Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Versailles d'annuler l'arrêté du 22 décembre 2022 par lequel le préfet de l'Essonne a rejeté sa demande de titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français sans délai et a fixé le pays à destination duquel il pourra être reconduit.
Par un jugement n° 2300314 du 31 mars 2023, le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 14 avril 2023, M. B..., représenté par Me Lebon, avocat, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler cet arrêté ;
3°) d'enjoindre au préfet de l'Essonne de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ", dès la notification de la décision à intervenir.
Il soutient que :
- l'arrêté contesté est insuffisamment motivé et entaché d'un défaut d'examen de sa situation personnelle ;
- les dispositions du 3° de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne lui sont pas applicables, compte tenu de sa situation personnelle et familiale ;
- il remplit les conditions fixées par les articles L. 423-1, L. 423-2 et L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le préfet de l'Essonne aurait dû, en tout état de cause, procéder à la régularisation de sa situation ;
- il a entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation et méconnu les stipulations des articles 6 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ainsi que celles de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- sa présence en France ne constitue pas une menace pour l'ordre public.
La requête a été communiquée au préfet de l'Essonne qui n'a pas produit d'observations.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Ablard a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. B..., ressortissant tunisien né le 3 décembre 1994, entré en France le 26 juillet 2014 muni d'un visa de court séjour, a présenté le 7 décembre 2021 une demande de titre de séjour en qualité de conjoint d'une ressortissante française. Par un arrêté du 22 décembre 2022, le préfet de l'Essonne a rejeté sa demande, lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai et a fixé le pays de renvoi. M. B... relève appel du jugement du 31 mars 2023 par lequel le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande d'annulation de cet arrêté.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
2. Aux termes de l'article L. 423-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger, entré régulièrement et marié en France avec un ressortissant français avec lequel il justifie d'une vie commune et effective de six mois en France, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an. La condition prévue à l'article L. 412-1 n'est pas opposable." Aux termes de l'article L. 432-1 de ce code : " La délivrance d'une carte de séjour temporaire ou pluriannuelle ou d'une carte de résident peut, par une décision motivée, être refusée à tout étranger dont la présence en France constitue une menace pour l'ordre public ".
3. Il ressort des pièces du dossier que M. B..., qui justifie être entré en France le 26 juillet 2014 avec un visa de court séjour, a épousé le 24 avril 2021 à Garges-lès-Gonesse (95) une ressortissante française. A cet égard, si le préfet de l'Essonne a opposé au requérant la circonstance qu'il ne pouvait se prévaloir d'une durée de mariage suffisante, il ne conteste pas que la communauté de vie n'a pas cessé depuis le mariage, condition en tout état de cause fixée par les dispositions de l'article L. 423-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors que la situation de M. B... relève de l'article L. 423-2 de ce code. Au surplus, le couple ayant eu deux enfants, le premier mort-né le 20 novembre 2021 et le second né le 24 juin 2022, M. B... peut également bénéficier de plein droit d'un titre de séjour en sa qualité de parent d'un enfant de nationalité française. Pour lui refuser un titre de séjour, le préfet de l'Essonne s'est fondé sur la circonstance que l'intéressé a fait l'objet de quatre signalements, le 20 avril 2019 pour des faits de détention frauduleuse de faux document administratif, le 8 novembre 2019 pour des faits de recel de bien provenant d'un vol, le 17 août 2021 pour des faits de conduite d'un véhicule sans permis et maintien irrégulier sur le territoire français après placement en rétention ou assignation à résidence d'un étranger ayant fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français et le 7 mai 2022 pour des faits de vol par ruse dans un local d'habitation ou un lieu d'entrepôt ; Toutefois, ces signalements n'ont donné lieu à aucunes poursuites ni condamnation pénale. Dans ces circonstances, la présence de M. B... en France constitue une menace pour l'ordre public, au sens des dispositions précitées de l'article L. 432-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Il s'ensuit que, M. B... est fondé à soutenir que le préfet de l'Essonne a méconnu les dispositions précitées de l'article L. 423-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
4. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que M. B... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande.
Sur les conclusions à fin d'injonction :
5. Eu égard au moyen d'annulation retenu au point 3 du présent arrêt, celui-ci implique nécessairement, sous réserve d'un changement dans les circonstances de droit ou de fait, qu'il soit enjoint à la préfète de l'Essonne de délivrer à M. B... une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale ", dans le délai de deux mois à compter de sa notification.
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement n° 2300314 du tribunal administratif de Versailles du 31 mars 2023 et l'arrêté du préfet de l'Essonne du 22 décembre 2022 sont annulés.
Article 2 : Il est enjoint à la préfète de l'Essonne, sous réserve d'un changement dans les circonstances de droit ou de fait, de délivrer à M. B... une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale ", dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B..., au ministre de l'intérieur et à la préfète de l'Essonne.
Délibéré après l'audience du 21 novembre 2024, à laquelle siégeaient :
Mme Dorion, présidente,
Mme Bruno-Salel, présidente-assesseure,
M. Ablard, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 5 décembre 2024.
Le rapporteur,
T. ABLARD
La présidente,
O. DORION
La greffière,
C. YARDE
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme,
La greffière,
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N° 23VE00764