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25/01/2011 | FRANCE | N°09/01492

France | France, Cour d'appel de Lyon, 8ème chambre, 25 janvier 2011, 09/01492


R. G : 09/ 01492

Décision du Tribunal de Grande Instance de MONTBRISON Au fond du 31 décembre 2008
RG : 06/ 00076 ch no

X...
C/
SA SUD ARCHITECTES ASSOCIES ALLIANZ IARD SA Y...

COUR D'APPEL DE LYON
8ème chambre
ARRET DU 25 Janvier 2011

APPELANT :
Monsieur Bruno X... né le 23 Mai 1952 à SAINT ETIENNE (42)... 42170 SAINT JUST SAINT RAMBERT
représenté par la SCP DUTRIEVOZ, avoués à la Cour
assisté de Me Isabelle GRENIER-DUCHENE, avocat au barreau de SAINT-ETIENNE

INTIMES :
SA SUD ARCHITECTES ASSOCIES représentÃ

©e par ses dirigeants légaux 13 quai du Commerce 69256 LYON CEDEX 09
représentée par Me Alain RAHON, avoué à la Cou...

R. G : 09/ 01492

Décision du Tribunal de Grande Instance de MONTBRISON Au fond du 31 décembre 2008
RG : 06/ 00076 ch no

X...
C/
SA SUD ARCHITECTES ASSOCIES ALLIANZ IARD SA Y...

COUR D'APPEL DE LYON
8ème chambre
ARRET DU 25 Janvier 2011

APPELANT :
Monsieur Bruno X... né le 23 Mai 1952 à SAINT ETIENNE (42)... 42170 SAINT JUST SAINT RAMBERT
représenté par la SCP DUTRIEVOZ, avoués à la Cour
assisté de Me Isabelle GRENIER-DUCHENE, avocat au barreau de SAINT-ETIENNE

INTIMES :
SA SUD ARCHITECTES ASSOCIES représentée par ses dirigeants légaux 13 quai du Commerce 69256 LYON CEDEX 09
représentée par Me Alain RAHON, avoué à la Cour
assistée de Me Frédérique BARRE, avocat au barreau de LYON

SA ALLIANZ IARD anciennement dénommée AGF IART ès qualités d'assureur de la société SNMC représentée par ses dirigeants légaux 87 rue Richelieu 75113 PARIS CEDEX 02
représentée par la SCP LIGIER DE MAUROY-LIGIER, avoués à la Cour
assistée de Me Philippe REFFAY, avocat au barreau de l'AIN substitué par Me PRUGNAUD, avocat

Maître Marie Madeleine Y... ès qualités de liquidateur de la société SNMC... 31800 SAINT GAUDENS

* * * * * *
Date de clôture de l'instruction : 06 Septembre 2010
Date des plaidoiries tenues en audience publique : 08 Décembre 2010
Date de mise à disposition : 25 Janvier 2011
Composition de la Cour lors des débats et du délibéré :- Pascal VENCENT, président-Dominique DEFRASNE, conseiller-Agnès CHAUVE, conseiller
assistés pendant les débats de Nicole MONTAGNE, greffier.
A l'audience, Pascal VENCENT a fait le rapport, conformément à l'article 785 du code de procédure civile.
Arrêt contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,
Signé par Pascal VENCENT, président, et par Nicole MONTAGNE, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

* * * *

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES :
Dans le courant de l'année 1995, monsieur Bruno X... a décidé d'entreprendre la réalisation d'une piscine avec " pool house " pour sa résidence située à Saint Just Saint Rambert.
Par contrat du 18 décembre 1995, il a confié la mission d'architecte à la société SUD ARCHITECTES.
Les travaux ont été réalisés dans le courant de l'année 1996, par les sociétés SNMC et COULEURS PISCINE.
Constatant des malfaçons, monsieur X... a, par acte d'huissier en date du 25 juillet 2003 saisi le juge des référés du tribunal de grande instance de Montbrison aux fins d'expertise.
Par ordonnances des 10 et 25 septembre 2003, le juge des référés a ordonné une expertise confiée à monsieur Z....
L'expert a déposé son rapport final le 21 mai 2007.
Parallèlement, Monsieur X... a, par acte d'huissier en date du 10 janvier 2006, assigné la société SUD ARCHITECTES, maître Y..., ès qualités de mandataire liquidateur de la société SNMC, ainsi que la société d'assurance AGF IART SA assureur de la société SNMC, devant le tribunal de grande instance de Montbrison aux fins de voir notamment condamner solidairement les sociétés SUD ARCHITECTES et SNMC ou la compagnie AGF au paiement de la somme de 110. 323, 82 euros au titre de la remise en état de la piscine litigieuse et de ses abords, et d'obtenir la réparation de leur préjudice de jouissance.
Par jugement du 31 décembre 2008, le tribunal de grande instance de Montbrison a :
- constaté que les conditions de mise en jeu de la responsabilité décennale ne sont pas remplies en l'absence de réception tacite des travaux,
- dit que le contrat d'architecte signé en 1995 par la société SUD ARCHITECTES pour la piscine était un contrat allégé ne comportant pas une mission complète de maîtrise d'oeuvre,
- mis la société SUD ARCHITECTES hors de cause, considérant qu'aucune faute n'était établie à son encontre,
- dit que la société SNMC a commis des fautes dans la conception et l'exécution des travaux de construction de la piscine de monsieur X...,
- fixé le montant des travaux de remise en état de la piscine à la somme de 28. 385, 57euros TTC,
- dit que la société SNMC devra payer la somme de 28. 385, 57euros TTC à monsieur X... à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi du fait des désordres affectant la piscine et ses abords,
- débouté monsieur X... du surplus de ses demandes,
- dit que la compagnie AGF est assureur de la société SNMC en vertu d'un contrat de responsabilité civile professionnelle,
- condamné la compagnie AGF à relever et garantir la société SNMC de la condamnation prononcée contre elle au bénéfice de monsieur X..., à hauteur de la somme de 28. 385, 57euros,
- condamner la compagnie AGF à payer à monsieur X... la somme de 1. 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- débouté la société SUD ARCHITECTES de sa demande d'application de l'article 700 du code de procédure civile,
- laissé les dépens à la charge de la compagnie AGF.
Par déclaration en date du 5 mars 2009, monsieur X... a interjeté appel de cette décision.
Dans ses conclusions déposées le 5 mai 2010, monsieur X... demande à la Cour de reformer la décision entreprise et en conséquence de :
- condamner solidairement les sociétés SUD ARCHITECTES et SNMC ou la compagnie d'assurance ALLIANZ IARD SA au paiement de la somme de 110. 323, 82 euros TTC au titre de la remise en état de la piscine litigieuse et de ses abords sur le fondement de l'article 1792 du code civil,
- condamner solidairement, les sociétés SUD ARCHITECTES et SNMC ou la compagnie d'assurance ALLIANZ IARD SA au paiement de la somme de 15. 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation des troubles de jouissance excessifs causés par la longueur des travaux et des malfaçons,
- condamner les sociétés SUD ARCHITECTES et SNMC ou la compagnie d'assurance ALLIANZ IARD SA au paiement de la somme de 12. 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.
Subsidiairement, il reprend l'ensemble de ses demandes qu'il fonde sur l'article 1147 du code civil.
A l'appui de ses prétentions, monsieur X... soulève les moyens suivants :
Il se fonde sur l'article 1792 du code civil pour invoquer le droit à la garantie décennale. Il fait valoir qu'une réception tacite des travaux est intervenue. Pour en justifier, il soutient avoir d'une part, réglé entièrement la société SNMC exécutante des travaux et d'autre part, avoir démontré l'existence non équivoque de sa volonté d'accepter les travaux. Il reconnaît avoir émis des réserves puisqu'il a constaté des anomalies, mais considère qu'en vertu de l'article 1792-6 du code civil il est possible d'accepter un ouvrage avec réserves. En outre, il justifie de cette réception par la prise de possession et invoque à ce titre une jurisprudence de la Cour de cassation de sa 3ème chambre civile en date du 16 mars 1994 qui l'admet comme signe suffisant d'une volonté non équivoque.
Il invoque une extension de mission portant sur le contrôle général des travaux par avenant au contrat le liant à la société SUD ARCHITECTES. Il considère que l'architecte se chargeait du suivi des travaux et était habilité à prendre les mesures utiles au déroulement du chantier et qu'en conséquence sa mission n'était pas allégée. Sur ce point, il rappelle une jurisprudence de la 3ème chambre civile de la Cour de cassation du 19 novembre 1997 en vertu de laquelle l'architecte ne peut s'exonérer que s'il prouve que les dommages allégués sont sans lien avec la mission qui lui a été confiée.
En outre, envisageant l'hypothèse dans laquelle l'extension de mission ne pourrait être retenue, il fait valoir que l'architecte chargé du projet et joint à toute demande de permis de construire est tenu de contrôler le respect de celui-ci. Ainsi, il considère que le défaut d'étanchéité n'aurait pas du lui échapper.
Quant à la répartition de responsabilité entre la société SNMC et COULEURS PISCINE, il soutient que les deux sociétés formaient un groupe et que conformément à la jurisprudence de la chambre commerciale de la Cour de cassation en date du 4 mars 1997, les sociétés d'un même groupe doivent supporter in solidum les conséquences de l'inexécution d'un contrat conclu par l'une d'entre elle, qui n'avait aucune autonomie et dans la gestion de laquelle les autres s'étaient immiscées. En conséquence, arguant de la qualité de mandataire de la société SNMC, il sollicite qu'elle répare l'intégralité des dommages subis même si celle-ci n'a pas réalisé entièrement les travaux.
Sur l'évaluation des travaux de remise en état, il souhaite que soit retenu les préconisations de l'expert compte tenu de l'importance des désordres et de sa compétence technique.
Pour justifier de son préjudice de jouissance, il rappelle que les travaux ont duré trente mois et que depuis dix ans sa piscine est inutilisable. Il précise avoir dû détruire la piscine litigieuse pour commencer les travaux, la remise en état s'étant avérée impossible.
A titre subsidiaire, il fonde ses demandes sur la responsabilité contractuelle et notamment l'article 1147 du code civil.
Il soutient que l'entrepreneur est tenu d'une obligation de résultat quant à la réalisation des travaux et, est avant réception de ceux-ci, responsable de tout désordre. Il invoque la même obligation de résultat pour les obligations contractuelles de l'architecte.
Il relève que faute pour ceux-ci de prouver un cas d'exonération, ils sont tenus de l'indemniser.
En réponse dans ses conclusions déposées le 16 février 2010, la société SUD ARCHITECTES demande à la Cour de confirmer le jugement attaqué et le complétant de rejeter toutes les demandes de monsieur X... et de le condamner à la somme de 12. 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.
A l'appui de ses prétentions, la société SUD ARCHITECTES soulève les moyens suivants :
Elle fait valoir que la réception de travaux constituant le prémisse de la garantie décennale prévue par l'article 1792 du code civil n'est pas intervenue. Elle relève qu'aucun procès verbal de réception n'est établi et qu'un doute subsiste sur le paiement intégral du chantier de la part de monsieur X....
Quant à sa responsabilité invoquée au titre de l'article 1792 ou 1147 du code civil, elle fait valoir qu'il lui a été confié une mission limitée à la simple conception architecturale, sans mission d'exécution des travaux. Elle invoque une jurisprudence de la 3ème chambre civile de la Cour de cassation en date du 21 février 1978 selon laquelle l'architecte ne peut être responsable que dans les limites de la mission qui lui a été confiée. En conséquence, elle considère que sa responsabilité doit être limitée à l'accomplissement des formalités administratives tendant à obtenir des autorisations administratives.
Elle rappelle que le contrat d'architecture stipule de manière claire que le projet de construction de la piscine était une mission allégée et qu'aucun avenant n'a été régularisé ou prouvé. L'ensemble des désordres seraient donc hors de sa sphère d'intervention et seule la responsabilité de la société SNMC serait susceptible d'être engagée.
Concernant la demande de dommage et intérêt pour préjudice de jouissance, elle réfute à nouveau sa responsabilité au regard de sa mission contractuelle.
Par conclusions déposées le 29 avril 2010, la compagnie ALLIANZ IARD anciennement dénommée AGF demande à la Cour de reformer le jugement entrepris et en conséquence de :- juger que la police de responsabilité civile professionnelle souscrite par la société SNMC a été résiliée à effet le 28 septembre 1997, cette dernière n'ayant pas eu au surplus vocation à couvrir les dommages affectant les ouvrages réalisés par l'assuré, de sorte que sa garantie ne peut être recherchée que sur le fondement de la responsabilité civile décennale,
- juger que la police responsabilité civile décennale et la police professionnelle souscrite par la société MC ENTREPRISE auprès d'elle ont vocation à couvrir exclusivement les ouvrages de maçonnerie,
- juger que les désordres allégués ne relèvent pas des ouvrages de maçonnerie pour lequel la société MC ENTREPRISE était assurée,
- la mettre hors de cause,
- condamner, en tant que de besoin, in solidum la société SUD ARCHITECTES à la relever et la garantir des éventuelles condamnations susceptibles d'être prononcées à son encontre,
- juger que toute condamnation susceptible d'être prononcée à son encontre s'entendra dans les limites de son contrat,
- condamner monsieur X... ou qui mieux le devra à une indemnité de 7. 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.
A l'appui de ses prétentions, la compagnie ALLIANZ soulève les moyens suivants :
Elle fait valoir que la réception des travaux est un préalable à la garantie décennale prévue à l'article 1792 du code civil. Elle précise qu'il n'y a eu aucune réception expresse de l'ouvrage et aucune réception tacite puisque celle-ci n'intervient qu'en démontrant l'existence d'une volonté non équivoque du maître de l'ouvrage présentant un caractère contradictoire. Elle soulève que le règlement intégral du chantier n'est pas établi et que de nombreux éléments démontrent que monsieur X... ne souhaitait pas réceptionner les travaux en l'état. En conséquence, elle conclut à l'absence de réception de travaux et à l'absence d'application de la responsabilité décennale des constructeurs et de la sienne.
Elle invoque l'absence d'imputabilité des désordres à son assuré la société MC ENTREPRISE et réfute tout lien entre celle-ci et la société SNMC qui formeraient des entités absolument indépendante. En conséquence, elle reteint que sa garantie n'a pas vocation à s'appliquer.
A titre subsidiaire, elle soulève que les travaux exécutés par la société SNMC ne sont pas identifiés puisque la société COULEUR PISCINE est également intervenue et que leur missions se sont entremêlées. L'imputabilité des anomalies seraient donc difficilement certaine.
Elle prétend que la police responsabilité civile décennale l'a été au titre d'une activité de maçonnerie et que selon le rapport de l'expert les désordres n'entreraient pas dans ce cadre. Elle précise que le contrat de responsabilité civile professionnelle souscrit par la société MC ENTREPRISE a été résilié à effet le 28 septembre 1997 et ne peut plus être sollicité.
Sur les prétentions financières de monsieur X..., elle relève que la somme estimée par l'expert doit être diminuée du poste imprévu qui n'est pas justifié et de la dette de monsieur X... envers la société SNMC de 44. 652, 95 euros. En conséquence, seule la somme de 28. 385, 57 euros pourrait être due.
Quant au préjudice de jouissance invoqué, elle considère que monsieur X... a continué d'utiliser sa piscine malgré les désordres constatés et la perte de 500 litres d'eau par jour avancée n'est aucunement prouvée.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 6 septembre 2010.

SUR QUOI LA COUR,
Sur la mise en jeu de la responsabilité décennale :
Le premier juge a fait un parfait récapitulatif des conditions nécessaires pour qu'une réception tacite puisse permettre le départ de la garantie décennale des articles 1792 et suivants du code civil, nonobstant l'absence d'une réception expresse et contradictoire formalisée par un écrit, soit entrée dans les lieux non équivoque, paiement de l'essentiel du prix, absence de réserves nombreuses ou importantes.
Présentement, si la prise de possession et l'absence de réserves nombreuses ou importantes n'apparaissent pas faire difficulté, il n'en est pas de même du paiement de l'essentiel du prix de ces travaux de construction d'une piscine par le maître de l'ouvrage.
Le paiement d'une somme de 694. 145 francs sur un marché d'un montant total de 900. 000 francs est incontestable.
Monsieur X... tente de prouver qu'il a effectivement payé ce solde très important par des paiements en espèces qu'il veut démontrer par des moyens indirects que sont l'absence de réaction de la liquidatrice judiciaire de la SNMC lors de la récupération par ses soins des créances impayées à l'entreprise, et par l'attestation d'un sieur CARTAL qui affirmerait avoir constaté le paiement de l'intégralité du prix, soit par chèque, soit par paiements en espèces.
Mais ces deux éléments n'ont en réalité aucun caractère probant, l'attitude maître Y... étant simplement subodorée alors qu'une sommation interpellative aurait peut être permis d'éclaircir le point de savoir pour quelle raison elle n'avait pas jugé bon de recouvrer l'hypothètique créance sur monsieur X... et l'attestation du sieur CARTAL, outre qu'elle est largement sujette à interrogation du fait des liens de subordination entre le témoin et le maître de l'ouvrage, outre encore qu'elle ne fait même pas clairement référence aux travaux de construction de la piscine, ne fait état que du paiement de plusieurs factures en chèques ou en espèces, ce qui à la limite n'est pas contesté, mais ce qui ne démontre pas que l'essentiel du prix a ainsi été payé sous une forme ou sous une autre.
Le jugement déféré qui a considéré que les éléments d'une réception tacite n'étaient pas réunis en l'espèce doit être confirmé.
Reste effectivement la possibilité d'invoquer la responsabilité contractuelle de droit commun de l'article 1147 du code civil.
Avant la réception de l'ouvrage l'entrepreneur est contractuellement tenu envers le maître de l'ouvrage d'une obligation de résultat lui imposant de mettre en place un ouvrage exempt de vices.
Il est constant que sur ce fondement textuel monsieur X... vient, à titre subsidiaire, rechercher la responsabilité solidaire de la société SUD ARCHITECTES et de la société SNCM.
Sur la responsabilité contractuelle de la société SUD ARCHITECTES :
Il est avéré que contractuellement en l'état du SSP en date du 12 décembre 1995, monsieur X... a régularisé avec la société SUD ARCHITECTES un contrat portant sur une mission limitée à la simple conception architecturale, sans mission d'exécution des travaux.
Monsieur X... entend donc rapporter la preuve que cette mission s'est en réalité poursuivie par une mission d'exécution des ouvrages, de suivi de chantier et de réception.
Mais on sait déjà que la mission de réception n'a pas été exécutée.
Aucun plan d'exécution n'est versé aux débats démontrant l'intervention de l'architecte au niveau de l'exécution des ouvrages, travail pourtant essentiel pour ce corps de métier censé indiquer précisément au maçon le travail à accomplir spécialement s'agissant d'un ouvrage complexe comme une piscine de plus de 10 mètres de long.
Il n'existe aucun compte rendu de chantier matérialisant le travail de suivi d'exécution coordonnant l'intervention des différents corps de métier.
Certes, sont versées des copies de correspondances manuscrites tendant à démontrer que le suivi du chantier n'est pas resté indifférent à un sieur A..., ancien salarié de la SA SUD ARCHITECTES.
Mais le ton alors employé dans ces différents courriers est celui de la camaraderie et de l'aide amicale.
En matière contractuelle la présomption de responsabilité de l'article 1792 du code civil n'existe pas et il ne suffit pas de tendre à démontrer qu'un professionnel a été vu sur un chantier pour en déduire nécessairement qu'il est intervenu dans un cadre contractuel, qu'il est alors responsable dans sa sphère de compétence des désordres qui ont pu survenir dans ce laps de temps.
L'intervention du sieur A... apparaît dès lors se situer hors contrat.
Une preuve essentielle de cet état de fait doit être trouvée dans la tentative par la société SUD ARCHITECTES de présenter à monsieur X... un avenant au contrat du 12 décembre 1995 incluant cette fois une mission complète renfermant mission de suivi d'exécution.
Il est constant que ce contrat n'a pas été avalisé par le maître de l'ouvrage, qu'il est donc resté lettre morte.
La preuve est donc rapportée à contrario de ce que les parties en sont restées au contrat initial, ce qui est confirmé encore par la note d'honoraires no2 dite rectifiée du 8 octobre 1996 qui récapitule la réalité du travail de la société SUD ARCHITECTES laquelle ne fait mention d'aucun suivi de chantier.
Monsieur X... est donc mal fondé à se prévaloir d'un quelconque contrat complémentaire et le jugement doit également être confirmé sur ce point.
Cependant à la suite de l'expert, il convient de considérer que même la mission allégée de maîtrise d'œ uvre confiée à SUD ARCHITECTES rend ce cabinet responsable de l'oubli de l'étanchéité de la terrasse qui est à créer maintenant pour un montant de 10. 750 euros HT car dans le cadre de ses missions élémentaires d'analyse des offres et de mise au point des marchés de travaux, au moins cette anomalie n'aurait pas dû échapper au cabinet d'architecture.
Sur la responsabilité contractuelle de la société SNCM :
Si les travaux ont été réalisés dans le courant de l'année 1996 par les sociétés SNMC et COULEURS PISCINE, il est avéré que monsieur X... n'a traité qu'avec la société SNCM à qui les sommes contractuellement dues ont été payées.
Il ressort clairement du rapport de l'expert judiciaire que les désordres litigieux sont dus à des défauts d'exécution et de conception du ressort de cette entreprise.
Il n'y a donc pas eu respect des règles de l'art en la matière, ce qui constitue une faute au regard de son obligation de résultats susceptible d'entraîner la responsabilité contractuelle de cette entreprise.
A bon droit le premier juge a retenu la responsabilité pleine et entière de cette entreprise pour l'ensemble des désordres sauf pour ce qui concerne l'étanchéité de la terrasse qui a vu un concours de responsabilités contractuelles de la part de l'atelier SUD ARCHITECTES et de l'entreprise SNCM.
Sur ce point il convient de parvenir à une condamnation in solidum de ces deux parties.
Montant des réparations et trouble de jouissance :
Dans un rapport clair et circonstancié parfaitement explicité, l'expert parvient à un montant des réparations ainsi détaillé :
- modification des volets coulissants : 36. 276 euros-étanchéité de la terrasse : 3. 750 euros-réfection du revêtement en pierre : 7. 500 euros-carrelage des bassins : 1. 200 euros-travaux spécialisés en piscine : 12. 343 euros-maîtrise d'œ uvre : 9. 125 euros-sondages géotechniques : 1. 300 euros-Imprévus : 10. 000 euros-Total HT : 81. 494, 00 euros-TVA 19, 6 % : 15. 972, 82 euros-Total TTC : 97. 466, 82 euros
Rien ne permet de douter du sérieux des travaux ainsi préconisés et de leur chiffrage.
S'agissant d'ouvrages relativement complexes induisant de fortes contraintes au sol du fait du poids considérable d'une piscine de grande dimension remplie d'eau, il est légitime de prévoir des sondages géotechniques.
De même les imprévus sur ce genre de chantiers relativement atypiques sont obligatoirement nombreux et il est légitime de prévoir une somme de 10. 000 euros pour couvrir les dépenses de cet ordre.
La cour réforme sur ce point le jugement déféré et avalise le chiffrage de l'expert pour la somme de 97. 466 euros TTC.
Cette somme diminuée de 12. 857 euros TTC comme vu plus haut, soit donc 84. 609 euros TTC, doit donc être mise entièrement à la charge de la société SNCM.
De cette somme, par compensation judiciaire, il convient effectivement de retrancher la somme de 44. 652 euros TTC restant à payer à l'entreprise SNCM, ce qui laisse un solde de 52. 814 euros TTC à la charge de la SNCM.
Aucune condamnation ne peut intervenir à l'encontre de cette entreprise aujourd'hui liquidée, il convient simplement de fixer la créance à son encontre à hauteur de cette somme de 52. 814 euros TTC.
Pour ce qui concerne l'étanchéité de la terrasse, il convient bien de condamner in solidum la société SUD ARCHITECTES et la société SNCM, uniquement pour celle-ci sous forme de fixation de créance, à payer à monsieur X... la somme de 12. 857 euros TTC.
Le trouble de jouissance est avéré puisque la dite piscine est rapidement devenue inutilisable du fait de la grande perte d'eau, soit plus de 4m3 par heure, et de l'impossibilité de jouir correctement de ses abords pendant plusieurs années, outre un aspect négligé donné de ce fait à un ensemble immobilier de caractère.
La cour a les éléments suffisants pour arbitrer ce trouble important eu égard à l'importance des sommes mobilisées pour cet important ouvrage d'agrément et à l'ancienneté du litige à la somme de 10. 000 euros.
La SNCM et la SA SUD ARCHITECTES, qui ont concouru à l'entier dommage, doivent être condamnées in solidum à réparations, la première sous forme de fixation de créance.
De même il convient de les condamner in solidum à payer à monsieur X... une somme de 7. 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et les entiers dépens.
Mise en cause de la compagnie ALLlANZ lARD SA, anciennement dénommée AGF :
La société MC ENTREPRISE a souscrit auprès de la compagnie ALLIANZ lARD SA, deux contrats distincts, à savoir :- une police No65032471 ayant vocation à couvrir la responsabilité civile décennale de l'entreprise,- une police No65197124 ayant vocation à couvrir la responsabilité civile professionnelle de l'entreprise.
La société SNMC qui a réalisé les travaux de la piscine de la propriété de monsieur X..., apparaît donc à priori étrangère à la compagnie ALLIANZ.
Il est cependant avéré comme résultant de la simple lecture des papiers commerciaux de cette entreprise que la société SNCM n'est autre que la Société Nouvelle C. M. et est la continuation de la même entité sous le même No RCS.
Puisque la SNCM s'est substituée à la société CM au moins en 1996 lors de la construction de cette piscine et que le contrat responsabilité civile professionnelle souscrit par la société MC ENTREPRISE auprès de la compagnie concluante, n'a été résilié qu'à effet du 28 septembre 1997, il faut en déduire que la société SNCM était bien assurée par la compagnie ALLIANZ à l'époque considérée.
Le jugement déféré doit être confirmé sur ce point.
Mais il est désormais acquis que la garantie décennale ne trouve pas à s'appliquer en l'espèce et que la police responsabilité civile professionnelle n'a vocation qu'à s'appliquer du chef de dommages causés en cours d'exécution du chantier, notamment aux tiers.
La responsabilité contractuelle de l'entreprise vis à vis du maître de l'ouvrage n'est pas couverte de ce chef.
Il échet donc de mettre cet assureur hors de cause et de lui accorder la prise en charge par monsieur X... de la somme de 3. 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et les entiers dépens de première instance et d'appel.

PAR CES MOTIFS
Confirme le jugement déféré en ce qu'il constate que les conditions de mise en jeu de la garantie décennale ne sont pas remplies en l'absence de réception expresse ou tacite des travaux, dit que le contrat d'architecte signé en 1995 par la société SUD ARCHITECTES pour la piscine était un contrat allégé ne comportant pas une mission complète de maîtrise d'oeuvre, dit que la société SNMC a commis des fautes dans la conception et l'exécution des travaux de construction de la piscine de monsieur X..., dit que la compagnie AGF était assureur de la société SNCM en vertu d'un contrat de responsabilité civile professionnelle.
Le réforme pour le surplus et statuant à nouveau,
Fixe après compensation la créance de monsieur X... sur la société SNCM, actuellement liquidée, à la somme de 52. 814 euros TTC.
Condamne in solidum la société SUD ARCHITECTES et la société liquidée SNCM à réparations au bénéfice de monsieur X... du chef de l'étanchéité de la terrasse.
Du fait de la liquidation de la société SNCM, condamne seule la SA SUD ARCHITECTES à payer à monsieur X... la somme de 12. 857 euros.
Fixe à 10. 000 euros la créance de dommages et intérêts pour troubles de jouissance due in solidum tant par la société liquidée SNCM que par la SA SUD ARCHITECTES.
Condamne la SA SUD ARCHITECTES à payer cette somme à monsieur X....
Fixe à 7. 000 euros la créance au titre des dispositions de l'article 700 due in solidum tant par la société SA SUD ARCHITECTES que par la société liquidée SNCM, outre les entiers dépens de première instance et d'appel.
Condamne la SA SUD ARCHITECTES à payer cette somme à monsieur X....
Déboute monsieur X... de ses demandes dirigées contre la compagnie ALLIANZ et met celle-ci hors de cause dans ses rapports avec les autres parties.
Condamne en cause d'appel monsieur X... à payer à cet assureur la somme de 3. 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi que ses entiers dépens et autorise les avoués de la cause à recouvrer ceux des dépens dont ils auront fait l'avance sans avoir reçu de provision.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : 8ème chambre
Numéro d'arrêt : 09/01492
Date de la décision : 25/01/2011
Sens de l'arrêt : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Références :

ARRET du 28 février 2012, Cour de cassation, civile, Chambre civile 3, 28 février 2012, 11-15.197, Inédit

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.lyon;arret;2011-01-25;09.01492 ?
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