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07/11/2006 | FRANCE | N°450

France | France, Cour d'appel d'agen, Chambre sociale, 07 novembre 2006, 450


ARRÊT DU7 NOVEMBRE 2006CA/SBA-R.G. 05/01200-Jean-Paul X... C/MUTUALITÉ SOCIALE AGRICOLE-ARRÊT no 450COUR D'APPEL D'AGEN Chambre Sociale Prononcé à l'audience publique du sept novembre deux mille six par Catherine LATRABE, Conseillère faisant fonction de Présidente de Chambre, assistée de Solange BELUS, Greffière,La COUR d'APPEL D'AGEN, CHAMBRE SOCIALE, dans l'affaire ENTRE :Jean-Paul X... né le 30 septembre 1944 à SENAILLAC LAUZES (46360) ... Rep/assistant : la SELARL "LA CLÉ DES CHAMPS" SOCIÉTÉ D'AVOCATS (avocats au barreau d'ALBI) APPELANT d'un jugement du Tribunal des Affaires

de Sécurité Sociale de CAHORS en date du 27 juin 2005 dans u...

ARRÊT DU7 NOVEMBRE 2006CA/SBA-R.G. 05/01200-Jean-Paul X... C/MUTUALITÉ SOCIALE AGRICOLE-ARRÊT no 450COUR D'APPEL D'AGEN Chambre Sociale Prononcé à l'audience publique du sept novembre deux mille six par Catherine LATRABE, Conseillère faisant fonction de Présidente de Chambre, assistée de Solange BELUS, Greffière,La COUR d'APPEL D'AGEN, CHAMBRE SOCIALE, dans l'affaire ENTRE :Jean-Paul X... né le 30 septembre 1944 à SENAILLAC LAUZES (46360) ... Rep/assistant : la SELARL "LA CLÉ DES CHAMPS" SOCIÉTÉ D'AVOCATS (avocats au barreau d'ALBI) APPELANT d'un jugement du Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de CAHORS en date du 27 juin 2005 dans une affaire enregistrée au rôle sous le no R.G. 2005/3 d'une part, ET :MUTUALITÉ SOCIALE AGRICOLE 159 rue du Pape Jean XXIII BP 279 4601 CAHORS CEDEX 9 Rep/assistant : la SCP FAUGERE - BELOU - LAVIGNE (avocats au barreau de CAHORS) INTIMÉE

d'autre part,

SERVICE REGIONAL DE L'INSPECTION DU TRAVAIL, DE L'EMPLOI ET DE LA POLITIQUE SOCIALE AGRICOLES Cité Administrative Boulevard André Duportal 31000 TOULOUSE non comparant PARTIE INTERVENANTE

A rendu l'arrêt réputé contradictoire suivant après que la cause ait été débattue et plaidée en audience publique le 3 octobre 2006 devant Catherine LATRABE, Conseillère faisant fonction de Présidente de Chambre, Chantal AUBER et Françoise MARTRES, Conseillères, assistées de Solange BELUS, Greffière, et après qu'il en ait été délibéré par les magistrats du siège ayant assisté aux débats, les parties ayant été avisées de la date à laquelle l'arrêt serait rendu.*FAITS ET PROCÉDURE :

Jean Paul X..., qui exerçait la profession d'agriculteur dans le cadre d'un GAEC et qui était affilié à la Mutualité Sociale Agricole du Lot en qualité de chef d'exploitation agricole, est propriétaire d'un gîte rural ..., loué périodiquement à des touristes.

La Mutualité Sociale Agricole du Lot ayant intégré dans l'assiette de ses cotisations sociales le montant des revenus provenant de l'activité de gîte rural et la commission de recours amiable de cet organisme ayant rejeté sa contestation, il a formé un recours auprès du tribunal des affaires de sécurité sociale du Lot qui, par jugement du 27 juin 2005, a confirmé la décision de la commission de recours

amiable de la Mutualité Sociale Agricole du Lot du 9 novembre 2004 sur la prise en compte des revenus provenant de l'activité de location de gîte rural exercée par Jean-Paul X... dans l'assiette des cotisations sociales.

Jean Paul X... a relevé appel de cette décision.MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES :

Jean Paul X... fait valoir que les conditions cumulatives prévues par l'article 1er du décret no 2003-685 du 24 juillet 2003 pour que l'activité de gîte rural soit soumise à cotisations, ne sont pas remplies.

En ce qui concerne les prestations fournies, il soutient que le mobilier et les services du gîte "Lou Paradou" ne sont pas un élément déterminant pour les locataires qui le choisissent davantage en raison de la région naturellement touristique et de sa capacité d'accueil permettant à plusieurs familles de passer des vacances ensemble. Il indique en effet que les services et les équipements mis à la disposition des locataires correspondent aux critères imposés par la classification du gîte en catégorie "4 épis", qu'ils sont des éléments habituellement fournis dans ce type d'hébergement et qu'ils ne constituent en rien des prestations de type hôtelier.

Concernant le critère de dépendance à l'exploitation agricole, il souligne que l'activité du gîte ne répond à aucune des deux conditions cumulatives prescrites par l'article 1er du décret du 24 juillet 2003, à savoir : être développée sur une exploitation agricole et donner lieu à l'utilisation des locaux ou des terrains dépendant de cette exploitation.

Il indique à ce sujet que les bâtiments d'exploitation utilisés par le GAEC "Lou Paradou" et les parcelles sur lesquelles se trouvent le gîte sont distants de 500 mètres à vol d'oiseau et que les parcelles destinées à l'activité touristique constituent un îlot distinct

autonome, délimité par des voies de circulation, de sorte qu'il n'existe aucune dépendance géographique. Il ajoute qu'un gîte rural n'a pas vocation à entrer dans la définition de l'article L.311-1 du Code rural s'agissant d'une activité civile et non agricole par principe et que pour clarifier cette notion, le décret du 24 juillet 2003 a consacré le principe du rattachement géographique de cette activité qui doit désormais être exercée dans les locaux ou terrains de l'exploitation pour constituer une activité soumise à cotisations agricoles.

Il explique qu'il a consenti au GAEC "Lou Paradou"dont il est associé un bail rural à long terme qui exclut expressément la parcelle sur laquelle est situé le gîte cadastrée section A no 301 et les parcelles attenantes no 302, 305, 306, 307 où sont situés la piscine et le tennis, qu'ainsi le GAEC n'a pas la jouissance de ces parcelles, que le gîte n'utilise aucun local ou terrain appartenant ou mis à la disposition du GAEC, que si les terrains constituant l'environnement paysager du gîte sont entretenus par lui et son fils, il ne s'agit pas d'une activité professionnelle et qu'il n'en tire aucun revenu de nature agricole.

Il soutient, en réponse à l'argumentation de la Mutualité Sociale Agricole, que si le GAEC Du Paradou est devenu GAEC partiel suite au bail, la Mutualité Sociale Agricole ne saurait apprécier la conformité de la situation en se substituant au Comité d'agrément GAEC, seul compétent pour définir la situation juridique du GAEC et en tirer les conséquences, ni se servir d'une éventuelle non-conformité qui n'est pas démontrée.

Par ailleurs, il conteste l'affirmation selon laquelle le financement de l'aménagement du gîte contracté en 1992 ait été repris depuis par le GAEC.

Enfin, en ce qui concerne la direction de l'activité de location, il

fait valoir qu'il ressort de plusieurs attestations et du rapport de contrôle effectué par la MSA, qu'elle est assurée par Françoise X... qui n'était pas chef d'exploitation en 2003 et 2004, qu'en vertu des articles 1428 et suivants du Code civil, l'administration des biens propres d'un époux peut être confiée à l'autre et qu'il est alors fait application des règles du mandat tacite. Il ajoute que les salariés sont employés par Françoise X..., que les documents établis à son nom s'expliquent par le simple fait qu'il est propriétaire du gîte et que les seuls actes effectués par la personne dirigeant de manière effective le gîte sont les contrats de location qui sont établis au nom des deux époux.

Il demande en conséquence à la cour :

- de constater l'irrégularité du calcul des cotisations sociales à sa charge pour les années 2003 et 2004 en ce que les revenus de la location meublée du gîte sont intégrés dans l'assiette de calcul,

- d'infirmer la décision de la commission de recours amiable de la Mutualité Sociale Agricole du Lot et le jugement du tribunal des affaires de sécurité sociale du Lot du 27 juin 2005,

- de juger que l'activité de location de gîte rural dirigée par Françoise X... ne relève pas du régime agricole et que les revenus du gîte n'entrent pas dans l'assiette des cotisations sociales agricoles au nom de Jean Paul X...,

- de condamner la Mutualité Sociale Agricole du Lot au paiement de la somme de 1.200 ç en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.*

La Mutualité Sociale Agricole conclut à la confirmation du jugement déféré qui a considéré comme remplies les conditions posées par l'article D.772-4 du Code rural issu du décret du 27 juillet 2003 rendant applicable le régime de protection sociale des non salariés agricoles aux structures d'accueil touristiques.

Elle fait valoir :

- sur la première condition relative au mobilier et services offerts, que le confort, les services et la qualité du gîte rural de Jean-Paul X... sont un critère déterminant de sa location.

- sur le critère de dépendance à l'exploitation agricole : que les parcelles sur lesquelles le gîte rural est exploité sont exclues des terres louées au GAEC, mais que le GAEC créé par Jean-Paul X... et son fils est total, c'est à dire qu'il fait obligation aux associés de mutualiser leurs activités et de transférer la jouissance de l'ensemble de leurs terres au profit de la société ; que la modification du GAEC en GAEC partiel, entraînée par le bail rural, n'a pas été approuvée par le Comité Départemental d'Agrément et n'est pas opposable aux tiers, de sorte qu'elle est fondée à considérer que les parcelles sur lesquelles le gîte est exploité sont des terres agricoles ; de plus, Jean-Paul X... a lui-même revendiqué auprès des pouvoirs publics le caractère agricole de ces parcelles.

- sur le critère relatif à la direction de l'activité de la location du gîte : que la gestion quotidienne et l'aide au fonctionnement du gîte assurées par Françoise X... n'impliquent pas nécessairement la direction de l'activité de location de cette structure qui appartient en propre à Jean-Paul X... et dont les revenus sont déclarés par ce dernier dans ses propres revenus.

Elle demande donc le rejet des demandes de Jean-Paul X... et sa condamnation au paiement de la somme de 1.500 ç au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

MOTIFS DE LA DÉCISION :

L'article L.722-1 du Code rural dispose que le régime de protection sociale des non salariés des professions agricoles est applicable aux personnes occupées notamment dans les structures d'accueil touristique situées sur l'exploitation ou dans les locaux de celle-ci.

L'article D.722-4 du même code précise que pour l'application de ce texte, sont considérées comme structures d'accueil touristique celles permettant d'effectuer des locations de logement en meublé et que celles-ci doivent porter sur des logements aménagés de telle sorte que le mobilier et les services offerts constituent un élément déterminant de la location, que ces activités doivent être développées sur l'exploitation agricole et doivent donner lieu à l'utilisation des locaux ou des terrains dépendant de cette exploitation et que les structures d'accueil doivent être dirigées par des chefs d'exploitation quelle que soit la forme juridique de la structure d'accueil.

Trois conditions cumulatives doivent ainsi être réunies pour que l'activité de location de gîte rural relève de l'application du régime de protection sociale agricole ;

En ce qui concerne la première condition, il n'est pas sérieusement contestable que le mobilier, les équipements et services fournis aux locataires du gîte "Le Paradou" de Jean-Paul X... constituent des éléments déterminants de la location.

Le fait que ces services et équipements correspondent aux critères imposés par la classification du gîte en catégorie "4 épis", n'exclut pas qu'ils soient aussi des facteurs déterminant permettant aux

locataires de choisir cette structure plutôt qu'une autre de catégorie équivalente. Le caractère touristique de la région et la capacité d'accueil du gîte sont effectivement un critère de ce choix comme l'indique Jean-Paul X.... Mais il n'en demeure pas moins que les avantages de ce gîte de grand confort, dont la plaquette publicitaire éditée par Jean-Paul et Françoise X... le présente comme un "gîte de caractère" et indique qu'il dispose d'un grand séjour avec cheminée, d'une salle à manger d'été avec coin cuisine équipé d'un lave vaisselle, de 9 chambres, de 3 salles de bains, 2 salles d'eau, d'une buanderie avec lave-linge, d'une grande salle polyvalente avec TV, ping-pong, bibliothèque, outre 5 hectares de terrain avec piscine et tennis privés, volley, badminton, aires de jeu, constituent des facteurs d'attrait évidents pour sa location.

La deuxième condition tenant au développement des activités sur l'exploitation agricole et l'utilisation des locaux ou des terrains dépendant de cette exploitation est également remplie.

En effet, cette condition ne correspond pas à une dépendance ou à une proximité géographique ; le fait que les bâtiments d'exploitation du GAEC "Lou Paradou" et les parcelles affectées au gîte soient distants d'au moins 500 mètres est donc indifférent.

Jean Paul X..., à l'époque litigieuse, était associé du GAEC "Lou Paradou" qui a été constitué le 22 avril 1998. Il est également propriétaire des parcelles constituant le gîte rural et son environnement, cadastrées section A no 301, 302, 305, 306 et 307. Or il ne conteste pas que selon ses statuts, le GAEC était total, impliquant pour les associés le transfert de la jouissance de l'ensemble de leurs terres à son profit.

Si par bail du 21 juin 2001, Jean-Paul X... a donné en location au GAEC "Lou Paradou" les terres dont il est propriétaire en excluant celles concernées par le gîte rural, il n'a pas informé la Mutualité

Sociale Agricole de cette situation et il ne conteste pas que la modification du GAEC résultant du bail n'a pas été approuvée par le Comité Départemental d'Agrément. Cette situation n'est donc pas opposable à la MSA.

Il résulte en outre d'une lettre de la Direction Départementale de l'Agriculture du 8 octobre 2004 que les parcelles A 305, A 306a et A 306b ont été déclarées en prairies dans les dossiers "surfaces" du GAEC des années 2000 à 2004 et font l'objet d'un engagement au titre d'un contrat territorial d'exploitation donnant lieu à un versement de 538 ç par an.

Il est ainsi établi par ces éléments que les activités du gîte rural sont développées sur l'exploitation agricole et donnent lieu à l'utilisation de terrains qui en dépendent.

Enfin, concernant la troisième condition relative à la direction du gîte, s'il est constant que Françoise X... participe activement à la gestion et au fonctionnement de cette structure qui appartient en propre à son époux, en effectuant notamment l'accueil des locataires, la signature des contrats de location et le recrutement du personnel de ménage, son activité n'exclut pas pour autant la fonction de direction assurée par Jean Paul X....

Or, Jean-Paul X..., qui déclare les revenus provenant de l'activité du gîte dans ses propres revenus, a mentionné l'exercice de cette activité à son nom dans la déclaration annuelle adressée à la Mutualité Sociale Agricole pour l'année 1993.

Il ressort en outre du rapport de contrôle de la Mutualité Sociale Agricole et il n'est pas contesté que le bulletin d'adhésion à l'association départementale de tourisme local de l'année 2004 est au nom de Jean-Paul X..., de même que le dossier d'inscription aux "Gîtes de France" et que les contrats de location sont établis au nom de Monsieur et Madame X....

Ces différents éléments ne peuvent pas s'expliquer seulement par le fait que Jean-Paul X... est propriétaire du gîte, mais démontrent qu'il en assure la direction alors qu'à l'époque concernée, il était chef d'exploitation.

En conséquence, le régime de protection sociale des non salariés des professions agricoles est applicable Jean-Paul X... au titre de l'activité de gîte rural qu'il exerce.

C'est donc par une exacte appréciation des circonstances de la cause et une juste application de la règle de droit et en des motifs pertinents que la cour adopte, que les premiers juges ont retenu que les revenus tirés de cette activité devaient être pris en compte dans l'assiette de ses cotisations sociales. Le jugement déféré sera ainsi confirmé en toutes ses dispositions.

Jean Paul X... qui succombe dans son appel sera condamné à payer à la Mutualité Sociale Agricole la somme de 800 ç en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.PAR CES MOTIFS :

La Cour, statuant en audience publique, par arrêt réputé contradictoire et en dernier ressort,

Confirme en toutes ses dispositions le jugement rendu le 27 juin 2005 par le tribunal des affaires de sécurité sociale du Lot,

Y ajoutant,

Condamne Jean-Paul X... à payer à la Mutualité Sociale Agricole la somme de 800 ç en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

Le présent arrêt a été signé par Catherine LATRABE, Conseillère faisant fonction de Présidente de Chambre, et par Solange BELUS, Greffière présente lors du prononcé.

LA GREFFIÈRE :

LA PRÉSIDENTE :


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'agen
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 450
Date de la décision : 07/11/2006
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Composition du Tribunal
Président : Mme LATRABE, Présidente

Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.agen;arret;2006-11-07;450 ?
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