Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Montreuil d'annuler la délibération n° CT 2019-04-01-8 du 1er avril 2019 par laquelle l'établissement public territorial (EPT) Est-Ensemble a fixé le taux de la taxe d'enlèvement des ordures ménagères (TEOM) pour l'année 2019, et de mettre à la charge de la commune une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Par un jugement n° 1907182 du 21 juillet 2020, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et deux mémoires, enregistrés respectivement le 22 septembre 2020, le 7 novembre 2022 et le 27 février 2023, M. A..., représenté par Me Marques Vieira, puis par Me Simonia, avocates, demande à la cour dans le dernier état de ses écritures :
1°) d'annuler ou subsidiairement de réformer ce jugement ;
2°) d'annuler la délibération du conseil de territoire de l'EPT Est-Ensemble n° CT 2019-04-01-8 du 1er avril 2019 fixant les taux de la TEOM pour l'exercice 2019 ;
3°) de mettre à la charge de l'EPT Est-Ensemble la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et les dépens, à lui verser.
Il soutient que :
- la minute du jugement n'a pas été signée en méconnaissance de l'article R. 741-7 du code de justice administrative ;
- il méconnaît les dispositions de l'article R. 751-2 du même code qui prévoit que " les expéditions des décisions sont signées et délivrées par le greffier en chef ou, au Conseil d'État, par le secrétaire du contentieux " ;
- il est entaché d'une insuffisance de motivation ;
- il est entaché d'une dénaturation des faits et d'une contradiction de motifs ;
- la délibération attaquée a été prise sur une procédure irrégulière menée en violation des dispositions des articles L. 2121-12, L. 2121-13, L. 2312-1 et D. 2312-3 du code général des collectivités territoriales du fait des insuffisances du rapport d'orientation budgétaire et de la note de synthèse relative à la taxe d'enlèvement des ordures ménagères ;
- ces irrégularités l'ont privé d'une garantie ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard du caractère excessif de la TEOM, qui n'a pas le caractère d'un prélèvement opéré sur les contribuables en vue de pourvoir à l'ensemble des dépenses budgétaires, mais a exclusivement pour objet de couvrir les dépenses exposées par la commune pour assurer l'enlèvement et le traitement des ordures ménagères et non couvertes par des recettes fiscales ;
- au moins 13 % du produit de la TEOM n'est pas justifié par des dépenses réelles de fonctionnement et d'investissement imputables directement au service de collecte de traitement des ordures ménagères.
- le tribunal administratif de Montreuil a, par trois jugements n° 1805104 du 21/07/2020, n° 1809434 du 11 janvier 2021 et n° 2002015 du 17 octobre 2022 annulé les délibérations du conseil de territoire d'Est-Ensemble fixant le taux de TEOM pour les exercices 2016, 2017, 2018 et 2020 en relevant que le produit et le taux de taxe d'enlèvement des ordures ménagères est manifestement disproportionné et que le produit de cette taxe sert à financer des dépenses étrangères à la collecte et au traitement des ordures ménagères ;
- l'EPT utilise les ressources de la TEOM pour financer la sous-fonction 813 du budget, le service de propreté urbaine dont les principaux effectifs sont situés à Montreuil, ville dont le maire est également président de l'EPT ;
- cette situation constatée dans le budget 2020 est strictement identique à celle du budget 2019, les paramètres de dépenses étant les mêmes avec une légère différence pour le produit de TEOM.
Par deux mémoires en défense et des pièces enregistrés le 30 juin 2021, 16 décembre 2022 et le 20 décembre 2022, l'établissement public territorial Est Ensemble (EPT Est Ensemble), représenté par Me Gauch, avocat, demande à la cour, de confirmer ce jugement et de rejeter la requête comme irrecevable ou infondée, et de mettre à la charge de M. A... la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le fait que la version électronique transmise par l'application Télérecours ne comporte pas les signatures de la minute de la décision, n'est pas de nature à établir que les dispositions de l'article R. 741-7 du code de justice administrative auraient été méconnues ;
- la méconnaissance des dispositions de l'article R. 751-2 du même code est sans conséquence sur la régularité du jugement ;
- le jugement est suffisamment motivé ;
- la demande de première instance est irrecevable car le requérant n'a pas qualité donnant intérêt à agir, d'une part, comme contribuable en raison de son incapacité à justifier de l'importance des conséquences qu'aurait cette délibération sur les finances locales, et d'autre part, comme conseiller municipal, puisqu'il ne démontre pas que cette délibération ne relèverait pas des missions de l'EPT, ni qu'elle porteraient atteinte, fût-ce indirectement, aux conditions d'exercice de son mandat ;
- sur le fond, à titre subsidiaire :
o les élus ont été correctement informés dans le cadre du rapport d'orientation budgétaire, conformément aux dispositions de l'article L. 2121-12 du code général des collectivités ;
o ils l'ont été également par la note de synthèse relative à la taxe d'enlèvement des ordures ménagères, conformément aux dispositions de l'article L. 2121-13 de ce même code ;
o la délibération n'est pas entachée d'une erreur manifeste d'appréciation, notamment parce qu'un excédent inférieur à 15% n'est pas manifestement disproportionné au regard de la jurisprudence et que l'excédent du produit de la taxe contestée ne représente en l'espèce que 12,26 % ;
- la circonstance que la délibération fixant les taux de TEOM pour l'année 2020 ait été annulée par le Tribunal administratif de Montreuil est donc sans incidence sur la régularité de la délibération fixant les taux de TEOM pour l'année 2019 et faisant l'objet du présent litige ;
- ce jugement frappé d'appel devant la Cour administrative d'appel de Paris sera annulé.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des collectivités territoriales ;
- le code général des impôts ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Even,
- les conclusions de M. Frémont, rapporteur public,
- les observations de M. A... et de Me Millard, substituant Me Gauch, pour l'EPT Est-Ensemble.
Considérant ce qui suit :
1. M. A... fait appel du jugement n° 1907182 du 21 juillet 2020 par lequel le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la délibération n° CT 2019-04-01-8 du 1er avril 2019 par laquelle l'établissement public territorial (EPT) Est Ensemble a fixé le taux de la taxe d'enlèvement des ordures ménagères (TEOM) pour l'année 2019.
Sur la recevabilité de la demande de première instance :
2. L'EPT Est Ensemble soutient que M. A... n'a pas d'intérêt à agir dans la présente instance, ni en sa qualité de membre du conseil municipal de Noisy-le-Sec dès lors que les délibérations litigieuses relèvent de sa seule compétence et qu'elles n'ont aucune conséquence pour la commune, ni en sa qualité de contribuable local faute d'établir que les délibérations auraient des conséquences d'une importance suffisante sur les finances locales. Toutefois, et alors que le requérant justifie avoir été assujetti à la TEOM votée par l'EPT Est Ensemble au titre notamment de l'année 2019, qu'il a acquittée, il a en cette qualité intérêt à agir contre la délibération par laquelle a été adopté le taux de cette taxe. La fin de non-recevoir soulevée par l'EPT Est Ensemble sur ce point ne peut donc qu'être écartée.
Sur la légalité de la délibération de l'établissement public territorial Est-Ensemble n° CT 2019-04-01-8 du 1er avril 2019 fixant le taux de la taxe d'enlèvement des ordures ménagères pour l'année 2019 :
En ce qui concerne la légalité externe :
3. D'une part, aux termes de l'article L. 2121-12 du code général des collectivités territoriales : " Dans les communes de 3 500 habitants et plus, une note explicative de synthèse sur les affaires soumises à délibération doit être adressée avec la convocation aux membres du conseil municipal " et aux termes de l'article L. 2121-13 de ce même code : " Tout membre du conseil municipal a le droit, dans le cadre de sa fonction, d'être informé des affaires de la commune qui font l'objet d'une délibération ". Il résulte de ces dispositions, qui sont applicables aux établissements publics de coopération intercommunale, que les documents joints à la convocation adressée par le maire aux membres du conseil municipal en vue de la séance doivent comprendre une note explicative de synthèse sur les affaires soumises à délibération afin de permettre aux membres de l'organe délibérant de disposer d'une information suffisante pour se prononcer en toute connaissance de cause. Cette obligation, qui doit être adaptée à la nature et à l'importance des affaires, doit permettre aux intéressés d'appréhender le contexte ainsi que de comprendre les motifs de droit de fait et des mesures envisagées et de mesurer les implications de leurs décisions.
4. D'autre part, aux termes de l'article L. 2312-1 du code général des collectivités territoriales : " Le budget de la commune est proposé par le maire et voté par le conseil municipal. / Dans les communes de 3 500 habitants et plus, le maire présente au conseil municipal, dans un délai de deux mois précédant l'examen du budget, un rapport sur les orientations budgétaires, les engagements pluriannuels envisagés ainsi que sur la structure et la gestion de la dette. Ce rapport donne lieu à un débat au conseil municipal, dans les conditions fixées par le règlement intérieur prévu à l'article L. 2121-8. Il est pris acte de ce débat par une délibération spécifique. / Dans les communes de plus de 10 000 habitants, le rapport mentionné au deuxième alinéa du présent article comporte, en outre, une présentation de la structure et de l'évolution des dépenses et des effectifs. Ce rapport précise notamment l'évolution prévisionnelle et l'exécution des dépenses de personnel, des rémunérations, des avantages en nature et du temps de travail. Il est transmis au représentant de l'Etat dans le département et au président de l'établissement public de coopération intercommunale dont la commune est membre ; il fait l'objet d'une publication. Le contenu du rapport ainsi que les modalités de sa transmission et de sa publication sont fixés par décret. Les dispositions du présent article s'appliquent aux établissements publics administratifs des communes de 3 500 habitants et plus ". Aux termes de l'article D. 2312-3 du même code : " A. - Le rapport prévu à l'article L. 2312-1 comporte les informations suivantes : / 1° Les orientations budgétaires envisagées par la commune portant sur les évolutions prévisionnelles des dépenses et des recettes, en fonctionnement comme en investissement. (...) B. - Dans les communes de plus de 10 000 habitants, le rapport prévu au troisième alinéa de l'article L. 2312-1, présenté par le maire au conseil municipal, comporte, au titre de l'exercice en cours, ou, le cas échéant, du dernier exercice connu, les informations relatives : / 1° A la structure des effectifs ; / 2° Aux dépenses de personnel comportant notamment des éléments sur la rémunération tels que les traitements indiciaires, les régimes indemnitaires, les nouvelles bonifications indiciaires, les heures supplémentaires rémunérées et les avantages en nature ; / 3° A la durée effective du travail dans la commune. / Il présente en outre l'évolution prévisionnelle de la structure des effectifs et des dépenses de personnel pour l'exercice auquel se rapporte le projet de budget. / Ce rapport peut détailler la démarche de gestion prévisionnelle des ressources humaines de la commune (...) ".
5. Enfin, aux terme de l'article L. 2313-1 du même code : " Les communes et leurs groupements de 10 000 habitants et plus ayant institué la taxe d'enlèvement des ordures ménagères conformément aux articles 1520, 1609 quater, 1609 quinquies C et 1379-0 bis du code général des impôts et qui assurent au moins la collecte des déchets ménagers retracent dans un état spécial annexé aux documents budgétaires, d'une part, le produit perçu de la taxe précitée et les dotations et participations reçues pour le financement du service, liées notamment aux ventes d'énergie ou de matériaux, aux soutiens reçus des éco-organismes ou aux aides publiques, et d'autre part, les dépenses, directes et indirectes, afférentes à l'exercice de la compétence susmentionnée. "
6. Il ressort des pièces du dossier que si l'EPT Est Ensemble a communiqué aux conseillers territoriaux un rapport sur le prix et la qualité du service public de gestion des déchets ménagers et assimilés se rapportant à l'année 2018 et un rapport sur le budget primitif 2019 de l'ensemble de l'établissement public dans le cadre de la procédure d'élaboration du budget 2019, et s'il a en outre produit au dossier contentieux l'état annexé au compte administratif 2019 retraçant les dépenses et les sources de financement du service de collecte et d'enlèvement des ordures ménagères constatées à la clôture de l'exercice 2019, il n'a pas communiqué l'état y afférent qui devait être annexé au budget prévisionnel 2019 conformément à l'article L. 2313-1 du même code, pourtant réclamé dans le cadre d'une mesure d'instruction, dont il n'est pas établi qu'il aurait été réalisé et communiqué aux conseillers territoriaux pour cette discussion budgétaire, ni une comptabilité analytique de ce service. Par suite, et en l'absence de budget annexe retraçant les prévisions budgétaires de ce service, les éléments produits aux conseillers territoriaux ne leur permettaient pas d'identifier les dépenses afférentes au service de collecte et de traitement des déchets et de les confronter au montant prévisionnel de la TEOM pour l'année 2019. Les membres du conseil de territoire n'ont donc pas disposé d'une information suffisamment claire et précise pour leur permettre de se prononcer en toute connaissance de cause sur la délibération contestée. Dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées doit être accueilli.
En ce qui concerne la légalité interne :
7. Aux termes du I de l'article 1520 du code général des impôts dans sa rédaction issue de l'article 23 de la loi du 28 décembre 2018 de finances pour 2019, applicable aux années en litige : " Les communes qui assurent au moins la collecte des déchets des ménages peuvent instituer une taxe destinée à pourvoir aux dépenses du service de collecte et de traitement des déchets ménagers et des déchets mentionnés à l'article L. 2224-14 du code général des collectivités territoriales ainsi qu'aux dépenses directement liées à la définition et aux évaluations du programme local de prévention des déchets ménagers et assimilés mentionné à l'article L. 541-15-1 du code de l'environnement, dans la mesure où celles-ci ne sont pas couvertes par des recettes ordinaires n'ayant pas le caractère fiscal. / Les dépenses du service de collecte et de traitement des déchets mentionnées au premier alinéa du présent I comprennent : / 1° Les dépenses réelles de fonctionnement ; / 2° Les dépenses d'ordre de fonctionnement au titre des dotations aux amortissements des immobilisations lorsque, pour un investissement, la taxe n'a pas pourvu aux dépenses réelles d'investissement correspondantes, au titre de la même année ou d'une année antérieure ; / 3° Les dépenses réelles d'investissement lorsque, pour un investissement, la taxe n'a pas pourvu aux dépenses d'ordre de fonctionnement constituées des dotations aux amortissements des immobilisations correspondantes, au titre de la même année ou d'une année antérieure. / (...) ".
8. La taxe d'enlèvement des ordures ménagères (TEOM) susceptible d'être instituée sur le fondement du I de l'article 1520 du code général des impôts n'a pas le caractère d'un prélèvement opéré sur les contribuables en vue de pourvoir à l'ensemble des dépenses budgétaires, mais a exclusivement pour objet de couvrir les dépenses exposées par la commune ou l'établissement de coopération intercommunale (EPCI) compétent pour assurer l'enlèvement et le traitement des ordures ménagères et des déchets mentionnés à l'article L. 2224-14 du code général des collectivités territoriales et non couvertes par des recettes non fiscales affectées à ces opérations. Il s'ensuit que le produit de cette taxe et, par voie de conséquence, son taux, ne doivent pas être manifestement disproportionnés par rapport au montant des dépenses exposées pour ce service, tel qu'il peut être estimé à la date du vote de la délibération fixant ce taux ", déduction faite, le cas échéant, du montant des recettes non fiscales de la section de fonctionnement, telles qu'elles sont définies par les articles L. 2331-2 et L. 2331-4 du code général des collectivités territoriales, relatives à ces opérations.
9. Les dépenses susceptibles d'être prises en compte sont constituées de la somme de toutes les dépenses de fonctionnement réelles exposées pour le service public de collecte et de traitement des déchets ménagers et des déchets mentionnés à l'article L. 2224-14 du code général des collectivités territoriales et des dotations aux amortissements des immobilisations qui lui sont affectées, telle qu'elle peut être estimée à la date du vote de la délibération fixant le taux de la taxe. Peuvent être incluses dans ces dépenses de fonctionnement les dépenses correspondant à une quote-part du coût des directions ou services transversaux centraux de la collectivité, calculée au moyen d'une comptabilité analytique permettant, par différentes clés de répartition, d'identifier avec suffisamment de précision les dépenses qui, parmi celles liées à l'administration générale de la collectivité, peuvent être regardées comme ayant été directement exposées pour le service public de collecte et de traitement des déchets ménagers et des déchets mentionnés à l'article L. 2224-14 du code général des collectivités territoriales .
10. Lorsqu'un requérant se prévaut, à l'appui de sa contestation de la légalité de la délibération fixant le taux de TEOM, de ce que les éléments retracés dans le compte administratif ou le rapport annuel relatif au service public d'élimination des ordures ménagères établis à l'issue de l'année en litige font apparaître que le produit constaté de TEOM excède manifestement le montant constaté des dépenses à couvrir, il appartient au juge de rechercher, au besoin en mettant en cause l'administration et en ordonnant un supplément d'instruction, si les données prévisionnelles au vu desquelles la délibération a été prise diffèrent sensiblement de celles, constatées a posteriori, sur lesquelles le requérant fonde son argumentation.
11. Il résulte du budget primitif de l'EPT Est Ensemble au titre de l'année 2019, qui n'a pas été modifié sur ce point au cours de l'exercice par des décisions modificatives, que le montant prévisionnel attendu pour le produit de la TEOM a été fixé à la somme de 52 030 000 euros, qui est la base de calcul du taux fixé par la délibération contestée n° CT 2019-04-01-8 du 1er avril 2019, cette recette n'étant pas, s'agissant du service de collecte et de traitement des déchets, complétée par la redevance spéciale de l'art L. 2333-78 du code général des collectivités territoriales, ni par une subvention d'équilibre provenant du budget général qui imposent l'établissement d'un budget annexe mais simplement par des recettes non fiscales d'un volume au demeurant très modeste.
12. L'EPT Est Ensemble reconnait lui-même, par son dernier mémoire en défense, qu'à concurrence de 12,26% cette somme excède le montant des dépenses afférentes au service de collecte et de traitement des déchets, soit au total la somme d'environ 46 347 764 euros, qui a été au demeurant constatée à concurrence de 46 508 502 euros au compte administratif de l'année 2019.
13. M. A... affirme que, par-delà cet écart, une partie des dépenses de personnel et des versements de subventions prises en compte pour le calcul de la TEOM 2019 sont étrangères au service de collecte et de traitement des ordures ménagères et des déchets.
S'agissant des dépenses de personnel :
14. M. A... soutient qu'au titre de ces dépenses de personnel l'EPT Est Ensemble a pris en compte une somme de 3 152 414,31 euros se rapportant à la propreté urbaine, plus des dépenses de personnel mutualisées non justifiées à concurrence de 345 302,72 euros.
15. Si l'EPT Est Ensemble affirme que le montant des dépenses de personnels affectées à la gestion des déchets ménagers, qui avaient été évaluées à 6 328 318 euros dans l'état de répartition de TEOM du budget primitif 2018, aurait été réduit à 2 754 589,28 euros pour le budget primitif 2019, ceci n'est pas corroboré par le compte administratif 2019 qui fait apparaitre à ce titre une dépense très supérieure de 4 363 771 euros.
16. L'EPT Est Ensemble reconnait par ailleurs, sans contester les chiffrages de M. A..., qu'en 2019 les dépenses de personnel de la direction de la prévention et valorisation des déchets (DPVD) prises en compte regroupaient les personnels dédiés à la collecte et au traitement des déchets ménagers et assimilés et à la prévention (fonction comptable 812), plus ceux affectés à la propreté urbaine (fonction comptable 813), et les " personnels mutualisés " dont les misions ne sont pas explicitées, alors que celles afférentes à la propreté urbaine ne peuvent en vertu des dispositions de l'article 1520 du code général des impôts être financés par la taxe d'enlèvement des ordures ménagères. Elles ont d'ailleurs été exclues pour une somme de 3 287 007 euros au budget 2020 afin précise l'EPT Est Ensemble " de s'assurer qu'il ne puisse lui être valablement reproché de faire financer par le produit de la TEOM des dépenses afférentes à la propreté urbaine ".
17. En outre, en affirmant qu'est prise en compte la masse salariale correspondant aux personnels dont le planning révèle qu'entre 80 % et 100 % de leur temps de travail est affecté à la gestion des déchets ménagers, l'EPT Est Ensemble reconnait que la totalité de ces rémunérations sont prises en compte alors que seule la fraction correspondant au temps de travail de ces agents dévolue à la gestion des déchets, qui ne peut être chiffrée en l'état du dossier, devrait être prise en compte.
18. Enfin, si l'EPT Est Ensemble affirme que de nombreux agents sont affectés à la gestion administrative de la collecte et du traitement des déchets ménagers, et que d'autres " chargés de sensibilisation et de contrôle de l'espace public (CSCEP) pour le contrôle de la qualité, le pilotage et l'accompagnement des usagers ", sont affectées à leur gestion technique, il ne le démontre pas et ne le chiffre pas.
19. Il résulte de ce qui précède qu'une partie importante des dépenses de personnel prises en compte par l'EPT Est Ensemble pour la fixation de la TEOM 2019 estimées à plus de 3 497 716 euros sont étrangères au service de collecte et de traitement des ordures ménagères.
S'agissant des subventions :
20. M. A... affirme que l'EPT Est Ensemble ne démontre pas que les subventions prises en compte en 2019 à hauteur de 570 000 euros concerneraient une dépense afférente au service de collecte et de traitement des ordures ménagères, et qu'elles doivent donc être déduites pour le calcul de comparaison avec le montant de la TEOM.
21. En se bornant à affirmer en réponse que cette somme correspond à des subventions versées à des associations répondant à des appels à projets dans le cadre du " contrat d'objectifs déchets et économie circulaire (CODEC) " relevant de la convention de financement signée avec l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (ADEME) le 16 juillet 2019, laquelle prévoit le financement par celle-ci de projets subventionnés jusqu'à 450 000 euros sur une période de 40 mois, et que ce poste de dépense a été fortement réduit à 360 000 euros en 2020 par rapport au budget 2019, l'EPT Est Ensemble ne justifie pas la prise en compte de cette dépense au titre du calcul de la TEOM.
22. Il résulte de tout ce qui précède qu'il est établi que la taxe d'enlèvement des ordures ménagères pour 2019 a servi à financer des dépenses étrangères à la collecte et au traitement des ordures ménagères et des déchets. Le produit prévisionnel de la TEOM fixé à 52 030 000 euros au budget 2019, qui a servi de base au calcul du taux fixé par la délibération litigieuse, et par voie de conséquence ce taux, qui excède d'au moins 9 589 214 euros, soit 22,59% par rapport aux seules dépenses du service de collecte et de traitement des déchets estimées à 42 440 786 euros, est manifestement disproportionné par rapport au montant des dépenses exposées pour le service de collecte et de traitement des déchets. Dans ces conditions, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens, la délibération fixant le taux de la taxe d'enlèvement des ordures ménagères pour l'année 2019 est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.
23. Il résulte de tout ce qui précède que, sans qu'il soit besoin de statuer sur sa régularité, M. A... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la délibération n° CT 2019-04-01-8 du 1er avril 2019 par laquelle l'établissement public territorial (EPT) Est Ensemble a fixé le taux de la taxe d'enlèvement des ordures ménagères (TEOM) pour l'année 2019.
Sur les frais liés au litige :
24. Les dispositions énoncées par l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge du requérant au titre des frais supportés par l'EPT Est Ensemble. Il y a en revanche lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etablissement public territorial Est Ensemble une somme de 1 500 euros à verser à M. A... en application des mêmes dispositions.
DECIDE :
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Montreuil n° 1907182 du 21 juillet 2020 et la délibération de l'Etablissement public territorial Est Ensemble n° CT 2019-04-01-8 du 1er avril 2019 fixant le taux de la taxe d'enlèvement des ordures ménagères au titre de l'année 2019 sont annulés.
Article 2 : L'Etablissement public territorial Est Ensemble versera une somme de 1 500 euros à M. A... en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le surplus des conclusions de l'EPT Est ensemble est rejeté.
Article 4 : Le présent jugement sera notifié à M. B... A... et à l'Etablissement Public territorial Est Ensemble.
Copie en sera adressée à la direction départementale des finances publiques de Seine-Saint-Denis.
Délibéré après l'audience du 15 juin 2023, à laquelle siégeaient :
M. Even, président de chambre,
M. David Lerooy, premier conseiller,
Mme Houllier, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 30 juin 2023.
Le président-rapporteur,
B. EVEN
L'assesseur le plus ancien,
D. LEROOY
La greffière,
C. RICHARD
La République mande et ordonne au préfet de la Seine-Saint-Denis en ce qui les concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme
La greffière,
2
N° 20VE02516