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06/02/2009 | FRANCE | N°08/00975

France | France, Cour d'appel de Lyon, Chambre sociale, 06 février 2009, 08/00975


AFFAIRE PRUD'HOMALE
RAPPORTEUR

R. G : 08 / 00975

X...

C /

SARL VIRGINIE ET NATACHA

APPEL D'UNE DÉCISION DU : Conseil de Prud'hommes de SAINT-CHAMOND du 28 Janvier 2008 RG : F 07 / 00014

COUR D'APPEL DE LYON

CHAMBRE SOCIALE C
ARRÊT DU 06 FEVRIER 2009
APPELANT :
Khaled X...... 69004 LYON 04

comparant en personne, assisté de Maître Dominique ROUSSET, avocat au barreau de LYON

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Partielle numéro 2008 / 007122 du 10 / 04 / 2008 accordée par le bureau d'aide juridictio

nnelle de LYON)

INTIMÉE :

SARL VIRGINIE ET NATACHA 8 Rue Joseph Cugnot 38300 BOURGOIN JALLIEU

représentée par Maîtr...

AFFAIRE PRUD'HOMALE
RAPPORTEUR

R. G : 08 / 00975

X...

C /

SARL VIRGINIE ET NATACHA

APPEL D'UNE DÉCISION DU : Conseil de Prud'hommes de SAINT-CHAMOND du 28 Janvier 2008 RG : F 07 / 00014

COUR D'APPEL DE LYON

CHAMBRE SOCIALE C
ARRÊT DU 06 FEVRIER 2009
APPELANT :
Khaled X...... 69004 LYON 04

comparant en personne, assisté de Maître Dominique ROUSSET, avocat au barreau de LYON

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Partielle numéro 2008 / 007122 du 10 / 04 / 2008 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de LYON)

INTIMÉE :

SARL VIRGINIE ET NATACHA 8 Rue Joseph Cugnot 38300 BOURGOIN JALLIEU

représentée par Maître Richard DE LAMBERT, avocat au barreau de LYON

PARTIES CONVOQUÉES LE : 4 juin 2008

DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 15 Janvier 2009
Présidée par Marie-Claude REVOL, Conseiller magistrat rapporteur (sans opposition des parties dûment avisées) qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré, assistée pendant les débats de Malika CHINOUNE, Greffier.
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :
Bruno LIOTARD, Président Hélène HOMS, Conseiller Marie-Claude REVOL, Conseiller

ARRÊT : CONTRADICTOIRE

Prononcé publiquement le 06 Février 2009 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ;
Signé par Bruno LIOTARD, Président, et par Malika CHINOUNE, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
********************
EXPOSE DU LITIGE

Du 1er juillet au 30 septembre 2005, Khaled X... a travaillé en qualité d'agent de sécurité pour Marguerite Y..., exploitant en nom personnel sous l'enseigne Concept Sécurité ; le 3 octobre 2005, Khaled X... a été embauché aux mêmes fonctions par la S. A. R. L. VIRGINIE ET NATACHA, exerçant sous l'enseigne Concept Sécurité Protection ; il a été mis à pied le 23 août 2006 et licencié pour faute grave le 16 septembre 2006, l'employeur lui reprochant une absence injustifiée ;

Khaled X... a contesté la mise à pied et le licenciement devant le Conseil des prud'hommes de SAINT-CHAMOND et a réclamé un rappel de salaires correspondant à la période de mise à pied, une indemnité compensatrice de préavis et des dommages et intérêts ;
Par jugement du 28 janvier 2008, le conseil des prud'hommes a considéré que le licenciement reposait sur une faute grave, a débouté Khaled X... de l'ensemble de ses demandes, a rejeté les prétentions fondées sur les frais irrépétibles et a laissé les dépens de l'instance à la charge de Khaled X... ;
Le jugement a été notifié le 8 février 2008 à Khaled X... qui a interjeté appel par déclaration au greffe le 14 février 2008 ;
Par conclusions reçues au greffe le 30 juillet 2008 maintenues et soutenues oralement à l'audience, Khaled X... :- affirme avoir été employé dès le 1er juillet 2005 par la même entreprise ayant des dénominations différentes, à savoir entreprise en nom personnel Marguerite Y..., société CONCEPT SECURITE PROTECTION et S. A. R. L. VIRGINIE ET NATACHA, et affirme avoir toujours été affecté aux mêmes chantiers,- fait remonter son ancienneté au 1er juillet 2005,- reproche à son employeur d'avoir voulu le licencier en février 2006 alors qu'il était en arrêt de travail pour cause de maladie et de ne pas lui avoir fait passer la visite médicale de reprise du travail,- accuse donc son employeur d'avoir exécuté le contrat de travail de manière déloyale et réclame la somme de 1. 000 € à titre de dommages et intérêts,- justifie son absence du 23 août 2006 par son admission en urgence à l'hôpital de SAINT-CHAMOND et soutient avoir avisé son employeur le jour même à 8 heures,- demande la somme de 684, 80 € au titre du salaire correspondant à la période de mise à pied, outre 68, 48 € de congés payés afférents, la somme de 1. 298, 30 € au titre de l'indemnité compensatrice de préavis, outre 129, 83 € de congés payés afférents, la somme de 8. 000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement abusif et la somme de 300 € à titre de dommages et intérêts pour absence d'information sur son droit individuel à la formation,- sollicite la somme de 2. 500 € en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

Par conclusions reçues au greffe le 15 janvier 2009 maintenues et soutenues oralement à l'audience, la société VIRGINIE ET NATACHA :- admet que l'ancienneté de Khaled X... a pour point de départ le 1er juillet 2005,- fait grief au salarié d'avoir été absent le 23 août 2006 et de ne pas l'avoir prévenue immédiatement et soutient qu'il a ainsi violé ses obligations découlant du contrat de travail et de la convention collective,- qualifie ce manquement de faute grave justifiant le licenciement et excipe d'observations formulées le 4 juillet 2006 et d'un avertissement prononcé le 31 juillet 2006,- fait valoir que cette faute lui a causé un important préjudice commercial,- sollicite donc la confirmation du jugement entrepris,- subsidiairement, conteste le préjudice allégué par le salarié au soutien de sa demande de dommages et intérêts pour licenciement sans cause,- objecte à la demande de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail que l'absence de visite médicale de reprise après un arrêt maladie n'a généré aucun dommage au salarié,- réclame la somme de 2. 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

MOTIFS DE LA DECISION

Sur le licenciement :

L'employeur qui se prévaut d'une faute grave du salarié doit prouver l'exactitude des faits imputés à celui-ci dans la lettre de licenciement et doit démontrer que ces faits constituent une violation des obligations du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié pendant la durée du préavis ; dans la mesure où l'employeur a procédé à un licenciement pour faute disciplinaire, il appartient au juge d'apprécier, d'une part, si la faute est caractérisée, et, d'autre part, si elle est suffisante pour motiver un licenciement ;
La lettre de licenciement qui fixe les limites du litige énonce deux griefs :- celui de ne pas s'être présenté à ses différents postes de travail le 23 août 2006,- celui de ne pas avoir prévenu son employeur en temps utile ;

Le 23 août 2006, Khaled X... devait assurer l'ouverture de la bijouterie AUGIS à LYON à 7 heures 30 puis effectuer le gardiennage de l'agence de la Banque Nationale de Paris à VILLEURBANNE à partir de 8 heures 15 ; il ne s'est effectivement pas présenté à son travail ;
Le contrat de travail oblige le salarié à aviser immédiatement l'employeur de toute absence pour maladie ou accident et à fournir un certificat médical dans les 48 heures ; la convention collective stipule que l'absence est réputée régulière si un cas de force majeure a empêché le salarié de prévenir immédiatement son employeur ;
Khaled X... a été admis au service des urgences de l'hôpital de SAINT-CHAMOND le 23 août 2006 vers 7 heures du matin car il souffrait d'une phlébite ; il a été alité et placé sous perfusion ; dès 8 heures du matin, l'employeur a téléphoné et a été informé de l'hospitalisation de Khaled X... ;
L'hospitalisation en urgence justifie l'absence au travail ; les soins immédiatement prodigués constituent un cas de force majeure qui interdisait à Khaled X... de téléphoner à son employeur ou de le faire prévenir par des tiers ; l'hospitalisation et les soins urgents remplissent, en effet, les conditions de la force majeure en ce qu'ils sont imprévisibles, irrésistibles et externes ; en outre, l'admission à l'hôpital a été faite vers 7 heures et l'employeur a été informé vers 8 heures ;
Les griefs invoqués dans la lettre de licenciement ne sont donc pas fondés ;
En conséquence, le licenciement doit être déclaré dépourvu de cause réelle et sérieuse et le jugement entrepris doit être infirmé ;
L'ancienneté de Khaled X... qui remonte au 1er juillet 2005 est supérieure à six mois et inférieure à deux ans ;
L'article L. 1234-1 du code du travail et la convention collective fixent la durée du préavis à un mois ; Khaled X... percevait un salaire mensuel brut de 1. 298, 30 € ;
En conséquence, la S. A. R. L. VIRGINIE ET NATACHA doit être condamnée à verser à Khaled X... la somme de 1. 298, 30 € au titre de l'indemnité compensatrice de préavis, outre 129, 83 € de congés payés afférents ;
Par application de l'article L. 1235-5 du code du travail, Khaled X... a droit à une indemnité correspondant au préjudice subi ; Khaled X... ne justifie pas de recherches d'emploi ; l'indemnité revenant à Khaled X... doit être chiffrée à la somme de 5. 000 € ;
En conséquence, la S. A. R. L. VIRGINIE ET NATACHA doit être condamnée à verser à Khaled X... la somme de 5. 000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
Khaled X..., contre qui aucune faute n'est retenue, doit être rémunéré pour la période de mise à pied ; il a été en arrêt maladie jusqu'au 3 septembre 2006 ; le bulletin de salaire de septembre 2006 révèle que la mise à pied a pris effet le 4 septembre 2009 et s'est achevée le 16 septembre 2006, jour de la réception de la lettre de licenciement ; la mise à pied a donc duré 12 jours ; la perte de revenu liée à la mise à pied se monte à la somme de 514, 18 € se calculant comme suit : salaire mensuel de 1. 298, 30 € divisé par 30, 3 jours et multiplié par 12 jours ;
En conséquence, la S. A. R. L. VIRGINIE ET NATACHA doit être condamnée à verser à Khaled X... la somme de 514, 18 € au titre des salaires correspondant à la période de mise à pied, outre 51, 42 € de congés payés afférents ;
Sur l'exécution déloyale du contrat de travail :
L'article L. 1222-1 du code du travail pose le principe selon lequel le contrat de travail doit être exécuté de bonne foi ; l'article L. 4121-1 du code du travail oblige l'employeur à protéger la santé des travailleurs ; l'article R. 4624-21- 4o du code du travail rend obligatoire l'examen de reprise du travail par le médecin du travail lorsque le salarié a été absent au moins 21 jours pour cause de maladie ;
Khaled X... a été en arrêt de travail pour cause de maladie du 1er janvier au 31 mars 2006, soit durant trois mois ; l'employeur reconnaît ne pas avoir fait passer à Khaled X... de visite médicale à l'issue du congé maladie ;
L'employeur a ainsi failli à ses obligations et ce manquement a nécessairement causé au salarié un préjudice que les éléments de la cause conduisent à réparer par la somme de 500 € ;
En conséquence, la S. A. R. L. VIRGINIE ET NATACHA doit être condamnée à verser à Khaled X... la somme de 500 € à titre de dommages et intérêts pour mauvaise exécution du contrat de travail ;
Sur l'information relative au droit individuel à la formation :
L'article L. 6323-7 du code du travail oblige l'employeur à informer annuellement et par écrit chaque salarié du droit individuel à la formation qu'il a acquis ; l'article L. 6323-18 du code du travail impose à l'employeur d'informer le salarié sur son droit individuel à la formation dans la lettre de licenciement ; l'article L. 6323-17 du code du travail dispose que le droit individuel à la formation n'est pas transférable en cas de licenciement pour faute grave ;
La S. A. R. L. VIRGINIE ET NATACHA qui a procédé à un licenciement pour faute grave n'avait donc pas à délivrer d'information à Khaled X... sur son droit individuel à la formation ;
En conséquence, Khaled X... doit être débouté de sa demande de dommages et intérêts pour défaut d'information sur son droit individuel à la formation ;
Sur les frais irrépétibles et les dépens :
L'équité commande de confirmer le jugement entrepris en ses dispositions relatives aux frais irrépétibles et de condamner la S. A. R. L. VIRGINIE ET NATACHA à verser à Khaled X... en cause d'appel la somme de 2. 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
La S. A. R. L. VIRGINIE ET NATACHA qui succombe doit supporter les dépens de première instance et d'appel avec application des règles relatives à l'aide juridictionnelle partielle dont bénéficie Khaled X... ;

PAR CES MOTIFS

La Cour,
Infirme le jugement entrepris sauf en ses dispositions relatives aux frais irrépétibles,
Statuant à nouveau,
Juge le licenciement de Khaled X... dépourvu de cause réelle et sérieuse,
Condamne la S. A. R. L. VIRGINIE ET NATACHA à verser à Khaled X... la somme de 1. 298, 30 € au titre de l'indemnité compensatrice de préavis, outre 129, 83 € de congés payés afférents,
Condamne la S. A. R. L. VIRGINIE ET NATACHA à verser à Khaled X... la somme de 5. 000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
Condamne la S. A. R. L. VIRGINIE ET NATACHA à verser à Khaled X... la somme de 514, 18 € au titre des salaires correspondant à la période de mise à pied, outre 51, 42 € de congés payés afférents,
Condamne la S. A. R. L. VIRGINIE ET NATACHA aux dépens de première instance avec application des règles relatives à l'aide juridictionnelle partielle dont bénéficie Khaled X...,
Ajoutant,
Condamne la S. A. R. L. VIRGINIE ET NATACHA à verser à Khaled X... la somme de 500 € à titre de dommages et intérêts pour mauvaise exécution du contrat de travail,
Déboute Khaled X... de sa demande de dommages et intérêts pour défaut d'information sur son droit individuel à la formation,
Condamne la S. A. R. L. VIRGINIE ET NATACHA à verser à Khaled X... en cause d'appel la somme de 2. 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne la S. A. R. L. VIRGINIE ET NATACHA aux dépens d'appel avec application des règles relatives à l'aide juridictionnelle partielle dont bénéficie Khaled X....


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 08/00975
Date de la décision : 06/02/2009
Type d'affaire : Sociale

Analyses

CONTRAT DE TRAVAIL, RUPTURE - Licenciement - Cause - Cause réelle et sérieuse - Faute du salarié - Faute grave - Défaut - Applications diverses - / JDF

L'hospitalisation en urgence justifie l'absence au travail. En effet, les soins immédiatement prodigués constituent un cas de force majeure qui interdisent au salarié de téléphoner à son employeur ou de le faire prévenir par des tiers, l'hospitalisation et les soins urgents étant imprévisibles, irrésistibles et externes. En conséquence, est dépourvu de cause réelle et sérieuse le licenciement prononcé pour faute grave fondée sur une absence injustifiée du salarié hospitalisé en urgence


Références :

Décision attaquée : Conseil de prud'hommes de Saint-Chamond, 28 janvier 2008


Composition du Tribunal
Président : M. Liotard

Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.lyon;arret;2009-02-06;08.00975 ?
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