, M. Y... a calculé l'astreinte en prenant en compte un seul contrat ; qu'il ressort en effet de son assignation que n'ayant pas été rendu destinataire des contrats, il ne peut en déterminer le nombre et que la somme de 310 000 € correspond à l'astreinte arrêtée au " 21 octobre 2007 " (sic) ;

Que, certes, pour liquider à la somme de 200 000 € l'astreinte dont est assortie cette injonction, le premier juge, en relevant que la société ARTEDIS " ne donne aucune raison valable pour expliquer les raisons de la retenue de ces contrats, ce qui laisse penser que le profit résultant du silence est supérieur au prix du risque pesant sur (elle) du fait du prononcé de l'astreinte " et que " des pièces versées au débat, il apparaît que les droits de remake ont été cédés pour un montant de 400 000 $ le 25 octobre 1994 et que le contrat initial prévoyait un pourcentage de 50 % pour M. Claude Y... en cas de remake ", a statué par des motifs étrangers aux conditions posées par l'article 36 de la loi précitée ;

Que, cependant, la liquidation de l'astreinte pour la période du 29 mai au 21 octobre 2007, date arrêtée par l'intimé, s'élevait à 292 000 € (146 jours à 2 000 €- et non pas à 310 000 € = 155 jours) ;

Que, l'intimé n'ayant pas demandé, par voie incidente, la réactualisation de l'astreinte mais sollicitant au contraire la confirmation de l'ordonnance déférée qui a réduit ses prétentions, il y a lieu, sans qu'il soit nécessaire de répondre aux moyens surabondants, de confirmer la décision déférée de ce chef ;

Considérant que M. Y... demande la somme d'un euro et la publication d'extraits du présent arrêt en réparation du préjudice que lui a causé la société ARTEDIS " en mettant publiquement en cause son honnêteté " ;

Que, toutefois, il ne démontre pas quel préjudice est résulté des écritures, dont il ne sollicite la suppression d'aucun passage, par lesquelles l'appelante indique, aux motifs que selon elle la société BRINTER a toujours existé, qu'il a " abusé les juges " et " n'a cessé de travestir les faits " ;

Qu'il convient de rejeter les demandes formées à ce titre par l'intimé ;

Considérant que la société ARTEDIS qui succombe sera condamnée aux dépens et, pour des motifs tirés de l'équité, à payer à l'intimé une indemnité de procédure pour les frais qu'elle l'a contraint à exposer en cause d'appel ;

PAR CES MOTIFS,

Infirme l'ordonnance entreprise en ce qu'elle a enjoint la S. A. ARTEDIS de communiquer les comptes afférents aux oeuvres " Les biches ", " Une partie de plaisir ", " Que la bête meurt ", " La femme infidèle ", " La rupture ", " La décade prodigieuse ", " Les noces rouges ", " Les innocents aux mains sales ", " Nada ", " Le boucher ", " Juste avant la nuit ", " La route de Corinthe " aux dates fixées par les contrats et ce, sous astreinte de 2 000 € par jour et par contrat passé, ladite astreinte prenant effet dès que la date contractuelle aura été dépassée et le juge s'étant réservé la liquidation de l'astreinte ;

Confirme l'ordonnance entreprise en toutes ses autres dispositions ;

Déboute M. Claude Y... de sa demande de dommages-intérêts et de publication d'extraits du présent arrêt ;

Condamne la S. A. ARTEDIS à payer à M. Claude Y... la somme de 1 500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne la S. A. ARTEDIS aux dépens d'appel dont recouvrement dans les conditions prévues par l'article 699 du même code.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Ct0151
Numéro d'arrêt : 644
Date de la décision : 07/11/2008

Références :

Décision attaquée : Tribunal de grande instance de Paris, 09 janvier 2008


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.paris;arret;2008-11-07;644 ?
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