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10/07/2025 | FRANCE | N°25VE00058

France | France, Cour administrative d'appel de VERSAILLES, Pôle etrangers, 10 juillet 2025, 25VE00058


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Versailles d'annuler l'arrêté du 31 juillet 2024 par lequel le préfet des Yvelines a rejeté sa demande de titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être éloigné.



Par un jugement n° 2407736 du 16 décembre 2024, le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande.



Procédure devant la cour :



Par une requête et des pièces, enregistrées les 9 et 15 janvier 2025, M. A...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Versailles d'annuler l'arrêté du 31 juillet 2024 par lequel le préfet des Yvelines a rejeté sa demande de titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être éloigné.

Par un jugement n° 2407736 du 16 décembre 2024, le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des pièces, enregistrées les 9 et 15 janvier 2025, M. A..., représenté par Me Bulajic, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet des Yvelines de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " ou, à défaut, de procéder au réexamen de sa situation administrative et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler, dans un délai d'un mois à compter de la notification de la décision à intervenir, sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'État la somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

S'agissant du jugement attaqué,

- les premiers juges ont omis de répondre aux moyens tirés de ce que les décisions de refus de titre de séjour et portant obligation de quitter le territoire français méconnaissent les dispositions des articles L. 423-1 et L. 423-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le jugement attaqué n'est pas suffisamment motivé dans sa réponse au moyen tiré de de ce que les décisions de refus de titre de séjour et portant obligation de quitter le territoire français méconnaissent les dispositions des articles L. 423-1 et L. 423-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

S'agissant de l'arrêté contesté,

-il méconnaît les dispositions des articles L. 423-1 et L. 423-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- il porte une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale, en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- il est entaché d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation.

La requête a été communiquée au préfet des Yvelines, qui n'a pas produit de mémoire.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Bruno-Salel,

- et les observations de Me Bulajic, pour M. A....

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., ressortissant marocain né le 15 juin 1989, déclare être entré sur le territoire français le 25 juin 2017 sous couvert d'un visa de court séjour valable du 17 juin 2017 au 17 juillet 2017. Il a épousé le 26 septembre 2020 une ressortissante française et a été mis en possession d'un premier titre de séjour en qualité de conjoint de Français valable du 29 mars 2021 au 28 mars 2022, dont il a demandé le renouvellement. Par un arrêté du 30 janvier 2023, le préfet des Yvelines a rejeté sa demande et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours. Son recours devant le tribunal administratif contre cet arrêté a été rejeté par un jugement n° 2301790 du 25 mai 2023 devenu définitif. M. A... a divorcé le 16 février 2023 et s'est maintenu irrégulièrement en France sans exécuter la mesure d'éloignement prise à son encontre. Il s'est remarié le 2 décembre 2023 avec une autre ressortissante française. Il a sollicité à nouveau, le 21 mai 2024, un titre de séjour en qualité de conjoint de français. Par un arrêté du 31 juillet 2024, le préfet des Yvelines a rejeté sa demande, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de son renvoi. M. A... relève appel du jugement du jugement du 16 décembre 2024 par lequel le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande d'annulation de cet arrêté.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Il ressort de la demande présentée par M. A... devant le tribunal administratif de Versailles que l'intéressé avait soulevé un moyen tiré de ce que le refus de titre de séjour contesté méconnait les dispositions de l'article L. 423-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Les premiers juges, s'ils ont cité, quoiqu'inexactement, ces dispositions au point 3 de leur jugement, n'ont pas répondu à ce moyen, qui n'était pas inopérant, ni au point 4, ni ailleurs dans leur jugement. Il en va de même de ce moyen soulevé également à l'encontre de l'obligation de quitter le territoire français contestée, dès lors que les premiers juges ont, au point 6 de leur jugement, renvoyé à son point 4, qui ne comporte, ainsi qu'il vient d'être dit, aucune réponse en relation avec les dispositions invoquées. Ils ont à tout le moins entaché leur réponse à ce dernier moyen d'une insuffisance de motivation. Par suite, M. A... est fondé à soutenir que le jugement attaqué est entaché d'irrégularité et à en demander l'annulation.

3. Il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur les conclusions présentées par M. A... devant le tribunal administratif de Versailles et devant la cour.

Sur la légalité des décisions contestées :

4. En premier lieu, le refus de titre de séjour contesté vise les textes dont le préfet a fait application, expose les circonstances propres à la situation de M. A... ainsi que les raisons pour lesquelles il a pris les décisions en litige. Il est, ainsi suffisamment motivé au regard des prescriptions posées par les articles L. 211-2 et L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration.

5. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 423-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger marié avec un ressortissant français, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an lorsque les conditions suivantes sont réunies : 1° La communauté de vie n'a pas cessé depuis le mariage ; 2° Le conjoint a conservé la nationalité française ; 3° Lorsque le mariage a été célébré à l'étranger, il a été transcrit préalablement sur les registres de l'état civil français. " Aux termes de l'article L. 432-1-1 du même code : " La délivrance ou le renouvellement d'une carte de séjour temporaire ou pluriannuelle peut, par une décision motivée, être refusé à tout étranger : / 1° N'ayant pas satisfait à l'obligation qui lui a été faite de quitter le territoire français dans les formes et délais prescrits par l'autorité administrative ; / (...). "

6. Pour rejeter la demande de M. A..., le préfet des Yvelines s'est notamment fondé sur le motif que l'intéressé s'était volontairement soustrait à l'obligation qui lui avait été faite de quitter le territoire français dans un délai de trente jours par un arrêté du 30 janvier 2023 devenu définitif, en application des dispositions précitées de l'article L. 432-1-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qu'il a expressément visées. Il ressort des pièces du dossier que M. A... a fait l'objet d'une mesure d'éloignement par un arrêté du préfet des Yvelines du 30 janvier 2023, qui a été confirmé par un jugement n° 2301790 du 25 mai 2023 du tribunal administratif de Versailles devenu définitif, et qu'il n'a pas exécuté cette mesure d'éloignement. Ce premier motif, qui est ainsi fondé, justifiait le refus de séjour contesté sur le fondement des dispositions de l'article L. 432-1-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Si le préfet des Yvelines s'est également fondé sur le fait que M. A... ne justifiait pas de manière probante d'une vie commune avec son épouse sur le territoire français et ne remplissait donc pas les conditions posées par les dispositions de l'article L. 423-1 du même code, il ressort des pièces du dossier qu'il aurait en tout état de cause pris la même décision s'il n'avait retenu que le premier motif qui est fondé. Il en irait de même si, comme le soutient le requérant, le préfet avait méconnu les dispositions de l'article L. 423-2 de ce code.

7. En dernier lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. "

8. Il ressort des pièces du dossier que M. A..., qui s'est maintenu irrégulièrement en France à l'expiration de son visa de court séjour, a épousé le 26 septembre 2020 une ressortissante française, et a obtenu un titre de séjour valable du 29 mars 2021 au 28 mars 2022 en qualité de conjoint de français. M. A... et son épouse ont divorcé le 16 février 2023. Si le requérant a épousé le 2 décembre 2023 une autre ressortissante française, et en admettant même que leur relation se serait nouée un peu avant qu'ils s'installent ensemble au mois de juillet 2023, elle ne revêt pas un caractère d'ancienneté et de stabilité significatif à la date de la décision contestée, à laquelle s'apprécie sa légalité. Si le requérant soutient que son épouse a des problèmes de santé, il n'apporte aucun élément pour démontrer que l'état de santé de son épouse nécessiterait impérativement sa présence auprès d'elle. Il lui sera par ailleurs loisible, une fois avoir quitté la France, de solliciter, dans le respect de la législation en vigueur, un visa de long séjour en tant que conjoint de Français. Enfin, si M. A... produit des pièces d'identité française qui concerneraient une sœur, ainsi qu'un oncle et un cousin paternels qui résident en France, il n'établit pas qu'il serait dépourvu d'attaches dans son pays d'origine où il ne conteste pas que vivent ses parents et deux frères ou sœurs, et où il a lui-même vécu jusqu'à l'âge de vingt-huit ans. Dans ces conditions, eu égard aux conditions de son séjour en France et alors que M. A... n'a pas exécuté une précédente mesure d'éloignement, le préfet des Yvelines n'a pas, en prenant l'arrêté contesté, et bien que l'intéressé ait fait des efforts notables d'insertion professionnelle, porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts qu'il poursuit. Il n'a, ainsi, pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Pour les mêmes motifs de fait, le refus de titre de séjour et l'obligation de quitter le territoire français contestés ne sont pas entachés d'une erreur manifeste quant à l'appréciation de leurs conséquences sur la situation personnelle et familiale de M. A....

9. Il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à demander l'annulation de l'arrêté du préfet des Yvelines du 31 juillet 2024. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte et celles présentées au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées.

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Versailles n° 2407736 du 16 décembre 2024 est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. A... devant le tribunal administratif de Versailles et le surplus des conclusions de sa requête d'appel sont rejetés.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre d'État, ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet des Yvelines.

Délibéré après l'audience du 26 juin 2025, à laquelle siégeaient :

Mme Dorion, présidente,

Mme Bruno-Salel, présidente-rapporteure,

M. Ablard, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 10 juillet 2025.

La rapporteure,

C. Bruno-SalelLa présidente,

O. Dorion

La greffière,

C. Yarde

La République mande et ordonne au ministre d'État, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 25VE00058


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de VERSAILLES
Formation : Pôle etrangers
Numéro d'arrêt : 25VE00058
Date de la décision : 10/07/2025
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme DORION
Rapporteur ?: Mme Catherine BRUNO-SALEL
Rapporteur public ?: M. de MIGUEL
Avocat(s) : BULAJIC

Origine de la décision
Date de l'import : 19/08/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-07-10;25ve00058 ?
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