La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

31/05/2023 | FRANCE | N°21VE03496

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 6ème chambre, 31 mai 2023, 21VE03496


Vu la procédure suivante :

Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise, qui a transmis la requête au tribunal administratif de Versailles, d'annuler la décision du 3 septembre 2019 par laquelle la commission de discipline du baccalauréat de l'académie de Versailles lui a interdit de subir tout examen conduisant à l'obtention du baccalauréat et tout diplôme délivré par un établissement public dispensant des formations post-baccalauréat pendant un an et a, en conséquence, prononcé la nullité de son épreuve de philosophie.

Par un jugement n°

1908157 du 28 octobre 2021, le tribunal administratif de Versailles a annulé...

Vu la procédure suivante :

Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise, qui a transmis la requête au tribunal administratif de Versailles, d'annuler la décision du 3 septembre 2019 par laquelle la commission de discipline du baccalauréat de l'académie de Versailles lui a interdit de subir tout examen conduisant à l'obtention du baccalauréat et tout diplôme délivré par un établissement public dispensant des formations post-baccalauréat pendant un an et a, en conséquence, prononcé la nullité de son épreuve de philosophie.

Par un jugement n° 1908157 du 28 octobre 2021, le tribunal administratif de Versailles a annulé la décision du 3 septembre 2019.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 30 décembre 2021, le ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Versailles du 28 octobre 2021 ;

2°) de rejeter la demande présentée par Mme B... devant le tribunal administratif.

Il soutient que :

- le plagiat commis par la requérante était constitutif d'une fraude et constitué dès lors qu'elle a recopié presque mot à mot le contenu de trois corrigés d'épreuves publiés sur internet, sans citer ses sources ; c'est un acte grave susceptible de constituer un délit pénal ; la circonstance qu'il a pu être réalisé lors de l'examen à l'aide d'un appareil ou document non autorisé est indifférente ; le plagiat et le copiage sont une fraude au sens du code de l'éducation ;

- le tribunal administratif de Versailles s'est mépris sur les compétences respectives de l'administration et du jury d'examen du baccalauréat car l'administration ne peut pas abaisser la note d'un candidat ; il ne pouvait pas considérer qu'il lui revenait d'ajuster la note au lieu d'engager une procédure de sanction.

Mme B..., qui a été mise en demeure de produire un mémoire en défense le 9 juin 2022, n'a pas produit d'observations.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'éducation ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Mauny,

- les conclusions de Mme Moulin Zys, rapporteure publique,

- et les observations de M. C..., représentant le ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse.

Considérant ce qui suit :

1. Mme A... B... a passé, le 24 juin 2019, l'épreuve écrite de philosophie du baccalauréat technologique série " sciences et technologies du management et de la gestion ", diplôme qu'elle a d'ailleurs décroché au terme de ces épreuves. Néanmoins, un procès-verbal de suspicion de fraude a été dressé le 24 juin par le correcteur de sa copie, que Mme B... a signé le 28 juin 2019. Mme B... a présenté des observations écrites par un courrier du 1er juillet 2019. Par un courrier du 18 juillet 2019, Mme B... a été informée de l'engagement de poursuites disciplinaires pour fraude ou tentative de fraude avec un cas de " copiage et plagiat " lors de l'épreuve de philosophie et convoquée devant la commission de discipline de l'académie de Versailles le 3 septembre 2019. Ce même jour, la commission de discipline du baccalauréat de l'académie de Versailles a décidé, après avoir retenu la matérialité des faits de copiage et leur imputabilité à Mme B..., de lui interdire de subir tout examen conduisant à l'obtention du baccalauréat et tout diplôme délivré par un établissement public dispensant des formations post-baccalauréat pendant un an, et relevé que cette sanction entrainait automatiquement la nullité de l'épreuve de philosophie. Par un jugement 28 octobre 2021, le tribunal administratif de Versailles a annulé la décision du 3 septembre 2019. Le ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports relève appel de ce jugement.

2. Aux termes de l'article D. 334-25 du code de l'éducation : " Dans chaque académie, une commission de discipline du baccalauréat est compétente pour prononcer des sanctions disciplinaires à l'égard des candidats auteurs ou complices d'une fraude ou d'une tentative de fraude commise à l'occasion du baccalauréat ". Aux termes de l'article D. 334-32 de ce code : " Les sanctions disciplinaires qui peuvent être prononcées par la commission de discipline du baccalauréat sont : / 1° Le blâme avec inscription au livret scolaire, s'il existe ; / 2° La privation de toute mention portée sur le diplôme délivré au candidat admis ; / 3° L'interdiction de subir tout examen conduisant à l'obtention du baccalauréat pour une durée maximum de cinq ans ou d'un titre ou diplôme délivré par un établissement public dispensant des formations post-baccalauréat pour une durée maximum de cinq ans. Cette sanction peut être prononcée avec sursis si l'interdiction n'excède pas deux ans ; / 4° L'interdiction de prendre toute inscription dans un établissement public dispensant des formations post-baccalauréat pour une durée maximum de cinq ans ". Aux termes de l'article D. 334-33 dudit code : " Toute sanction prononcée entraîne, pour l'intéressé, la nullité de l'épreuve au cours de laquelle la fraude ou la tentative de fraude a été commise. L'intéressé est réputé avoir été présent sans l'avoir subie. La commission de discipline du baccalauréat peut en outre décider de prononcer à l'égard de l'intéressé la nullité du groupe d'épreuves ou de la session d'examen ". Aux termes de l'article D. 334-35 du même code : " Toute sanction prononcée en application des dispositions de la présente section peut faire l'objet d'un recours de plein contentieux devant le tribunal administratif territorialement compétent. ".

3. Alors que la rectrice a décidé d'engager des sanctions disciplinaires pour des faits de " copiage et plagiat ", la commission de discipline du baccalauréat de l'académie de Versailles a décidé le 3 septembre 2019 de sanctionner Mme B... pour des faits de copiage. S'il ressort des pièces du dossier que la copie de Mme B... consiste effectivement en un assemblage de trois corrigés du sujet de l'épreuve de philosophie accessibles sur internet et restitués quasiment au mot près, et qu'il est fort peu vraisemblable que Mme B... ait pu les apprendre par cœur ainsi qu'elle l'a pourtant fait valoir en première instance, sans que cela soit contesté, le ministre soutient que c'est à tort que le tribunal a annulé la décision de la commission de discipline du baccalauréat de l'académie de Versailles alors que le plagiat commis par Mme B... était constitutif d'une fraude, sans se prévaloir de ce que la copie de Mme B... révèlerait, eu égard à sa teneur, le copiage de ces corrigés au cours de l'épreuve de philosophie, à partir d'un appareil de communication ou de stockage de données ou d'un document non autorisés. Toutefois, ainsi que l'a justement relevé le tribunal, la seule restitution au cours d'un examen sur table d'éléments appris par cœur par un élève au cours de ses révisions ne saurait être regardée comme constitutive d'une fraude. Par ailleurs, le ministre ne peut pas utilement se prévaloir d'une erreur qu'aurait commise le tribunal sur les compétences respectives de l'administration et du jury d'examen du baccalauréat dès lors que les premiers juges, après avoir exposé le motif d'annulation de la décision en litige, n'ont relevé qu'incidemment qu'il est toujours loisible à l'administration, dans une telle situation, d'ajuster la note du candidat pour tenir compte de sa capacité de réflexion personnelle et d'argumentation.

4. Il suit de là, au regard des moyens qu'il a soulevés, que le ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Versailles a annulé la décision du 3 septembre 2019 de la commission de discipline du baccalauréat de l'académie de Versailles.

D E C I D E :

Article 1er : La requête du ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse et à Mme A... B....

Délibéré après l'audience du 18 avril 2023, à laquelle siégeaient :

M. Albertini, président de chambre,

M. Mauny, président assesseur,

Mme Villette, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 31 mai 2023.

Le rapporteur,

O. MAUNYLe président,

P.-L. ALBERTINILa greffière,

S. DIABOUGA

La République mande et ordonne au ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme

La greffière,

N° 20VE03496 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 21VE03496
Date de la décision : 31/05/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

30-02-07-02 Enseignement et recherche. - Questions propres aux différentes catégories d'enseignement. - Établissements d'enseignement privés. - Relations entre les collectivités publiques et les établissements privés.


Composition du Tribunal
Président : M. ALBERTINI
Rapporteur ?: M. Olivier MAUNY
Rapporteur public ?: Mme MOULIN-ZYS

Origine de la décision
Date de l'import : 11/06/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2023-05-31;21ve03496 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award