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02/07/2008 | FRANCE | N°07/07925

France | France, Cour d'appel de Montpellier, 04, 02 juillet 2008, 07/07925


COUR D'APPEL DE MONTPELLIER 4e chambre sociale

ARRET DU 02 Juillet 2008

Numéro d'inscription au répertoire général : 07 / 07925

Décision déférée à la Cour : Jugement du 13 NOVEMBRE 2007
CONSEIL DE PRUD'HOMMES DE PERPIGNAN N° RG : 05 / 00882

APPELANT :

Monsieur Noreddine X... ...66330 CABESTANY Représentant : Me CHAUVIN substituant Me Valérie DELHAYE-LAMBERT (avocat au barreau de PERPIGNAN) (bénéficie d'une aide juridictionnelle Partielle numéro 2008 / 003247 du 26 / 03 / 2008 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de MONTPELLI

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INTIMEES :
SARL BLANCHISSERIE ARTISANALE DU CANIGOU prise en la personne de son représent...

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER 4e chambre sociale

ARRET DU 02 Juillet 2008

Numéro d'inscription au répertoire général : 07 / 07925

Décision déférée à la Cour : Jugement du 13 NOVEMBRE 2007
CONSEIL DE PRUD'HOMMES DE PERPIGNAN N° RG : 05 / 00882

APPELANT :

Monsieur Noreddine X... ...66330 CABESTANY Représentant : Me CHAUVIN substituant Me Valérie DELHAYE-LAMBERT (avocat au barreau de PERPIGNAN) (bénéficie d'une aide juridictionnelle Partielle numéro 2008 / 003247 du 26 / 03 / 2008 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de MONTPELLIER)

INTIMEES :
SARL BLANCHISSERIE ARTISANALE DU CANIGOU prise en la personne de son représentant légal 17 bis rue Gisclard 66350 TOULOUGES non comparante, ni représentée

Me Z... COMMISSAIRE A L'EXECUTION DU PLAN DE LA SARL BLANCHISSERIE ARTISANALE DU CANIGOU ... 66000 PERPIGNAN Représentant : la SCPA PARRAT VILANOVA ARCHAMBAULT LLATI (avocats au barreau de PERPIGNAN)

AGS (CGEA-TOULOUSE) 72, Rue Riquet-BP 81510 31015 TOULOUSE CEDEX 6 Représentant : la SCP CHATEL-CLERMONT-BRUN (avocats au barreau de MONTPELLIER)

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 04 JUIN 2008, en audience publique, Monsieur Pierre D'HERVE ayant fait le rapport prescrit par l'article 785 du Code de Procédure Civile, devant la Cour composée de :
Monsieur Pierre D'HERVE, Président Monsieur Jean-Luc PROUZAT, Conseiller Monsieur Eric SENNA, Conseiller

Greffier, lors des débats : Mademoiselle Sophie LE SQUER

ARRET :

- Réputé contradictoire.
- prononcé publiquement le 02 JUILLET 2008 par Monsieur Pierre D'HERVE, Président.
- signé par Monsieur Pierre D'HERVE, Président, et par Mademoiselle Sophie LE SQUER, Greffier présent lors du prononcé.
FAITS ET PROCEDURE
Noreddine X... a été embauché en qualité de chauffeur livreur, agent de production coefficient 160, par la SARL BLANCHISSERIE ARTISANALE DU CANIGOU, suivant contrat de travail saisonnier à termes variables pour la période du 13 avril au 30 octobre 2004, moyennant une rémunération mensuelle brute de 1 214, 69 € sur la base de 1 600 heures par an (35 heures par semaine) suivant accord d'annualisation du 1er juin 2000.
Le contrat de travail est soumis aux dispositions de la convention collective de la blanchisserie, laverie, location de linge, nettoyage, pressing et teinturerie du 17 novembre 1997.
La société BLANCHISSERIE ARTISANALE DU CANIGOU a été placée en redressement judiciaire le 10 décembre 2003, et par jugement du 15 décembre 2004, le plan de redressement par voie de continuation présenté par l'entreprise a été homologué, Maître Z... étant nommé en qualité de commissaire à l'exécution du plan.
Au mois d'octobre 2005, Monsieur X... a saisi le Conseil des Prud'Hommes de Perpignan aux fins de voir requalifier son contrat de travail à durée déterminée en contrat de travail à durée indéterminée, faire juger que la rupture du contrat de travail s'analyse en un licenciement irrégulier et abusif, et obtenir la condamnation de l'employeur au paiement d'une indemnité de requalification de 1 214, 69 € brut, d'une indemnité compensatrice de préavis de 1 214, 69 € outre 121, 46 € à titre de congés payés afférents, de dommages et intérêts pour licenciement irrégulier et abusif à hauteur de 7 200 € et d'une somme de 214, 70 € à titre d'heures supplémentaires.
Par jugement de départage du 13 novembre 2007, la juridiction saisie l'a débouté de toutes ses demandes.
Monsieur X..., par lettre recommandée du 30 novembre 2007, a régulièrement relevé appel de ce jugement.
PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES
L'appelant demande à la Cour de réformer le jugement déféré en toutes ses dispositions et de faire droit à l'ensemble de ses prétentions telles que formulées en première instance.
Il fait valoir essentiellement :
- que le contrat conclu le 14 juillet 2004 ne comporte aucune définition précise de son motif, au regard des termes de l'article L 122-3-1 du code du travail, et que le seul titre " contrat saisonnier " ne caractérise pas une mention précise de motif du contrat à durée déterminée.
- que la définition de l'objet du contrat n'est pas prévue, aucun paragraphe prévoyant avec précision les travaux pour lesquels il était embauché, et la saison qu'il devait réaliser.
- qu'en outre, l'employeur ne justifie pas du caractère saisonnier de son activité.
- qu'il résulte des plannings, des disques et de l'aveu de l'employeur qu'il effectuait des heures supplémentaires, et n'a pas été intégralement réglé de ces heures qui lui ont été payés à hauteur de 577h68 sur 625h15 réalisées.
La SARL BLANCHISSERIE ARTISANALE DU CANIGOU demande à la Cour de confirmer le jugement déféré et de condamner l'appelant au paiement d'une somme de 1 500 € en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.
Elle fait valoir en substance :
- que la mention " contrat saisonnier " figurant sur le contrat de travail conclu entre les parties suffit à satisfaire à l'exigence de l'énoncé du motif.
- que son activité est fortement impactée par les saisons, puisque sa clientèle est uniquement constituée de professionnels tels que hotels, restaurants, campings, ainsi qu'elle en justifie.
- que les plannings produits par l'appelant ont été remplis par ce dernier qu'il les a seul signé, alors qu'ils sont censés être contrôlés et signés par l'employeur ou un responsable ; que la comparaison des disques et des décomptes établis par le salarié fait apparaître que ce dernier confond " travail effectif " et " amplitude " omettant régulièrement de déduire les heures de repos ; que ces éléments ne sont pas de nature à étayer sa demande.
Maître Z..., ès qualités, sollicite sa mise hors de cause, en faisant observer qu'il a été désigné commissaire à l'exécution du plan le 15 décembre 2004, que la saisine du Conseil des Prud'Hommes est intervenue postérieurement, soit en octobre 2005, et que la présente procédure n'a donc aucun effet sur le plan de continuation. Subsidiairement, il s'en rapporte à l'argumentation développée par l'employeur.
L'AGS-CGEA de Toulouse demande à la Cour de confirmer le jugement déféré, et de dire en toute hypothèse que sa garantie sera suspendue pendant toute la durée d'exécution du plan de redressement par voie de continuation.
Pour un exposé complet des moyens et arguments des parties, la Cour se réfère à leurs conclusions écrites qu'elles ont reprises oralement à l'audience.
MOTIFS DE LA DECISION
1 - Sur la requalification du contrat de travail.
Le contrat de travail peut être conclu à durée déterminée en cas d'emplois à caractère saisonnier.
Le caractère saisonnier d'un emploi concerne des tâches appelées à se répéter normalement chaque année à des dates à peu près fixes, en fonction du rythme des saisons ou des modes de vie collectifs.
En l'espèce, Monsieur X... a été embauché en qualité de chauffeur livreur ainsi qu'il en résulte du contrat de travail et du certificat de travail délivré par l'employeur.
Il est manifeste que l'emploi de chauffeur livreur, compte tenu de l'activité de la société BLANCHISSERIE ARTISANALE DU CANIGOU, est un emploi permanent au sein de l'entreprise, qui certes a une clientèle plus importante pendant la saison touristique, mais a également une clientèle annuelle, ainsi qu'il en ressort des pièces qu'elle produit.
Au demeurant, la société intimée fait valoir que son activité est impactée fortement par les saisons, ce qui démontre qu'elle a eu recours aux services de Monsieur X... pour faire face à un surcroît d'activité.
Dés lors, l'employeur ne pouvait recourir à un contrat de travail saisonnier, dans la mesure où si les tâches liées à l'emploi de chauffeur livreur s'accroissent pendant la saison touristique, l'emploi de chauffeur livreur ne correspond pas en lui-même à un emploi saisonnier.
Par suite, il y a lieu de requalifier le contrat de travail saisonnier en contrat de travail à durée indéterminée, et d'allouer au salarié une indemnité de 1214, 69 € correspondant à un mois de salaire.
2 - Sur la rupture.
La requalification du contrat en contrat à durée indéterminée conduit à appliquer à la rupture de ce contrat les règles régissant le licenciement.
Comptant une ancienneté supérieure à 6 mois, le salarié pouvait prétendre à un délai congé d'un mois, soit la somme de 1 214, 69 € brut à titre d'indemnité compensatrice de préavis, outre les congés payés afférents.
Lors de la rupture, le salarié était âgé de 31 ans, comptait 6 mois et 17 jours d'ancienneté, et percevait une rémunération mensuelle brute de 1 214, 69 €.
En l'état de ces éléments, et compte tenu de sa situation matérielle et professionnelle après la rupture, son préjudice consécutif à son licenciement sans cause réelle et sérieuse, ni respect de la procédure, sera évalué, toutes causes confondues, à la somme de 5 000 €.
3 - Sur les heures supplémentaires.
Aux termes de l'article L 3171-4 du contrat de travail, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail effectuées, l'employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié, au vu de ces éléments et des éléments fournis par le salarié à l'appui de sa demande, le juge forme sa conviction, après avoir ordonné en cas de besoin toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles.
S'il appartient à l'employeur d'établir et de fournir les documents nécessaires pour le décompte de la durée du travail du salarié, il appartient cependant à ce dernier de fournir préalablement au juge des éléments de nature à étayer sa demande.
A l'appui de sa demande, le salarié produit un récapitulatif des livraisons effectuées, récapitulatif établi chaque semaine avec indication jour par jour des lieux de livraison et des heures de travail, et portant sur la période du 13 avril 2004 au 9 août 2004. Il produit également des disques chronotachygraphes pour les mois de juin et juillet 2004.
Ces éléments sont de nature à étayer sa demande.
De son côté, l'employeur ne fournit pas les documents qu'il était tenu d'établir, conformément aux articles D 212-18 et D 212-21 du code du travail, en vue du décompte de la durée du travail ; le contrat de travail précise que les horaires de travails sont établis en accord avec la direction et sont repartis du lundi au samedi, mais il n'est produit aucun document sur cette répartition.
La société BLANCHISSERIE ARTISANALE DU CANIGOU fait valoir que la comparaison entre les disques et les décomptes du salarié fait apparaître que le salarié confond " travail effectif " et " amplitude " mais ne produit aucun document relatif à la lecture des disques, lecture à laquelle elle est censée en mesure de procéder.
En outre les deux attestations qu'elle produit émanant de salariés de l'entreprise, sont insuffisantes pour établir la réalité des horaires de travail de l'appelant.
Enfin, l'employeur ne produit pas pour le salarié, les " plannings " de livraison auxquels font référence les auteurs des attestations sus visées.
En conséquence il sera fait droit à la demande de rappel de salaire au titre des heures supplémentaires à hauteur de la somme réclamée de 214, 70 € brut.

4 - Sur les autres demandes

Le certificat de travail délivré par l'employeur n'a pas lieu d'être rectifié.
Par contre, la délivrance d'une attestation ASSEDIC rectifiée s'impose, sans astreinte.
Il n'y a pas lieu de mettre hors de cause le Commissaire à l'exécution du plan.
La SARL BLANCHISSERIE ARTISANALE DU CANIGOU bénéficiant d'un plan de redressement par voie de continuation, et la garantie d'AGS n'étant que subsidiaire, il y a lieu de dire que la dite garantie sera suspendue pendant la durée du plan de redressement par voie de continuation.
Eu égard à la solution apportée au règlement du présent litige, il n'y a pas lieu de faire application des dispositions de l'article 700 du code procédure civile au profit de la Société intimée.
En l'état de la procédure collective, les dépens de première instance et d'appel seront employés en frais privilégiés de procédure collective.

PAR CES MOTIFS

LA COUR
Réforme le jugement déféré en toutes ses dispositions,
Statuant à nouveau,
Requalifie le contrat de travail saisonnier en contrat de travail à durée indéterminée,
Fixe la créance de Nourredine X... à la procédure collective de la SARL BLANCHISSERIE ARTISANALE DU CANIGOU, aux sommes suivantes :-1 214, 69 € à titre d'indemnité de requalification,-1 214, 69 € brut à titre d'indemnité compensatrice de préavis,-121, 46 € brut à titre de congés payés afférents,-5 000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,-214, 70 € brut à titre de rappel de salaire pour heures supplémentaires,

Dit n'y avoir lieu à prononcer la mise hors de cause de Maître Z..., ès qualités de commissaire à l'exécution du plan,
Ordonne la délivrance d'une attestation ASSEDIC rectifiée et conforme au présent arrêt, sans astreinte.
Dit que la garantie de l'AGS-CGEA TOULOUSE sera suspendue pendant la durée de l'exécution du plan de redressement par voie de continuation et qu'elle s'appliquera en cas de défaillance de l'employeur,
Rejette toute plus ample ou contraire,
Ordonne l'emploi des dépens de première instance et d'appel en frais privilégiés de procédure collective.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Formation : 04
Numéro d'arrêt : 07/07925
Date de la décision : 02/07/2008
Sens de l'arrêt : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Références :

ARRET du 19 mai 2010, Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 19 mai 2010, 08-44.409, Inédit

Décision attaquée : Conseil de prud'hommes de Perpignan, 13 novembre 2007


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.montpellier;arret;2008-07-02;07.07925 ?
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