Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La SCCV Triel 87-89 a demandé au tribunal administratif de Versailles d'annuler l'arrêté du 19 septembre 2018, par lequel le maire de la commune de Triel-sur-Seine a refusé de lui délivrer un permis de construire en vue de l'autoriser à démolir le bâti existant sur un terrain situé au 87-89 rue de Sablonville à Triel-sur-Seine et à édifier un ensemble immobilier de 102 logements, ainsi que la décision rejetant son recours gracieux, d'enjoindre à la commune de Triel-sur-Seine de statuer à nouveau sur sa demande dans un délai de deux mois et de mettre à la charge de la commune de Triel-sur-Seine une somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Par un jugement n° 1901770 du 5 mars 2021, le tribunal administratif de Versailles a annulé l'arrêté portant refus de permis de construire du 19 septembre 2018, ainsi que la décision rejetant le recours gracieux de la SCCV Triel 87-89, a enjoint à la commune de Triel-sur-Seine de réexaminer la demande de permis de construire déposée par la SAS Promotion Pichet, aux droits de laquelle est venue la SCCV Triel 87-89, dans un délai de trois mois à compter de la notification du jugement, a mis à la charge de la commune de Triel-sur-Seine une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et a rejeté les conclusions présentées par la commune de Triel-sur-Seine sur ce même fondement.
Procédure devant la cour :
Par une requête et des mémoires, enregistrés le 4 mai 2021 et le 22 janvier 2023, la commune de Triel-sur-Seine, représentée par Me Ferrand puis Me Léron, avocats, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) de rejeter la demande de la SCCV Triel 87-89 présentée devant le tribunal administratif de Versailles ;
3°) de mettre à la charge de la SCCV Triel 87-89 une somme de 3 000 euros à lui verser au titre des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative.
La commune soutient que :
- sa requête d'appel est recevable dès lors que la notification prévue par l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme ne s'impose pas en cas de refus de permis de construire ;
- les premiers juges auraient dû relever d'office l'irrecevabilité de la demande de la SCCV Triel 87-89 dès lors que cette dernière ne disposait pas de la personnalité morale, et donc de la capacité à ester en justice, à la date de l'introduction de son recours gracieux ;
- la SCCV Triel 87-89 ne justifie pas de sa capacité à ester en justice ;
- elle ne dispose pas d'un intérêt lui donnant qualité pour agir dès lors que les propriétaires des parcelles concernées par le projet ont refusé de proroger la promesse de vente ;
- les premiers juges ont entaché leur jugement d'une erreur de droit et d'une dénaturation des faits quant à la méconnaissance de l'article UAb 10 du règlement du plan local d'urbanisme ; l'arrêté attaqué ne méconnaît pas ces dispositions ; aucune adaptation mineure ne pouvait être accordé sur ce point ;
- le jugement attaqué est entaché d'une erreur d'appréciation et d'une dénaturation des pièces du dossier quant à la méconnaissance des dispositions de l'article UA 11 du règlement du plan local d'urbanisme de la commune de Triel-sur-Seine et des dispositions de l'article R. 111-27 du code de l'urbanisme ; l'arrêté attaqué ne méconnaît pas les dispositions de l'article UAb 11 du règlement du plan local d'urbanisme de la commune de Triel-sur-Seine, ni les dispositions de l'article R. 111-27 du code de l'urbanisme.
Par des mémoires en défense, enregistrés le 14 septembre 2021, le 10 février 2023 et le 2 mars 2023, la SCCV Triel 87-89, représentée par Me Rousseau, avocat, conclut au rejet de la requête, à ce qu'il soit enjoint à la commune de Triel-sur-Seine d'accorder le permis de construire sollicité à la SAS Promotion Pichet, aux droits desquels la SCCV Triel 87-89 est venue, dans un délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 500 euros par jour de retard, et à ce qu'une somme de 4 000 euros soit mise à la charge de la commune de Triel-sur-Seine au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la requête d'appel est irrecevable en l'absence d'une notification régulière du recours sur le fondement de l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme ;
- sa demande de première instance est recevable ;
- les autres moyens de la requête ne sont pas fondés ;
- une éventuelle irrégularité pour défaut d'intérêt pour agir pourrait faire l'objet d'une régularisation sur le fondement de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme.
Par une ordonnance du 10 mars 2023, la clôture de l'instruction a été fixée, en dernier lieu, au 27 mars 2023, en application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Houllier,
- les conclusions de M. Frémont, rapporteur public,
- et les observations de Me Davoust, substituant Me Léron, pour la commune de Triel-sur-Seine et de Me Radoszycki, substituant Me Rousseau, pour la SCCV Triel 87-89.
Une note en délibéré présentée pour la SCCV Triel 87-89 a été enregistrée le 21 juin 2023.
Considérant ce qui suit :
1. La SAS Promotion Pichet a, le 15 juin 2018, sollicité la délivrance d'un permis de construire en vue d'être autorisée à démolir le bâti existant sur les parcelles cadastrées AX 892 et AX 893, situées 87-89 rue de Sablonville à Triel-sur-Seine, et à édifier un immeuble d'habitation de 102 logements. Par un arrêté du 19 septembre 2018, le maire de la commune de Triel-sur-Seine a refusé de délivrer le permis de construire sollicité. La commune de Triel-sur-Seine demande à la cour d'annuler le jugement n° 1901770 du 5 mars 2021 par lequel le tribunal administratif de Versailles a annulé cet arrêté du 19 septembre 2018, ainsi que la décision implicite rejetant le recours gracieux de la SCCV Triel 87-89.
Sur la recevabilité de l'appel :
2. La décision juridictionnelle qui, dans les conditions rappelées au point précédent, annule un refus d'autorisation d'urbanisme et enjoint à l'autorité compétente de délivrer cette autorisation n'a ni pour effet de constater l'existence d'une telle autorisation ni, par elle-même, de rendre le requérant bénéficiaire de cette décision, titulaire d'une telle autorisation. Par suite, le défendeur à l'instance initiale qui forme un appel ou se pourvoit en cassation contre cette décision juridictionnelle n'est pas tenu de notifier son recours sur le fondement des dispositions de l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme. Par suite, la fin de non-recevoir opposée par la SCCV Triel 87-89, tirée du défaut de notification régulière de l'appel sur le fondement de l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme, doit être rejetée.
Sur la régularité du jugement attaqué :
3. Hormis le cas où le juge de première instance a méconnu les règles de compétence, de forme ou de procédure qui s'imposaient à lui et a ainsi entaché son jugement d'une irrégularité, il appartient au juge d'appel, non d'apprécier le bien-fondé des motifs par lesquels le juge de première instance s'est prononcé sur les moyens qui lui étaient soumis, mais de se prononcer directement sur les moyens dirigés contre la décision administrative contestée dont il est saisi dans le cadre de l'effet dévolutif de l'appel. La requérante ne peut donc utilement se prévaloir des erreurs de droit et d'appréciation et de la dénaturation des pièces du dossier qu'auraient commises les premiers juges pour demander l'annulation du jugement attaqué.
Sur la recevabilité de la demande de première instance :
4. La commune de Triel-sur-Seine soutient que la SCCV Triel 87-89 n'avait pas capacité pour agir contre l'arrêté litigieux, en raison de l'absence de personnalité juridique. S'il ressort des pièces du dossier que la SCCV Triel 87-89 a été immatriculée au registre du commerce et des sociétés le 15 février 2023, au cours de l'instance d'appel, cet enregistrement est postérieur au jugement attaqué et n'a pu avoir pour effet de régulariser son défaut de capacité pour agir en première instance. Par suite, le jugement attaqué doit être annulé et la demande de première instance rejetée, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de recevabilité de la demande de première instance.
5. Il résulte de ce qui précède que la commune de Triel-sur-Seine est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Versailles a fait droit à la demande de la SCCV Triel 87-89.
Sur les conclusions à fin d'injonction :
6. Il résulte de ce qui précède que les conclusions à fin d'injonction présentées par la SCCV Triel 87-89 doivent être rejetées.
Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
7. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de la commune de Triel-sur-Seine, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que la SCCV Triel 87-89 demande à ce titre. Il y a lieu en revanche de mettre à la charge de la SCCV Triel 87-89 une somme de 1 000 euros à verser à la commune de Triel-sur-Seine sur le fondement des mêmes dispositions.
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement n° 1901770 du 5 mars 2021 du tribunal administratif de Versailles est annulé.
Article 2 : La demande présentée par la SCCV Triel 87-89 devant le tribunal administratif de Versailles est rejetée.
Article 3 : La SCCV Triel 87-89 versera à la commune de Triel-sur-Seine une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Triel-sur-Seine et à la SCCV Triel 87-89.
Délibéré après l'audience du 15 juin 2023, à laquelle siégeaient :
M. Even, président de chambre,
M. Lerooy, premier conseiller,
Mme Houllier, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 30 juin 2023.
La rapporteure,
S. HOULLIERLe président,
B. EVENLa greffière,
C. RICHARD
La République mande et ordonne au préfet des Yvelines en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme
La greffière,
N° 21VE01383 2