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24/05/2022 | FRANCE | N°20VE01924

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 1ère chambre, 24 mai 2022, 20VE01924


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SAS Azentis Technology a demandé au tribunal administratif de Montreuil de prononcer la décharge, en droits, pénalités et intérêts de retard, des retenues à la source auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2014 et 2015.

Par un jugement no 1808724 du 8 juin 2020, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 5 août 2020, la SAS Azentis Technology, représentée par Me Capel, avocate, deman

de à la cour :

1° d'annuler le jugement attaqué ;

2° de prononcer la décharge, en droits, pénal...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SAS Azentis Technology a demandé au tribunal administratif de Montreuil de prononcer la décharge, en droits, pénalités et intérêts de retard, des retenues à la source auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2014 et 2015.

Par un jugement no 1808724 du 8 juin 2020, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 5 août 2020, la SAS Azentis Technology, représentée par Me Capel, avocate, demande à la cour :

1° d'annuler le jugement attaqué ;

2° de prononcer la décharge, en droits, pénalités et intérêts de retard, des retenues à la source auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2014 et 2015 ;

3° de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les prestations de service assurées par la société Ecoma Technology, établie à Madagascar, ne constituent ni des prestations techniques ni des prestations impliquant un transfert de savoir-faire ou la mise à disposition d'un droit de propriété intellectuelle ; par conséquent, les rémunérations qu'elle a versées à cette société en contrepartie de ces prestations ne doivent pas être qualifiées de redevances au sens de l'article 12 de la convention fiscale conclue entre la France et Madagascar mais de bénéfices au sens de l'article 7 de cette convention, qui étaient par suite insusceptibles de faire l'objet de retenues à la source sur le fondement du c du I de l'article 182 B du code général des impôts, ces bénéfices étant imposables à Madagascar.

Par un mémoire en défense, enregistré le 5 février 2021, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête.

Le ministre fait valoir que le moyen de la requête n'est pas fondé.

Par une ordonnance du 9 novembre 2021, la clôture de l'instruction a été fixée au 26 novembre 2021, en application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la Convention entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République démocratique de Madagascar en vue d'éviter les doubles impositions, de prévenir l'évasion fiscale et d'établir des règles d'assistance administrative en matière fiscale, signée à Tananarive le 22 juillet 1983 ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Bouzar, premier conseiller,

- et les conclusions de M. Met, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. La SAS Azentis Technology, qui a son siège à Saint-Ouen (93), exerce une activité de numérisation de tout type de documents pour des clients en France, tels que le Centre Pompidou ou la Ville de Paris. A l'issue de la vérification de comptabilité dont elle a été l'objet, portant sur la période du 1er janvier 2014 au 31 décembre 2015, elle a été destinataire d'une proposition de rectification du 26 juillet 2017 par laquelle l'administration lui a notifié des retenues à la source sur les sommes versées à la société Ecoma Technology, établie à Madagascar, en rémunération de prestations de service effectuées par cette société pour la SAS Azentis Technology et utilisées en France, en application des dispositions du c. du I de l'article 182 B du code général des impôts et des stipulations de l'article 12.2 de la convention fiscale conclue entre la France et Madagascar. La SAS Azentis Technology relève appel du jugement du 8 juin 2020 par lequel le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande de décharge, en droits, pénalités et intérêts de retard, des retenues à la source auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2014 et 2015 pour un montant de 24 108 euros.

Sur l'application de la loi fiscale :

2. Aux termes du I de l'article 182 B du code général des impôts : " Donnent lieu à l'application d'une retenue à la source lorsqu'ils sont payés par un débiteur qui exerce une activité en France à des personnes ou des sociétés, relevant de l'impôt sur le revenu ou de l'impôt sur les sociétés, qui n'ont pas dans ce pays d'installation professionnelle permanente : / (...) c. Les sommes payées en rémunération des prestations de toute nature fournies ou utilisées en France ". Aux termes du II du même article dans sa rédaction alors applicable : " II. - Le taux de la retenue est fixé à 33 1/3 % ". Il résulte de ces dispositions que sont soumises à retenue à la source les sommes payées par une société qui exerce une activité en France à des personnes ou des sociétés qui n'y disposent pas d'une installation professionnelle permanente en rémunération de prestations qui sont soit matériellement fournies en France, soit, bien que matériellement fournies à l'étranger, effectivement utilisées par le débiteur pour les besoins de son activité en France.

3. En l'espèce, il est constant que la SAS Azentis Technology, qui exerce son activité en France, a versé à la société Ecoma Technology, établie à Madagascar et qui n'a pas d'installation professionnelle permanente en France, des sommes en rémunération de prestations assurées par cette dernière et utilisées par la SAS Azentis Technology en France. Ces sommes étaient par conséquent passibles de la retenue à la source prévue par les dispositions précitées de l'article 182 B du code général des impôts.

Sur l'application de la convention fiscale conclue entre la France et Madagascar :

4. Aux termes de l'article 12 de la convention fiscale conclue entre la France et Madagascar, relatif aux redevances : " 1. Les redevances provenant d'un Etat et payées à un résident de l'autre Etat sont imposables dans le premier Etat. (...) / 2. Les rémunérations provenant d'un Etat et payées à un résident de l'autre Etat qui fournit, dans le premier Etat, exclusivement des services techniques, des analyses ou des études de nature géologique, scientifique ou technique, des travaux d'ingénierie y compris les plans y afférents, ou des services de consultation ou de surveillance, sont imposables dans le premier Etat. Toutefois, l'impôt ainsi établi ne peut excéder 10 p. cent du montant brut de ces rémunérations ". Aux termes de l'article 7 de cette même convention, relatif aux bénéfices : " 1. Les bénéfices d'une entreprise d'un Etat ne sont imposables que dans cet Etat, à moins que l'entreprise n'exerce son activité dans l'autre Etat par l'intermédiaire d'un établissement stable qui y est situé. (...) 7. Lorsque les bénéfices comprennent des éléments de revenu traités séparément dans d'autres articles de la présente Convention, les dispositions de ces articles ne sont pas affectées par les dispositions du présent article. "

5. Il résulte de l'instruction, notamment du contrat conclu le 8 septembre 2015 entre la SAS Azentis Technology et la société Ecoma Technology, intitulé " Contrat de prestations de service informatique documentaires ", que la société Ecoma Technology réalise pour le compte de la SAS Azentis Technology des prestations informatiques de traitement d'images, de saisie d'informations et de réalisation de bases de données. Ces prestations, qui ne se limitent au demeurant pas à de la recopie de données comme l'allègue la société requérante, doivent être regardées comme des services techniques au sens et pour l'application de l'article 12.2 de la convention fiscale précitée, alors même que la réalisation de ces prestations n'implique aucun transfert de savoir-faire, ni aucune mise à disposition d'un droit de propriété intellectuelle. En qualifiant de redevances les rémunérations provenant d'un Etat et payées à un résident de l'autre Etat qui fournit, dans le premier Etat, exclusivement des services techniques, la convention fiscale conclue entre la France et Madagascar s'écarte, notamment sur ce point, du modèle de convention fiscale de l'OCDE, qui retient une définition différente des redevances. Par suite, l'appelante ne saurait utilement se prévaloir des commentaires relatifs à la notion de " redevance " au sens de ce modèle de convention fiscale pour contester l'application par l'administration fiscale de la convention fiscale conclue entre la France et Madagascar. Enfin, il ressort du point 7 de l'article 7 de la convention fiscale relatif aux bénéfices que cet article ne s'applique que de manière subsidiaire par rapport aux autres articles de la convention. Par conséquent, c'est à bon droit que l'administration a fait application des stipulations de l'article 12.2 de la convention fiscale conclue entre la France et Madagascar et assujetti les rémunérations versées par la SAS Azentis Technology à la société Ecoma Technology en 2014 et 2015 à des retenues à la source au taux conventionnel de 10%.

6. Il résulte de tout ce qui précède que la SAS Azentis Technology n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande. Sa requête doit par suite être rejetée, y compris ses conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DECIDE :

Article 1er : La requête de la SAS Azentis Technology est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SAS Azentis Technology et ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Délibéré après l'audience du 10 mai 2022 à laquelle siégeaient :

Mme Dorion, présidente-assesseure,

Mme Pham, première conseillère,

M. Bouzar, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 24 mai 2022.

Le rapporteur,

M. A...La présidente,

O. DORIONLa greffière,

C. FAJARDIE

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière,

2

N° 20VE01924


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 20VE01924
Date de la décision : 24/05/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-01-01-05 Contributions et taxes. - Généralités. - Textes fiscaux. - Conventions internationales.


Composition du Tribunal
Président : Mme DORION
Rapporteur ?: M. Mohammed BOUZAR
Rapporteur public ?: M. MET
Avocat(s) : CABINET CGC AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 31/05/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2022-05-24;20ve01924 ?
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