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26/09/2006 | FRANCE | N°1410

France | France, Cour d'appel de colmar, Chambre sociale, 26 septembre 2006, 1410


JD/EB MINUTE No 06/1410 NOTIFICATION :

ASSEDIC ( ) Copie aux parties Clause exécutoire aux : - avocats - délégués syndicaux - parties non représentées Le Le Greffier REPUBLIQUE FRANCAISE AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS COUR D'APPEL DE COLMAR CHAMBRE SOCIALE - SECTION B ARRET DU 26 Septembre 2006 Numéro d'inscription au répertoire général : 4 B 04/02355 Décision déférée à la Cour : 15 Avril 2004 par le CONSEIL DE PRUD'HOMMES DE MULHOUSE APPELANT : Monsieur Francis X..., comparant, ... Représenté par Maître Jean-Luc VONFELT, avocat au barreau de MULHOUSE INTIMES : La SA CGBI,

prise en la personne de son PDG, non comparante, 69 Boulevard Galliéni...

JD/EB MINUTE No 06/1410 NOTIFICATION :

ASSEDIC ( ) Copie aux parties Clause exécutoire aux : - avocats - délégués syndicaux - parties non représentées Le Le Greffier REPUBLIQUE FRANCAISE AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS COUR D'APPEL DE COLMAR CHAMBRE SOCIALE - SECTION B ARRET DU 26 Septembre 2006 Numéro d'inscription au répertoire général : 4 B 04/02355 Décision déférée à la Cour : 15 Avril 2004 par le CONSEIL DE PRUD'HOMMES DE MULHOUSE APPELANT : Monsieur Francis X..., comparant, ... Représenté par Maître Jean-Luc VONFELT, avocat au barreau de MULHOUSE INTIMES : La SA CGBI, prise en la personne de son PDG, non comparante, 69 Boulevard Galliéni - 92130 ISSY LES MOULINEAUX Représentée par Maître Jean-Paul RIBETON, avocat au barreau de STRASBOURG Le CGEA DE L'ILE DE FRANCE OUEST, pris en la personne de son Directeur, non comparant, 90 rue Baudin - 92300 LEVALLOIS PERRET Représenté par Maître ALBANESI remplaçant Maître Marc STAEDELIN, avocats au barreau de MULHOUSE Maître Francisque GAY - administrateur de la SA CGBI, non comparant, 3 avenue de Madrid - 92200 NEUILLY SUR SEINE Représenté par Maître Jean-Paul RIBETON, avocat au barreau de STRASBOURG Maître Patrick LEGRAS DE GRANDCOURT, représentant des créanciers de la SA CGBI, non comparant, 57/63 rue Ernest Renan - 92022 NANTERRE CEDEX Représenté par Maître Jean-Paul RIBETON, avocat au barreau de STRASBOURG

.../...

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 15 Mai 2006, en audience publique, devant la Cour composée de :

Mme BURGER, Conseiller faisant fonction de Président,

Mme MITTELBERGER, Conseiller,

M. DIE, Conseiller,

qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : Mme MASSON,

ARRET :

- Contradictoire,

- prononcé par mise à disposition au greffe par Mme Catherine BURGER, Conseiller faisant fonction de président,

- signé par Mme Catherine BURGER, Conseiller faisant fonction de

président et Mme Linda MASSON, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le 25 octobre 2000, Monsieur Francis X... fut embauché en qualité d'ingénieur consultant senior par la société CONSULTANTS INFORMATIQUES ASSOCIES (CIA).

A la suite de l'absorption de la société CIA, l'emploi de Monsieur X... fut repris par la société COMPAGNIE GENERALE DE BUREAUTIQUE ET D'INFORMATIQUE (CGBI). Un nouveau contrat de travail fut souscrit à la date du 11 janvier 2002. Il fut notamment stipulé que le contrat était soumis à la convention collective des bureaux d'études techniques, cabinets d'ingénieurs conseil et sociétés de conseil (SYNTEC), que l'ancienneté de Monsieur X... était reprise, que le travail s'exécuterait dans le secteur de l'agence de MULHOUSE et en ILE DE FRANCE, mais que le salarié pourrait être amené à effectuer des déplacements ponctuels en FRANCE et à l'étranger.

Le 25 juillet 2002, la société CGBI fut sollicitée pour procéder à une évaluation du système informatique judiciaire de la République Macédonienne. Le 2 août 2002, elle avertit Monsieur X... alors en congé, qui donna son accord. Le 5 août 2002, elle présenta à Monsieur X... un ordre de mission pour se rendre à SKOPJE du 12 août au 11 septembre 2002. Monsieur X... refusa de signer cet ordre de mission.

Le 6 août 2002, la société CGBI convoqua Monsieur X... à un entretien préalable fixé au 13 août. Le 8 août 2002, par une nouvelle lettre recommandée, elle modifia la date pour convoquer Monsieur X... à un entretien fixé au 14 août, et pour lui notifier sa mise à pied à titre conservatoire.

Le 14 août 2002, la société CGBI adressa à Monsieur X... une lettre de licenciement à effet immédiat, en invoquant une faute grave, et en reprochant à Monsieur X... d'avoir refusé une mission relevant de ses

obligations contractuelles d'une part, et d'être volontairement et directement intervenu auprès d'un client pour nuire à l'image de l'entreprise d'autre part.

Le 3 janvier 2003, Monsieur X... saisit la juridiction prud'homale en contestant la légitimité de son licenciement.

Le 15 avril 2004, par jugement de sa section de l'encadrement, le Conseil de Prud'hommes de MULHOUSE considéra que l'ordre de mission contenait les éléments essentiels caractérisant la mission, que le refus de signer cet ordre s'apparentait à un refus d'exécuter la mission, et que le salarié demandeur avait mis l'employeur en porte-à-faux par rapport au client. Il estima que salarié avait fait preuve d'une indiscipline ayant gravement nui à la bonne marche et à la notoriété de l'entreprise, et qu'il avait ainsi commis une faute grave. En conséquence, il débouta Monsieur X... et le condamna à verser 500,00 euros en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile à la société CGBI qui avait alors fait l'objet d'une ouverture de la procédure de redressement judiciaire.

Le 6 mai 2004, Monsieur X... interjeta régulièrement appel de ce jugement à lui notifié le 22 avril 2004.

A l'audience, Monsieur X... fait oralement actualiser et développer ses dernières conclusions d'appel déposées le 8 juillet 2005. Il conteste avoir refusé la mission. Il explique avoir refusé de signer l'ordre de mission parce qu'il n'était pas conforme aux prescriptions de la convention collective. Il se défend d'avoir voulu nuire à l'image de l'entreprise. Il demande à la Cour d'infirmer le jugement entrepris, de déclarer abusif le licenciement, et de condamner la société CGBI, désormais in bonis, à verser la somme de 14.025,00 euros au titre du préavis, de 1.402,50 euros au titre des congés payés sur préavis, de 3.116,66 euros à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement, de 28.050,00 euros à titre de

dommages et intérêts pour licenciement abusif, de 28.050,00 euros à titre de dommages et intérêts pour le préjudice moral, et de 3.500,00 euros au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile. La société CGBI justifie qu'elle bénéficie d'un plan de redressement, arrêté par jugement du 23 mars 2005 et modifié par jugement du 5 octobre 2005 du tribunal de commerce de NANTERRE. Elle fait oralement soutenir ses conclusions de réplique déposées le 6 décembre 2005. Elle maintient que le licenciement est justifié par une faute grave. Elle sollicite la confirmation du jugement entrepris et la condamnation de Monsieur X... à payer 3.500,00 euros en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

Le CGEA DE L'ILE DE FRANCE OUEST reprend ses conclusions déposées le 6 septembre 2005 pour demander sa mise hors de cause dès lors que la société CGBI est revenue in bonis, subsidiairement la confirmation du jugement entrepris.

Maître Patrick LEGRAS DE GRANDCOURT, anciennement représentant des créanciers de la société CGBI, fait reprendre ses conclusions du 12 mai 2005 pour se désister.

SUR QUOI, LA COUR :

Dès lors qu'un employeur a invoqué une faute grave pour justifier le licenciement qu'il a notifié avec effet immédiat, il lui incombe d'en rapporter la preuve, tant sur la réalité des faits reprochés qu'il devait énoncer dans la lettre de licenciement, que sur leur degré de gravité qui devait rendre impossible la poursuite des relations contractuelles même pendant la période de préavis.

Il s'en suit qu'en l'espèce, cette preuve incombe à la société intimée CGBI.

Or, si la société intimée soutient la gravité des griefs qu'elle a articulés, elle ne parvient pas à démontrer la réalité des faits

qu'elle a imputés à l'appelant dans la lettre de licenciement.

Par un premier grief, la société CGBI a reproché à Monsieur X... d'avoir refusé la mission qu'elle lui confiait et qui relevait de ses obligations contractuelles.

D'une part, la société CGBI affirme que Monsieur X... a fait part de son refus au client. Mais elle se limite à produire un courriel de la société ASSOCIATES CONSULTING GROUP. Le document n'a pas été recueilli en la forme des attestations, il n'est pas même signé, et il est dépourvu de toute force probante. Au surplus, il ne relate aucun refus formel de Monsieur X..., mais des avertissements sur l'annulation de sa mission, ou sur sa renonciation à l'exécuter, qu'il aurait adressés à la société ASSOCIATES CONSULTING GROUP qui n'était pas le client final.

D'autre part, la société CGBI tente d'assimiler le refus de Monsieur X... de signer l'ordre de mission qu'elle lui a présenté, à un refus d'exécuter la mission.

Mais contrairement à ce qu'elle soutient, le document n'a pas été rédigé en vue de formaliser un accord du salarié en vue de concrétiser la préparation de la mission.

La société CGBI veut aussi y voir un document préparatoire, selon un usage prétendu de l'entreprise, à la suite duquel elle aurait ultérieurement présenté au salarié le détail de sa mission. Elle ne peut dès lors contester que cet ordre de mission, comme Monsieur X... dit lui avoir immédiatement fait observer, ne satisfaisait aux prescriptions de la convention collective SYNTEC qui détaillent les 26 points devant obligatoirement figurer dans le document qui doit être remis préalablement à l'envoi en mission hors de France métropolitaine.

En application des articles 64 et 66 de ladite convention collective, la société CGBI n'avait certes pas à recueillir l'accord de Monsieur

LEY pour un déplacement de moins de trois mois à l'étranger, alors que la possibilité de déplacements ponctuels avait été stipulée au contrat de travail du 11 janvier 2002. Mais la société CGBI était néanmoins tenue de remettre un ordre de mission fixant les conditions spécifiques de la mission et contenant les renseignements prescrits. Le refus de Monsieur X... de signer un ordre de mission irrégulier était donc légitime, d'autant que la société CGBI voulait l'envoyer dans une zone peu sûre. L'ambassade de France à SKOPJE venait d'avertir de risques de troubles liés à la tenue d'élections législatives, et elle invitait les ressortissants français à différer de mi-août à fin septembre 2002 tout voyage en MACEDOINE qui n'était pas indispensable. Monsieur X... avait donc hautement intérêt à être complètement et préalablement averti, comme il est dit à l'article 66 de la convention collective, de la couverture des risques de voyage et de déplacement, et des risques politiques et sociaux. En tout cas, son refus de signer ne peut être interprété comme un refus d'exécuter la mission.

Au contraire, Monsieur X... démontre qu'il a préparé son départ, ce qui laisse à penser qu'il entendait se rendre effectivement à SKOPJE. Aucune réalité ne peut donc être reconnue au premier motif énoncé dans la lettre de licenciement.

Par un second grief, la société CGBI a reproché à Monsieur X... une intervention directe auprès du client visant à nuire à l'image de l'entreprise.

Mais elle se limite encore à présenter le courriel de la société ASSOCIATES CONSULTING GROUP qui n'a aucune valeur probante. Au surplus, si ce courriel prétend dénoncer le manque de professionnalisme de Monsieur X..., il ne caractérise aucune manoeuvre

visant à nuire à la société CGBI.

Le second motif énoncé dans la lettre de licenciement n'est donc pas établi.

En définitive, la faute grave alléguée n'est pas prouvée, et aucune cause réelle et sérieuse ne peut même justifier le licenciement prononcé.

Le jugement entrepris doit donc être infirmé.

Monsieur X... est par conséquent fondé à obtenir une indemnité compensatrice du préavis dont il a été privé, une indemnité pour les congés payés y afférents et une indemnité conventionnelle de licenciement. Ses prétentions n'étant pas critiquées en leurs calculs et montants, il échet d'y faire droit.

Monsieur X... est également fondé à obtenir l'indemnisation du préjudice que lui a fait subir l'absence de cause réelle et sérieuse, pour un montant qui ne peut être inférieur à ses six derniers mois de salaires en application de l'article L 122-14-4 du Code du travail. Une juste et intégrale appréciation de son préjudice, y compris la souffrance morale qu'il a éprouvée des conditions de sonpour un montant qui ne peut être inférieur à ses six derniers mois de salaires en application de l'article L 122-14-4 du Code du travail. Une juste et intégrale appréciation de son préjudice, y compris la souffrance morale qu'il a éprouvée des conditions de son licenciement et qu'il invoque spécifiquement, conduit à fixer l'indemnité à 42.000,00 euros.

En application des mêmes dispositions de l'article L 122-14-4 du Code du travail, il s'impose de mettre à la charge de l'employeur le remboursement des indemnités de chômage servies au salarié abusivement licencié, dans la limite de six mois d'indemnités.

En application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, il est équitable que l'employeur contribue aux frais irrépétibles

qu'il a contraint le salarié à exposer.

Conformément au principe de l'article 696 du nouveau Code de procédure civile, les dépens doivent être supportés par l'employeur qui succombe. PAR CES MOTIFS La Cour statuant par mise à disposition au greffe, contradictoirement, en dernier ressort, après en avoir délibéré conformément à la loi :

Déclare recevable l'appel interjeté ;

Infirme le jugement entrepris ;

Déclare le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse ;

Condamne la société COMPAGNIE GENERALE DE BUREAUTIQUE ET D'INFORMATIQUE (CBBI) à verser à Monsieur Francis X... :

- la somme de 14.025,00 ç bruts (quatorze mille vingt-cinq euros bruts) à titre d'indemnité compensatrice de préavis ;

- la somme de 1.402,50 ç bruts (mille quatre cent deux euros et cinquante centimes bruts) à titre d'indemnité compensatrice de congés payés y afférents ;

- la somme de 3.116,66 ç bruts (trois mille cent seize euros et soixante-six centimes bruts) à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement ;

- la somme de 42.000,00 ç (quarante-deux mille euros) à titre de dommages et intérêts en application de l'article L 122-14-4 du code du travail ;

- la somme de 2.000,00 ç (deux mille euros en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ;

Ordonne le remboursement aux organismes concernés, à la charge de la société CGBI, des indemnités de chômage versées à Monsieur Francis X..., dans la limite des six premiers mois d'indemnités ;

Dit que le CGEA DE L'ILE DE FRANCE OUEST est hors de cause ;

CONDAMNE la société CGBI à supporter les entiers dépens de première instance et d'appel. Et le présent arrêt a été signé par Madame

BURGER, Conseiller faisant fonction de Président, et Madame MASSON, greffier.

Le Greffier :

Le Président :


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de colmar
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 1410
Date de la décision : 26/09/2006
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Composition du Tribunal
Président : Mme Burger, président

Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.colmar;arret;2006-09-26;1410 ?
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