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17/01/2008 | FRANCE | N°06/07603

France | France, Cour d'appel de Lyon, Chambre civile 1, 17 janvier 2008, 06/07603


R. G : 06 / 07603

décisions :-cour d'appel de Grenoble en date du 12 / 6 / 2001 saisie après cassation

-cour de Cassation du 27 mai 2003
-cour d'appel de Lyon en date du 7 mars 2005 après cassation

-cour de Cassation en date du 7 février 2006

X... Société AXA ASSURANCES VENANT AUX DROITS DE LA CIE LES MUTUELLES UNIES

C /
DE G... C... Y... Z...

COUR D'APPEL DE LYON
PREMIERE CHAMBRE CIVILE A
ARRET DU 17 Janvier 2008

APPELANTS :

Monsieur Jean Christophe X... 17 Bis Place du Palais des Papes 84000 AVIGNON

re

présenté par la SCP BRONDEL-TUDELA, avoués à la Cour
assisté de Me COURTOIS, avocat au barreau d'Aix en Provence
Soci...

R. G : 06 / 07603

décisions :-cour d'appel de Grenoble en date du 12 / 6 / 2001 saisie après cassation

-cour de Cassation du 27 mai 2003
-cour d'appel de Lyon en date du 7 mars 2005 après cassation

-cour de Cassation en date du 7 février 2006

X... Société AXA ASSURANCES VENANT AUX DROITS DE LA CIE LES MUTUELLES UNIES

C /
DE G... C... Y... Z...

COUR D'APPEL DE LYON
PREMIERE CHAMBRE CIVILE A
ARRET DU 17 Janvier 2008

APPELANTS :

Monsieur Jean Christophe X... 17 Bis Place du Palais des Papes 84000 AVIGNON

représenté par la SCP BRONDEL-TUDELA, avoués à la Cour
assisté de Me COURTOIS, avocat au barreau d'Aix en Provence
Société AXA ASSURANCES VENANT AUX DROITS DE LA CIE LES MUTUELLES UNIES Grande Arche Paroi Nord 92044 PARIS LA DEFENSE

représentée par la SCP BRONDEL-TUDELA, avoués à la Cour assistée de Me COURTOIS, avocat au barreau d'Aix en Provence

INTIMES :
Maître Bernard DE G..., pris en sa qualité d'administrateur judiciaire du règlement judiciaire de la Société C... et des époux C.......... 84302 CAVAILLON CEDEX

défaillant
Monsieur Antoine C...... 84120 PERTUIS

représenté par Me Christian MOREL, avoué à la Cour assisté par Me E..., avocat au barreau de Paris

Madame Jeanne Y... épouse C...... 84120 PERTUIS

représentée par Me Christian MOREL, avoué à la Cour assistée par Me E..., avocat au barreau de Paris

Maître Laurent Z..., pris en sa qualité d'administrateur ad hoc de Mr et Mme C....... 84100 UCHAUX

représenté par Me Christian MOREL, avoué à la Cour assisté par Me E..., avocat au barreau de Paris

L'instruction a été clôturée le 24 Septembre 2007
L'audience de plaidoiries a eu lieu le 29 Novembre 2007
L'affaire a été mise en délibéré au 17 Janvier 2008
COMPOSITION DE LA COUR, lors des débats et du délibéré :
Président : Monsieur VOUAUX-MASSEL Conseiller : Madame BIOT Conseiller : Monsieur GOURD Greffier : Mme JANKOV pendant les débats uniquement

A l'audience Monsieur VOUAUX-MASSEL a fait le rapport conformément à l'article 785 du NCPC.
ARRET : contradictoire

prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du nouveau code de procédure civile ;

signé par Monsieur VOUAUX-MASSEL, président et par Madame JANKOV, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSE DU LITIGE

Le 12 mars 1982, le Tribunal de Commerce d'AVIGNON a ouvert la procédure de règlement judiciaire de la société à responsabilité limitée Société d'exploitation bâtiment et travaux publics C... ET FILS, dont Pierre C... était alors le gérant.
Monsieur de G..., nommé syndic, recevait une lettre datée du 18 mars 1982 ainsi rédigée :
" Comme suite à notre entretien, nous, Monsieur et Madame C... Antoine, confirmons par la présente que nous sommes d'accord pour collaborer au passif social de la Sarl C... et Fils.
A cet effet, nous donnons notre accord pour donner en collaboration tous nos biens mobiliers et immobiliers, et sommes également d'accord pour que vous preniez une inscription hypothécaire sur nos biens.
De toute façon, Monsieur C... Antoine est le gérant de fait de la société C... et il existe une confusion de patrimoine entre la Sarl C... et Fils et Monsieur C... Antoine.
D'ailleurs, si vous engagez une action en extension du règlement judiciaire de la Sarl C... et Fils à Monsieur C... Antoine, celui-ci ne s'y opposera pas. "

A la requête de Monsieur de G..., ayant élu domicile au cabinet de Maître Jean-Chritophe X..., Avocat au barreau d'AVIGNON, Monsieur et Madame Antoine C..., ont, par acte du 5 avril 1982 été assignés à comparaître devant le Tribunal de Commerce d'AVIGNON aux fins de condamnation de Monsieur Antoine C... à payer l'ensemble des dettes sociales de la société C... ET FILS en application de l'article 101 de la loi du 13 juillet 1967.

Le 7 février 1982 était adressée à Maître Jean-Christophe X..., avocat, une lettre signée par Madame Jeanne C... ainsi rédigée : " Nous vous prions de bien vouloir trouver ci-joint copie de l'assignation qui vient de nous être remise à la requête de Monsieur de G... pour le 23 avril 1982. Nous restons dans l'attente de vos instructions et vous remerciaons par avance de bien vouloir faire le nécessaire ".
Le 21 avril 1982, Maître X... a adressé à Monsieur et Madame C... la lettre suivante :
" Je m'empresse de vous accuser réception de votre courrier du 7 avril et d el'assignation qui y était jointe.
Il s'agit de l'assignation que je vous ai fait délivrer à la requête du syndic, ainsi que nous en avions convenu lors de notre dernière entrevue.
Je pense dans ces conditions que compte tenu de l'accord que vous avez donné au syndic et des lettres que vous lui avez adressées, la solution la plus simple est de ne pas bouger lors de l'audience du 23 avril où l'extension de règlement judiciaire sera prononcée "
Monsieur et Madame C... ayant été assignés à cette fin par acte du 11 mai 1982 délivré à la requête de Monsieur de G... ès qualités, ayant élu domicile au cabinet de Maître Jean-Christophe X..., le règlement judiciaire de la société C... ET FILS leur a été étendu par jugement du Tribunal de Commerce du 4 juin 1982 qui est devenu irrévocable. Le règlement judiciaire, tant de la société C... ET FILS que de Monsieur et Madame C..., a été converti en liquidation de biens par jugement du 22 octobre 1984 qui a été confirmé par arrêt de la Cour d'appel de NIMES du 4 juin 1992.
Suivant acte du 19 octobre 1990, Monsieur et Madame C... ont assigné Maître Jean-Christophe X... en responsabilité professionnelle et pour le faire condamner, solidairement avec son assureur, les Mutuelles Unies, à leur payer des dommages-intérêts.
Ils lui reprochaient d'avoir plaider contre eux alors qu'il était leur conseil depuis plusieurs années et d'avoir gravement failli à son obligation de conseil en ne les éclairant pas sur les conséquences de l'extension du règlement judiciaire et en ne leur conseillant pas de faire appel.
Par jugement du 17 décembre 1992, le Tribunal de Grande Instance de NIMES a dit la responsabilité de Monsieur Jean-Christophe X... intégralement engagée et la garantie de son assureur acquise et les a condamnés solidairement à relever et garantir Monsieur et Madame C... de toutes les sommes qui pourraient être mises à leur charge à l'issue de la procédure collective et à leur payer 10. 000 francs en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile. Ce jugement a été réformé par arrêt du 30 mars 1994 de la Cour d'appel de NIMES qui a débouté Monsieur et Madame C... de toutes leurs demandes.
La Cour de cassation ayant cassé l'arrêt de la Cour d'appel de NIMES et renvoyé la cause et les parties devant la Cour d'appel de GRENOBLE, celle-ci a par arrêt du 12 juin 2001 infirmé le jugement entrepris et débouté Monsieur et Madame C... de leurs demandes.
L'arrêt de la Cour d'appel de GRENOBLE du 12 juin 2001 a été cassé par arrêt du 27 mai 2003 de la Cour de cassation au motif que la Cour d'appel de GRENOBLE avait violé les articles 1315 et 1147 du Code civil en énonçant qu'il appartient à celui qui invoque un défaut de conseil de le prouver, d'une part, et en considérant que Monsieur et Madame C... avait décidé seul de l'extension du passif à la société C... ET FILS et qu'ils étaient à même de saisir les enjeux de la situation alors que l'avocat n'est pas déchargé de ses obligations professionnelles par la compétence de son client, d'autre part.
La Cour d'appel de LYON, désignée cour de renvoi, a confirmé, suivant arrêt du 7 mars 2005 le jugement du Tribunal de Grande Instance de NIMES, hormis en ce qu'il a condamné Monsieur Jean-Christophe X... et la compagnie Mutuelles Unies à relever et garantir de toutes les sommes qui pourraient être mises à leur charge à l'issue de la procédure collective et y ajoutant, a condamné solidairement Monsieur X... et la société AXA FRANCE venant aux droits des Mutuelles Unies à payer à Monsieur et Madame Antoine C... la somme de 150. 000 € à titre de dommages-intérêts et celle de 25. 000 € sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.
Monsieur et Madame C... formaient un pourvoi contre cet arrêt en lui reprochant de les avoir déboutés de leur demande à être garanti de toutes les sommes qui pourraient être mises à leur charge à l'issue de la procédure collective, aux motifs qu'ils étaient en mesure de comprendre par eux-mêmes le sens de leur engagement de s'acquitter du montant du passif de la société C... ET FILS.
Par arrêt en date du 7 février 2006, la Cour de cassation considérait qu'en se déterminant ainsi, après avoir retenu le manquement de l'avocat à ses obligations envers ses clients en ce qui concerne certains passages de leur lettre, en énonçant que s'ils avaient été consciencieusement et efficacement conseillés et assistés en justice, ils auraient eu les plus grandes chances d'éviter l'extension de la procédure collective, quand le devoir de conseil concernait également les conséquences de l'engagement retenu à leur encontre et contenu dans la même lettre, en eussent-ils compris le sens, la cour d'appel a violé l'article 1147 du Code civil.
En conséquence, la Cour de cassation cassait et annulait l'arrêt de la Cour d'appel de LYON, mais seulement en ce qu'il a infirmé le jugement qui avait condamné Monsieur X... et la société AXA FRANCE à relever et garantir Monsieur et Madame C... de toutes sommes mises à leur charge à l'issue de la procédure collective.
Reprenant régulièrement l'instance devant la présente Cour de renvoi, Monsieur et Madame C... concluent, dans des écritures auxquelles la Cour se réfère expressément, à la confirmation du jugement du Tribunal de Grande Instance de NIMES et en conséquence à la condamnation solidaire de Monsieur X... et de la société AXA FRANCE à leur verser la somme de 936. 575 € correspondant aux sommes mises à leur charge à l'issue de la procédure collective, avec intérêts au taux légal à compter du 14 décembre 1992, date de la décision entreprise. Monsieur et Madame C... sollicite en outre la condamnation de Madame Renée I... et de la société AXA FRANCE à lui verser une somme de 475. 567 € au titre de la perte patrimoniale, ainsi que la somme de 47. 158 € au titre du préjudice complémentaire de Madame C..., laquelle, souhaitant ouvrir un commerce, n'a pu obtenir le déblocage d'un prêt, faute par l'organisme prêteur de pouvoir inscrire une hypothèque de premier. Les époux C... estiment qu'outre le préjudice moral réparé par l'arrêt de la Cour d'appel de LYON du 7 mars 2005 (définitif sur ce point) que la résistance apportée par leurs adversaires à les indemniser leur a causé un préjudice de jouissance durant 15 années de leur vie. Ils sollicitent à ce titre une somme supplémentaire de 200. 000 € à titre de dommages-intérêts. Enfin ils estiment être en droit de solliciter une indemnité de 73. 331 € au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.
Dans des écritures auxquelles la Cour se réfère expressément, Monsieur Jean-Christophe X... et la société AXA FRANCE dont notamment valoir qu'il ressort de la décision du tribunal de Commerce la preuve de l'accord donné directement à cette juridiction par les époux C... ; qu'l avaient toute conscience de la protée de leur engagement, entendant expressément collaborer au passif social. Ils estiment en outre que les époux C... n'ont subi aucun préjudice. A titre subsidiaire, ils demandent que soit ordonné une expertise afin de compléter les preuves de l'absence de préjudice directement lié à la mesure d'extension du règlement judiciaire. Ils concluent en conséquence à l'infirmation du jugement du Tribunal de Grande Instance de NÎMES et au débouté de Monsieur et Madame C.... Ils sollicitent enfin la condamnation des intimés à leur verser une indemnité de 30. 000 € sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.
MOTIFS DE LA DECISION
Il est constant que Monsieur Jean-Christophe X... était le conseil des époux C... et de la société C... depuis plusieurs années, son père, également avocat, l'ayant déjà été avant lui. Néanmoins Maître Jean-Christophe X..., agissant alors pour le compte de Monsieur Bernard de G..., syndic du règlement judiciaire de la société C... ET FILS, a fait assigner les époux C... afin qu'ils soient déclarés personnellement en règlement judiciaire par application de l'article 101 de la loi du 13 juillet 1967.
La mesure prévue par ce texte constitue une sanction et, comme telle, est par nature défavorable à celui à l'égard duquel elle est prise, de sorte qu'il n'est pas sérieux de soutenir, comme le font les appelants, que le époux C... avaient, avec Monsieur Bernard de G... ès qualité qui la sollicitait, un intérêt commun à ce que la procédure collective leur fût étendue.
De plus, le choix de procéder par assignation pour saisir le tribunal de commerce de la demande d'extension de règlement judiciaire a eu pour effet de donner à la procédure une nature contentieuse de sorte qu'était applicable en l'espèce la règle interdisant que le même avocat représente ou assiste les parties ayant des intérêts opposés.
A réception de la lettre des époux C... datée du 7 avril 1982 (reproduite plus haut), non seulement Monsieur Jean-Christophe X... ne les a pas informés qu'il ne pouvait pas être leur conseil, au moins dans cette procédure, et qu'ils devaient se faire assister ou représenter par un autre avocat s'ils entendaient se défendre, mais qu'il leur a répondu dans un courrier en date du 21 avril 1982 qu'il convenait de " ne pas bouger lors de l'audience du 23 avril où l'extension du règlement judiciaire sera prononcée ". Monsieur Jean-Christophe X... a ainsi accepté de continuer à être leur conseil tout en étant celui de leur adversaire, Monsieur Bernard de G..., ès qualité.
Ce faisant, Monsieur Jean-Christophe X... a gravement enfreint la règle édictée par l'article 84 du décret no72-468 du 9 juin 1972.
Dès lors qu'il avait accepté de continuer à être leur conseil, Monsieur Jean-Christophe X... avait l'obligation de fournir aux époux C... tous conseils et informations quant à l'extension de la procédure collective et à ses effets à leur égard et quant aux mesures envisageables pour parvenir au sauvetage de la société C... ET FILS.
Il résulte des dernières écritures de Monsieur Jean-Christophe X..., où il relate en page 2 in fine que " sur intervention du syndic..., il fut accepté par les époux C..., en plein accord avec leur conseil, de garantir la situation avec leur patrimoine par le moyen d'une extension du passif ", ainsi que des termes de sa lettre du 21 avril 1982 (reproduite plus haut) que Monsieur Jean-Christophe X... a pris part aux discussions entre Monsieur Bernard de G..., ès qualité et les époux C..., alors qu'il n'est pas démontré qu'il a, lors de cet entretien ou à une autre occasion, rempli ses obligations à l'égard de ces derniers.
En particulier, alors même qu'il résulte de sa lettre du 21 avril 1992 (" compte tenu de l'accord que vous avez donné au syndic et des lettres que vous lui avez adressées ") que Monsieur Jean-Christophe X... avait connaissance de l'engagement pris par les époux C... dans la lettre qu'ils ont adressée au syndic le 18 mars 1982 (reproduite plus haut), Monsieur Jean-Christophe X... n'a manifestement pas informé ses clients sur la portée de cet engagement et sur les risques qu'ils encouraient.
Or il paraît en premier lieu évident, alors que des nombreuses attestations produites aux débats indiquent que les époux C..., émigrés italiens, maîtrisaient imparfaitement la langue française et étaient dépourvus de connaissances juridiques, qu'ils ne pouvaient en être les véritables rédacteurs, certains passages de la lettre du 18 mars 1982 faisant état de " gérant de fait ", de " confusion de patrimoine " et d'action en " extension de règlement judiciaire ", notions dont le sens leur échappait manifestement.
Si les époux C... pouvaient certes comprendre qu'ils donnaient leur accord pour " collaborer au passif social de la société C... ", ils ne pouvaient en percevoir seuls la véritable signification et surtout les conséquences qui pouvaient en être tirées. Cela pouvait s'entendre de la simple prise d'une hypothèque sur leur biens, comme cela est d'ailleurs effectivement proposé dans la lettre ou d'une mesure de comblement de passif et non point nécessairement de l'acceptation de la sanction d'extension du règlement judiciaire à leur patrimoine avec toutes ses implications, alors même qu'il n'est pas contesté que leur patrimoine immobilier était à cette époque suffisant pour apurer le passif. Or à aucun moment, leur conseil, Monsieur Jean-Christophe X... n'a attiré leur attention sur l'ambiguïté des termes de leur engagement et des risques courus.
Il résulte des dispositions du jugement rendues par le tribunal de commerce que les termes de la lettre des époux C... adressée au syndic le 18 mars 1982 ont précisément joué un rôle déterminant dans la décision prise d'extension du règlement judiciaire, le tribunal n'ayant pas recherché si les époux C... se trouvaient effectivement dans l'un des cas prévus par l'article 101 de la loi du 13 juillet 1967.
Or Monsieur Jean-Christophe X... qui avait manqué à son devoir de conseil en ne les informant pas des risques qu'ils couraient de par un engagement, dont les termes étaient des plus ambigus, négligeait encore, alors qu'il feignait dans sa lettre du 21 avril 1982 de continuer à vouloir assurer leur défense, de les assister efficacement et consciencieusement en justice, alors qu'il aurait pu faire valoir devant le tribunal de commerce, puis, en cas d'échec, par l'exercice d'un recours devant la Cour, le caractère relatif de l'engagement pris par les époux C... " de collaborer au passif de la société C... " et de la nécessité qu'il y avait de constater que ceux-ci se trouvaient effectivement dans un des cas prévus à l'article 101 de la loi du 13 juillet 2001 pour prononcer la sanction de l'extension du règlement judiciaire à leur patrimoine.
L'infraction grave commise par Monsieur Jean-Christophe X... aux règles de la profession d'avocat (article 84 du décret du 9 juin 1972), conjuguée à un manquement manifeste au devoir de conseil, puis à l'assistance loyale en justice ont fait perdre aux époux C... les plus grandes chances d'éviter que le règlement judiciaire ne leur soit étendu. La perte de chance, particulièrement élevée, sera fixée à trois quart. C'est dans cette proportion qu'il convient d'apprécier les conséquences dommageables de la faute commise par Monsieur Jean-Christophe X....
Il résulte des décomptes produits que Monsieur et Madame C... ont, à la suite de l'extension du règlement judiciaire, supporté personnellement au titre du passif de la liquidation de la société C... ET FILS la somme de 936. 575,17 €. Monsieur Jean-Christophe X..., in solidum avec son assureur, sera en conséquence condamné à leur verser la somme de 702. 431,25 € à titre de dommages-intérêts. Monsieur et Madame C... ne peuvent prétendre, en sus de cette somme indemnisant le préjudice directement causé par la faute de Monsieur Jean-Christophe X..., à une perte financière qu'aurait engendrée la vente forcée de biens immobiliers, étant précisé au surplus que le différentiel allégué par rapport au prix effectif du marché n'est pas formellement établi. Il convient enfin de relever que le préjudice spécifique allégué par Madame C... (perte d'une chance d'obtenir un prêt pour s'installer comme commerçante) n'est pas directement lié à la faute commise par Monsieur Jean-Christophe X.... Il convient de la débouter de ce dernier chef de demande.
Monsieur et Madame C... ne justifient pas non plus de l'existence d'un abus de la part de Monsieur Jean-Christophe X... et de son assureur dans l'exercice de leur droit d'ester en justice. Ils seront déboutés de la demande de dommages-intérêts qu'ils ont également formée de ce chef.
Il est par contre équitable d'allouer à Monsieur et Madame C..., en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, une indemnité au titre des frais, non compris dans les dépens, qu'ils ont dû exposer pour assurer leur défense durant les dix-années qu'a duré la procédure.
DECISION
PAR CES MOTIFS
La Cour,
Vu l'arrêt de la Cour de cassation du 7 février 2006 cassant partiellement l'arrêt de la Cour d'appel de LYON du 7 mars 2005,
Constate que l'indemnisation du préjudice moral et de l'article 700 du Nouveau Code de procédure civile allouée par la Cour d'appel de LYON dans son arrêt du 7 mars 2005 est définitive ;
Réforme le jugement rendu le 14 décembre 1992 par le Tribunal de Grande Instance de NÎMES quant au quantum de l'indemnisation ;
Et statuant à nouveau,
Condamne solidairement Monsieur Jean-Christophe X... et la société AXA FRANCE à payer à Monsieur et Madame C..., à titre principal, la somme de 702. 431,25 € augmentée des intérêts au taux légal à compter du 14 décembre 1992 et celle de 30. 000 € sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile (en sus de l'indemnité allouée sur le même fondement par la Cour d'appel de LYON dans son arrêt du 7 mars 2005) ;
Déboute Monsieur et Madame C... de leurs demandes plus amples ou contraires et Monsieur Jean-Christophe X... et son assureur de leur demande reconventionnelle ;
Condamne solidairement Monsieur Jean-Christophe X... et la société AXA FRANCE aux dépens de première instance et de ceux d'appel afférents aux arrêts rendus par les Cours d'appel de NÎMES, de GRENOBLE et de LYON (arrêt du 7 mars 2005), ainsi qu'à ceux afférents à l'arrêt présentement rendu, ces derniers distraits au profit de Maître MOREL, avoué à la Cour, sur son affirmation de droit.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 06/07603
Date de la décision : 17/01/2008
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Lyon, 07 mars 2005


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.lyon;arret;2008-01-17;06.07603 ?
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