Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. D... B... a demandé au tribunal administratif de Montreuil d'annuler la décision implicite de rejet de sa demande de protection fonctionnelle adressée à la directrice générale adjointe de la commune d'Aubervilliers par une lettre en date du 26 octobre 2017, d'enjoindre au maire de lui accorder le bénéfice de la protection fonctionnelle et de mettre à la charge de la commune d'Aubervilliers une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L.761-1 du code de justice administrative.
Par un jugement n° 1801866 du 29 avril 2019, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés respectivement le 1er juillet 2019 et 5 février 2021, M. B..., représenté par Me Arvis, avocat, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler cette décision ;
3°) d'enjoindre à la commune d'Aubervilliers de lui accorder la protection fonctionnelle ;
4°) de mettre à la charge de la commune d'Aubervilliers la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le jugement est insuffisamment motivé en méconnaissance des dispositions de l'article L. 9 du code de justice administrative ;
- la décision attaquée est entachée d'incompétence ;
- cette décision est entachée d'une violation de l'article 11 de la loi du 13 juillet 1983 et d'une erreur d'appréciation dans l'application de ce texte ; les difficultés rencontrées avec les deux agents de son service constituaient des faits de harcèlement moral ;
- la décision en litige est entachée d'une violation de l'article 6 quinquies de la loi du 13 juillet 1983 ; dès lors que l'administration a été informée des faits de harcèlement, elle était tenue de faire cesser ces agissements ;
- cette décision est entachée d'une violation de l'article 23 de la loi du 13 juillet 1983 et de l'article L. 4121-1 à 5 du code du travail.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code du travail ;
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme E...,
- les conclusions de M. Clot, rapporteur public,
- et les observations de Me A..., pour la commune d'Aubervilliers.
Considérant ce qui suit :
1. M. B..., adjoint administratif de 2ème classe de la commune d'Aubervilliers, a sollicité l'octroi de la protection fonctionnelle par un courrier du 26 octobre 2017. Cette demande a fait l'objet d'une décision implicite de rejet de la part de la commune. M. B... relève appel du jugement du 29 avril 2019 par lequel le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés ".
3. Contrairement à ce que soutient que M. B..., il résulte de l'examen du jugement attaqué que le tribunal administratif a écarté, par une motivation suffisante, les moyens soulevés par le requérant à l'encontre du refus de protection fonctionnelle et tirés de la violation de l'article 11 de la loi du 13 juillet 1983 et de l'erreur appréciation commise dans l'application de ces dispositions. Le moyen tiré de ce que le jugement serait irrégulier de ce chef doit, par suite, être écarté.
4. En second lieu, si M. B... soutient que le tribunal a entaché son jugement d'une erreur de droit et d'une erreur de qualification juridique, ces moyens, qui concernent le bien-fondé du jugement, ne sont pas de nature à mettre en cause sa régularité. Ils doivent, dès lors, être écartés.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
5. En premier lieu, si M. B... fait valoir que sa demande de protection fonctionnelle a été adressée à Mme C..., directrice générale adjointe Ressources, incompétente pour statuer sur une telle demande, cette dernière doit être regardée comme ayant été adressée au maire qui est ainsi réputé l'avoir rejetée implicitement à l'expiration d'un délai de deux mois après sa réception. Le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de la décision attaquée doit donc être écarté.
6. En deuxième lieu, aux termes de l'article 11 de la loi du 13 juillet 1983 : " IV. La collectivité publique est tenue de protéger le fonctionnaire contre les atteintes volontaires à l'intégrité de la personne, les violences, les agissements constitutifs de harcèlement, les menaces, les injures, les diffamations ou les outrages dont il pourrait être victime sans qu'une faute personnelle puisse lui être imputée. Elle est tenue de réparer, le cas échéant, le préjudice qui en est résulté. ". Aux termes de l'article 6 quinquies de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires : " Aucun fonctionnaire ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel. (...) ".
7. Il appartient à l'agent public qui soutient avoir été victime de faits constitutifs de harcèlement moral, lorsqu'il entend contester le refus opposé par l'administration dont il relève à une demande de protection fonctionnelle fondée sur de tels faits de harcèlement, de soumettre au juge des éléments de fait susceptibles d'en faire présumer l'existence. Il incombe à l'administration de produire, en sens contraire, une argumentation de nature à démontrer que les agissements en cause sont justifiés par des considérations étrangères à tout harcèlement. La conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si les agissements de harcèlement sont ou non établis, se détermine au vu de ces échanges contradictoires, qu'il peut compléter, en cas de doute, en ordonnant toute mesure d'instruction utile. Pour apprécier si des agissements dont il est allégué qu'ils sont constitutifs d'un harcèlement moral revêtent un tel caractère, le juge administratif doit tenir compte des comportements respectifs de l'agent auquel il est reproché d'avoir exercé de tels agissements et de l'agent qui estime avoir été victime d'un harcèlement moral.
8. Il résulte des termes du courrier du 26 octobre 2017 qu'à l'appui de sa demande de protection fonctionnelle, M. B... a fait valoir les difficultés rencontrées avec deux agents du service qui, outre des abus de comportement et de langage, le remettaient constamment en cause dans ses fonctions d'encadrement et provoquaient des situations de tension à l'origine d'une souffrance au travail chez certains agents pris pour cible. M. B... a également soutenu dans son courrier qu'il subissait un comportement harcelant de la part de ces agents qui portait atteinte à sa santé mentale. Toutefois, d'une part, s'il ressort des pièces du dossier et, notamment, des nombreux courriers électroniques et rapports adressés par M. B... à sa hiérarchie que deux agents de son service ont fait preuve d'insubordination, tenu des propos déplacés et adopté des attitudes provocatrice et agressive et que ces comportements ont conduit à une dégradation de l'environnement de travail du service dirigé par M. B..., aucun des faits ou propos rapportés par le requérant ne peut être qualifié de menace, violence, voie de fait, injure, diffamation ou outrage au sens de l'article 11 de la loi du 13 juillet 1983. D'autre part, si les agissements de ces deux agents ont indéniablement mis M. B... en difficulté dans ses fonctions d'encadrement et altéré ses conditions de travail, les éléments avancés par M. B..., dans sa demande de protection fonctionnelle et au travers des différents échanges avec sa hiérarchie, ne peuvent toutefois être regardés comme ayant entraîné une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel. Dans ces conditions, les faits en cause ne sont pas susceptibles de faire présumer l'existence d'un harcèlement moral commis à l'encontre du requérant. Enfin, les événements rapportés par M. B... relatifs à une altercation physique survenue le 26 mars 2018 sont postérieurs à la décision de refus de protection fonctionnelle du 26 octobre 2017 et donc sans incidence sur celle-ci. Dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 11 de la loi du 13 juillet 1983 ne peut qu'être écarté.
9. Enfin, si M. B... soutient que la décision attaquée a été prise en méconnaissance de l'article 23 de la loi du 13 juillet 1983 et des articles L. 4121-1 et suivants du code du travail, un tel moyen est inopérant à l'encontre de la décision en litige qui est régie par les dispositions de l'article 11 précité de la loi du 13 juillet 1983.
10. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.
Sur les conclusions à fin d'injonction :
11. Le présent arrêt qui rejette les conclusions à fin d'annulation n'implique aucune mesure d'exécution au sens des articles L. 911-1 et suivants du code de justice administrative. Par suite, les conclusions présentées par M. B... à fin d'injonction doivent être rejetées.
Sur les frais liés à l'instance :
12. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit mis à la charge de la commune d'Aubervilliers, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, une somme au titre des frais exposés par M. B... et non compris dans les dépens. Par ailleurs, il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. B... la somme demandée au même titre par la commune d'Aubervilliers.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Les conclusions présentées par la commune d'Aubervilliers sur le fondement de l'article L. 761-1 du code justice administrative sont rejetées.
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N° 19VE02390