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04/03/2022 | FRANCE | N°19VE03771

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 6ème chambre, 04 mars 2022, 19VE03771


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Montreuil d'annuler l'arrêté du 14 mars 2019 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays à destination duquel il serait susceptible d'être éloigné et lui a fait interdiction de revenir sur le territoire français pour une durée de deux ans, d'enjoindre au préfet de lui délivrer une carte de séjour temporaire me

ntion " vie privée et familiale ", dans un délai de quinze jours suivant la notific...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Montreuil d'annuler l'arrêté du 14 mars 2019 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays à destination duquel il serait susceptible d'être éloigné et lui a fait interdiction de revenir sur le territoire français pour une durée de deux ans, d'enjoindre au préfet de lui délivrer une carte de séjour temporaire mention " vie privée et familiale ", dans un délai de quinze jours suivant la notification du jugement, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, à défaut, de lui enjoindre de réexaminer sa situation dans le même délai et sous la même astreinte et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour le temps du réexamen.

Par un jugement n° 1903578 du 15 octobre 2019, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés les 12 novembre 2019 et 10 juin 2021, M. A..., représenté par Me Soukouna, avocat, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis de lui délivrer un certificat de résidence mention " vie privée et familiale " dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard, et, à défaut, de lui enjoindre de réexaminer sa situation dans le même délai et sous astreinte de 100 euros par jour de retard et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour le temps du réexamen ;

4°) d'enjoindre au préfet de mettre fin aux mesures de surveillance dont il fait l'objet ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat au profit de son conseil la somme de 2 400 euros sur le fondement des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- les décisions portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français sont insuffisamment motivées ;

- elles sont entachées d'un défaut d'examen particulier de sa situation ;

- elles sont aussi entachées d'une erreur de fait dès lors que le préfet a fait une appréciation étonnée de la durée de son séjour en France ;

- elles méconnaissent les stipulations des alinéas 1 et 5 de l'article 6 de l'accord franco-algérien ;

- elles méconnaissant les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elles sont entachées d'erreur manifeste d'appréciation ;

- la décision portant interdiction de retour sur le territoire français est insuffisamment motivée ;

- elle est entachée d'un défaut d'examen de sa situation particulière ;

- elle méconnaît aussi les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est également entachée d'erreur manifeste d'appréciation.

......................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer ses conclusions à l'audience dans la présente instance.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Albertini a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. B... A..., ressortissant algérien né le 19 décembre 1967 à Jijel, est entré irrégulièrement en France, selon ses déclarations, le 16 septembre 2001. Par un arrêté du 12 mars 2004, le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français. Le 17 octobre 2018, il a sollicité son admission exceptionnelle au séjour. Par un arrêté du 14 mars 2019, le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays à destination duquel il serait susceptible d'être éloigné et lui a fait interdiction de revenir sur le territoire français pour une durée de deux ans. M. A... relève appel du jugement du 15 octobre 2019 par lequel le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur les décisions portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français :

2. En premier lieu, aux termes des articles L. 211-2 et L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration, les décisions administratives individuelles défavorables qui constituent une mesure de police doivent être motivées et " comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision ". Aux termes du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger (...), lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : / 1° Si l'étranger ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français, à moins qu'il ne soit titulaire d'un titre de séjour en cours de validité (...) La décision énonçant l'obligation de quitter le territoire français est motivée (...) ".

3. L'arrêté en litige vise les dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dont le préfet a fait application, en particulier l'article L. 511-1 de ce code, et mentionne que M. A... a sollicité son admission exceptionnelle au séjour le 17 octobre 2018, précise que, toutefois, cette demande a été rejetée dès lors qu'il ne justifie pas être entré régulièrement sur le territoire français et qu'il n'apporte pas d'éléments suffisamment probants propres à démontrer sa présence réelle et continue sur le territoire français depuis son arrivée, notamment pour les années 2008 et 2009. Le préfet a en outre examiné la situation de l'intéressé au regard des dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile permettant l'obtention d'un titre de séjour de plein droit. Ces éléments de droit et de fait suffisent, à eux seuls, pour fonder cette obligation de quitter le territoire français prise au titre des 3° et 5° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, précité. Le préfet a de surcroît mentionné que l'intéressé est célibataire et sans charge de famille et qu'il n'est pas contrevenu aux stipulations des articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Dès lors, alors même que ne serait pas mentionné de façon exhaustive l'ensemble des éléments relatifs à la situation de l'intéressé, ces considérations sont suffisamment développées pour l'avoir mis utilement en mesure d'en apprécier la valeur et d'en discuter la légalité. Le moyen tiré de l'insuffisance de motivation ne peut par suite qu'être écarté.

4. En deuxième lieu, il ne ressort pas davantage des termes de la décision contestée que le préfet n'aurait pas procédé à un examen particulier de la situation personnelle de M. A..., alors même qu'elle ne ferait pas état de l'ensemble des circonstances caractérisant sa situation personnelle. Le moyen tiré du défaut d'examen particulier de la situation personnelle de M. A... ne peut donc qu'être écarté.

5. En troisième lieu, aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien susvisé : " Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : 1) au ressortissant algérien, qui justifie par tout moyen résider en France depuis plus de dix ans ou plus de quinze ans si, au cours de cette période, il a séjourné en qualité d'étudiant ; (...) 5) au ressortissant algérien, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus (...) ".

6. M. B... A... déclare résider en France de manière continue depuis son arrivée en date du 16 septembre 2001. Toutefois, comme l'ont souligné à juste titre les premiers juges, les pièces produites pour les années 2008, 2009 et 2010, consistant en des factures, ordonnances médicales et feuilles de soins ainsi que deux avis d'imposition qui ne mentionnent aucun revenu ne suffisent pas à établir que M. A... aurait résidé en France de manière continue ces trois dernières années. Dans ces conditions, l'intéressé, qui n'apporte pas davantage de pièces qu'en première instance pour démontrer la réalité de la continuité de sa présence sur le territoire depuis plus de dix ans, n'est pas fondé à soutenir que le préfet, en refusant de lui délivrer un titre de séjour sur ce fondement, aurait commis une erreur de fait et méconnu les stipulations précitées.

7. En quatrième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ".

8. M. A..., dont la présence alléguée en France depuis 2001 n'est pas établie, est célibataire et sans enfant à charge. Par ailleurs, il se borne à faire valoir qu'il a reconstitué l'ensemble de ses attaches familiales, sociales et professionnelles en France, sans apporter d'éléments permettant d'établir la réalité de ses allégations. M. A... n'est dès lors pas fondé à soutenir que la décision l'obligeant à quitter le territoire français est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ni à soutenir qu'elle porterait à sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels la décision a été prise en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Sur la décision portant interdiction de retour sur le territoire français :

9. Aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors applicable : " III - L'autorité administrative, par une décision motivée, assortit l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français, d'une durée maximale de trois ans à compter de sa notification, lorsque aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger ou lorsque l'étranger n'a pas satisfait à cette obligation dans le délai imparti. / Des circonstances humanitaires peuvent toutefois justifier que l'autorité administrative ne prononce pas d'interdiction de retour. (...) / La durée de l'interdiction de retour mentionnée au premier alinéa du présent III ainsi que le prononcé et la durée de l'interdiction de retour mentionnée au quatrième alinéa sont décidés par l'autorité administrative en tenant compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français. (...) ". Il ressort des termes mêmes de ces dispositions que l'autorité compétente doit, pour décider de prononcer à l'encontre de l'étranger soumis à l'obligation de quitter le territoire français une interdiction de retour et en fixer la durée, tenir compte, dans le respect des principes constitutionnels, des principes généraux du droit et des règles résultant des engagements internationaux de la France, des quatre critères qu'elles énumèrent, sans pouvoir se limiter à ne prendre en compte que l'un ou plusieurs d'entre eux. La décision d'interdiction de retour doit comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement, de sorte que son destinataire puisse à sa seule lecture en connaître les motifs. Cette motivation doit attester de la prise en compte par l'autorité compétente, au vu de la situation de l'intéressé, de l'ensemble des critères prévus par la loi.

10. Il ressort de pièces du dossier que la décision prononçant à l'encontre de M. A... une interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de deux ans, qui vise le premier alinéa du III de l'article L. 511-1 précité, mentionne notamment que l'intéressé ne pouvait prétendre à une admission exceptionnelle au séjour au regard de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, qu'elle précise, et qu'il s'est soustrait à l'exécution d'une mesure d'éloignement. Contrairement à ce que soutient le requérant, cette décision, qui comporte l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement, est suffisamment motivée. Cette motivation ne révèle en outre aucun défaut d'examen de la situation personnelle du requérant.

11. Pour les mêmes motifs que ceux exposés aux points 6 et 8 du présent arrêt, M. A... ne peut être regardé comme justifiant de circonstances humanitaires au sens du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, et n'est pas non plus fondé à se prévaloir des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Les moyens tirés de ce que l'interdiction de retour méconnaîtrait ces stipulations et serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle du requérant doivent donc être écartés.

12. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande. Par suite, la requête de M. A... doit être rejetée, y compris ses conclusions aux fins d'injonction ainsi que ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

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N° 19VE03771


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 19VE03771
Date de la décision : 04/03/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. - Séjour des étrangers. - Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. ALBERTINI
Rapporteur ?: M. Paul-Louis ALBERTINI
Rapporteur public ?: Mme BOBKO
Avocat(s) : SOUKOUNA

Origine de la décision
Date de l'import : 15/03/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2022-03-04;19ve03771 ?
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