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09/11/2011 | FRANCE | N°10/06039

France | France, Cour d'appel de Montpellier, 4o chambre sociale, 09 novembre 2011, 10/06039


SD/ RBICOUR D'APPEL DE MONTPELLIER 4o chambre sociale

ARRÊT DU 09 Novembre 2011

Numéro d'inscription au répertoire général : 10/ 06039

ARRÊT no
Décision déférée à la Cour : Jugement du 01 JUILLET 2010 TRIBUNAL DES AFFAIRES DE SECURITE SOCIALE DE HERAULT No RG20900254

APPELANT :

Monsieur Gabriel X... ... 13300 SALON DE PROVENCE Représentant : Me Josianne CHAILLOL (avocat au barreau d'AIX EN PROVENCE)

INTIMEES :

SNC GTM GENIE CIVIL 111 rue de la Jasse 13009 MARSEILLE 09 Représentant : Me Laurence BOZZI (avocat au barreau de

MARSEILLE)

CPAM BOUCHES DU RHONE 6 rue Alexis Carrel BP 32 13324 MARSEILLE CEDEX 4 représenté par Mell...

SD/ RBICOUR D'APPEL DE MONTPELLIER 4o chambre sociale

ARRÊT DU 09 Novembre 2011

Numéro d'inscription au répertoire général : 10/ 06039

ARRÊT no
Décision déférée à la Cour : Jugement du 01 JUILLET 2010 TRIBUNAL DES AFFAIRES DE SECURITE SOCIALE DE HERAULT No RG20900254

APPELANT :

Monsieur Gabriel X... ... 13300 SALON DE PROVENCE Représentant : Me Josianne CHAILLOL (avocat au barreau d'AIX EN PROVENCE)

INTIMEES :

SNC GTM GENIE CIVIL 111 rue de la Jasse 13009 MARSEILLE 09 Représentant : Me Laurence BOZZI (avocat au barreau de MARSEILLE)

CPAM BOUCHES DU RHONE 6 rue Alexis Carrel BP 32 13324 MARSEILLE CEDEX 4 représenté par Melle Laurène BATLLE (Autre) en vertu d'un pouvoir spécial du 05/ 09/ 11

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 945-1 du Code de Procédure civile, l'affaire a été débattue le 06 OCTOBRE 2011, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Monsieur Robert BELLETTI, Conseiller et Madame Gisèle BRESDIN, Conseiller, chargés d'instruire l'affaire.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Monsieur Pierre D'HERVE, Président de Chambre Monsieur Robert BELLETTI, Conseiller Madame Gisèle BRESDIN, Conseiller

Greffier, lors des débats : Mademoiselle Sylvie DAHURON

ARRÊT :

- Contradictoire.
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du nouveau Code de Procédure civile ;
- signé par Monsieur Pierre D'HERVE, Président de Chambre, et par Mademoiselle Sylvie DAHURON, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

* ** EXPOSE DU LITIGE

Salarié de la société GTM GCS (ci-après société GTM), Monsieur Gabriel X... a été victime d'un accident du travail le 17 août 2007 aux environs de 13h50 sur le chantier SNCF de Lantissargues à Montpellier.
Alors qu'en compagnie d'un autre salarié, il se trouvait occupé à poser des " Piges " ou piquets sur le front de taille d'un tunnel à environ dix mètres sous terre, à l'effet de connaître l'épaisseur du béton qui devait être projeté sur les parois, la terre a cédé l'ensevelissant ainsi que son collègue de travail, lequel décédera.
Les travaux litigieux ont été réalisés à l'initiative de la ville de Montpellier dans le cadre du recalibrage du ruisseau de Lantissargues par le doublement du collecteur existant au franchissement des voies ferrées du chantier des Près d'Arène et la création d'un nouvel ouvrage de trois mètres de diamètre, sensiblement parallèle à l'ancien collecteur existant.
La réalisation de ce nouveau collecteur confié à la société CHANTIERS MODERNES SUD en groupement avec la société GTM nécessitait notamment la création de galeries souterraines et de tranchées couvertes sous les voies ferrées électrifiées exploitées par la SNCF.
Les travaux exécutés par la société GTM l'étaient sous la maîtrise d'oeuvre de la SNCF, le contrôle technique relevait de CET APAVE SUD EUROPE à Lattes et la coordination SPS de VERITAS à Montpellier.
Saisi par Monsieur X... en vue d'une demande en reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur, le tribunal des affaires de sécurité sociale de l'Hérault l'a débouté de l'ensemble de ses demandes suivant jugement rendu le 1er juillet 2010.
Appelant de cette décision Monsieur X... a déposé des écritures le 17 mars 2011 auxquelles il est expressément renvoyé.
La société GTM a répondu par conclusions remises le 16 mars 2011 et à la lecture desquelles il convient de se référer.
La Caisse Primaire d'Assurance Maladie a déclaré dans des écritures du 10 février 2011, s'en rapporter à justice sur la reconnaissance d'une éventuelle faute de l'employeur, comme sur la demande en majoration de la rente.
Monsieur X... a fait essentiellement valoir que les risques d'éboulement avaient été largement sous-évalués et qu'il y avait carences dans les principes de prévention qui concernent les mesures particulières de protection applicables pour l'exécution des travaux souterrains.
Une divergence d'analyse entre les parties quant au mode opératoire devant dicter la pose des " Piges ", a conduit la présente Cour a ordonner, suivant arrêt rendu le 25 mai 2011, une mesure de consultation et commettre Monsieur A..., ingénieur civil, expert près la Cour d'Appel.
Rapport a été déposé par l'expert le 30 août 2011.
Suivant écritures déposées le 06 octobre 2011 et réitérées à l'audience, Monsieur X... reprend les observations formulées dans ses premières écritures sur la sous-évaluation des risques d'éboulement et la pose des " Piges " avant l'opération de " Gunitage " dont il prétend qu'elles auraient du être posées après cette opération qui aurait ainsi permis de sécuriser le front de taille.
Il conclut, à l'infirmation du jugement déféré, à la faute inexcusable de l'employeur, demande que son préjudice soit indemnisé sur la base de la nomenclature Dinthillac, et réclame condamnation de l'employeur à lui payer les sommes suivantes, avec intérêts de droit à compter du 26 février 2009 :-128 160, 00 € pour l'incidence professionnelle-60 000, 00 € au titre des souffrances endurées-70 000, 00 € en réparation du préjudice d'agrément et des troubles dans les conditions d'existence.

A titre subsidiaire il sollicite la désignation d'un médecin expert chargé de déterminer les conséquences corporelles de l'accident sur les postes visés supra, et demande que lui soit versée une provision de 30000, 00 €.
La société GTM a développé à l'audience ses écritures déposées le 06 octobre 2011.
Elle soutient avoir respecté les règles de sécurité comme les procédures définies par les documents contractuels qui eux-mêmes ont été établis en conformité des prescriptions du bureau de contrôle VERITAS et qui ont été validées par la SNCF, maître d'oeuvre.
Considérant que l'effondrement litigieux revêtait un caractère imprévisible, la société GTM à la confirmation du jugement entrepris et au déboutement de l'intégralité des demandes formulées par Monsieur X....
SUR QUOI
En vertu du contrat de travail le liant à son salarié, l'employeur est tenu envers celui-ci d'une obligation de sécurité de résultat ; le manquement à cette obligation a le caractère d'une faute inexcusable, lorsque l'employeur avait ou aurait dû avoir conscience du danger auquel était exposé le salarié et qu'il n'a pas pris les mesures nécessaires pour l'en préserver.
Il en résulte que la faute inexcusable est caractérise par la conscience du danger que doit en avoir son auteur, et qu'elle fonde le manquement à l'obligation de sécurité de l'employeur.
Il est indifférent que la faute inexcusable commise par l'employeur ait été la cause déterminante de l'accident survenu, il suffit qu'elle en soit une cause nécessaire pour que la responsabilité de l'employeur soit engagée, alors même que d'autres causes peuvent avoir concouru au dommage.
La faute inexcusable ne se présume pas et sa preuve incombe à la victime ou à ses ayants droits en leur qualité de demandeurs à l'instance.
Sur la faute inexcusable invoquée
-Circonstances de l'accident :
Le vendredi 17 août 2007 vers 13h00, sur le chantier SNCF de Lantissargues, avenue Morlhon à Montpellier Monsieur X... et son équipe doivent projeter du " Gunit " (mélange béton-sable) sur le front de taille et la voûte d'un tunnel à 10 mètres sous terre.
Monsieur B..., coffreur, s'emploie à préparer la pose des drains d'écoulement des eaux pluviales au pied du front de taille, Monsieur X... est quant à lui occupé à préparer la projection du " Gunit " sur le front de taille en pratiquant des marquages pour y disposer préalablement des " Piges " (chevilles repères) qui permettront de matérialiser l'épaisseur du " Gunit " à mettre en oeuvre dans le cadre de l'opération dite de " Gunitage " qui va consister à projeter une épaisseur de 15 cm de matière sur le front de taille afin de le stabiliser avant l'arrêt du chantier pendant 48 heures.
C'est alors qu'une " lentille " de terrain d'environ 1 mètre cube se détache du front de taille et ensevelit entièrement, Monsieur B... qui décédera, et partiellement Monsieur X... qui sera grièvement blessé, subissant notamment un déplacement du fémur (sortie de son logement) avec lésions sur le bassin et la région abdominale.
- La demande :
Monsieur X... fait valoir au soutien de sa demande que les risques d'éboulement ont été sous-évalués et que la pose de " Piges " à nu sur le front de taille l'a mis en danger, cette opération devant normalement être mise en oeuvre après le " Gunitage ".
Il estime, dés lors, qu'il y a eu carence dans les principes de prévention qui concernent les mesures particulières de protection applicables pour l'exécution des travaux souterrains.
Il se vérifie des éléments du dossier et des pièces produites aux débats qu'un mémoire de synthèse géologique, géotechnique et hydrogéologique a été établi par la société FONDASOL, spécialisée en matière géotechnique, pour le compte du maître de l'ouvrage (la ville de Montpellier)- pièce no 1.
Cette étude a ainsi recensé les principales contraintes géotechniques du projet et défini les dispositions à mettre en oeuvre.
La procédure d'excavation et de soutènement en galeries, dans le cadre de laquelle les travaux litigieux sont intervenus, a été mise au point sur la base des études géotechniques préalables contenues dans le dossier de consultation et des prescriptions prévues par le Cahier des Clauses Techniques Particulières (CCTP) établi par la SNCF, maître d'oeuvre (pièce no 3 et 4).
En outre dans le cadre de la prévention des risques prévisibles encourus par les divers intervenants du chantier, l'employeur a analysé dans le Plan particulier de Sécurité et de Protection de la Santé (PPSPS), la situation tenant au " risque d'effondrement " et décliné les " moyens de prévention " à mettre en oeuvre " conformément aux procédures travaux et aux notes de calcul " (pièce no 7).
C'est en se fondant sur le rapport établi par le contrôleur du travail suite à son intervention sur le chantier le 21 août 2007, que Monsieur X... fait valoir que les " Piges ", destinées à mesurer l'épaisseur du béton projeté, auraient du être mises en place après que cette projection soit intervenue et non avant.
Compte tenu du fait que les documents du Maître d'oeuvre et notamment le CCTP mentionnent cette mise en place avant que la projection ne soit faite, la Cour a sollicité d'un expert une consultation sur ce point précis.
Il a été répondu que " les piges d'épaisseur se posent en principe au moment du ferraillage, avant le gunitage ", l'expert concluant son rapport ainsi : " il n'a y pas, à notre connaissance, d'obligation légale sur la pose des piges avant projection, mais a-t-on besoin de Normes quand le bon sens pratique est évident ".

Ce faisant c'est bien au respect des dispositions contractuelles du mode opératoire préconisé par le maître d'oeuvre, lui même respectueux des règles de l'art, que l'employeur a fait poser les " Piges " avant que la projection de béton ne soit réalisée.
Dés lors qu'il n'est pas discuté que le jour de l'accident, 17 août 2007, la société FONDASOL spécialiste géotechnicien a répondu à la société GTM (pièce no 10) que le front de taille, examiné à sa demande le 14 août 2007, présentait des " formations qui correspondent aux terrains identifiés lors des investigations géotechniques ", il ne peut être fait grief à l'employeur de n'avoir pas été alerté par la nature de la paroi sablonneuse et moins encore de la présence dans le front de taille d'une masse argileuse qui se révélera être à l'origine du détachement de la lentille de terrain et de sa chute sur les victimes.
La preuve étant rapportée par l'employeur que les meures prises et mises en place pouvaient légitimement lui paraître suffisantes, et qu'il n'est pas établi qu'il avait ou aurait dû avoir conscience du danger auquel était exposé le salarié, la cour confirmera le jugement entrepris en ce qu'il a débouté monsieur X... de sa demande tendant à voir reconnaître la faute inexcusable de l'employeur, comme il a rejeté ses demandes indemnitaires subséquentes.
Cette reconnaissance ayant été rejetée, la demande de provision et celle d'expertise sont sans objet.

PAR CES MOTIFS

La Cour,
Statuant publiquement, contradictoirement, en dernier ressort après en avoir délibéré,
En la forme reçoit l'appel de Monsieur Gabriel X...,
Au fond,
Confirme le jugement déféré.
Dit que Monsieur Gabriel X... conservera à sa charge les frais de la mesure de consultation.
Dit n'y avoir lieu à application de l'article R. 144-10 alinéa 2 du Code de la Sécurité Sociale.
Dit n'y avoir lieu de statuer sur les dépens d'appel.
LE GREFFIERLE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Formation : 4o chambre sociale
Numéro d'arrêt : 10/06039
Date de la décision : 09/11/2011
Sens de l'arrêt : Interprète la décision, rectifie ou complète le dispositif d'une décision antérieure
Type d'affaire : Sociale

Analyses

POURVOI R1210228 MAIRATA


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.montpellier;arret;2011-11-09;10.06039 ?
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