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22/02/2023 | FRANCE | N°21VE02030

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 6ème chambre, 22 février 2023, 21VE02030


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SCCV Les Collines d'Orsay a demandé au tribunal administratif de Versailles d'annuler l'arrêté du maire d'Orsay du 31 octobre 2018 portant sursis à statuer sur sa demande de permis de construire et de mettre à charge de la commune d'Orsay la somme de 3 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1901130 du 3 mai 2021, le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par

une requête et un mémoire, enregistrés le 1er juillet 2021 et le 20 janvier 2023, la SCC...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SCCV Les Collines d'Orsay a demandé au tribunal administratif de Versailles d'annuler l'arrêté du maire d'Orsay du 31 octobre 2018 portant sursis à statuer sur sa demande de permis de construire et de mettre à charge de la commune d'Orsay la somme de 3 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1901130 du 3 mai 2021, le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 1er juillet 2021 et le 20 janvier 2023, la SCCV les collines d'Orsay, représentée par Me Rochmann Sacksick, avocate, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 3 mai 2021 ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du maire d'Orsay du 31 octobre 2018 portant sursis à statuer sur sa demande de permis de construire ;

3°) de mettre à la charge de la commune d'Orsay la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement n'est pas signé par le greffier d'audience en méconnaissance de l'article R. 741-7 du code de justice administrative ;

- l'arrêté en litige est illégal car les effets de la délibération du 4 février 2015 ont été épuisés dès lors que la commune a renoncé à un aménagement dans le secteur des parcelles alors qu'elle a engagé l'opération d'aménagement avec l'approbation du plan local d'urbanisme et via l'orientation d'aménagement et de programme (OAP) sur le secteur du Guichet Nord ; les objectifs de l'OAP répondent à ceux de la délimitation du périmètre d'étude ;

- a minima, l'approbation du plan local d'urbanisme et des OAP le 28 mars 2017 a modifié le périmètre d'étude défini par cette délibération et le terrain d'assiette du projet est désormais en-dehors du périmètre ; le périmètre d'étude a été modifié et les parcelles qui ne sont pas incluses dans l'OAP sont discontinues et ne permettent pas une opération d'aménagement ; les caractéristiques du projet répondent aux prescriptions applicables au secteur UGa ; la commune a signé une convention de veille foncière avec l'Etablissement public foncier d'Ile-de-France sur le périmètre de l'OAP du Guichet ;

- l'arrêté en litige est illégal car cette délibération est devenue illégale, aucune opération d'aménagement n'étant désormais réalisable sur les parcelles restant hors du périmètre de l'OAP ; le maintien du périmètre d'étude sur les parcelles hors de l'OAP est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ; il ne peut pas y avoir d'application concomitante des deux périmètres ;

- à titre subsidiaire, l'arrêté en litige est illégal car le périmètre était illégal ab initio dès lors qu'il n'y a jamais eu d'opération d'aménagement prévue sur le terrain d'assiette du projet et que la parcelle d'implantation du projet n'est pas une grande unité foncière visée par la délibération et les objectifs de la délibération ont été atteints par la modification du règlement du plan local d'urbanisme ;

- à titre plus subsidiaire, l'arrêté en litige est illégal car la demande de permis de construire de la SCCV Les Collines d'Orsay ne compromet pas l'opération d'aménagement envisagée ; la préservation de l'aspect d'un quartier ne relève pas d'une opération d'aménagement ; aucune non-conformité du projet avec le plan local d'urbanisme n'a été relevée ;

Par un mémoire en défense, enregistré le 2 novembre 2022, la commune d'Orsay, représentée par Me Sagalovitsch, avocat, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 4 000 euros soit mise à la charge de cette dernière sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que les moyens soulevés ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. A...,

- les conclusions de Mme Moulin-Zys, rapporteure publique,

- et les observations de Me Rochmann représentant la SCCV Les Collines d'Orsay et de Me Sagalovitsch représentant la commune d'Orsay.

Considérant ce qui suit :

1. La SCCV Les Collines d'Orsay a demandé au tribunal administratif de Versailles d'annuler l'arrêté du 31 octobre 2018 par lequel le maire de la commune d'Orsay a opposé un sursis à statuer à sa demande de permis de construire deux bâtiments de trente-huit logements, dont douze logements locatifs sociaux, sur un terrain situé 13/13bis rue de Versailles cadastré AD 510 et AD 625. Par un jugement du 3 mai 2021, dont la société relève appel, le tribunal administratif a rejeté sa demande.

Sur la régularité du jugement :

2. Aux termes, d'une part, de l'article R. 741-7 du code de justice administrative : " Dans les tribunaux administratifs et les cours administratives d'appel, la minute de la décision est signée par le président de la formation de jugement, le rapporteur et le greffier d'audience. ".

3. Aux termes, d'autre part, de l'article 2 de l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 portant adaptation des règles applicables devant les juridictions de l'ordre administratif : " Durant la période comprise entre le 12 mars 2020 et la date de cessation de l'état d'urgence sanitaire déclaré dans les conditions de l'article 4 de la loi du 23 mars 2020 susvisée, il est dérogé aux dispositions législatives et réglementaires applicables aux juridictions administratives dans les conditions prévues au présent titre. ". Aux termes de l'article 12 de la même ordonnance : " Par dérogation aux articles R. 741-7 à R. 741-9 du code de justice administrative, la minute de la décision peut être signée uniquement par le président de la formation de jugement. ".

4. Il ressort des pièces du dossier que le jugement attaqué a été mis à disposition des parties le 3 mai 2021, après un délibéré suivant l'audience du 12 avril 2021, soit dans la période comprise entre le 12 mars 2020 et la cessation de l'état d'urgence sanitaire déclaré dans les conditions de l'article 4 de la loi du 23 mars 2020 susvisée. Il ressort des dispositions de l'article 12 précité qu'elles permettaient qu'il soit dérogé aux conditions de signature de la minute des jugements des tribunaux administratifs pendant ladite période, en prévoyant leur signature par le seul président de la formation de jugement. Il suit de là que la circonstance que le greffier d'audience n'a pas signé la minute du jugement attaqué, qui vise les dispositions de l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020, ne peut qu'être sans incidence sur la régularité dudit jugement.

Sur le bien-fondé du jugement :

5. Aux termes de l'article L. 424-1 du code de l'urbanisme : " L'autorité compétente se prononce par arrêté sur la demande de permis ou, en cas d'opposition ou de prescriptions, sur la déclaration préalable. Il peut être sursis à statuer sur toute demande d'autorisation concernant des travaux, constructions ou installations dans les cas prévus au 6° de l'article L. 102-13 et aux articles L. 153-11 et L. 311-2 du présent code et par l'article L. 331-6 du code de l'environnement. Il peut également être sursis à statuer : (...) 3° Lorsque des travaux, constructions ou installations sont susceptibles de compromettre ou de rendre plus onéreuse la réalisation d'une opération d'aménagement, dès lors que le projet d'aménagement a été pris en considération par la commune ou l'établissement public de coopération intercommunale compétent et que les terrains affectés par ce projet ont été délimités, sauf pour les zones d'aménagement concerté pour lesquelles l'article L. 311-2 du présent code prévoit qu'il peut être sursis à statuer à compter de la publication de l'acte créant la zone d'aménagement concerté . Le sursis à statuer ne peut être prononcé que si la décision de prise en considération prévue aux 2° et 3° du présent article et à l'article L. 102-13 a été publiée avant le dépôt de la demande d'autorisation. La décision de prise en considération cesse de produire effet si, dans un délai de dix ans à compter de son entrée en vigueur, l'exécution des travaux publics ou la réalisation de l'opération d'aménagement n'a pas été engagée (...) ". Aux termes de l'article L. 300-1 du même code : " Les actions ou opérations d'aménagement ont pour objets de mettre en œuvre un projet urbain, une politique locale de l'habitat, d'organiser le maintien, l'extension ou l'accueil des activités économiques, de favoriser le développement des loisirs et du tourisme, de réaliser des équipements collectifs ou des locaux de recherche ou d'enseignement supérieur, de lutter contre l'insalubrité, de permettre le renouvellement urbain, de sauvegarder ou de mettre en valeur le patrimoine bâti ou non bâti et les espaces naturels " ;

6. Les dispositions du premier alinéa de l'article L. 424-1 du code de l'urbanisme ne doivent recevoir application que pour autant que l'autorité compétente estime, à la date où elle statue, qu'en raison de leur situation, de leur consistance, de leur vocation, des normes de toutes natures qui leur seraient applicables et des projets dont elles peuvent constituer ou constituent l'assiette, il est nécessaire, afin de protéger le coût et la possibilité de l'opération prise en considération, de prévoir la possibilité de surseoir à statuer sur les demandes d'autorisation d'urbanisme relatives à ces propriétés.

7. Il ressort des pièces du dossier que le maire d'Orsay a opposé le 31 octobre 2018 un sursis à statuer sur la demande de permis de construire de la SCCV Les Collines d'Orsay au motif que les terrains d'assiette du projet de construction de deux bâtiments de trente-huit logements, sur les parcelles cadastrées section AD n° 510 et n° 625, étaient inclus dans le périmètre d'étude approuvé par la délibération précitée du 4 février 2015. Il ressort de cette délibération que la commune a créé ce périmètre d'études au motif que le secteur Nord du Guichet comportait de grandes unités foncières mutables à court et moyen terme, qu'il était nécessaire de conduire une réflexion urbaine sur ces secteurs et d'éviter un bouleversement dans ce quartier et d'adapter les projets aux besoins ainsi qu'à la configuration du quartier et que la création de ce périmètre d'étude lui permettait de surseoir à statuer sur les demandes d'autorisation du droit des sols. Il ne ressort toutefois pas des termes de cette délibération qu'un projet d'aménagement d'une précision même minimale et concernant les parcelles cadastrées section AD n° 510 et n° 625 aurait été concrètement mis à l'étude postérieurement à cette délibération. Il en est de même en particulier à la date de la décision de sursis à statuer, laquelle se borne à rappeler les objectifs de la délibération du 4 février 2015, à constater que l'OAP du secteur du Guichet ne les concerne pas et que le projet prévoit une opération de logements collectifs d'une densité importante dans un environnement bâti où prédomine l'habitat pavillonnaire, et ce alors que la conservation d'un état existant ne peut pas constituer un projet d'aménagement. Au surplus, il ressort des pièces du dossier que le secteur du Guichet Nord est l'objet d'une orientation d'aménagement et de programmation adoptée lors de la révision du plan local d'urbanisme de la commune d'Orsay approuvé le 28 mars 2017, et que cette orientation reprend très largement le périmètre d'étude fixé le 4 février 2015, s'agissant en particulier des secteurs les plus importants situés au Nord et au Sud de la rue de Versailles. Si la bande de terrains reliant ces deux secteurs est effectivement différente s'agissant du périmètre d'étude et de l'OAP, celle de l'OAP se situant à l'Est de la rue de Versailles et celle du périmètre d'étude à l'Ouest de la même rue, cette bande de terrains est de taille réduite et il ne ressort d'aucune pièce du dossier qu'une réflexion aurait été ne serait-ce qu'engagée s'agissant des terrains situés à l'Ouest de la rue de Versailles, et ce alors que l'essentiel du périmètre d'étude, situé au Nord et au Sud de cette bande de terrain, est désormais couvert par l'OAP. Enfin, il ressort des pièces du dossier que les deux parcelles en cause sont désormais situées en zone UGa du plan local d'urbanisme, laquelle, au terme de la révision dudit plan le 28 mars 2017, correspond " aux secteurs de diffusion de la dynamique urbaine autour de la centralité du Guichet et de sa gare ". Or il n'est pas sérieusement contesté par la commune que le projet de la requérante n'était pas contraire au règlement de la zone UG, lequel pouvait pourtant prendre en compte, eu égard à la date de son approbation, les objectifs poursuivis par la commune pour un éventuel projet d'aménagement. Au regard de ces circonstances, la SCCV les collines d'Orsay est fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Versailles a écarté le moyen tiré de l'absence d'opération d'aménagement incluant les parcelles en cause et de l'impossibilité en résultant de décider de sursoir à statuer sur sa demande de permis de construire. Il y a lieu, pour la cour, saisie par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les moyens soulevés par la SCCV les collines d'Orsay en première instance et en appel.

8. Il résulte de ce qui a été exposé au point 7 qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que la commune aurait entrepris ou seulement décidé une opération d'aménagement concernant les deux parcelles d'implantation du projet de la société à la date de la décision en litige, alors que ce motif est le seul retenu par la commune pour sursoir à statuer sur la demande de permis de construire de la SCCV les collines d'Orsay. La société est donc fondée à soutenir que cette décision est entachée d'une illégalité.

9. Enfin, pour l'application de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme, et par l'effet dévolutif de l'appel, aucun des autres moyens soulevés par la société requérante n'est, en l'état de l'instruction, de nature à fonder l'annulation de l'arrêté en litige.

10. Il résulte de tout ce qui précède que la SCCV les collines d'Orsay est fondée à demander l'annulation du jugement du tribunal administratif de Versailles du 3 mai 2021 et celle de l'arrêté du 31 octobre 2018 par lequel la commune d'Orsay a décidé de sursoir à statuer sur sa demande.

Sur les frais liés au litige :

11. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la SCCV Les Collines d'Orsay, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme demandée par la commune d'Orsay au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.

12. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la commune d'Orsay une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par la requérante et non compris dans les dépens.

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Versailles du 3 mai 2021 et l'arrêté du 31 octobre 2018 par lequel la commune d'Orsay a décidé de sursoir à statuer sur la demande de permis de construire de la SCCV Les Collines d'Orsay sont annulés.

Article 2 : La commune d'Orsay versera la somme de 1 500 euros à la SCCV Les Collines d'Orsay au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Les conclusions de la commune d'Orsay présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la SCCV Les Collines d'Orsay et à la commune d'Orsay.

Délibéré après l'audience du 2 février 2023, à laquelle siégeaient :

M. Albertini, président de chambre,

M. Mauny, président assesseur,

Mme Troalen, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 22 février 2023.

Le rapporteur,

M. MAUNYLe président,

P.-L. ALBERTINILa greffière,

F. PETIT-GALLAND

La République mande et ordonne au préfet de l'Essonne en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme

La greffière,

21VE02030002


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 21VE02030
Date de la décision : 22/02/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-03-025-01 Urbanisme et aménagement du territoire. - Permis de construire. - Nature de la décision. - Sursis à statuer.


Composition du Tribunal
Président : M. ALBERTINI
Rapporteur ?: M. Olivier MAUNY
Rapporteur public ?: Mme MOULIN-ZYS
Avocat(s) : SCP LONQUEUE - SAGALOVITSCH - EGLIE-RICHTERS et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2023-02-22;21ve02030 ?
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