COUR D'APPEL DE DOUAI
TROISIÈME CHAMBRE
ARRÊT DU 26 / 01 / 2006
BAUX RURAUX
No RG : 05 / 04854 jonction avec dossier RG No 05 / 04858
Tribunal paritaire des baux ruraux d'AVESNES SUR HELPE du 27 Juillet 2005 jugements no 99 / 000010 et 04 / 000006
APPELANTE Madame Marie-Noëlle X... épouse Y... Demeurant... 59138 PONT SUR SAMBRE
représentée par Me STERLILN de la SCP JP STERLIN-C STERLIN, avocats au barreau d'AMIENS
INTIMÉS Monsieur Michel Z... Demeurant... 59138 BACHANT
représenté par Me VILLESECHE de la SCP ROFFIAEN-LE FUR-VILLESECHE, avocats au barreau d'AVESNES SUR HELPE
Monsieur Avit X... Demeurant... 59138 BACHANT
représenté par Me COLSON de la SCP CHABOT-COLSON, avocats au barreau d'AVESNES SUR HELPE
Madame Marie-Christine X... épouse A... Demeurant... 59750 FEIGNIES
représentée par Me COLSON de la SCP CHABOT-COLSON, avocats au barreau d'AVESNES SUR HELPE
Madame Marie-Claire X... épouse B... Demeurant... 59550 PRISCHES
représentée par Me COLSON de la SCP CHABOT-COLSON, avocats au barreau d'AVESNES SUR HELPE
Madame Marie-Antoinette X... épouse C... Demeurant... 59440 ST AUBIN
représentée par Me COLSON de la SCP CHABOT-COLSON, avocats au barreau d'AVESNES SUR HELPE
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ Madame MERFELD, Président de chambre Madame CONVAIN, Conseiller Madame PAOLI, Conseiller--------------------- GREFFIER LORS DES DÉBATS : Madame GAMEZ
DÉBATS à l'audience publique du 01 Décembre 2005, Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe.
ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 26 Janvier 2006 (date indiquée à l'issue des débats) par Madame MERFELD, Président, et Madame GAMEZ, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Suivant acte notarié du 8 novembre 1967 les époux BAYART-SOYEZ, aux droits desquels se trouve Monsieur Michel Z... ont consenti aux époux Avit X..., Lydie E... un bail rural sur diverses parcelles de terres sises à BACHANT.
Monsieur Avit X... est décédé le 15 septembre 1991 laissant pour lui succéder sa veuve, Madame Lydie E... et ses neufs enfants dont Madame Marie-Noëlle X... épouse Y... et Monsieur Avit X... (fils).
Le 14 avril 1999 Monsieur Z... a donné congé à Madame Lydie E... veuve X..., née le 19 mars 1928, pour le 31 décembre 2000 sur le fondement de l'article L 411-64 du code rural qui dispose que le bailleur peut refuser le renouvellement du bail au preneur ayant atteint l'âge de la retraite retenu en matière d'assurance vieillesse des exploitants agricoles.
Madame Lydie E... veuve X... a contesté ce congé devant le Tribunal Paritaire des Baux Ruraux d'AVESNES-SUR-HELPE par acte du 23 juillet 1999, faisant valoir qu'elle souhaite céder son bail à sa fille, Madame Y... qui justifie des conditions exigées par les articles L 411-64 et L 411-35 du code rural.
Par jugement du 5 juin 2000 le Tribunal Paritaire a sursis à statuer sur cette contestation jusqu'à ce qu'une décision ayant autorité de chose jugée intervienne entre les parties sur l'attribution préférentielle du droit au bail de Monsieur Avit X... père.
Pa arrêt du 4 juillet 2002 la Cour d'Appel de DOUAI a attribué à Madame Lydie E... veuve X... les droits que son mari décédé détenait dans le bail consenti par Monsieur Michel Z....
Madame Lydie E... veuve X... est décédée le 14 septembre 2003.
Le pourvoi formé contre l'arrêt du 4 juillet 2002 a été rejeté par la Cour de Cassation le 24 février 2004.
Par requête du 9 mars 2004 Madame Y... a saisi le Tribunal Paritaire des Baux Ruraux d'AVESNES-SUR-HELPE d'une demande tendant à voir constater et subsidiairement dire et juger qu'elle est titulaire d'un bail rural, par application de l'article L 411-34 du code rural, sur les biens donnés en location par Monsieur Z....
Monsieur Z... a indiqué qu'il ne s'opposait pas à la demande de reprise par Madame Y....
Monsieur Avit X... et trois de ses soeurs, Madame Marie-Christine X... épouse A..., Madame Marie-Claire X... épouse B... et Madame Marie-Antoinette X... épouse C... sont intervenues à l'instance pour s'opposer à la demande de Madame Y... et subsidiairement demander que le bail soit attribué à Monsieur Avit X....
Le 28 juin 2004 Madame Y... a sollicité la réinscription au rôle de l'instance aux fins d'annulation du congé du 14 avril 1999.
Sur l'instance aux fins d'annulation de congé le Tribunal Paritaire, par jugement du 27 juillet 2005, a déclaré l'action irrecevable, a condamné les ayants droit de Madame E... à payer à Monsieur Z... la somme de 1. 000 € au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile et à payer les dépens au Trésor Public.
Pour statuer ainsi les premiers juges ont considéré que l'action en nullité d'un congé n'est pas transmissible dès lors que le contrat de bail n'existe plus ou que l'action est entachée d'un vice, ont indiqué que par jugement rendu le 27 juillet 2005, dans le cadre de la contestation d'un congé délivré par un autre bailleur le Tribunal avait constaté l'incapacité de Madame E... à faire un acte valide et en ont déduit que la demande de Madame E... en annulation de congé étant irrecevable pour défaut de capacité ses ayants droit n'avaient aucun intérêt à agir.
Sur l'instance aux fins de reprise du bail par Madame Y..., le Tribunal Paritaire, par jugement du 27 juillet 2005 a débouté Madame Y... de ses demandes, débouté les intervenants volontaires de leurs demandes, en conséquence constaté l'absence de bail rural sur les parcelles de Monsieur Z... et condamné solidairement Madame Y..., Monsieur X..., Madame A..., Madame B... et Madame C... à verser à Monsieur Z... la somme de 1. 000 € au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile et à payer les dépens au Trésor Public.
Pour rejeter la demande de Madame Y... les premiers juges ont dit qu'il est de l'intérêt et de la liberté contractuelle du bailleur de décider à qui il attribue le bail.
Madame Y... a relevé appel de ces deux jugements par actes reçus au greffe de la Cour le 3 août 2005.
Par conclusions déposées les 7 octobre et 30 novembre 2005 elle demande à la Cour d'infirmer les jugements, d'annuler le congé du 14 avril 1999, de déclarer fondée la demande de cession à son profit du bail consenti par Monsieur Z..., de dire qu'elle est titulaire d'un bail rural, par application de l'article L 411-34 du code rural sur les biens appartenant à Monsieur Z... et de condamner les consorts X... à lui payer la somme de 1. 000 € au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile pour chacun des deux dossiers.
Elle conteste que sa mère se soit trouvée en état d'insanité d'esprit en 1999, date de la saisine du Tribunal Paritaire et reproche aux premiers juges de s'être contentés d'indications particulièrement vagues, contraires aux documents médicaux produits. Elle soutient qu'elle est fondée à revendiquer le bénéfice de l'article L 411-34 du code rural puisqu'elle est chef d'exploitation et co-gérante de l'EARL dans le cadre de laquelle sa mère exploitait les terres données à bail et qu'elle l'a aidée quotidiennement dans les travaux de la ferme, contrairement à son frère Avit qui n'a jamais travaillé pour ses parents mais pour lui-même exclusivement.
Par conclusions déposées le 21 novembre 2005 Monsieur Z... s'en rapporte à justice sur la demande de Madame Y... visant à se voir attribuer le bail et soutient qu'en aucun cas le bail ne peut être attribué à Monsieur Avit X... puisque celui-ci n'a pas participé à l'exploitation par sa mère des terres données en location et ne bénéficie pas de l'autorisation administrative d'exploiter lesdites terres. Il se porte demandeur à l'égard des consorts X... d'une somme de 1. 000 € en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.
S'agissant de la demande en annulation de congé il fait observer qu'il n'était pas partie au jugement par lequel le Tribunal Paritaire a constaté l'incapacité de Madame E... à faire un acte valide et demande à la Cour de surseoir à statuer dans l'attente de l'arrêt qui sera rendu sur l'appel de ce jugement et, dans le respect du principe du contradictoire, de renvoyer l'affaire à une audience ultérieure pour lui permettre de s'expliquer et de conclure au vu de cet arrêt.
Par conclusions déposées les 25 novembre et 1er décembre 2005 Monsieur Avit X... et Mesdames A..., B... et C... soulèvent l'irrecevabilité de l'appel de Madame Y... et demandent la confirmation des jugements et la condamnation de l'appelante à leur verser la somme de 4. 000 € au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile pour chacun des deux dossiers.
Ils font valoir que l'action en annulation de congé engagée par Madame E... ne pourrait être reprise que par l'ensemble de ses héritiers, que Madame Y... n'a pas qualité pour exercer seule cette action et que dès lors même si elle peut personnellement agir pour demander que le bail rural lui soit attribué après le décès de sa mère, cette action ne peut faire disparaître l'effet du congé qui a mis fin au bail.
Ils sollicitent la confirmation du jugement en ce qu'il a retenu l'état d'insanité d'esprit de Madame E... lors de la contestation du congé soutenant qu'il ressort de l'ensemble des documents versés aux débats qu'elle souffrait depuis 1998 d'une maladie d'Alzheimer évolutive, puisqu'elle présentait dès 1998 des troubles de la mémoire et de nombreuses difficultés dont des troubles visuels importants et que cette situation a donné lieu ultérieurement à la saisine du juge des tutelles.
Ils ajoutent :- que Madame Y... qui exerce la profession de dentiste à plein temps ne peut participer effectivement à l'exploitation ainsi que l'exige l'article L. 411-34 du code rural et qu'en réalité la demande n'a d'autre but que de permettre à son mari de continuer à exploiter,- que l'état de santé de Madame E... qui était atteinte de la maladie d'Alzheimer et d'un cancer généralisé ne lui permettait pas d'exploiter elle-même les terres, que la mise à disposition d'une E. A. R. L. n'est possible en vertu de l'article L. 411-37 du code rural que dans la mesure où le preneur participe activement à l'exploitation et à la gestion de la société, ce qui n'était pas le cas de Madame E..., que la mise à disposition doit être mise à néant, qu'il n'est nullement produit l'avis de mise à disposition qui aurait dû être adressé par Madame E... au bailleur.
Subsidiairement dans l'hypothèse où la Cour n'estimerait pas devoir confirmer le jugement, Monsieur Avit X... demande que le bail lui soit attribué.
SUR CE :
Attendu que la recevabilité de l'appel n'est pas subordonnée à celle de la demande de l'appelant ; que c'est donc à tort que les consorts X... soutiennent que les appels de Madame Y... seraient irrecevables au motif qu'elle serait irrecevable à reprendre la procédure initiée par sa mère alors que Madame Y... était personnellement partie aux deux jugements ;
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Attendu que Madame E... ayant motivé sa contestation de congé par la faculté qui lui était donnée par la loi de céder son bail à sa fille, Madame Y... laquelle a initié une instance distincte pour voir reconnaître qu'elle est titulaire du bail depuis le décès de sa mère sur le fondement de l'article L 411-34 du code rural, les deux instances sont connexes et qu'il convient d'en ordonner la jonction afin de statuer par un seul et même arrêt ;
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Attendu que le Tribunal a considéré que Madame Y... était irrecevable à intervenir pour soutenir l'annulation du congé délivré par Monsieur Z... au motif qu'elle était étrangère au contrat de bail alors que dès lors que Madame Y... invoquait les dispositions de l'article L 411-34 du code rural selon lesquelles en cas de décès du preneur, le bail continue au profit de son conjoint, de ses ascendants et de ses descendants participant à l'exploitation ou y ayant participé effectivement au cours des cinq années antérieures au décès, elle peut se prévaloir de la contestation du congé dont Madame E... avait saisi le Tribunal avant son décès ; que le jugement sera infirmé en ce qu'il a déclaré irrecevable l'intervention de Madame Y... ;
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Attendu que Monsieur Z... fait valoir à bon droit qu'il n'était pas partie au jugement par lequel le Tribunal Paritaire a jugé que Madame E... était incapable de faire un acte valide en avril 1999, date à laquelle elle avait saisi le Tribunal Paritaire pour contester le congé qui lui avait été délivré par un autre bailleur ;
Que toutefois le moyen étant repris en cause d'appel dans la présente instance au sujet de la capacité de Madame E... à contester en juillet 1999 le congé qui lui a été délivré par Monsieur Z..., il appartient dès à présent à la Cour de se prononcer sur cette question au regard des pièces qui lui sont soumises ; que la demande de sursis à statuer doit être rejetée ;
Attendu que la preuve de l'altération des facultés mentales peut être faite par tous moyens dès lors qu'une action a été introduite du vivant de l'auteur de l'acte aux fins de faire ouvrir sa tutelle ou sa curatelle, ce qui est le cas en l'espèce puisque quelque temps avant le décès de Madame E... Monsieur Avit X... et trois de ses soeurs ont présenté une requête en ce sens au juge des tutelles d'AVESNES-SUR-HELPE qui, par ordonnance du 25 août 2003, a placé Madame E... sous sauvegarde de justice ; qu'il n'est toutefois pas contesté que la cause du décès de Madame E... le 14 septembre 2003 (cancer généralisé) est totalement étrangère à la maladie d'Alzheimer qui est invoquée comme cause d'insanité d'esprit ;
Attendu qu'il résulte de l'article 489 du code civil que le trouble mental dont la preuve doit être apportée doit exister au moment où l'acte attaqué a été fait ;
Attendu que, pour apporter la preuve qui leur incombe les consorts X... invoquent un courrier du Docteur G..., neuropsychiatre qui le 10 janvier 2000 écrivait à l'un de ses confrères que depuis deux ans, de manière progressive Madame E... développe des difficultés mnésiques auxquelles se sont ajoutés des troubles phasiques, praxiques et visio-spatiaux ;
Que ce document est insuffisant à démontrer une insanité d'esprit de Madame E... en juillet 1999 ; que la maladie d'Alzheimer à son stade débutant ne se caractérise que par les légers troubles de la mémoire, les capacités de jugement et de raisonnement n'étant que peu altérées ;
Que Madame Y... a fait pratiquer par le Docteur H..., neurologue, une expertise sur pièces afin de déterminer l'état psychique de sa mère ; que le Docteur H... écrit en conclusion de son rapport, après avoir analysé les différents documents médicaux qui lui étaient soumis, que la maladie d'Alzheimer dont était atteinte Madame E... a été jusqu'au moins février 2001, caractérisée par des déficiences et incapacité cognitives (et plus particulièrement mnésiques) peu importantes, que l'on peut considérer qu'en 2000 ses capacités de jugement et de raisonnement n'étaient que peu ou pas atteintes, qu'elle était capable de prendre seule, en toute sécurité et de façon appropriée des décisions concernant sa vie personnelle et plus particulièrement ses biens et qu'elle restait à cette époque pleinement consciente de ses difficultés et n'en était d'ailleurs qu'assez peu affectée ;
Que ce rapport d'expertise n'est certes pas contradictoire ; que cependant les consorts X... qui pèse la charge de la preuve n'apportent pas d'éléments contraires et que dès lors leurs affirmations sur l'état d'insanité d'esprit de Madame E... en juillet 1999 ne sont pas justifiées ;
Attendu que le jugement doit être infirmé en ce qu'il a déclaré irrecevable la demande d'annulation de congé pour cause d'incapacité de Madame E... ;
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Attendu que par arrêt du 4 juillet 2002 la Cour d'Appel de DOUAI a attribué à Madame E... les droits que son mari décédé détenait dans le bail consenti par Monsieur Z... ;
Attendu que Monsieur Avit X... et Mesdames B..., C... et A..., tiers à ce contrat, n'ont pas qualité pour contester les conditions dans lesquelles leur mère exploitait les terres, seul le bailleur étant recevable à invoquer une éventuelle irrégularité à l'appui d'une demande de résiliation ;
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Attendu que l'article L 411-64 du code rural permet au preneur évincé en raison de son âge de céder son bail à l'un de ses descendants ayant atteint l'âge de la majorité, dans les conditions prévues à l'article L 411-35 ;
Attendu que Madame Y... a obtenu le 10 juillet 1997 le brevet professionnel agricole, option chef d'exploitation ou ouvrier hautement qualifié en polyculture élevage, diplôme attestant de sa capacité ou expérience professionnelle en vertu de l'article R 331-1 du code rural ;
Qu'elle est co-gérante de l'EARL Ferme du Bel Air au sein de laquelle Madame E... exploitait les terres qui lui avaient été données à bail, qu'elle est en règle avec la réglementation des structures ; qu'elle est domiciliée à PONT-SUR-SAMBRE, à proximité immédiate des terres objet du bail ;
Qu'elle remplit les conditions pour bénéficier de la cession de bail, ce qui conduit à annuler le congé ;
Attendu que la demande est également présentée sur le fondement de l'article L 411-34 du code rural qui impose à Madame Y... de démontrer qu'elle participe à l'exploitation ou y a participé effectivement au cours des cinq années antérieures au décès ;
Que les consorts X... soutiennent que cette condition n'est pas remplie car Madame Y... exerce la profession de chirurgien dentiste et affirment que l'exploitation est en réalité assurée par son époux, co-gérant de l'EARL ;
Mais attendu que Madame Y... justifie qu'elle exerce son activité de dentiste en association avec sa soeur, Marie-Louise et qu'elle ne travaille qu'à temps partiel trois jours par semaine et uniquement sur rendez-vous, son cabinet se trouvant à PONT-SUR-SAMBRE, à proximité immédiate des parcelles données à bail ;
Qu'elle produit de nombreuses attestations qui démontrent qu'elle a apporté une participation effective aux travaux de la ferme après le décès de son père ;- que Madame I..., amie d'enfance déclare que depuis 1991 elle a pu constater au cours de ses visites que Marie-Noëlle Y... aidait sa mère à effectuer les tâches liées à la ferme, nettoyage de l'étable, soins et alimentation des animaux,- que Monsieur J..., vétérinaire de l'EARL Ferme du Bel Air depuis 1997 certifie que lors de ses visites et surtout lors des césariennes Madame Y... est régulièrement présente pour aider aux soins, qu'elle s'occupe de l'alimentation des bovins et qu'il l'a voit fréquemment conduire le tracteur,- que Monsieur K..., agriculteur à FEIGNIES déclare que depuis qu'il a fait la connaissance de Madame Y... en 1996 il l'a toujours vue travailler sur l'exploitation avec sa mère, qu'elle s'occupe des soins aux animaux, que lors de la moisson elle décharge les bennes de céréales dans la grange et effectue les trajets entre les champs et la ferme avec les remorques de paille,- que Monsieur L..., technico-commercial au sein des Etablissements BERQUET qui depuis 1998 fournit l'alimentation pour bétail à la ferme du Bel Air certifie avoir vu travailler Madame Y... auprès des animaux et l'avoir vue conduire des remorques de grains, qu'il atteste également avoir fait des tours de plaine depuis 2001 avec elle,- que Monsieur D..., ouvrier agricole qualifié, indique avoir vu à plusieurs reprises lors de ses passage à BACHANT de 1995 à 2005 Madame Y... travailler sur l'exploitation de sa mère au niveau des étables avec les bêtes et conduire le tracteur avec la tonne à eau ou des remorques de foin et de paille,- que Monsieur M..., technico commercial pour l'exploitation de Madame E..., atteste que depuis 1992 il a eu des relations de travail avec Madame E..., Madame Marguerite X... et Madame Marie-Noëlle Y...,- que Monsieur Philippe N..., agriculteur déclare avoir reçu des ordres, pour certains travaux de culture de Madame Marie-Noëlle Y...,
Que Madame Y... a apporté la preuve qui lui incombe d'une participation effective à l'exploitation au cours des cinq années qui ont précédé le décès de sa mère ;
Attendu que les premiers juges l'ont déboutée de sa demande au motif que selon l'article L 411-34 le Tribunal Paritaire se prononce en considération des intérêts en présence, que dans ces intérêts rentrent ceux des autres ayants droit potentiels, ainsi que ceux du propriétaire bailleur et qu'il est de l'intérêt et de la liberté contractuelle du bailleur de décider à qui il attribue le bail ;
Attendu que l'appelante soutient à bon droit que cette motivation s'écarte très largement de la lettre et des principes posés par l'article L 411-34 du code rural ;
Que le Tribunal Paritaire doit seulement vérifier si le demandeur remplit les conditions édictées par ce texte et que ce n'est que dans l'hypothèse où plusieurs demandeurs rempliraient ces conditions que le Tribunal doit prendre en considération les intérêts en présence ;
Que Monsieur Avit X... qui n'a jamais travaillé sur l'exploitation de sa mère n'a pas qualité pour demander le transfert du bail à son profit ; que le Tribunal n'était donc pas en présence de demandes multiples ;
Que le bailleur ne peut s'opposer à la continuation du bail au profit du demandeur remplissant les conditions d'application de l'article L 411-34 du code rural ; que Monsieur Z... a d'ailleurs indiqué tant au Tribunal que devant la Cour qu'il n'avait aucune contestation à formuler ;
Attendu qu'il convient d'infirmer le jugement, d'accueillir la demande présentée par Madame Y... sur le fondement de l'article L 411-34 du code rural et de dire en conséquence que le bail se trouve transféré à son profit ;
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Attendu que les consorts X... seront condamnés in solidum à verser à Madame Y... une somme de 1. 000 € au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ainsi qu'une somme de ce même montant sur le même fondement à Monsieur Z... ;
PAR CES MOTIFS :
La Cour,
Statuant en audience publique et contradictoirement,
Ordonne la jonction des instances enregistrées sous les numéros 05 / 4854 et 05 / 4858,
Reçoit les appels en la forme,
Infirme les jugements et statuant à nouveau,
Déclare Madame Marie-Noëlle X... épouse Y... recevable en son intervention et en sa demande de cession de bail,
Annule le congé délivré le 14 avril 1999,
Dit que le bail rural consenti par les époux Z... le 8 novembre 1967 sur diverses parcelles sises à BACHANT est transféré au profit de Madame Marie-Noëlle X... épouse Y...,
Déboute les consorts X... de leurs demandes,
Les condamne aux dépens de première instance et d'appel,
Les condamne en outre in solidum à verser, au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile, la somme de 1. 000 Euros à Madame Y... et la somme de 1. 000 Euros à Monsieur Z....